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11/03/2002 | FRANCE | N°00/01310

France | France, Cour d'appel d'agen, 11 mars 2002, 00/01310


DU 11 Mars 2002 -------------------------

S.A. COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D'EQUIPEMENTS C.G.L C/ Patrick X... Y... N : 00/01310 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du onze Mars deux mille deux, par Monsieur CERTNER, Conseiller, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : S.A. COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D'EQUIPEMENTS C.G.L prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège ... EN BAROEUL représentée par Me Solange TESTON, avoué assistée de la SCP CAMI

LLE-SARRAMON-VINCENTI, avocats APPELANTE d'un jugement du Tribunal...

DU 11 Mars 2002 -------------------------

S.A. COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D'EQUIPEMENTS C.G.L C/ Patrick X... Y... N : 00/01310 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du onze Mars deux mille deux, par Monsieur CERTNER, Conseiller, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : S.A. COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D'EQUIPEMENTS C.G.L prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège ... EN BAROEUL représentée par Me Solange TESTON, avoué assistée de la SCP CAMILLE-SARRAMON-VINCENTI, avocats APPELANTE d'un jugement du Tribunal de Commerce d'AGEN en date du 22 Octobre 1999 D'une part, ET : Monsieur Patrick X... né le 08 Mai 1947 ... Résidence Fallières 47000 AGEN représenté par Me TANDONNET, avoué assisté de Me SCP INQUINBERT-DUCASSE, avocat INTIME D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 21 Janvier 2002, devant Monsieur FOURCHERAUD, Président de Chambre, Monsieur CERTNER, Conseiller rédacteur et Madame LATRABE, Conseiller, assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.

EXPOSE DU LITIGE

Dans des conditions de régularité de forme et de délai non discutées, la Compagnie Générale de Location d'Equipement dite C.G.L. S.A. a interjeté appel d'un Jugement rendu par le Tribunal de Commerce d'AGEN le 22/10/99:

- ayant dit que la mission d'intermédiaire en opérations de banque confiée à Patrick X... n'excluait pas la qualification d'agent commercial et ne privait pas l'agent du droit à une indemnité au terme du contrat,

- l'ayant condamné à payer à Patrick X..., avec exécution provisoire sous réserve de constitution de garantie, une indemnité de rupture de 766.000 francs ainsi que la somme de 5.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- ayant rejeté la demande de provision de Patrick X... relativement aux commissions de l'année 1998;

Les faits de la cause ont été relatés par les premiers Juges en des énonciations auxquelles la Cour se réfère expressément;

L'appelante conclut à la réformation de la décision entreprise;

Au principal, elle demande à la Cour de dire et juger que:

* la profession d'intermédiaire en opérations de banque n'entre pas dans le champ d'application du statut régissant les relations entre les agents commerciaux et leurs mandants,

* seule la convention conclue avec Patrick X... le 01/10/93 doit trouver application,

* dès lors, il ne peut être alloué aucune indemnité à ce dernier du fait de la rupture du contrat;

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir l'argumentation suivante:

1 ) les premiers Juges ont violé les dispositions de l'art. 1134 du Code Civil en dénaturant l'intitulé et les clauses claires du contrat

liant les parties, lequel donne à l'intimé un mandat de droit commun dans le cadre du statut particulier de la profession d'intermédiaire en opérations de banque régi par les dispositions d'ordre public du chapitre VI de la Loi du 24/01/84; ils ont fait fi des références faites à la Loi du 28/12/66 sur l'usure et les prêts d'argent et à la Loi du 24/01/84, notamment son art. 71, alors que ces législations sont exclusives et incompatibles avec la Loi du 25/01/91 relative au statut des agents commerciaux; ils ont ignoré les art. 4 et 8 de la convention devant faire la loi des parties, dispositions exluant toute indemnité à l'occasion de la résiliation du contrat,

2 ) l'alinea 2 de l'art. 1er de la Loi du 25/06/91 exclut de son champ d'application les agents dont la mission de représentation s'exerce dans le cadre d'activités économiques qui font l'objet, en ce qui concerne cette mission, de dispositions législatives particulières; or, telle est la situation de l'intimé, la mission contractuellement dévolue à ce dernier le faisant intervenir en qualité d'intermédiaire en opérations de banque de sorte qu'il exerçait son activité économique dans le cadre de dispositions législatives particulières, à savoir la Loi bancaire du 24/01/84 réglementant cette profession; l'art. 68 de cette Loi crée un régime spécifique de mandat exclusif du mandat d'agent commercial,

3 ) la tâche confiée à l'appelant figure à l'art. 5 du contrat liant les parties; il s'agit pour lui de "visiter... et de prospecter la clientèle en vue de leur proposer les produits du C.G.I." (C.G.L.), c'est à dire le crédit, la location avec option d'achat ou promesse de vente, le crédit-bail et les produits annexes; il n'est fait nulle mention de la possibilité

-cela est encore rappelé à l'art. 6 du contrat- de négocier ou de conclure des contrats, ce qui est l'essence même de travail d'un agent commercial ainsi que cela résulte de la définition donnée de

cette activité tant à l'art. L. 134-1 qu'à l'art. L. 110-1 du Code de Commerce; au reste, le contenu de son activité, qui consiste en une action de démarchage et de mise en relation s'apparente plus à une activité de courtage que d'agence commerciale, ce que confirme le faible taux de commission stipulé qui ne correspond en rien à celui d'un agent commercial,

4 ) la rupture du contrat, arrivé à son terme renouvelé conformément aux prescriptions contractuelle, n'ouvrait aucun droit à indemnité, l'intermédiaire en opérations de banque ne constituant aucune clientèle propre en dehors de son mandant;

L'appelante réclame par ailleurs le rejet de la demande adverse en paiement d'une provision de 100.000 francs au titre de commissions prétendûment impayées, en raison du fait d'une part que la preuve d'une quelconque production de sa part auprès de deux garages particuliers n'est pas rapportée, d'autre part que TOYOTA avait créer sa propre société financière et ne concluait dès lors plus de contrats de financement pour la vente de ses véhicules qu'avec cette dernière;

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où il serait admis que la profession d'intermédiaire en opérations de banque entre dans le champ d'application des agents commerciaux, elle demande que l'indemnité allouée à l'intimé soit réduite de manière substantielle; elle soutient en effet que cette indemnité doit s'évaluer en fonction du préjudice réellement subi, au cas d'espèce modique puisque Patrick X... a retrouvé un travail dans une société de crédit concurrente à peine trois mois après la rupture du contrat les liant;

Enfin et en tout état de cause, elle sollicite l'allocation de la somme de 20.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

De son côté, Patrick X... conclut à la confirmation du Jugement

querellé, sauf en ce qu'il a écarté sa demande de provision de commissions;

Pour conforter sa position, il fait valoir, outre les motifs retenus par les premiers Juges, l'argumentation suivante:

1 ) l'art. 1er de la Loi du 25/06/91 n'exclut de son champ d'application que les professions régies par des dispositions législatives particulières parmi lesquelles ne se rangent pas les agents commerciaux agissant en qualité de mandataires intermédiaires en opérations de banque,

2 ) la Loi bancaire du 24/01/84 ne constitue pas un statut particulier pour la mission d'un agent commercial en matière bancaire mais se borne à rappeler les règles s'appliquant à toute personne appelée à pratiquer des opérations de banque,

3 ) le statut d'agent commercial n'est exclu par aucun des textes précités,

4 ) les termes et l'économie du contrat liant les parties, notamment les art. 1, 5 et 6, démontrent qu'il s'agit bien d'un mandat d'agent commercial, le fait qu'il ne dispose pas du pouvoir d'accepter ou de refuser les demandes de financement qu'il recueille étant le résultat de la volonté contractuelle des parties qui peuvent organiser leurs relations comme elles l'entendent dès lors que, comme c'est ici le cas, aucune disposition d'ordre public ne leur impose d'agir différemment,

5 ) le contrat d'agrément "TELEFI" conclu avec l'appelante le 21/12/93 met à sa charge la responsabilité financière d'avoir à régler au C.G.I. le montant du financement consenti, les frais et agios en cas d'inobservation de certaines obligations énumérées, ce qui ne se conçoit que dans la situation d'indépendance que confère le statut d'agent commercial,

6 ) le contrat conclu le 01/10/93 étant un contrat d'agent

commercial, les dispositions d'ordre public de la Loi du 25/06/91 s'appliquent en sorte que les dispositions lui faisant échec sont réputées non écrites, spécialement celle relative à l'absence d'indemnités de rupture, ce qui rend sans portée la référence adverse à l'art. 1134 du Code Civil,

7 ) le contrat précité, qui décrit les activités qu'il est supposé accomplir, comporte la location (avec option d'achat) et la vente de produits financiers, lesquels correspondent aux activités énumérées à l'art. L. 134-1 du Code de Commerce; en outre, il n'est pas constesté qu'il a parfaitement accompli sa mission de négociation et d'intermédiaire au bénéfice de son mandant en créant et développant largement son secteur d'intervention,

8 ) le mandat d'intérêt commun consenti comporte des obligations générales s'appliquant à tout agent commercial et des obligations spéciales à certains agents commerciaux intervenant dans le domaine économique particulier des opérations de banque,

9 ) l'agent commercial, privé des revenus de la clientèle qu'il a constitué par son mandant, a droit à une indemnisation qui a été évaluée justement par les premiers Juges conformément à une Jurisprudence massive et univoque,

10 ) pas plus que précédemment, l'appelante ne produit la moindre pièce relative aux indemnités de l'année 1998 concernant deux garages particuliers et la marque TOYOTA;

Il demande en conséquence la réformation de la décision attaquée sur cette dernière question et l'allocation une somme provisionnelle de 100.000 francs;

Enfin, il sollicite l'octroi de la somme de 20.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le statut de Patrick X...

L'alinea 2 de l'art. 1er de la Loi du 25/06/91 exclut de son champ d'application les agents dont la mission de représentation s'exerce dans le cadre d'activités économiques qui font l'objet, en ce qui concerne cette mission, de dispositions législatives particulières;

Or, la mission accomplie par l'intimé, telle qu'elle est décrite aux termes des deux contrats successivement conclus entre parties, correspond très exactement à celle d'un intermédiaire en opérations de banque, activité se définissant comme le fait de mettre habituellement en rapport des parties intéressées à la conclusion d'une opération de banque, profession réglementée par des dispositions législatives particulières aux art. 65 à 71 de la Loi du 24/01/84;

Il apparait à l'examen de ces articles que la profession en question est exercée en vertu d'un mandant délivré par l'établissement de crédit;

A la lecture des contrats liant les parties, il apparait que celles-ci ont au surplus entendues se placer sur le terrain de la réglementation spécifique aux intermédiaires en opérations de banque:

d'une part, ces contrats comportent deux intitulés: "Agent privilégié d'AGEN" et non agent commercial; "mandat d'intermédiaire en opération de banque"; d'autre part leur contenu fait expressément référence à la Loi n 84-46 du 24/01/84 (page 1 où il est indiqué que le contrat est conclu conformément à ce texte), à la notion de mandat sous le couvert duquel l'intermédiaire en opération de banque doit agir (page 1), à l'art. 71 de la Loi bancaire qui impose pour l'exercice de cette profession de ne pas tomber sous le coup des dispositions de l'art. 13 de ladite Loi (page 2), à la nature et aux conditions des opérations que l'intermédiaire est habilité à accomplir (page 2

paragraphe 3, page 3 paragraphe 5, pages 4 et suivantes), à l'absence de toute indemnité à l'occasion de la résiliation du contrat mettant fin au mandat;

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la profession effectivement exercée par Patrick X... est celle d'un intermédiaire en opération de banque, profession régie par des dispositions législatives particulières et en conséquence, de ce fait, exclus du champ d'application de la Loi du 25/06/91 relative aux agents commerciaux;

Ne pouvant revendiquer le statut des agents commerciaux, l'intimé ne peut prétendre à l'allocation d'une quelconque indemnité;

Il faut en conséquence entrer en voie de réformation;

Sur la demande de provision sur commissions

Patrick X... a été informé par lettre recommandée en date du 24/10/97 par C.G.L. S.A. de la modification des rapports commerciaux intervenus avec la société TOYOTA, modification ayant un impact sur ses rémunérations mais ne l'en privant pas totalement;

A partir de là, il appartenait à l'intimé de démontrer ou d'apporter un commencement de preuve de l'existence d'opérations réalisées grâce à son intervention de nature à générer un commissionnement;

Tel n'est pas le cas, son dossier étant à cet égard d'une totale vacuité, la copie d'une fiche de visite en date du 09/01/98 établie par lui -nul ne peut se faire une preuve à soi-même- mais dont rien ne démontre qu'elle ait seulement été faxée ne pouvant suppléer sa carence;

Il n'y a en conséquence pas lieu à allocation de la provision réclamée;

Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens

L'équité et la situation économique ne commandent pas d'allouer à l'une ou l'autre partie le remboursement des sommes exposées pour la

défense de leurs intérêts;

Dès lors, leurs demandes au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile doivent être rejetées;

Les dépens de première instance et d'appel doivent être supportés par l'intimé qui succombe; PAR CES MOTIFS LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la Loi,

Réforme la décision déférée,

Dit que la profession d'intermédiaire en opérations de banque exercée par Patrick X... n'entre pas dans le champ d'application du statut régissant les relations entre les agents commerciaux et leurs mandants,

Déboute Patrick X... de ses prétentions,

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne Patrick X... aux dépens de première instance et d'appel,

Autorise les Avoués de la cause à recouvrer directement ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision. LE GREFFIER LE PRESIDENT D.SALEY M. FOURCHERAUD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Numéro d'arrêt : 00/01310
Date de la décision : 11/03/2002

Analyses

BANQUE - Personnel - CONTRAT DE TRAVAIL.

L'alinéa 2 de l'article 1er de la loi du 25 juin 1991 exclut de son champ d'application les agents dont la mission de représentation s'exerce dans le cadre d'activités économiques qui font l'objet, en ce qui concerne cette mission, de dispositions législatives particulières. La mission accomplie par l'intimé, telle qu'elle est décrite aux termes des deux contrats successivement conclus entre les parties, correspond très exactement à celle d'un intermédiaire en opérations de banque, activité se définissant comme le fait de mettre habituellement en rapport des parties intéressées à la conclusion d'une opération de banque, profession réglementée par des dispositions législatives particulières aux articles 65 à 71 de la loi du 24 janvier 1984. Il apparaît, à l'examen de ces articles, que la profession en question est exercée en vertu d'un mandat délivré par l'établissement de crédit. A la lecture des contrats liant les parties, il apparaît que celles-ci ont au surplus entendu se placer sur le terrain de la réglementation spécifique aux intermédiaires en opérations de banque : d'une part, ces contrats comportent deux intitulés : "agent privilégié" et non agent commercial et : "mandat d'intermédiaire en opération de banque" ; d'autre part, leur contenu fait expressément référence à la loi du 24 janvier 1984, à la notion de mandat sous le couvert duquel l'intermédiaire en opération de banque doit agir, à l'article 71 de la loi bancaire qui impose pour l'exercice de cette profession de ne pas tomber sous le coup des dispositions de l'article 13 de ladite loi, à la nature et aux conditions des opérations que l'intermédiaire est habilité à accomplir, à l'absence de toute indemnité à l'occasion de la ré- siliation du contrat mettant fin au mandat. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la profession effectivement exercée par l'intimé est celle d'un intermédiaire en opération de banque, profession régie par des dispositions législatives particulières et,

en conséquence, de ce fait, exclue du champ d'application de la loi du 25 juin 1991 relative aux agents commerciaux. Ne pouvant revendiquer le statut des agents commerciaux, l'intimé ne peut préten- dre à l'allocation d'une quelconque indemnité de rupture de contrat arrivé à son terme


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2002-03-11;00.01310 ?
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