DU 29 Janvier 2002 ------------------------- M.F.B
Consorts X... Y.../ S.A. CREDIT LYONNAIS, Thierry X... RG N : 99/00102 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du vingt neuf Janvier deux mille deux, par Monsieur LOUISET, Conseiller, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : Monsieur Benoît Jean Marie X... né le 05 Octobre 1967 à AUCH (32000) Mademoiselle Stéphanie Christine Martine X... née le 04 Juin 1972 à AUCH (32000) Z... ensemble "Château d'Antras " 32360 JEGUN agissant en qualité d'héritiers de leur mère Madame Madeleine X... décédée le 9 avril 2000 représentés par Me Jacques VIMONT, avouéassistés de Me THALAMAS, avocat APPELANTS d'un jugement du Tribunal d'Instance d'AUCH en date du 23 Novembre 1998 D'une part, ET : S.A. CREDIT LYONNAIS pris en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège 18, rue de la République 69002 LYON représenté par Me Philippe BRUNET, avoué assisté de Me Jean-Luc MARCHI, avocat Monsieur Thierry X... Z... "au Pavillon" 32360 ANTRAS ASSIGNE EN REPRISE d'INSTANCE N'ayant pas constitué avoué INTIMES D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 02 Octobre 2001, devant Monsieur MILHET, Président de Chambre, Messieurs LOUISET, Conseiller rédacteur et ROS, Conseiller, assistés de Monique FOUYSSAC, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
Attendu que Madeleine A... veuve X... a régulièrement relevé appel d'un jugement rendu le 23 novembre 1998 par le Tribunal d'instance d'Auch qui l'a débouté de ses demandes et condamnée aux dépens;
Attendu que l'appelante est décédée le 9 avril 2000 ;
Attendu que Benoît X... et Stéphanie X... demandent à la Cour :
- leur donner acte de leur reprise d'instance en qualité d'héritiers de leur mère décédée,
- de réformer le jugement entrepris,
- sur le fondement de l'article L 311-33 du Code de la consommation, - de prononcer la déchéance du droit aux intérêts sur les sommes prêtées par le Crédit Lyonnais à Madeleine A... veuve X... selon convention en date du 12 août 1992,
- conséquemment,
- de condamner le Crédit Lyonnais à rembourser à la succession de veuve X... la somme de 108.470,74 F assortie des intérêts au taux légal à compter de son versement effectif,
- de condamner le Crédit Lyonnais à une somme de 10.000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC ;
Attendu que le Crédit Lyonnais prie la Cour:
- à titre principal, de confirmer le jugement déféré,
- subsidiairement, de déclarer forclose l'action de veuve X...
reprise par ses héritiers,
- de condamner en toute hypothèse ces derniers à lui verser une indemnité de 6.000F sur le fondement de l'article 700 du NCPC ;
Attendu que Thierry X..., troisième héritier de veuve X..., assigné en reprise d'instance par acte d'huissier du 30 septembre 2000, n'a pas constitué avoué; que cependant, l'assignation ayant été délivrée à sa personne, l'arrêt sera contradictoire ; SUR CE ;
Attendu que, bien que se référant pour plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des fins et moyens des parties, aux énonciations du jugement querellé et aux conclusions régulièrement échangées, la Cour rappellera seulement que:
- selon offre préalable du 12 août 1992, le Crédit Lyonnais a accordé à veuve X... une ouverture de découvert en compte avec un maximum autorisé de 180.000 F pour une durée de 8 ans,
- veuve X... a accepté cette offre préalable à la même date et a offert en garantie un natissement sur des titres d'indemnisation de rapatrié d'outre-mer,
- par acte d'huissier du 18 mars 1998, veuve X... a fait assigner le Crédit Lyonnais devant le Tribunal d'instance d'Auch pour voir :
* constater la déchéance du droit aux intérêts du chef du Crédit Lyonnais au titre de l'ouverture de découvert en compte qui lui avait été consentie, suivant offre du 12 août 1992,
- [* condamner le Crédit Lyonnais au remboursement de la somme de 108.470,74F,correspondant aux intérêts indûment versés, assortie de l'intérêt au taux légal à compter de leur versement effectif,
*] condamner le Crédit Lyonnais au paiement d'une somme de 50.000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC,
- le jugement dont appel a été rendu dans ces conditions le 23 novembre 1998; sur le droit applicable au prêt
Attendu que les appelants soutiennent que les parties ont eu la volonté de soumettre le contrat de prêt aux dispositions d'ordre public régissant les crédits à la consommation ; qu'ils exposent en particulier que :
- il ressort de l'examen du contrat en cause que celui-ci a été rédigé conformément au modèle n° 4 "Contrat de découvert en compte" annexé au décret n° 78 - 509 du 24 mars 1978 pris pour l'application des articles 5 et 12 de la loi n° 78 - 22 du 10 janvier 1978,
- il convient de rappeler que pour être régulière, une offre préalable de crédit à la consommation doit être établie "selon l'un des modèles types fixés par le Comité de Réglementation Bancaire, après consultation du Conseil National de la Consommation" (article L. 311 - 13 du code de la consommation,
- l'article L. 311 - 6 du même code ajoute que "l'offre préalable prévue à l'article L. 311 - 8 comprend des indications figurant dans celui des modèles types annexés au présent code qui correspond à l'opération de crédit.",
- en outre, il apparaît que plusieurs des clauses dudit contrat se réfèrent de manière explicite ou implicite à la loi n° 78 - 22 du 10 janvier 1978,
- en effet, en premier lieu, les parties n'ont pas conclu directement un contrat de prêt mais le Crédit Lyonnais a préalablement saisie veuve X... d'une offre préalable de découvert en compte conformément aux articles 5 et suivants de la loi susvisée,
- en second lieu, le contrat mentionne qu'il est valable 15 jours,
- en troisième lieu, l'article IV de la convention intitulé "Cette offre peut devenir votre contrat de crédit dans les conditions suivantes :" organise précisément les conditions dans lesquelles l'offre préalable peut être acceptée, l'acceptation rétractée, le contrat de prêt définitivement conclu et ce, dans le strict respect des dispositions relatives au crédit à la consommation : délai de rétractation de sept jours, mention de l'exercice du droit de rétractation, précision que l'exercice du droit de rétractation ne donne pas lieu à un enregistrement sur fichier, mention de ce que jusqu'à conclusion définitive du contrat, le bénéficiaire de l'offre n'a rien à payer au prêteur...",
- en quatrième lieu, il convient de relever à l'article II de la convention la phrase: "L'utilisation de lettres de change ou billets à ordre est interdite (article 17 de la loi n° 78.22 du décret du 10/01/1978)",
- en cinquième lieu, l'article VI relatif à la compétence
contentieuse dispose : "Le Tribunal d'instance connaît des litiges nés de l'application de la loi 78 - 22 du 10/01/1978. Les actions engagées devant lui doivent l'être dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance. Elles sont portées soit devant le Tribunal où demeure le défendeur en justice soit devant celui du lieu de l'exécution de la prestation de services.",
- en sixième lieu, l'article VII prescrit qu'à l'occasion de son acceptation, l'emprunteur "reconnaî(t) rester en possession d'un exemplaire de cette offre doté d'un formulaire détachable de rétractation.",
Attendu qu'en réplique, le Crédit Lyonnais fait valoir que cette ouverture de découvert en compte n'est pas soumise à la loi de 1978, reprise dans le Code de la consommation, qui exclut de son champ d'application les offres de crédit supérieures à 140.000F et à une année ;
Attendu que le prêt dont s'agit était d'une durée fixe de 8 ans et d'un montant de 180.000 F ;
Qu'il ne rentre donc pas dans le champ d'application de la loi n° 78 - 22 du 10 janvier 1978, reprise dans le Code de la consommation ;
Attendu certes que la convention signée entre les parties est conforme au modèle type 4 annexé au décret n° 78 - 509 du 24 mars 1978 pris pour l'application des articles 5 et 12 de la loi n° 78 - 22 du 10 janvier 1978 ;
Qu'aucune disposition n'interdit aux parties de soumettre
volontairement leur accord aux règles édictées par ladite loi, même si celui-ci n'entre pas d'office dans son champ d'application au regard du montant du crédit et de sa durée ;
Attendu cependant que le contrat litigieux ne précise pas clairement qu'il était soumis aux dispositions de la loi n° 78 - 22 du 10 janvier 1978 :
Qu'en outre, le premier juge a pertinemment retenu :
- que la seule utilisation du modèle susvisé ne constituait pas la preuve de la volonté commune des parties de se soumettre à une loi contraignante qui serait normalement inapplicable dans leurs rapports contractuels,
- qu'en outre, en convenant d'une durée de 8 ans, les parties ont entendu déroger aux dispositions de la loi de 1978, puisque celle-ci limite à un an renouvelable la durée de l'ouverture de crédit ;
Attendu qu'ainsi, la volonté commune des parties de se soumettre aux dispositions d'ordre public de la loi n° 78 - 22 du 10 janvier 1978 n'est pas claire et non-équivoque ;
Attendu, dans ces conditions, que le Tribunal en a déduit , à juste titre, que l'article 5 alinéa 2 de ladite loi, devenu l'article L 311-9 alinéa 2 du Code de la consommation, n'avait pas vocation à s'appliquer en l'espèce et que la demande de veuve B... devait, en conséquence, être rejetée, décision qui doit être confirmée ; sur les frais irrépétibles
Attendu qu'il n'existe pas en la cause de considération d'équité permettant de faire application des dispositions de l'article 700 du NCPC ; sur les dépens
Attendu que la partie qui succombe doit supporter les dépens; PAR CES MOTIFS LA COUR
Statuant par arrêt contradictoire,
Rejette l'appel,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne Benoît X... et Stéphanie X... aux entiers dépens d'appel, avec la possibilité pour Maître BRUNET, avoué à la Cour, de les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du NCPC. Ainsi fait les jour, mois et an susdits. LE GREFFIER LE PRESIDENT M. FOUYSSAC A. MILHET