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12/01/2005 | FRANCE | N°03/1434

France | France, Cour d'appel d'agen, 12 janvier 2005, 03/1434


DU 12 Janvier 2005 -------------------------

D.N/S.B S.A. CFP CREDIT venant aux droits de la BANQUE WORMS S.A. X.../ Raoul X... Gabrielle Y... épouse X... S.C.I. X... Gabrielle Germaine X... divorcée B. Aide juridictionnelle RG N : 03/01434 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé B l'audience publique du douze Janvier deux mille cinq, par Bernard BOUTIE, Président de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1Pre Chambre dans l'affaire, ENTRE : S.A. CFP CREDIT venant aux droits de la BANQUE WORMS S.A. prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonction

s domicilié en cette qualité au siPge Dont le siPge social e...

DU 12 Janvier 2005 -------------------------

D.N/S.B S.A. CFP CREDIT venant aux droits de la BANQUE WORMS S.A. X.../ Raoul X... Gabrielle Y... épouse X... S.C.I. X... Gabrielle Germaine X... divorcée B. Aide juridictionnelle RG N : 03/01434 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé B l'audience publique du douze Janvier deux mille cinq, par Bernard BOUTIE, Président de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1Pre Chambre dans l'affaire, ENTRE : S.A. CFP CREDIT venant aux droits de la BANQUE WORMS S.A. prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siPge Dont le siPge social est 137 Rue Victor Hugo 92595 LEVALLOIS PERRET représentée par la SCP Henri TANDONNET, avoués assistée de Me Philippe OLHAGARAY, avocat APPELANTE d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AUCH en date du 30 Juillet 2003 D'une part, ET : Monsieur Raoul X... Madame Gabrielle Y... épouse X... S.C.I. X... prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siPge Dont le siPge social est Côte du Grison 32000 AUCH Madame Gabrielle Germaine X... divorcée B. (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2003/003759 du 31/10/2003 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AGEN) représentés par la SCP VIMONT J. ET E., avoués assistés de Me HélPne PLENIER, avocat INTIMES D'autre part, a rendu l'arrLt contradictoire suivant aprPs que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 24 Novembre 2004, devant Bernard BOUTIE, Président de Chambre, Dominique NOLET et Francis TCHERKEZ , Conseillers, assistés de Dominique Z..., GreffiPre, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siPge ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date B laquelle l'arrLt serait rendu. * * *

Par jugement du 30 juillet 2003 le tribunal de grande instance d'Auch a déclaré nul l'acte de cautionnement reçu le 22 décembre 1992 et condamné la banque Worms B payer B Raoul X... et Gabrielle X... la somme

de 7 000 ä B titre de dommages et intérLts, ainsi que 2 500 ä sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

Par déclaration du 8 septembre 2003 dont la régularité n'est pas contestée, la banque Worms relevait appel de cette décision. Elle demande B la cour de constater la prescription de l'action en nullité intentée par les consorts X... et en conséquence de réformer le jugement. Elle réclame encore la somme de 3 000 ä en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Raoul et Gabrielle X..., la SCI X... et Danielle X... estiment que les premiers juges ont fait une exacte application des rPgles de droit aux éléments de l'espPce. Ils sollicitent donc la confirmation du jugement entrepris. Ils forment un appel incident et demandent la condamnation de la SA CFP Crédit B leur payer la somme de 609 796.06 ä B titre de dommages intérLts pour faute. Ils réclament encore la somme de 10 000 ä B titre de dommages-intérLts pour procédure abusive et celle de 5 000 ä en remboursement de leurs frais irrépétibles.

Vu les derniPres conclusions de l'appelante en date du 19 octobre 2004 ;

Vu les derniPres conclusions des intimés en date du 16 juin 2004 ; SUR QUOI

La SARL X... est une entreprise familiale de transports qui a été exploitée pendant 45 ans par Raoul X... qui a transmis la direction de l'entreprise B sa fille DaniPle en 1986.

La banque Worms est entrée en relation avec la société X... en 1990.

Suivant acte sous seing privé du 20 juin 1990, DaniPle X... et Raoul X... se sont portés cautions solidaires des sommes dues par la SEM X... B concurrence de la somme de 1 000 000 F.

Suivant acte du 22 décembre 1992 la banque Worms a consenti B DaniPle X... une autorisation de découvert de 1 500 000 F les époux X... et la SCI X... se portant cautions hypothécaires.

Suivant acte sous seing privé du 4 juin 1993 Raoul X... s'est porté caution afin de garantir la somme de 1 500 000 F.

Par jugement du 11 février 1994 le tribunal de commerce d'Auch a prononcé le redressement judiciaire de la SEM X..., par jugement du 17 juin 1994 la date de cession des paiements était fixée au 14 juin 1992.

Le 15 novembre 1994 la banque Worms faisait assigner les époux X... en paiement de la somme de 3 500 000 F, et le 24 novembre 1994 elle leur faisait délivrer ainsi qu'B la SCI X... un commandement aux fins de saisie immobiliPre. Les époux X... ont formé opposition au commandement le 30 novembre 2004. Les deux instances ont été jointes par décision du 10 mai 1995 et par décision du 1° octobre 1997, le juge de la mise en état prononçait la radiation administrative de l'affaire.

Par jugement du 26 janvier 1996 confirmé par un arrLt définitif (en raison du rejet du pourvoi exercé par la banque Worms par la Cour de Cassation le 12 mars 2002) de la Cour d'Appel d'Agen du 20 septembre 1999, le tribunal de commerce d'Auch a condamné la banque Worms B payer B la SEM X... des dommages et intérLts d'un montant équivalent B l'insuffisance d'actif pour soutien artificiel. Un expert judiciaire a été commis

Par arrLt du 16 décembre 2002 la Cour d'Appel d'Agen a condamné la banque Worms B payer B Maître Gascon es-qualité la somme de 1 561 442,50 ä.

Le 12 mars 2001, la banque Worms a repris les poursuites en saisie immobiliPre suspendues depuis le 12 avril 1995 en raison de l'opposition au commandement du 24 novembre 1994.

Par exploit du 7 mai 2001 Monsieur X..., son épouse et la SCI X... ont fait assigner la banque Worms devant le TGI d'Auch qui a rendu la décision déférée.

Par décision du 6 juin 2001 la chambre des criées a prononcé la suspension de la procédure de saisie immobiliPre dans l'attente de l'issue de cette procédure.

Par acte sous seing privé du 4 mars 2004, la banque Worms a cédé au profit de la SA CFP CREDIT un certain nombre de créances, dont celles détenues sur la SMC X... Cette cession a été réguliPrement signifiée le 15 avril 2004, c'est donc la SA CFP CREDIT qui intervient aux lieu et place de la banque Worms dans la présente instance. SUR LA PRESCRIPTION DE L'ACTION A... NULLITE

L'acte dont il est demandé la nullité est l'acte reçu par Maître V. le 22 décembre 1992, l'assignation introductive d'instance est du 7 mai 2001, l'appelante estime que l'action est donc prescrite conformément aux dispositions de l'article 1304 du code civil qui prévoit que l'action en nullité d'une convention se prescrit par cinq ans. Au surplus elle fait valoir que l'argument tiré du caractPre perpétuel de l'exception de nullité ne saurait prospérer puisque les consorts X... sont demandeurs B l'action.

Il résulte toutefois des circonstances de l'espPce que l'action des consorts X... est la conséquence de la reprise des poursuites immobiliPres B leur encontre par la banque Worms le 12 mars 2001. A... contestant en justice l'application de la convention du 22 décembre 1992 , les consorts X..., bien que demandeurs principaux agissent non par voie d'action mais par voie d'exception en réponse aux poursuites engagées, et par conséquent la prescription quinquennale ne peut leur Ltre opposée. SUR L'ACTION A... NULLITE

LE DOL

Aux termes de l'article 1116 du code civil le dol est une cause de nullité de la convention lorsqu'il est prouvé que les manoeuvres d'une partie ont déterminé son engagement.

Il résulte des éléments versés au débat, et notamment de la décision

du tribunal de commerce d'Auch fixant au 14 JUIN 1992 la date de cessation des paiements qu'au moment de la signature de l'acte querellé du 22 décembre 1992, la situation de la SEM X... était irrémédiablement compromise, ce que savait la banque, et ce qu'ignoraient les consorts X... A... cachant aux cautions les graves difficultés financiPres du débiteur principal la banque Worms a manqué B son obligation de contracter de bonne foi. Les époux X... dans l'acte querellé ont accepté de garantir leur fille alors qu'en réalité les fonds ont été débloqués au profit de la société. Ils ont donc été trompés la banque ne rapportant pas la preuve de ce qu'elle avait avisé les cautions des conséquences exactes de leur engagement. Or, si les consorts X... avaient su que leur engagement servait en réalité B cautionner un emprunt destiné B combler en partie le découvert en compte courant non autorisé de la société, qualifié par la Cour d'appel d'Agen, de disproportionné, ils n'auraient évidemment pas contracté, la manoeuvre de la banque servant en réalité B échapper B la procédure collective. Il y a donc lieu de prononcer la nullité de l'acte du 22 décembre 1992.

LA FAUTE

Surabondamment, ce moyen étant également invoqué il convient de l'examiner.

La banque Worms savait que la situation de la SEM était irrémédiablement compromise et d'ailleur son concurrent la BPTP s'était dPs 1990 désengagée. La Cour d'Appel d'Agen dans son arrLt du 20 septembre 1999 précise que la banque Worms a eu connaissance de la situation exacte de la SEM dPs qu'elle a eu connaissance du bilan de l'exercice 1991. Maître F., admnistrateur judiciaire qualifiait B cette date la situation de critique : diminution du chiffre d'affaire

de 20%, perte de résultats de plus de 2,3 KF amenant les capitaux propres de -600 B -2,9 KF, frais financiers doublés, total des dettes B cout terme inscrites au passif supérieur au total de l'actif. Cette situtation interdisait tout espoir de redressement et lorsqu'au début de l'année 1992 la banque Worms a eu connaissance des résultats comptables elle a eu les moyens de mesurer le caractPre irrémédiablement compromis de la situation de la société X..., or au lieu de prendre dPs cet instant les mesures qui s'imposaient et d'assurer auprPs de son client son devoir de conseil et de prudence, la banque a consenti un découvert en compte courant disproportionné qui a contribué B maintenir artificiellement en activité la société et n'a fait qu'aggraver son passif.

A... consentant B la gérante ce crédit ruineux, la Banque a commis une faute transférant sur elle (puis également sur ses parents) le risque financier alors que la situation de la société était désespérée et qu'elle mLme n'avait aucune capacité financiPre puisqu'B cette époque elle ne percevait quasiment plus de revenus.

Elle a également commis une faute B l'égard des cautions âgées de 74 et 70 ans, au moment de leur engagement, alors que Monsieur X... était B la retraite depuis 1996 et qu'il n'avait plus aucun intérLt financier dans la société puisqu'il n'a jamais été associé B la SARL et qu'il a vendu le fonds de commerce pour le franc symbolique. Son épouse n'a quant B elle jamais participé B la gestion de la société. Au surplus la banque les a laissés s'engager pour un montant démesuré par rapport B leurs ressources , alors qu'ils étaient B cette époque retirés des affaires.

Il y a lieu de dire, ainsi que l'a fait le premier juge, surabondamment que cette faute de la banque a causé aux consorts X... un préjudice égal au montant des sommes qui leur sont aujourd'hui réclamées.

Sur les dommages-intérLts, il n'est pas démontré une faute dans l'exercice de la voie de l'appel ni l'existence d'un préjudice supérieur B celui inhérent B l'exercice de toute action en justice ; ils ne seront donc pas accordés ;

La SA CFP Crédit qui succombe dans ses prétentions, supportera les dépens. Tenue aux dépens, elle devra payer aux intimés la somme de 1 500 ä en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en audience publique, par arrLt contradictoire et en dernier ressort, aprPs en avoir délibéré conformément B la loi,

Reçoit en la forme l'appel jugé régulier,

Au fond, confirme le jugement rendu le 30 juillet 2003 par le tribunal de grande instance d'Auch

Déboute les consorts X... de leur demandes de dommages et intérLts.

Condamne la SA CFP Crédit venant aux droits de la banque Worms SA aux dépens et autorise les avoués B les recouvrer conformément B l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamne la SA CFP Crédit B payer aux consorts X... la somme de 1 500 ä sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

Le présent arrLt a été signé par Monsieur BOUTIE, Président et par Madame Z..., Greffier présent lors du prononcé.Greffier présent lors du prononcé.

Le Greffier

Le Président

Dominique Z...

Bernard BOUTIE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Numéro d'arrêt : 03/1434
Date de la décision : 12/01/2005

Analyses

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Consentement - Dol.

La direction de l'entreprise familiale de transports a été reprise par la fille des intimés. Ces derniers se sont portés cautions solidaires des sommes dues par l'entreprise, puis cautions hypothécaires pour l'autorisation de découvert consentie par la banque appelante. Aux termes de l'article 1116 du Code civil, le dol est une cause de nullité de la convention lorsqu'il est prouvé que les manoeuvres d'une partie ont déterminé son engagement. Au moment de la signature de l'acte querellé autorisant le découvert, la situation de l'entreprise de leur fille était irrémédiablement compromise, ce que savait la banque, et ce qu'ignoraient les consorts intimés. En cachant aux cautions les graves difficultés financières du débiteur principal la banque appelante a manqué à son obligation de contracter de bonne foi. Les époux intimés, dans l'acte querellé, ont accepté de garantir leur fille alors qu'en réalité, les fonds ont été débloqués au profit de la société. Ils ont donc été trompés, la banque ne rapportant pas la preuve de ce qu'elle avait avisé les cautions des conséquences exactes de leur engagement. Or, si les consorts intimés avaient su que leur engagement servait en réalité à cautionner un emprunt destiné à combler en partie le découvert en compte courant non autorisé de la société, qualifié de disproportionné par la cour d'appel, ils n'auraient évidemment pas contracté, la manoeuvre de la banque servant à échapper à la procédure collective. Il y a donc lieu de prononcer la nullité de l'acte d'autorisation de découvert

BANQUE - Responsabilité - Ouverture de crédit - Situation de l'entreprise irrémédiablement compromise - / jdf.

En consentant à la gérante ce crédit ruineux, la banque appelante a commis une faute transférant sur elle, puis également sur ses parents, le risque financier alors que la situation de la société était désespérée et qu'elle même n'avait aucune capacité financière puisqu'à cette époque elle ne percevait quasiment plus de revenus. Elle a également commis une faute à l'égard des cautions âgées de 74 et 70 ans, au moment de leur engagement, alors que le mari était à la retraite et qu'il n'avait plus aucun intérêt financier dans la société puisqu'il n'a jamais été associé et qu'il a vendu le fonds de commerce pour le franc symbolique. Son épouse n'a quant à elle jamais participé à la gestion de la société. Au surplus la banque les a laissés s'engager pour un montant démesuré par rapport à leurs ressources, alors qu'ils étaient à cette époque retirés des affaires. Il y a lieu de dire, ainsi que l'a fait le premier juge, surabondamment, que cette faute de la banque a causé aux consorts intimés un préjudice égal au montant des sommes qui leur sont aujourd'hui réclamées


Références :

Code civil, article 1116

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2005-01-12;03.1434 ?
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