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12/10/2004 | FRANCE | N°JURITEXT000006944995

France | France, Cour d'appel d'agen, 12 octobre 2004, JURITEXT000006944995


DU 12 Octobre 2004 -------------------------

N.R/S.Buz Maurice A. X.../ Yveline Y... U.D.A.F DU TARN Aide juridictionnelle RG N : 02/00619 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé Z... l'audience publique du douze Octobre deux mille quatre, par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1Pre Chambre dans l'affaire, ENTRE : Maître Maurice A. représenté par la SCP VIMONT J. ET E., avoués assisté de Me Georges LURY, avocat APPELANT d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de CAHORS en date du 08 Mars 2002 D'une part, ET :

Madam

e Yveline Y... représentée par Me Solange TESTON, avoué assistée de...

DU 12 Octobre 2004 -------------------------

N.R/S.Buz Maurice A. X.../ Yveline Y... U.D.A.F DU TARN Aide juridictionnelle RG N : 02/00619 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé Z... l'audience publique du douze Octobre deux mille quatre, par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1Pre Chambre dans l'affaire, ENTRE : Maître Maurice A. représenté par la SCP VIMONT J. ET E., avoués assisté de Me Georges LURY, avocat APPELANT d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de CAHORS en date du 08 Mars 2002 D'une part, ET :

Madame Yveline Y... représentée par Me Solange TESTON, avoué assistée de la SCP SOCIETE D'AVOCATS C.FAUGERE F. FAUGERE L.BELOU, avocats U.D.A.F DU TARN, venant aux lieu et place de Madame X..., es qualité de gérante de tutelle de Mme Y... A... le siPge social est 13 rue des Cordeliers 81000 ALBI représentée par Me Solange TESTON, avoué assistée de la SCP SOCIETE D'AVOCATS C.FAUGERE F. FAUGERE L.BELOU, avocats (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2002/003562 du 14/11/2002 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AGEN) INTIMEES D'autre part, a rendu l'arrLt contradictoire suivant aprPs que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 14 Septembre 2004, devant Nicole ROGER, Présidente de Chambre, Francis TCHERKEZ et Christian COMBES, Conseillers, assistés de Dominique SALEY, GreffiPre, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siPge ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date Z... laquelle l'arrLt serait rendu. * * * FAITS ET PROCÉDURE

Suivant acte passé devant Maître Maurice A. le 22 juin 1990, Louis Y... et sa soeur Yveline Y..., placée sous le régime de la tutelle depuis le 7 novembre 1995, ont procédé au partage des successions confondues de leurs auteurs.

Aux termes de cet acte, Louis Y... devait verser Z... sa soeur une rente

annuelle et viagPre d'un montant de 6.000 francs et il était prévu en outre un privilPge de co-partageant au bénéfice d'Yveline Y... devant faire l'objet d'une inscription lors de sa publication.

Aucune inscription hypothécaire n'a finalement été effectuée sur l'ensemble des biens faisant l'objet du partage.

Le 11 janvier 1994, Louis Y... a été soumis Z... une procédure collective agricole.

Yveline Y... a déclaré sa créance Z... titre privilégié qui, par ordonnance du juge commissaire du 4 novembre 1997 n'a été finalement admise qu'B titre chirographaire pour défaut d'inscription du privilPge.

Le 11 juillet 1995, Louis Y... a bénéficié d'un plan de continuation.

Par assignation du 7 mai 1999, Yveline Y... et sa tutrice Bernadette X... ont fait citer Maître A. devant le tribunal de grande instance de CAHORS afin de le voir condamner Z... payer les annuités de rentes viagPres échues Z... échoir telles que fixées par l'acte de partage ; elles sollicitaient en outre le bénéfice de l'exécution provisoire et la condamnation de Maître A. aux entiers dépens.

Par jugement du 8 mars 2002, le tribunal de grande instance de CAHORS a :

- condamné Maître Maurice A. Z... payer Z... Bernadette X..., es qualité de tutrice d' Yveline Y... les annuités de rente viagPre échues Z... échoir telles que fixées par l'acte de partage du 22 juin 1990.

- ordonné l'exécution provisoire

- condamné Maître Maurice A. aux dépens qui seront recouvrés conformément aux textes régissant l'aide juridictionnelle.

Le 3 mai 2002, Maître A. a relevé appel de cette décision.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Au soutien de son appel, Maître A. fait valoir que le préjudice subi par Yveline Y... doit s'apprécier au regard de la perte de chance, le

préjudice subi par cette derniPre du fait de l'omission notariale étant indirect.

Il fait valoir que l'omission qu'il a commise en ne procédant pas aux formalités d'inscription du privilPge du co-partageant au bénéfice d'Yveline Y... n'est nullement Z... l'origine du préjudice subi par l'intimée, qu'en l'espPce, la perte de chance est nulle et que le premier juge a méconnu les principes relatifs Z... la perte de chance.

Il soutient que pour fixer le préjudice, la cour doit apprécier la situation qui s'est produite du fait de la faute notariale avec celle qui se serait produite en l'absence de faute.

Il expose que si Yveline Y... avait bénéficié d'une inscription hypothécaire sur les biens objets de l'exploitation et sur lesquels Louis Y... exécutait son plan de continuation, ladite HypothPque ne lui aurait pas permis de recouvrer sa créance. Il ajoute que l'intimée n'aurait nullement pu solliciter la résolution du plan puisque comme elle le précise bien tardivement dans le cadre de la procédure d'appel, cette derniPre a perçu le 7 décembre 2001 un dividende de 1439,26 ä de Maître K., commissaire Z... l'exécution du plan correspondant Z... 50% de sa créance admise.

Il explique que la procédure en résolution de plan a été radiée suite au rPglement en cours des débiteurs. Il estime que la réformation s'impose en conséquence et que le préjudice subi par Yveline Y... s'explique par la seule carence de Louis Y..., carence qu'elle aurait df supporter mLme nantie du privilPge de co-partageant.

Il fait valoir que seule la clôture des opérations de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif permettra de déterminer précisément le préjudice subi par Yveline Y..., nonobstant les sommes perçues au cours du plan de continuation et les déductions forfaitaires de 30 francs prévus dans l'acte du 22 juin 1996. Il ajoute qu'en l'état du dossier, Yveline Y... ne démontre pas que Louis

Y... ne fait pas face aux échéances du plan ce dernier n'ayant pas été résolu.

Subsidiairement, il rappelle qu'il est de jurisprudence constante que le contrat de rente viagPre n'est pas un contrat en cours.

Il considPre qu'au jour du redressement judiciaire, soit le 17 mai 1994, il appartenait Z... Yveline Y... de déclarer l'intégralité des arrérages échus et Z... échoir de la rente afin de satisfaire aux prescriptions de l'article 51 alinéa 1 de la loi du 25 janvier 1985 et qu'elle n'aurait jamais perçu, mLme nantie du privilPge du co-partageant, les arrérages Z... échoir non déclarés.

Il estime que l'intimée se prévaut des termes de l'ordonnance d'admission qui a admis la créance d' Yveline Y... au titre des termes échus et Z... échoir et qu'il ne peut s'agir lB que d'une erreur matérielle ou d'un abus de langage.

En conséquence, il demande Z... la cour :

Vu les articles 1382 et 1978 du Code Civil

- Vu les articles 37 et 51 de la loi du 25 janvier 1985

- réformant le jugement dont appel dans toutes ses dispositions

- de dire n'y avoir lieu Z... perte de chance

- de débouter Yveline Y... de toutes ses demandes

SUBSIDIAIREMENT

-de fixer le préjudice d'Yveline Y... Z... la somme de 1439,26 ä

- de condamner en tout état de cause Yveline Y... aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP VIMONT en application de l'article 699 du Nouveau Code de procédure Civile. * * *

Yveline Y... et l'UDAF du TARN, intimés, répliquent que le contrat était destiné Z... assurer l'entretien d'Yveline Y... et qu'au regard de cette situation particuliPre dont il avait parfaitement connaissance Maître A. devait redoubler de vigilance.

Elles estiment que ce professionnel a agit avec la plus grande légPreté de sorte qu'il lui appartient de supporter les conséquences de la faute commise pouvant Ltre qualifiée de grave, et que le tribunal a fait une application stricte des rPgles de la responsabilité contractuelle.

Elles considPrent que la responsabilité du notaire est entiPre, que son préjudice est né, actuel et certain et qu'enfin malgré l'existence d'un plan de continuation décidé dans le cadre de la procédure de liquidation, elles n'ont aucun intérLt Z... demander la résolution de ce plan ne venant pas en rang utile dans l'ordre des créanciers. Elles s'estiment fondées Z... obtenir réparation de son préjudice certain et actuel.

Elles ajoutent que l'ordonnance rendue le 4 novembre 1997 par le juge commissaire du tribunal de grande instance de CAHORS que la créance d' Yvonne Y... a été définitivement admise Z... titre chirographaire Z... hauteur de la somme de 2878,53 ä représentant les termes échus au 31 décembre 1993 dont elle est créanciPre ainsi qu'B hauteur des rentes Z... échoir et que cette décision est définitive.

Elles font valoir que l'état des créances vérifiées a été déposé au greffe le 7 novembre 1996 et qu'un avis est paru dans le BODDAC le 31 aoft 1997, et qu'en tout état de cause l'adversaire ne saurait se prévaloir des rPgles de la procédure collective pour échapper Z... son entiPre responsabilité et minimiser le montant des sommes mises Z... sa charge.

Elles ajoutent qu'en aucun cas la condamnation de l'adversaire ne saurait se limiter au paiement des arrérages échus de la rente.

En conséquence, elles demandent Z... la cour :

- de rejeter l'appel de Maître A.

- Vu les articles 1147 et suivants du code civil

- de confirmer le jugement rendu le 8 mars 2002

- de condamner l'appelant Z... leur payer la somme de 1525 ä Z... titre de dommages et intérLts ainsi qu'aux dépens d'appel dont distraction au profit de Maître TESTON, avoué, conformément aux dispositions de la loi. MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'il est constant que Maurice A. qui a dressé l'acte de partage du 22 juin 1990 attribuant Z... Yveline Y... une rente annuelle et viagPre de 6 000 F et décidant que les biens objets du partage feraient l'objet d'une affectation hypothécaire afin de garantir cette rente, a omis son obligation consistant Z... inscrire ce privilPge, ce qu'il a reconnu le 25 aoft 1995 ;

Attendu qu'il est non moins constant que cette rente n'a jamais été réglée, que les époux Louis Y... ont été mis en redressement judiciaire le 17 mai 1994 et que Yveline Y... représentée par son tuteur a bien fait la déclaration de créance le 11 janvier 1994 ; qu'B la suite de cette déclaration, qui avait été contestée, le juge commissaire a rendu une ordonnance le 4 novembre 1997 dans les termes suivants :

"Admettons Yveline Y...

"Admettons Yveline Y... au passif des époux Y... Z... titre chirographaire Z... hauteur de 18 880,94 F représentant les termes échus jusqu'au 31 décembre 1993 dont elle est créanciPre, ainsi qu'B hauteur des rentes Z... échoir."

Attendu que cette décision est devenue définitive et que la responsabilité du notaire ne peut qu'Ltre accueillie sur le fondement de l'article 1149 du code civil ; qu'il a effectivement commis une faute dans le cadre de sa responsabilité contractuelle de telle sorte qu'Yveline Y... n'a pu bénéficier que d'une créance Z... titre chirographaire au lieu de la créance privilégiée qu'elle était en droit d'attendre de l'acte du 22 juin 1990.

Attendu qu'il ne s'agit nullement de la perte d'une chance ; qu'il résulte des documents produits que les biens, aprPs autorisation

judiciaire des biens ont été vendus pour une somme de 320 000 F qui a été entiPrement consacrée au désintéressement du crédit agricole, lui aussi créancier privilégié ;

Qu'il apparaît que le privilPge du crédit agricole avait été inscrit postérieurement Z... celui d'Yveline Y... et que si son privilPge avait été inscrit en temps utile, elle aurait pu en bénéficier.

Attendu que l'intégralité du préjudice d'Yveline Y... doit Ltre réparé ; que son préjudice est certain et actuel, qu'elle n'a perçu que 50 % des termes échus au 31 décembre 1993 et reste créanciPre pour l'ensemble des annuités des rentes viagPres Z... échoir.

Que c'est en conséquence Z... juste titre que les premiers juges ont statué ainsi qu'ils l'ont fait et qu'il convient de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et, y ajoutant de condamner Maurice A. Z... payer Z... Yveline Y... représentée par son tuteur l'U.D.A.F. au paiement de la somme de 1 500 ä de dommages et intérLts sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Que Maurice A. devra également supporter la charge des dépens. PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du 8 mars 2002.

Condamne Maurice A. Z... payer une somme supplémentaire de 1 500 ä de dommages et intérLts sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile Z... Yveline Y... représentée par son tuteur l'U.D.A.F.

Condamne l'appelant aux dépens d'appel dont distraction au profit de Maître TESTON, avoué, conformément aux dispositions de la loi.

Le présent arrLt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de Chambre et Dominique SALEY, Greffier.

Le Greffier

La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006944995
Date de la décision : 12/10/2004

Analyses

OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS.

Le notaire appelant qui a dressé l'acte de partage de la succession des parents de l'intimée et de son frPre, attribuant B celle-ci une rente annuelle et viagPre et décidant que les biens objets du partage feraient l'objet d'une affectation hypothécaire afin de garantir cette rente, a omis son obligation consistant B inscrire ce privilPge, ce qu'il a reconnu. Cette rente n'a jamais été réglée, le frPre de l'intimée et son épouse ont été mis en redressement judiciaire et l'intimée, représentée par son tuteur a bien fait la déclaration de créance que le juge commissaire a admise B titre chirographaire au passif du couple de son frPre. Cette décision est devenue définitive et la responsabilité du notaire ne peut qu'Ltre accueillie sur le fondement de l'article 1149 du Code Civil : il a effectivement commis une faute dans le cadre de sa responsabilité contractuelle de telle sorte que l'intimée n'a pu bénéficier que d'une créance B titre chirographaire au lieu de la créance privilégiée qu'elle était en droit d'attendre de l'acte de partage. Il ne s'agit nullement de la perte d'une chance. Il résulte des documents produits que les biens, aprPs autorisation judiciaire, ont été vendus pour une somme qui a été entiPrement consacrée au désintéressement de la banque, elle aussi créancier privilégié. Il apparaît que le privilPge de la banque avait été inscrit postérieurement B celui de l'intimée et que si son privilPge avait été inscrit en temps utile, elle aurait pu en bénéficier.

Ainsi, l'intégralité de son préjudice doit Ltre réparé par la condamnation du notaire appelant B payer B l'intimée les annuités de rente viagPre échues et B échoir, telles que fixées par l'acte de partage.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2004-10-12;juritext000006944995 ?
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