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10/05/2004 | FRANCE | N°JURITEXT000006945594

France | France, Cour d'appel d'agen, 10 mai 2004, JURITEXT000006945594


DU 10 Mai 2004 ----------------------

C.C/S.B G.F.A. - Groupement Foncier Agricole SOCIETE DOMAINE D'ORPHEE C/ Monsieur le DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DU GERS RG N :

03/00311 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du dix Mai deux mille quatre, par Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : G.F.A. - Groupement Foncier Agricole SOCIETE DOMAINE D'ORPHEE prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège Dont le siÃ

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DU 10 Mai 2004 ----------------------

C.C/S.B G.F.A. - Groupement Foncier Agricole SOCIETE DOMAINE D'ORPHEE C/ Monsieur le DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DU GERS RG N :

03/00311 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du dix Mai deux mille quatre, par Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : G.F.A. - Groupement Foncier Agricole SOCIETE DOMAINE D'ORPHEE prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège Dont le siège social est Poussignan 32220 ST LOUBE représenté par la SCP Henri TANDONNET, avoués assisté de la SCP NONNON - FAIVRE, avocats APPELANT d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AUCH en date du 15 Janvier 2003 D'une part, ET : Monsieur le DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DU GERS prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège Dont le siège social est 2, place de l'Ancien Foirail BP 301 32007 AUCH représenté par Me Jean-Michel BURG, avoué assisté de Me Gérard SEGUY, avocat INTIME D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 29 Mars 2004, devant Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre, Catherine LATRABE et Christian COMBES, Conseillers, assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. FAITS ET PROCÉDURE

Selon acte notarié du 6 décembre 1996, le GFA DOMAINE D'ORPHEE a acquis de la SAFER une propriété rurale et d'exploitation sise sur les communes de Montblanc et de Saint Loubes Amade pour le prix de 4 785 000 francs en prenant l'engagement de conserver pendant une durée de dix ans la destination agricole du bien ainsi acquis avant de la

donner à bail selon un second acte notarié du 4 juillet 1997 à l'EARL de Poussignan.

Arguant de la présence parmi les biens ainsi acquis d'une maison de maître qui ne peut être considérée comme étant à usage agricole, le Centre des Impôts d'Auch a notifié un redressement le 18 octobre 1999 que l'administration a maintenu après rejet de la réclamation contentieuse le 17 octobre 2001. A son tour saisi, le Tribunal de Grande Instance d'Auch a rejeté la demande formée par le GFA DOMAINE D'ORPHEE tendant à prononcer la décharge des droits correspondant au redressement opéré. MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le GFA DOMAINE D'ORPHEE a relevé appel de cette décision dans des formes et des délais qui n'apparaissent pas critiquables.

Il soutient que ce qui est baptisé château n'est en réalité qu'une maison de maître construite en 1970, située au centre de l'exploitation agricole dont elle n'est séparée des bâtiments agricoles que par des clôtures mobiles non fixées au sol et servant au logement du chef d'exploitation, sans que la loi distingue les conditions de l'exonération en fonction du "standing" de la maison d'habitation.

Ayant été acquise puis rétrocédée par la SAFER dans le cadre de la mission dévolue à celle-ci par l'article L 141-1 du Code rural, cette cession doit bénéficier des dispositions de l'article 1028 du CGI dés lors que la maison du chef d'exploitation fait partie de l'exploitation agricole, peu important les caractéristiques de cette maison comme son occupation temporaire par le chef d'exploitation.

Relevant encore que l'acquisition comme la rétrocession ont nécessairement fait l'objet d'un avis conforme des services fiscaux du Gers qui ne peuvent se contredire, il demande d'annuler la décision de rejet entreprise, de prononcer la décharge des droits d'enregistrement rappelés au nom du GFA par la mise en recouvrement

contestée, d'ordonner la restitution des droits préalablement acquittés avec intérêts au taux légal depuis leur paiement, enfin de condamner le Directeur des Services fiscaux du Gers aux dépens et au paiement de la somme de 5 000 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile. * * *

Le Directeur des Services fiscaux du Gers réplique que la remise en cause du caractère agricole de la maison d'habitation découle d'un ensemble d'éléments et de circonstances de fait dont la configuration des lieux, qui contribuent à démontrer que cette maison de maître, assortie d'un parc, d'une piscine et d'un court de tennis ne peut constituer l'accessoire indissociable de l'exploitation qui comporte des bâtiments d'exploitation et des communs.

En outre l'exploitant réside en Andorre et n'y a donc pas sa résidence habituelle principale si bien que cette maison n'est pas l'accessoire indispensable à la mise en valeur de l'exploitation agricole.

Arguant du fait que les interventions de la SAFER ne sont pas exclusivement cantonnées dans un rôle agricole et n'impliquent pas nécessairement un caractère agricole aux biens transmis dés lors qu'elles peuvent également faciliter la réorientation des terres, bâtiments ou exploitations vers des usages non agricoles en vue de favoriser le développement rural, et ajoutant que le fait générateur de l'impôt contesté est celui du jour de l'acquisition en sorte que l'accord du directeur des services fiscaux à l'acquisition par la SAFER est inopérant, il conclut à la confirmation de la décision dont appel tout en précisant que l'administration bénéficie en cas de condamnation d'une dérogation aux articles 695 à 699 du Nouveau Code de Procédure civile. MOTIFS

Attendu en premier lieu que l'acte reçu le 6 décembre 1996 contient la cession par la SAFER de Gascogne Haut Languedoc au GFA DOMAINE

D'ORPHEE, représenté par sa gérante, Margaret C., d'un ensemble immobilier décrit comme une propriété rurale et d'exploitation contenant maison de maître et dépendances, bâtiments de colons et d'exploitation, dépendances et terres attenantes, dont l'origine de propriété figurant dans l'acte précise que le bien a lui même été acquis suivant "acte reçu par le même notaire un instant avant les présentes" de Rose E. veuve X... (à l'exception de droits indivis portant sur une seule parcelle acquis de l'administrateur de la succession d'Antoine X...) ;

Que nul ne conteste que l'ensemble de l'opération, consistant en une acquisition et une cession immédiate, ait été faite par la SAFER dans le cadre des missions qui lui étaient dévolues selon la législation alors en vigueur, savoir accroître la superficie de certaines exploitations agricoles ou forestières, faciliter la mise en culture du sol et l'installation ou le maintien d'agriculteurs à la terre et réaliser des améliorations parcellaires, conduire des opérations destinées à faciliter la réorientation des terres, bâtiments ou exploitations vers des usages non agricoles en vue de favoriser le développement rural ainsi que la protection de la nature et de l'environnement ; qu'à cet effet et ainsi que le relève expressément l'acte page 13 in fine après le rappel qui précède, la SAFER peut notamment céder la propriété des biens qu'elle a acquis à des personnes qui s'engagent à les donner en location ;

Que d'ailleurs l'acte n'omet pas de préciser que l'acquéreur a été agréé par la SAFER sans opposition des commissaires du gouvernement, et qu'en conséquence de cet agrément, il s'oblige à louer le bien pendant une durée minimum de dix ans à un agriculteur agréé par la SAFER et les commissaires du gouvernement, dont il est expressément dit qu'il s'agit de l'EARL de Poussignan dont la gérante est Margaret C., comme il s'interdit également de le morceler ;

Et qu'à l'occasion de cette acquisition les parties ont ensemble déclaré que celle-ci était faite dans le cadre des opérations immobilières prévues par la loi du 5 août 1960 modifiée par le décret du 14 juin 1961, l'acquéreur qui s'engageait par ailleurs à conserver la destination agricole du bien vendu pour une durée de dix ans requérant en conséquence le bénéfice des avantages fiscaux prévus par l'article 16-1 de la loi précitée, soit le taux réduit de 0.60 % au titre du droit d'enregistrement ou de la taxe de publicité foncière ; Attendu en second lieu que les articles 1020, 1028 bis et 1028 ter du Code Général des Impôts dans leur rédaction en vigueur lors de l'opération, instituent un régime spécial des droits de timbre et d'enregistrement à l'occasion tant des acquisitions que des cessions effectuées par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural ;

Qu'en particulier toutes les cessions effectuées par celles-ci d'un bien acquis comme en l'espèce postérieurement à la date de publication de la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990, qui ayant pour objet le maintien, la création ou l'agrandissement d'exploitations agricoles, sont assorties d'un engagement de l'acquéreur pris pour lui et ses ayants cause de conserver cette destination pendant un délai de dix ans à compter du transfert de propriété, sont exonérées des droits de timbre et sous réserve de l'article 1020 des droits d'enregistrement ;

Qu'ainsi les deux seuls critères limitativement prévus par le texte afin de bénéficier de l'exonération sont la cession par la SAFER d'un bien constituant une exploitation agricole et l'engagement de l'acquéreur d'en conserver la destination durant le délai de dix ans ;

Attendu qu'il découle de l'ensemble que l'administration fiscale ne

saurait remettre en cause, sauf fraude démontrée, le régime appliqué à l'opération litigieuse dés lors que la SAFER a, dans le cadre de sa mission et au terme de cette double opération, organisé le transfert d'une exploitation agricole afin que le cessionnaire la donne à bail pendant une durée minimum de dix ans à un agriculteur qu'elle a agréé, et que l'affectation du bien a été maintenue en conséquence de l'engagement pris ;

Alors que la maison d'habitation participe à l'exploitation pour constituer la demeure du chef d'exploitation, avant comme après la cession, peu important ses caractéristiques dés lors qu'elle est située sur l'exploitation dont elle est partie prenante des éléments qui la composent, ni le fait que l'exploitant, à supposer qu'il puisse être fait abstraction de la forme sociable usitée, à qui en pareil cas rien n'interdit d'exercer une autre activité partie de l'année, n'y demeure en permanence, ni ne soit imposable en France ; Et que si les caractéristiques du bien cédé s'apprécient à la date de la cession, il ressort de la concomitance des opérations d'acquisition et de cession intervenues le même jour que le bien n'a subi aucune transformation ni physique, ni juridique, entre la première mutation, revêtue de l'aval des Commissaires du Gouvernement, parmi lesquels le Directeur départemental des Services fiscaux, et la seconde actuellement en cause, autorisant l'administration à distinguer le régime fiscal affectant telle ou telle de ses composantes ;

Attendu que la décision déférée sera infirmée en conséquence ;

Qu'il convient, annulant la décision de rejet, de prononcer la décharge des droits acquittés et d'ordonner en application des articles L 207 et L 208 du Livre des Procédures fiscales le remboursement au profit de l'appelant des sommes perçues avec

paiement d'intérêts moratoires au taux de l'intérêt légal à compter du jour du paiement ;

Attendu que l'appel étant désormais, en vertu de l'article R 202-6 ajouté au même code par le décret du 4 mars 1998, formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure avec représentation obligatoire prévue au Nouveau Code de procédure civile, il convient de condamner le Directeur des Services fiscaux du Gers aux dépens, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 1 500 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile. PAR CES MOTIFS LA COUR

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déclare l'appel recevable en la forme,

Infirme le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

Annule la décision de rejet prise le 17 octobre 2001,

Prononce la décharge des droits d'enregistrement rappelés au nom du GFA DOMAINE D'ORPHEE,

Ordonne le remboursement au profit du GFA DOMAINE D'ORPHEE des sommes perçues par l'administration fiscale avec intérêts au taux légal à compter du jour du paiement,

Condamne le Directeur des Services fiscaux du Gers à payer au GFA DOMAINE D'ORPHEE la somme de 1 500 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile,

Rejette toute autre demande et dit inutiles ou mal fondées celles plus amples ou contraires formées par les parties,

Condamne le Directeur des Services fiscaux du Gers aux dépens,

Autorise, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure civile, la SCP TANDONNET, avoué, à recouvrer directement contre la partie condamnée, ceux des dépens d'appel dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

Le présent arrêt a été signé par Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre et Dominique SALEY, Greffier.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006945594
Date de la décision : 10/05/2004

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Enregistrement.

L'acte reçu contient la cession par une société d'aménagement foncier et d' établissement rural (SAFER)au groupement foncier agricole (GFA) appelant, d'un ensemble immobilier décrit comme une propriété rurale et d'exploitation contenant maison de maître et dépendances, bâtiments de colons et d'exploitation, dépendances et terres attenantes. Nul ne conteste que l'ensemble de l'opération, consistant en une acquisition et une cession immédiate, ait été faite par la SAFER dans le cadre des missions qui lui étaient dévolues selon la législation alors en vigueur ; notamment la SAFER peut céder la propriété des biens qu'elle a acquis à des personnes qui s'engagent à les donner en location. L'acte n'omet d'ailleurs pas de préciser que l'acquéreur a été agréé par la SAFER sans opposition des commissaires du gouvernement, et qu'en conséquence de cet agrément, il s'oblige à louer le bien pendant une durée minimum de dix ans à un agriculteur agréé par la SAFER et les commissaires du gouvernement, comme il s'interdit également de le morceler. Les articles 1020, 1028 bis et 1028 ter du Code général des impôts dans leur rédaction en vigueur lors de l'opération, instituent un régime spécial des droits de timbre et d'enregistrement à l'occasion tant des acquisitions que des cessions effectuées par les SAFER. En particulier, toutes les cessions effectuées par celles-ci d'un bien acquis comme en l'espèce postérieurement à la date de publication de la loi du 23 janvier 1990, qui ayant pour objet le maintien, la création ou l'agrandissement d'exploitations agricoles, sont assorties d'un engagement de l'acquéreur pris pour lui et ses ayants cause de conserver cette destination pendant un délai de dix ans à compter du transfert de propriété, sont exonérées des droits de timbre et, sous réserve de l'article 1020, des droits

d'enregistrement. Ainsi, les deux seuls critères limitativement prévus par le texte afin de bénéficier de l'exonération sont la cession par la SAFER d'un bien constituant une exploitation agricole et l'engagement de l'acquéreur d'en conserver la destination durant le délai de dix ans. Il découle de l'ensemble que l'administration fiscale ne saurait remettre en cause, sauf fraude démontrée, le régime appliqué à l'opération litigieuse dés lors que la SAFER a, dans le cadre de sa mission et au terme de cette double opération, organisé le transfert d'une exploitation agricole afin que le cessionnaire la donne à bail pendant une durée minimum de dix ans à un agriculteur qu'elle a agréé, et que l'affectation du bien a été maintenue en conséquence de l'engagement pris. Alors que la maison d'habitation participe à l'exploitation pour constituer la demeure du chef d'exploitation, avant comme après la cession, peu important ses caractéristiques dés lors qu'elle est située sur l'exploitation dont elle est partie prenante des éléments qui la composent. Il convient de prononcer la décharge des droits acquittés et d'ordonner, en application des articles L 207 et L 208 du Livre des procédures fiscales, le remboursement, au profit de l'appelant, des sommes perçues avec paiement d'intérêts moratoires au taux de l'intérêt légal à compter du jour du paiement


Références :

Code de procédure fiscale, articles L207, L208
Code général des Impôts, articles 1020, 1028 bis, 1028 ter

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2004-05-10;juritext000006945594 ?
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