La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/05/2002 | FRANCE | N°00/01107

France | France, Cour d'appel d'agen, 22 mai 2002, 00/01107


DU 22 Mai 2002 ------------------------- M.F.B

Irmine X... épouse Y... Z.../ Didier A... RG N : 00/01107 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du vingt deux Mai deux mille deux, par Monsieur LEBREUIL, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : Madame Irmine X... épouse Y... née le 28 Avril 1966 à ORLEANS (45000) Demeurant Promenade des Pyrénées 32130 SAMATAN représentée par Me Jean Michel BURG, avoué assistée de Me Gilbert UGO, avocat APPELANTE d'un jugement du Tribunal de Grande Instance d'AUCH en date du 28 Juin 2

000 D'une part, ET : Monsieur Didier A... né le 25 Juin 1951 à VILL...

DU 22 Mai 2002 ------------------------- M.F.B

Irmine X... épouse Y... Z.../ Didier A... RG N : 00/01107 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du vingt deux Mai deux mille deux, par Monsieur LEBREUIL, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : Madame Irmine X... épouse Y... née le 28 Avril 1966 à ORLEANS (45000) Demeurant Promenade des Pyrénées 32130 SAMATAN représentée par Me Jean Michel BURG, avoué assistée de Me Gilbert UGO, avocat APPELANTE d'un jugement du Tribunal de Grande Instance d'AUCH en date du 28 Juin 2000 D'une part, ET : Monsieur Didier A... né le 25 Juin 1951 à VILLEMOISAN (49370) Demeurant Promenade des Pyrénées 32130 SAMATAN représenté par Me TANDONNET, avoué assisté de Me Monique BROCARD, avocat INTIME D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 27 Mars 2002, devant Monsieur LEBREUIL, Président de Chambre rédacteur, Messieurs B... et COMBES, Conseillers, assistés de Monique FOUYSSAC, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.

Statuant sur l'appel dont la régularité n'est pas contestée interjeté par Madame X... épouse Y... du jugement rendu le 28 juin 2000 par le tribunal de grande instance d'Auch dans l'instance l'opposant à Monsieur A... ;

Attendu que les faits de la cause ont été exactement relatés par les premiers juges en des énonciations auxquelles la cour se réfère expressément et qu'il suffit de rappeler

- que la société civile professionnelle X... - VILATE ( la SCP) a été constituée le 21 mai 1994 entre les docteurs vétérinaires X... et VILATE avec comme objet l'exercice en commun de la profession de vétérinaires ;

- que courant 1996 des litiges vont s'élever entre les associés, Madame X... épouse Y... prétendant avoir découvert que Monsieur A..., à partir de 1996, n'avait plus domicilié sur le compte bancaire de la société civile professionnelle l'encaissement des salaires qu'il recevait en rémunération de ses fonctions de médecin inspecteur, les encaissant directement sur son compte personnel ; qu'elle lui reprochait aussi d'avoir encaissé sur son compte personnel des revenus rémunérant ses productions intellectuelles, des honoraires d'expertise, d'autres honoraires et diverses sommes ; qu'elle lui faisait enfin grief de faire régler par la SCP des factures correspondant à des dépenses personnelles ; qu'elle estimait que ces faits étaient contraires aux statuts interdisant aux associés d'exercer leur profession à titre individuel;

- que les deux parties signaient le 22 décembre 1997 un compromis d'arbitrage et qu'une sentence arbitrale était rendue le 16 janvier 1998 aux termes de laquelle il était décidé qu'il y avait lieu à rupture des conventions entre les parties, que la rupture serait effective le 1er mai 1998, que Madame X... épouse Y... conserverait l'usage du cabinet vétérinaire et que Monsieur A... pourrait continuer l'exercice de sa profession dans la même ville de Samatan dans un local de son choix, qu'en compensation il recevrait de Madame X... épouse Y... une compensation financière pour solde

de tout compte d'un montant de 200.000 francs correspondant à sa perte d'usage de l'actuel cabinet, apurée des dettes de Monsieur A... envers la SCP, et que l'expert-comptable habituel de la SCP procéderait au partage des actifs et passifs au jour de la dissolution,

- que Madame X... épouse Y... reproche à Monsieur A... de n'avoir pas respecté la date du 1er mai 1998 comme départ du cabinet et soutient qu'il s'est maintenu dans les lieux dans des conditions particulièrement préjudiciable à son égard; qu'elle a contesté la validité de la sentence rectificative du 12 avril 1998 aux termes de laquelle il aurait reçu l'accord du Tribunal arbitral pour rester dans les lieux jusqu'au 1er septembre 1998; qu'elle a soutenu que le Tribunal ne s'est jamais réuni une seconde fois ; qu'elle a intenté un recours à l'encontre de ce document du 12 avril 1998 et qu'il a été fait droit à sa demande par un arrêt de ce siège en date du 18 novembre 1998 ;

- que par assignation du 17 novembre 1998 elle a demandé au Tribunal de grande instance d'Auch de constater que la sentence arbitrale du 16 janvier 1998 n'a pas pu être exécutée dans des conditions normales et en conséquence de l'exonérer du paiement de l'indemnité de 200.000 francs et de lui donner acte de ce qu'elle estime en l'état son préjudice causé par les agissements de Monsieur A... à la somme de 300.000 francs sous réserve des conclusions définitives du liquidateur de la SCP ;

- que le Tribunal, par le jugement dont appel du 28 juin 2000 a considéré

[* que les deux parties interprètent la sentence arbitrale de manière opposée ; que pour Madame X... épouse Y... il convient de déduire de la somme de 200.000 francs qu'elle doit verser à Monsieur A... au terme du compromis d'arbitrage celle de 163.380,26 francs, dont Monsieur A... est débiteur envers la SCP; qu'il est au contraire soutenu par Monsieur A... que la somme de 200.000 francs qui doit lui être versée est une compensation financière pour solde de tout compte pour perte d'usage de son cabinet et ne doit pas être amputée du montant de ses dettes ; qu'il s'agit donc d'une difficulté d'interprétation de la sentence puisque les deux parties sont en désaccord sur la signification du terme " épurée" ; qu'aux termes de l'article 1475 alinéa 2 du nouveau Code de procédure civile, l'arbitre a le pouvoir d'interpréter la sentence qu'il a rendue ; que c'est donc à juste titre que Monsieur A... soulève l'irrecevabilité de la demande de Madame X... épouse Y... en ce qu'il convient de faire trancher par le seul tribunal arbitral de la difficulté liée à l'utilisation du mot " épurée " ; qu'il y a donc lieu de se déclarer incompétent pour trancher cette question au profit du Tribunal arbitral ;

*] sur la demande indemnitaire présentée par Madame X... épouse Y... que celle-ci prétend que Monsieur A... lui a causé un préjudice susceptible d'ouvrir droit à des dommages-intérêts pour le

non-respect de la sentence arbitrale mais qu'elle ne fait pas la démonstration de la réalité du préjudice qu'elle invoque à la suite du départ tardif de Monsieur A... ;

* que la demande d'indemnité pour procédure abusive formée par Madame X... épouse Y... au motif que Monsieur A... a engagé contre elle abusivement une procédure de saisie vente qui l'a amenée à saisir le juge de l'exécution est irrecevable car elle ne pouvait être portée que devant la juridiction saisie du litige consécutif à l'exercice de la voie d'exécution ;

- que par jugement susceptible de contredit en ce qui concerne la compétence le Tribunal a donc décidé que les arbitres sont seuls compétents pour statuer sur l'interprétation de la sentence et que, statuant en premier ressort pour le surplus, il a déclaré Madame X... épouse Y... irrecevable en sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et pour inexécution de la sentence arbitrale et l'a condamnée à payer à Monsieur A... la somme de 15.000 francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que l'appelante fait grief au Tribunal de s'être ainsi prononcé alors pourtant

- que l'obligation qu'elle avait prise de payer 200.000 francs à son associé supposait le strict respect par ce dernier de la date du 1er

mai 1998 comme date de départ du cabinet ; que cette indemnité était conçue comme la contrepartie du fait qu'elle conservait d'usage de la clinique dès le 1er mai 1998 et non pas comme le soutient Monsieur A... pour compenser une perte patrimoniale le concernant puisqu'il avait cédé en 1994 toutes ses parts dans la SCI propriétaire des locaux loués à la SCP et que Madame X... épouse Y... avait dû s'endetter pour racheter 95 pour cent des parts de la SCI et ce en juillet 1998;

- qu'il n'avait pas rempli son obligation de quitter la clinique dès le 1er mai 1998 date qui présentait à la fois un caractère conventionnel et juridictionnel en l'état de la sentence arbitrale ; que la sentence rectificative sur laquelle il avait cru pouvoir s'appuyer avait été annulée par la cour par arrêt du 18 novembre 1998, que ce document était nul et qu'il ne pouvait produire aucun effet juridique ; qu'il n'avait pas hésité le 18 mai 1998 à déposer auprès du président du Tribunal de grande instance d'Auch une requête en exequatur visant aussi ce rectificatif alors que celui-ci était formellement contesté et que surprenant la religion du président du Tribunal il avait obtenu le 22 mai 1998 une ordonnance d'exequatur pour le tout ; que c'était dans ce contexte, caractérisant la mauvaise foi de son adversaire, qu'elle avait saisi le Tribunal d'une demande tendant à voir dire et juger que la somme de 163.380,26 francs devait venir en déduction de la somme de 200.000 francs allouée à Monsieur A... par la sentence arbitrale et voir condamner Monsieur A... à lui payer la somme de 200.000 francs à titre de dommages-intérêts ;

- que par arrêt en date du 8 novembre 2000, prononcé à la suite du contredit formé par Madame X... épouse Y..., la cour avait infirmé la décision déférée en ce que le Tribunal s'était déclaré incompétent au profit du Tribunal arbitral et invité les parties à conclure au fond, faisant usage de son pouvoir d'évocation ;

- que Monsieur A... se prétendait créancier de la somme de 200.000 francs envers Madame X... épouse Y... et indiquait que la Cour pourrait demander leur avis aux arbitres mais que ce faisant il oubliait que la Cour par son arrêt précité du 8 novembre 2000 avait décidé d'évoquer le fond du litige et que c'était donc à elle qu'il revenait d'interpréter la sentence ;

- que selon cette dernière la somme de 200.000 francs devait être " épurée " des dettes de Monsieur A... à l'encontre de la SCP ; qu'il était donc certain que les arbitres n'avaient pas défini une somme " nette " que devait recevoir Monsieur A...; que la sentence avait fixé à la somme de 200.000 francs la perte d'usage de Monsieur A... mais qu'il ne pouvait pas être contesté que cette somme devait ensuite être diminuée des dettes de Monsieur A... ; que cette interprétation était parfaitement logique dès lors

* que l'origine du litige portait sur les détournements de Monsieur A... et que par conséquent ses dettes constituaient le point central voire l'objet même du procès ; que la sentence faisait suite au litige sur les fonds encaissés par Monsieur A... seul au

détriment de la SCP et que la question du remboursement des détournements mis à jour par un rapport d'expertise comptable ne pouvait pas être éludée ;

* que le terme " épurer " signifiait " déduire " et que cette opération de déduction devait être réalisée à la suite du prononcé de la sentence puisque la sentence elle-même ne l'avait pas fait ;

* que c'était la raison pour laquelle le président du conseil régional de l'ordre des vétérinaires avait demandé le 25 août 1997, en accord avec les parties, à Monsieur C... expert-comptable de procéder à une " expertise afin de mieux cerner les griefs financiers invoqués " ;

* que la Cour dans son arrêt du 18 novembre 1998 avait indiqué que les arbitres avaient apprécié les relations financières entre les parties de façon générale, ce qui supposait donc qu'il fallait ensuite les affiner ;

- que Monsieur A... ne pouvait donc pas sérieusement soutenir que la somme " nette " de 200.000 francs lui était due ;

- que dans ses dernières conclusions il soutenait que les arbitres, dans leur sentence, avaient déjà pris en compte ses dettes, mais que cette thèse ne reposait sur aucun élément sérieux car il ne résultait pas de la sentence que les dettes de Monsieur A... avaient été déduites et que la question revêtait trop d'importance pour que l'on puisse se permettre de considérer qu'elle avait été évacuée de façon implicite ;

- qu'il était par ailleurs constant que Monsieur A... n'avait pas respecté la sentence arbitrale puisqu'il s'était maintenu dans les lieux jusqu'au début septembre 1998 alors qu'il aurait dû les quitter le 1er mai 1998 ; qu'il avait trompé son associé et le Tribunal arbitral en signant un compromis fondé sur des engagements qu'il savait ne pas pouvoir tenir ; qu'il prétendait qu'il ne s'était maintenu dans les lieux qu'en vertu du rectificatif ultérieurement annulé par la cour et que cette annulation ne pouvait pas avoir d'effet rétroactif mais que sa thèse à cet égard était fantaisiste ; que toute personne devait répondre des agissements causant un préjudice à autrui et qu'il avait été rappelé par la cour dans son arrêt du 18 novembre 1998 " que les arbitres avaient apprécié de façon générale les relations entre les parties et que l'inexécution du compromis d'arbitrage mettait en péril l'équilibre et pouvait occasionner un préjudice nouveau " ; que de plus l'annulation du simulacre de rectificatif du 12 avril 1998 avait eu pour effet de replacer les parties dans l'état où elles se trouvaient antérieurement comme si ce rectificatif n'avait jamais existé, c'est-à-dire dans le seul état du compromis du 16 janvier 1998 ; que de ce fait la revendication de Monsieur A... de se maintenir dans les locaux de la clinique vétérinaire après le 1er mai 1998 se

trouvait anéantie et ne reposait sur aucune base ; qu'il devait être condamné à payer des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par le non-respect de la sentence arbitrale; que le tribunal avait rejeté cette demande, sans égard aux différentes pièces et attestations produites par Madame X... épouse Y... et non contestées par Monsieur A..., au motif que celui-ci produisait de son côté deux constats d'huissier en date du 5 mai et 27 juillet 1998 tendant à démontrer qu'il n'avait plus accés à la clinique, et au vu d'une attestation selon laquelle en juin 1998 il n'aurait pas eu accès aux locaux, mais que ce faisant les premiers juges avaient commis une erreur ; que les constats d'huissier se bornaient a rappeler les propos de Monsieur A... et mentionnaient l'opposition de Madame X... épouse Y... à ce qu'il puisse se maintenir dans les locaux de la clinique vétérinaire ; que de plus deux autres constats effectués les 10 et 20 juillet 1998 démontraient qu'il se servait du compte de la SCP puisqu'il était venu, accompagné de l'huissier, pour réclamer le carnet de chèques de la SCP alors même qu'un administrateur avait été désigné auparavant ; que de plus l'huissier ne constatait à aucun moment que Monsieur A... avait été empêché de pénétrer dans la clinique ; qu'au demeurant dans ses conclusions de première instance Monsieur A... n'avait pas contesté avoir bénéficié de la clinique jusqu'en septembre 1998 ; qu'il était de surcroît établi qu'il n'avait achevé la construction de la clinique qu'il avait ouverte ultérieurement qu'en septembre 1998 et qu'il avait donc nécessairement bénéficié des locaux en litige entre mai et septembre 1998; que tous ces faits constituaient des manquements à la sentence arbitrale dans des conditions préjudiciables à l'appelante ;

- que pour être plus précis il était démontré qu'à partir du 1er mai 1998 il avait vécu uniquement sur le stock de la SCP dans le cadre de son activité inchangée au sein de la clinique, qu'il n'avait pas payé le loyer dû à la SCI, qu'il n'avait pas supporté les charges correspondant à l'exercice de son activité au sein de la clinique, qu'il avait tenté de récupérer le 20 juillet 1998 le chéquier de la SCP afin de payer des factures personnelles, qu'il avait fait établir deux chèques de banque à son profit sur le compte de la SCP le 21 juillet 1998, que le 12 mai 1998 il avait mis la main sur la somme de 48.562,64 francs correspondant au revenu encaissé par Madame X... épouse Y..., qu'il avait tenté de paralyser la vie de la SCP en refusant de se rendre à la convocation de l'Assemblée générale en mai 1998 qui se réunissait en vue de la dissolution prévue par la sentence arbitrale, et que jusqu'à son départ des lieux, elle s'était trouvée dans une situation matérielle et morale extrêmement pénible, voyant son ex associé, au mépris de la sentence arbitrale, continuer à user et abuser de la structure de la société, des stocks, du personnel, et des finances, alors que par ailleurs il construisait des locaux en face de la clinique et qu'il s'employait à détourner la clientèle, allant jusqu'à couper la ligne téléphonique du cabinet vétérinaire le jour de son départ, un vendredi soir, de façon à causer un préjudice commercial à son associée ; qu'il y avait donc lieu de le condamner au paiement de la somme de 200.000 francs à titre de dommages et intérêts ;

- qu'il s'était par ailleurs rendu coupable d'un abus de droit en n'hésitant pas à engager une procédure de saisie vente le 14 octobre 1999 puis en poursuivant la procédure d'exécution alors que le Tribunal de grande instance d'Auch avait rendu sa décision sur le

fond, invitant les parties à faire interpréter la sentence par le Tribunal arbitral ; que sa mauvaise foi était patente sachant que l'exequatur avait été accordée en considération non seulement de la sentence du 16 janvier 1998 mais aussi du rectificatif ou prétendu tel du 12 avril 1998 obtenu dans des conditions parfaitement irrégulières ; qu'il aurait dû limiter sa demande d'exequatur à la sentence du 16 janvier 1998 et qu'en tentant d'exécuter son adversaire alors qu'une procédure était pendante au fond il avait manifesté sa volonté de nuire ; que le Tribunal avait cru pouvoir rejeter la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par Madame X... épouse Y... au motif qu'elle relevait de la compétence du juge de l'exécution mais que ce motif était inexact dans la mesure où la demande ne portait pas sur une difficulté d'exécution mais était fondée sur l'article 1382 du Code civil à la suite de tentatives d'exécution forcée injustifiées ; qu'il y avait lieu de le condamner à payer la somme de 20.000 francs en réparation du préjudice causé par ces abus de procédure ;

- que s'agissant du remboursement des dettes, celles-ci avaient été chiffrées dans le rapport établi contradictoirement par l'expert-comptable C... à l'initiative du conseil de l'ordre ; que les conclusions de cet expert étaient indiscutables, qu'il s'agisse de la rémunération que Monsieur A... avait perçue en sa qualité de vétérinaire inspecteur, des honoraires ( et non pas des droits d'auteur ) qu'il avait reçus en contrepartie de son travail intellectuel, des honoraires qu'il avait encaissés en qualité de sapiteur, ou enfin des indemnités qui lui avaient été allouées à l'occasion de ses activités au sein de la commission aviaire ; que dans ces conditions le total de ses dettes était bien de 163.380,26

francs ; qu'il s'agissait bien de dettes car en tant qu'associé en industrie, et par application de l'article 1843 - 3 alinéa 6 du Code civil, il devait rendre à la société les services promis et lui verser tous les gains réalisés par l'activité faisant l'objet de l'apport ; que de plus les statuts prévoyaient en leur article 13 que " la propriété des parts emportait de plein droit l'interdiction d'exercer à titre personnel " et que le règlement intérieur établi par les ex associés stipulait en son article 12 qu'en cas d'absence de l'un des vétérinaires pour participation à des congrès, ou réunions professionnelles diverses, la rémunération perçue à ces occasion devait être intégralement reversée à la SCP ; que certes il n'était pas interdit à un associé en industrie d'avoir une activité extérieure lui apportant des revenus, mais à la condition impérative que cette activité soit complètement extérieure à l'activité et à l'objet de la SCP ; que tel n'était pas le cas en l'espèce, les activités dont il était question se rattachant à l'évidence au métier de vétérinaire ;

qu'elle demande en conséquence à la Cour de réformer la décision déférée, de fixer à la somme de 163.380,26 francs le montant des dettes de Monsieur A... et de dire qu'elle viendra en déduction de la somme de 200.000 francs retenue par les arbitres au titre de la perte de la valeur d'usage, de dire et juger qu'en conséquence la créance de Monsieur A... est de 36.619,74 francs, et de le condamner à lui payer les sommes de 200.000 francs à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice causé du fait du

non-respect de la sentence arbitrale, 20.000 francs à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, et 20.000 francs par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que Monsieur A... intimé, fait au contraire valoir

- sur l'interprétation de la sentence arbitrale du 16 janvier 1998 que la somme de 200.000 francs a été fixée en tenant compte de sa dette au regard de la SCP,

- sur la demande de dommages et intérêts présentée par Madame X... épouse Y... que la sentence arbitrale du 16 janvier 1998 n'a toujours pas été exécutée par Madame X... épouse Y... quant au paiement de la somme de 200.000 francs alors pourtant qu'elle conserve depuis cette date l'usage exclusif du cabinet vétérinaire et que de plus,

OE s'agissant de l'action fondée sur l'article 1382 du Code civil,

[* la sentence n'était assortie d'aucune condition de délai ni d'aucun moratoire,

*] le maintien dans les lieux était justifié par la sentence rectificative du 12 avril 1998 dont l'annulation n'a été prononcée que le 18 novembre 1998,

[* les préjudices allégués par Madame X... épouse Y... ne sont pas des préjudices personnels mais des préjudice dont seule la SCP, qui n'est pas partie à l'instance, pourrait demander la réparation ;

*] les documents établis unilatéralement pour le compte de la SCP et non de Madame X... épouse Y... sont contestés par Monsieur A..., y compris le rapport d'expertise comptable, sur la base de griefs comptables sérieux et objectifs;

[* la preuve n'est donc pas rapportée, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, d'un quelconque préjudice personnel et direct ;

OE s'agissant de la demande fondée sur l'article 1843 - 2 du Code civil

*] les agissements qui lui sont reprochés ne concernent que la SCP et non pas Madame X... épouse Y... qui n'en est pas personnellement et directement victime ;

* la demande est donc irrecevable ;

- sur l'abus de droit, qu'il ne saurait lui être reproché d'avoir engagé une procédure de saisie vente le 14 octobre 1998 sur la base de la sentence arbitrale du 16 janvier 1998, revêtue de l'exequatur le 22 mai 1998, alors que Madame X... épouse Y... n'a jamais contesté cette sentence, laquelle détermine le montant de la créance de Monsieur A... à la somme de 200.000 francs, créance qui est certaine, liquide et exigible ; que l'on voit mal comment, seule la sentence arbitrale du 12 avril 1998 ayant été annulée par l'arrêt du 18 novembre 1998, Monsieur A... aurait dû solliciter à nouveau l'exequatur de la sentence du 16 janvier 1998, puisque l'arrêt du 18 novembre 1998 n'a pas annulé l'exequatur mais a simplement la décision d'arbitrage du 12 avril 1998 ;

qu'il demande en conséquence à la Cour

- sur l'interprétation de la sentence du 16 janvier 1998, à titre principal de dire que la somme de 200.000 francs constitue une compensation financière pour solde de tout compte, et à titre subsidiaire d'entendre les trois arbitres afin qu'ils fassent connaître l'interprétation qu'ils ont voulu donner au mot " épurée " et la commune intention des parties;

- sur le fond, de débouter Madame X... épouse Y... de toutes ses demandes, d'ordonner la capitalisation des intérêts sur la somme de

200.000 francs conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil et de condamner Madame X... épouse Y... au paiement de la somme de 10.000 ä sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

SUR QUOI

I°) Sur l'interprétation de la sentence arbitrale du 16 janvier 1998 Attendu que la sentence arbitrale soumise à l'interprétation de la cour est libellée comme suit:

" Le Docteur A... recevra du Docteur X... une compensation financière pour solde de tout compte. Cette somme de 200.000 F ( deux cent milles francs ) correspond à sa perte d'usage de l'actuel cabinet épurée des dettes du Docteur A... envers la SCP "

Attendu que la notion d'épuration est une notion d'exclusion et d'élimination, et que c'est après déduction des dettes de l'intimé que sa créance a été arrêtée à la somme de 200.000 F ;

qu'il suffit pour s'en convaincre de se référer au compromis d'arbitrage du 22 décembre 1997 et d'observer que les arbitres, qui avaient pour mission de régler les comptes entre les parties, avaient

en leur possession non seulement le rapport de Monsieur C... mais également les mémoires et pièces déposées par chacune des parties et le rapport de conciliation qui avait été établi ;

que la somme de 200.000 francs constitue donc, comme l'indique la sentence elle même, un solde de tout compte destiné à mettre fin à toute discussion ;

II°) Sur la demande de dommages et intérêts présentée par Madame X... épouse Y... pour inexécution de la sentence arbitrale

Attendu qu'il n'est pas contesté que Monsieur A... s'est maintenu dans les lieux jusqu'au début du mois de septembre 1998 alors qu'il aurait du les quitter le 1er mai 1998, date à laquelle selon la sentence la rupture devait devenir effective ;

que l'inexécution par la partie adverse de son obligation d'avoir à lui payer la somme de 200.000 F ne l'autorisait pas à continuer ses activités dans les locaux de la SCP car l'exception non adempleti contractus ne peut pas être invoquée s'agissant, non pas d'un contrat, mais de l'exécution d'une sentence arbitrale ;

que son occupation des lieux doit être considérée comme fautive dés lors que la sentence rectificative en vertu de laquelle il a cru pouvoir différer son départ a été purement et simplement annulée par la cour ;

qu'il appartient cependant à Madame X... épouse Y... de démontrer

que cette faute lui a causé un préjudice certain, direct et personnel et que force est de constater qu'elle est défaillante dans l'administration de cette preuve ;

qu'en effet les dommages dont elle demande réparation, à les supposer caractérisés, auraient été soufferts par la SCP et par elle seule, qu'il s'agisse de l'utilisation par Monsieur A... du stock de médicaments appartenant à la société, de l'utilisation par lui des structures de la SCP, des chèques de banque qu'il aurait fait établir sur le compte de la société, des sommes qu'il aurait prélevées ou encore de son refus de se rendre à l'assemblée générale qui devait se réunir pour concrétiser la dissolution décidée par la sentence arbitrale ;

que la personnalité morale d'une société subsiste pour les besoins de sa liquidation et qu'il appartiendra le cas échéant au liquidateur de la SCP de poursuivre le recouvrement de la créance de dommages et intérêts qu'elle détiendrait sur Monsieur A...;

Attendu que de la même manière Madame X... épouse Y... est mal fondée à se prévaloir des dispositions de l'article 1843-2 du Code civil dés lors qu'elle n'a pas été personnellement et directement victime des agissements dont l'intimé se serait rendu coupable ;

III°) Sur l'abus de droit reproché au Docteur A...

Attendu que Madame X... épouse Y... reproche d'une part à Monsieur A... d'avoir engagé une procédure de saisie-vente le 14 octobre 1999 sur la base de la sentence arbitrale du 16 janvier 1998, revêtue de l'exequatur le 22 mai 1998, et d'autre part d'avoir

poursuivi la procédure d'exécution alors que le juge du fond avait invité les parties à faire interpréter la sentence ;

qu'elle soutient

- en premier lieu que l'exéquatur ayant été accordée pour le tout, c'est à dire pour la sentence du 16 janvier 1998 mais aussi pour celle du 12 avril 1998, Monsieur A... ne pouvait pas s'en prévaloir dés lors que le rectificatif du 12 avril avait été annulé par arrêt du 18 novembre 1998 et qu'il aurait du demander au juge d'accorder l'exéquatur pour la seule sentence du 16 janvier ;

- en second lieu, qu'il a manifesté sa mauvaise foi en poursuivant la procédure d'exécution alors que le juge du fond était saisi et qu'il était lui même débiteur envers la SCP et envers son associée ;

Mais attendu

- d'une part

Mais attendu

- d'une part qu'il ne saurait être reproché à l'intimé d'avoir engagé une procédure d'éxécution par commandement aux fins de saisie-vente

du 15 janvier 1999 suivi d'un procès-verbal de saisie du 14 octobre 1999 alors que la sentence arbitrale du 16 janvier 1998, revêtue de l'exequatur le 22 mai 1998, était définitive, que Madame X... épouse Y... ne l'avait pas contestée, et que sa créance, soit la somme de 200.000 francs, était certaine, liquide et exigible ; que pour le surplus ce n'est pas parce que la sentence rectificative du 12 avril 1998 a été annulée que Monsieur A... ne pouvait pas se prévaloir de l'exéquatur accordée à la sentence du 16 janvier 1998 dont la validité n'a jamais été remise en cause ;

- d'autre part que la saisine du juge du fond n'interdisait en rien à l'intimé de poursuivre le recouvrement de sa créance ; que s'agissant non pas d'un contrat mais d'une décision de justice immédiatement exécutoire, Madame X... épouse Y... devait exécuter la sentence sans délai sans pouvoir compenser sa dette avec la créance qu'elle prétendait elle même détenir sur son associé ou sur la SCP ; qu'elle peut d'autant moins reprocher à Monsieur A... d'avoir agi de mauvaise foi que l'interprétation qu'elle propose de la sentence est en définitive inexacte et que sa demande de dommages intérêts n'est pas fondée ;

Attendu qu'il convient par conséquent de débouter Madame X... épouse Y... de toutes ses demandes et d'ordonner la capitalisation des intérêts sont elle est débitrice sur la somme de 200.000 F à compter du 15 février 2002, date à laquelle elle a été demandée pour la première fois ;

Attendu que l'appelante qui succombe en toutes ses prétentions doit être condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à l'intimé la somme de 2000 ä par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; PAR CES MOTIFS LA COUR

En la forme, reçoit l'appel jugé régulier,

Et au fond,

Confirme la décision déférée en ce qu'elle a débouté Madame X... épouse Y... de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et pour inexécution de la sentence arbitrale et en ce qu'elle l'a condamnée aux dépens ainsi qu'à payer à Monsieur A... la somme de 15.000 francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ,

Et vu son arrêt du 8 novembre 2000,

Dit et juge que la somme de 200.000 F ou 30.489,90 ä( trente mille quatre cent quatre vingt neuf Euros quatre vingt dix Cents ) allouée à Monsieur A... par la sentence arbitrale du 16 janvier 1998 constitue une compensation financière pour solde de tout compte, aprés déduction des dettes de Monsieur A... envers la SCP ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dus sur la somme de 30.489,90 ä ( trente mille quatre cent quatre vingt neuf Euros quatre vingt dix Cents ) à compter du 15 février 2002 ;

Condamne Madame X... épouse Y... aux dépens d'appel et autorise la SCP TANDONNET, avoué, à recouvrer directement contre elle ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante ;

La condamne en outre à payer à Monsieur A... la somme de 2000 ä ( deux mille Euros ) par application de l'article 700 modifié du nouveau Code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande contraire ou plus ample des parties.

Le président et le greffier ont signé la minute de l'arrêt. LE GREFFIER LE PRESIDENT M. FOUYSSAC M. LEBREUIL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Numéro d'arrêt : 00/01107
Date de la décision : 22/05/2002

Analyses

ARBITRAGE - Sentence

L'inexécution par la partie adverse de son obligation d'avoir à lui payer une somme, déterminée par une sentence arbitrale comme représentant le solde de tout compte entre les parties, n'autorisait pas l'intimé à continuer ses activités dans les locaux de la société car l'exception non adempleti contractus ne peut être invoquée s'agissant, non pas d'un contrat, mais de l'exécution d'une sentence arbitrale. Son occupation des lieux doit être considérée comme fautive. Il appartient cependant à l'appelante de démonter que cette faute lui a causé un préjudice certain, direct et personnel et force est de constater qu'elle est défaillante dans l'administration de cette preuve. En effet, les dommages dont elle demande réparation, à les supposer caractérisés, auraient été souffert par la société et par elle seule. La personnalité morale de cette dernière subsiste pour les besoins de sa liquidation et il appartiendra, le cas échéant, au liquidateur de poursuivre le recouvrement de la créance de dommages et intérêts qu'elle détiendrait sur l'intimé


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2002-05-22;00.01107 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award