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18/11/2003 | FRANCE | N°02/426

France | France, Cour d'appel d'agen, 18 novembre 2003, 02/426


DU 18 Novembre 2003 -------------------------

F.T/S.B Nadine X... Patrick Y... Kamir Z... veuve A.... Brahim A.... Alloua Jean-Claude A.... Aissa A.... X.../ Thomas B... GROUPAMA SUD OUEST ASSURANCES CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LOT ET GARONNE RG N : 02/00426 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du dix huit Novembre deux mille trois, par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : Madame Nadine X... Monsieur Patrick Y... Madame Kamir Z... veuve A.... Monsieur Brahim A.... Mons

ieur Alloua Jean-Claude A.... Monsieur Aissa A.... représe...

DU 18 Novembre 2003 -------------------------

F.T/S.B Nadine X... Patrick Y... Kamir Z... veuve A.... Brahim A.... Alloua Jean-Claude A.... Aissa A.... X.../ Thomas B... GROUPAMA SUD OUEST ASSURANCES CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LOT ET GARONNE RG N : 02/00426 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du dix huit Novembre deux mille trois, par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : Madame Nadine X... Monsieur Patrick Y... Madame Kamir Z... veuve A.... Monsieur Brahim A.... Monsieur Alloua Jean-Claude A.... Monsieur Aissa A.... représentés par la SCP VIMONT J. ET E., avoués assistés de la SCP ISSANDOU - TANDONNET - BASTOUL, avocats APPELANTS d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AGEN en date du 19 Février 2002 D'une part, ET : Monsieur Thomas B... représenté par la SCP A-L. PATUREAU P. RIGAULT, avoués assisté de Me Olivier O'KELLY, avocat GROUPAMA SUD OUEST ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège Dont le siège social est 5 place Marguerite Laborde 64024 PAU CEDEX 9 représentée par la SCP A-L. PATUREAU P. RIGAULT, avoués assistée de Me Olivier O'KELLY, avocat CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LOT ET GARONNE prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège Dont le siège social est 1 Quai du Docteur C... 47913 AGEN CEDEX 9 représentée par Me Solange TESTON, avoué assistée de la SCPA DELMOULY-GAUTHIER-THIZY, avocats INTIMES D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 14 Octobre 2003, devant Nicole ROGER, Présidente de Chambre, Francis TCHERKEZ et Christian COMBES, Conseillers, assistés de Dominique SALEY, Greffière, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt

serait rendu.

Par acte du 14 novembre 2000, Nadine X..., Patrick Y... ont assigné Thomas B..., la Société d'Assurances GROUPAMA, la Caisse de Mutualité Sociale Agricole de Lot Et Garonne devant le tribunal de grande instance d'Agen, sur le fondement des articles 1,3 et 4 de la Loi du 5 juillet 1985, aux fins de condamner Thomas B... et sa Compagnie d'Assurances GROUPAMA à leur verser respectivement la somme de 100 000 F (15 244,90 ä) en réparation de leur préjudice moral et la somme de 18 024 F (2 747,74 ä) à Patrick Y..., en remboursement des frais d'obsèques exposés ainsi que la somme de 6 000 F (914,69 ä) sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C.

Ils ont sollicité l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Ils ont exposé que leur mère, Christine A.... épouse X... avait trouvé la mort dans un très grave accident de la circulation survenu le 5 novembre 1998 alors qu'elle circulait au volant de son véhicule automobile dans le sens LAYRAC/AGEN au lieudit "Sarrau", elle avait perdu le contrôle de son véhicule et percuté un véhicule conduit par Thomas B... qui circulait en sens inverse.

L'expertise technique du véhicule ordonnée par le Procureur de la République dans le cadre de l'information pénale qui a été ouverte, a révélé que le déport à gauche du véhicule conduit par l'intéressée était consécutif à l'explosion de la batterie pour cause d'inflammation subite des gaz chimiques internes.

Aucune faute de conduite n'étant imputable à Christine X..., ils ont demandé l'application de l'article 4 de la Loi du 5 juillet 1985 et voir reconnaître leur droit à indemnisation dans la mesure où le véhicule de Thomas B... était impliqué dans l'accident.

Par conclusions d'interventions du 25 septembre 2001, Kamir Z... veuve A..., Brahim A..., Alloua Jean-Claude A..., Aissa A.... se sont associés aux moyens développés et demandent réparation de leur préjudice

moral.

Madame veuve A.... a sollicité la somme de 100 000 F (15 244,90 ä) à ce titre.

Elle a précisé s'être installée en FRANCE en 1960 avec ses quatre enfants et avoir gardé ainsi que ses trois frères domiciliés dans le Lot Et Garonne des liens d'affection étroits avec la victime.

Brahim, Aissa et Alloua A.... ont réclamé pour leur part la somme de 60 000 F (9 146,94 ä) chacun et la somme de 4 000 F (609,80 ä) sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C.

Thomas B... et GROUPAMA Assurances ont sollicité à titre principal, de voir débouter Nadine X... et Patrick Y... de l'ensemble de leurs demandes et à titre subsidiaire, diminuer considérablement les indemnités auxquelles ils pourraient être condamnés.

Ils considèrent en effet que la conductrice adverse a commis une faute en perdant le contrôle de son véhicule et que cette faute est à l'origine exclusive de l'accident.

Le tribunal de grande instance d'Agen a relevé qu'aux termes de l'article 4 de la Loi du 5 juillet 1985, "la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis".

Qu'en l'espèce, les ayants-droit de la victime arguent de l'absence de faute de celle-ci pour obtenir l'indemnisation de leur préjudice moral de la part du conducteur du véhicule impliqué.

Mais que le "déport sur la partie gauche de la chaussée" du véhicule de Christine X... est seul à l'origine de l'accident, le conducteur du véhicule impliqué ne pouvant se voir reprocher une faute,

Que le rapport d'expertise diligenté à l'initiative du Procureur de la République ainsi que les constations des enquêteurs ne permettent pas d'exclure toute faute de conduite de la victime, l'expert concluant : "cette explosion pouvait soustraire l'attention de la

conductrice, à rester dans son propre couloir de circulation".

Qu'il n'est donc pas démontré que l'explosion ait eu un caractère imprévisible et irrésistible tel que la conductrice ne pouvait garder la maîtrise de son véhicule.

Que ce défaut de maîtrise même s'il n'est pas la cause exclusive de l'accident que l'on peut également rattacher à la survenance de l'explosion représente une faute imputable à la victime.

Que l'existence de cette faute alors que l'autre conducteur Thomas B... ne peut s'en voir reprocher aucune ne permet pas d'ouvrir droit à réparation au conducteur fautif ou à ses ayants-droit.

Que les demandeurs devaient donc être déboutés de l'ensemble de leurs prétentions.

Et par décision du 19 février 2002, le tribunal de grande instance d'Agen a débouté les demandeurs de l'ensemble de leurs prétentions.

Et déclaré le jugement opposable à la Caisse de Mutualité Sociale Agricole de Lot Et Garonne.

Nadine X..., Patrick Y... et les consorts A.... ont formé appel par acte non critiqué du 29 mars 2002.

Par conclusions du 26 juillet 2002, ils demandent à la cour :

De réformer le jugement entrepris,

De condamner Monsieur B... et sa compagnie d'assurances GROUPAMA à payer

- à Mademoiselle Nadine X... et à Monsieur Patrick Y... la somme de 15 245 ä en réparation de leur préjudice moral,

- et à Monsieur Patrick Y... la somme de 2 748 ä en remboursement des frais d'obsèques.

De les condamner à payer à Madame A.... la somme de 15 245 ä en réparation de son préjudice moral et à Brahim A..., Alloua A..., Aissa A.... la somme de 9 147 ä, à chacun d'eux, en réparation de leur préjudicie moral.

De les condamner à payer la somme de 1 372 ä sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C.,

De les condamner aux dépens de première instance et aux dépens d'appel.

Selon eux, en effet, la perte de contrôle de la conductrice décédée est due à l'explosion de la batterie -qui est un événement imprévisible- aucune faute ne pouvant être reprochée à Madame X... - l'application de l'article 4 de la Loi du 5 juillet 1985 entraînant dès lors droit à indemnisation à leur profit.

Pour sa part, Monsieur B... et GROUPAMA, dans leurs conclusions du 29 août 2003 demandent à la cour :

De confirmer dans l'ensemble de ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Agen, le 19 février 2002.

De condamner "conjointement et solidairement" l'ensemble des appelants : Nadine X..., Patrick Y..., Madame Z... veuve A..., Monsieur Brahim A..., Monsieur Alloua Jean-Claude A.... et Monsieur Aissa A..., à leur payer la somme de 1 500 ä sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C.

De les condamner aux dépens.

Au motif la cause exclusive de l'accident dont ont été victimes Madame X... et Monsieur B... réside dans la perte de contrôle du véhicule de Madame X...

Qu'ils sont donc fondés à se prévaloir des dispositions de l'article 4 de la Loi du 5 juillet 1985.

Qu'en effet, une jurisprudence récente conforterait leur position.

Qu'en effet, dans un arrêt rendu le 2 octobre 1995 par la cour d'appel de Grenoble (2ème ch. Civile), et concernant un accident en tout point comparable à celui objet du présent litige, la cour a

considéré qu'il y avait lieu de retenir une faute du conducteur dans la mesure où la perte de contrôle était imprévisible pour le deuxième conducteur et où il était dû à une défaillance du véhicule de la victime.

Qu'à titre subsidiaire, les circonstances de l'espèce sont de nature à réduire considérablement l'indemnité du préjudice subi.

La Mutualité Sociale Agricole de Lot Et Garonne (M.S.A.) dans ses écritures du 29 août 2003 demande à la cour :

De condamner solidairement Monsieur Thomas B... et la société GROUPAMA SUD OUEST à lui payer la somme de 1 074 ä outre intérêts au taux légal à compter des présentes conclusions.

De condamner en outre solidairement Monsieur Thomas B... et la société GROUPAMA SUD OUEST à lui payer la somme de 358 ä conformément à l'ordonnance du 24 janvier 1996.

De condamner solidairement "tous succombants" aux dépens.

Au motif qu'elle aurait réglé le 17 novembre 1998 la somme de 1 074 ä "au titre des frais d'obsèques,"

Qu'elle est en droit d'exercer son "recours prioritaire,"

Que la somme de 358 ä, correspond au tiers des débours dont elle sollicite le remboursement, en application de l'ordonnance du 24 janvier 1996. MOTIFS

Il résulte des éléments contradictoirement débattus devant la cour que l'origine de l'accident provient certes d'un déport à gauche du véhicule conduit par Madame X... mais que ce dernier est consécutif à l'explosion de la batterie du véhicule sans qu'il puisse être établi par l'expertise diligentée à la suite de l'accident que cette explosion résulte d'un défaut d'entretien du véhicule de la conductrice et lui soit imputable.

Dès lors au sens de l'article 4 de la Loi du 5 juillet 1985 la faute, qui ne s'apprécie qu'en la personne du conducteur auquel on l'oppose,

ne revêt pas en l'espèce un caractère exclusif car elle n'est pas seule à l'origine du dommage.

Dès lors chaque conducteur même non fautif est tenu au sens du texte susvisé d'indemniser l'autre sous réserve de la limitation instituée par la loi.

Il convient donc de considérer que l'indemnisation sollicitée par les ayants droit de la personne décédée doit être accordée quoique limitée dans son quantum à raison des dispositions de l'article 4 de la Loi du 5 juillet 1985, invoqués en l'espèce.

La décision entreprise sera donc réformée.

En fonction des éléments d'appréciation dont la cour dispose en l'espèce, les indemnités devant être accordées sont précisées au dispositif.

Les pièces produites établissent que le règlement des frais d'obsèques de Madame X... a été effectué par Monsieur Y... (2 748 ä).

Par contre, la M.S.A. "47" ne justifie pas du règlement des frais d'obsèques dont elle fait état dans ses écritures.

Elle ne produit en effet à cet égard aucun document ni aucune pièce et ne fournit aucune explication au soutien de sa demande, elle sera donc déboutée de cette dernière.

Une allocation fondée sur les dispositions de l'article 700 du N.C.P.C. est équitable en faveur de Mademoiselle X..., Monsieur Y... et les consorts A... (in solidum) à hauteur de 1 000 ä.

Monsieur B... et GROUPAMA assurances supporteront la charge des dépens de première instance et d'appel relatif à l'instance principale.

La M.S.A. supportera la charge des dépens par elle engagés. PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort,

Reçoit en la forme l'appel de Mademoiselle Nadine X..., Monsieur

Patrick Y... et des consorts A...,

Réforme la décision entreprise et statuant à nouveau,

Dit que Monsieur Thomas B... et GROUPAMA assurances sont tenus à indemnisations du préjudice subi par les appelants à la suite du décès de Christine A... séparée X... en application de la Loi du 5 juillet 1985.

Condamne en conséquence Monsieur Thomas B... et GROUPAMA assurances 'in solidum" à payer à :

- Mademoiselle Nadine X... la somme de 4 500 ä (quatre mille cinq cent euros)

- à Monsieur Patrick Y... les sommes de 4 500 ä (quatre mille cinq cent euros) et de 2 748 ä (deux mille sept cent quarante huit euros)

- à Madame Kami Z... veuve A... la somme de 6 000 ä (six mille euros)

- à Monsieur Brahim A... la somme de 3 000 ä (trois mille euros)

- à Monsieur Alloua Jean-Claude A... la somme de 3 000 ä (trois mille euros)

- à Monsieur Aissa A... la somme de 3 000 ä (trois mille eurso) en réparation de leurs préjudices.

Déboute les appelants du surplus de leurs demandes.

Déboute la Mutualité Sociale Agricole de Lot Et Garonne de ses demandes.

Condamne Monsieur Thomas B... et GROUPAMA assurances "in solidum" à payer à Mademoiselle Nadine X..., Monsieur Patrick Y... et aux consorts A... "in solidum" la somme de 1 000 ä (mille euros) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Condamne Monsieur Thomas B... et GROUPAMA assurance aux dépens de première instance et d'appel à l'égard des appelants, et autorise Maître VIMONT, avoué, à les recouvrer conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dit que la Mutualité Sociale Agricole de Lot Et Garonne supportera en

ce qui la concerne la charge des dépens par elle engagés.

Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de Chambre et Dominique SALEY, Greffière. LA GREFFIERE

LA PRESIDENTE Z... SALEY

N. ROGER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Numéro d'arrêt : 02/426
Date de la décision : 18/11/2003

Analyses

ACCIDENT DE LA CIRCULATION - Loi du 5 juillet 1985 - Articles 1 à 6 - Domaine d'application

L'origine de l'accident provient certes d'un déport à gauche du véhicule conduit par la victime mais ce dernier est consécutif à l'explosion de la batterie du véhicule sans qu'il puisse être établi par l'expertise diligentée que cette explosion résulte d'un défaut d'entretien du véhicule de la conductrice et lui soit imputable. Dès lors au sens de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, la faute, qui ne s'apprécie qu'en la personne du conducteur auquel on l'oppose, ne revêt pas en l'espèce un caractère exclusif car elle n'est pas seule à l'origine du dommage : chaque conducteur même non fautif est donc tenu, au sens du texte susvisé, d'indemniser l'autre, sous réserve de la limitation instituée par la loi. Il convient donc de considérer que l'indemnisation sollicitée par les ayants droit de la victime décédée doit être accordée, quoique limitée dans son quantum à raison des dispositions de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, invoqués en l'espèce.


Références :

Article 4 de la loi du 5 juillet 1985

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2003-11-18;02.426 ?
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