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28/11/2001 | FRANCE | N°00/01337

France | France, Cour d'appel d'agen, 28 novembre 2001, 00/01337


DU 28 Novembre 2001 ------------------------- M.F.B

GROUPEMENT AGRICOLE GAEC DE HUGUENOT C/ SCP DENJEAN - ETELIN RG N :

00/01337 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du vingt huit Novembre deux mille un, par Monsieur LEBREUIL, Président de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : GROUPEMENT AGRICOLE GAEC DE HUGUENOT prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège "huguenot" 82300 CAUSSADE représenté par Me Philippe BRUNET, avoué assisté

de la SCP LARROQUE - REY, avocats APPELANT d'un jugement du Tribunal de G...

DU 28 Novembre 2001 ------------------------- M.F.B

GROUPEMENT AGRICOLE GAEC DE HUGUENOT C/ SCP DENJEAN - ETELIN RG N :

00/01337 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du vingt huit Novembre deux mille un, par Monsieur LEBREUIL, Président de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : GROUPEMENT AGRICOLE GAEC DE HUGUENOT prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège "huguenot" 82300 CAUSSADE représenté par Me Philippe BRUNET, avoué assisté de la SCP LARROQUE - REY, avocats APPELANT d'un jugement du Tribunal de Grande Instance d'AUCH en date du 12 Juillet 2000 D'une part, ET : SCP d'AVOCATS DENJEAN - ETELIN prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège 20 rue Sainte URSULE 31000 TOULOUSE représentée par Me TANDONNET, avoué assistée de Me Jean-Claude PRIM, avocat INTIMEE D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 24 Octobre 2001, devant Monsieur LEBREUIL, Président de Chambre, Messieurs X... et CERTNER, Conseillers, assistés de Monique FOUYSSAC, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.

Statuant sur l'appel dont la régularité n'est pas contestée, interjeté par le GAEC de HUGUENOT d'un jugement en date du 12 juillet 2000 par lequel le tribunal de grande instance d'Auch l'a débouté de toutes ses demandes à l'encontre de la SCP d'avocats DENJEAN ETELIN ; Attendu que les faits de la cause ont été exactement relatés par les

premiers juges en des énonciations auxquelles la cour se réfère expressément et qu'il suffit de rappeler que la SCP DENJEAN-ETELIN qui était chargée de la défense des intérêts du GAEC de HUGUENOT devant le juge de l'expropriation n'a pas déposé dans le délai réglementaire le mémoire d'appel au greffe de la Cour ; qu'elle ne conteste pas sa responsabilité mais que le Tribunal a néanmoins débouté le GAEC de toutes ses demandes à son encontre au motif que, si elle avait été valablement saisie, la Cour d'appel de Toulouse aurait de toute façon rejeté ses prétentions, tant en ce qui concerne l'indemnité d'éviction qu'elle réclamait que pour ce qui est des postes préjudice d'exploitation ou dépréciation ; que la Cour avait en effet rejeté les appels formés par d'autres expropriés pour les mêmes motifs dans le cadre de la même opération et que pour le surplus le fait que le demandeur ait été privé de la voie de la cassation était insuffisant pour caractériser son préjudice ;

Attendu que l'appelant fait grief au premier juge de s'être ainsi prononcé alors pourtant d'une part que son avocat avait manqué à son devoir de conseil en lui conseillant de faire appel alors que l'appel était manifestement voué à l'échec et que d'autre part il l'avait privé d'une chance de gagner son procès ; qu'en effet chaque cas est particulier et que la Cour d'appel de Toulouse, dans une autre composition, aurait pu ne pas appliquer sa jurisprudence; que de plus la privation d'une cassation éventuelle suffit à caractériser la perte de chance ;

qu'il demande en conséquence à la Cour de réformer la décision déférée, et de condamner la SCP DENJEAN-ETELIN à lui payer la somme

de 933.161 francs à titre de dommages-intérêts et celle de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que la SCP DENJEAN-ETELIN intimée, conclut au contraire à la confirmation pure et simple de la décision dont appel et à la condamnation de l'appelant au paiement de la somme de 8.000 francs sur le fondement de l'article 700 susvisé du nouveau Code de procédure civile ;

qu'elle fait valoir pour l'essentiel

- que lorsqu'elle a conseillé à son client de faire appel la jurisprudence ne lui était pas défavorable et que c'est postérieurement qu'elle l'est devenue ; qu'elle n'a donc pas manqué à son devoir de conseil ;

- qu'il et certain, en l'état de sa jurisprudence actuelle, que la Cour aurait confirmé le jugement que ce soit sur l'indemnité d'éviction ou sur l'indemnité pour préjudice d'exploitation ou de marge brute ou encore sur la question du déséquilibre d'exploitation ;

SUR QUOI

Attendu qu'il ne peut pas être reproché à l'intimée d'avoir manqué à son devoir de conseil dès lors qu'au moment où l'appel a été interjeté la jurisprudence de la Cour d'appel de Toulouse n'était pas défavorable à son client ;

Attendu qu'il est en revanche certain que la faute commise par l'avocat a privé le GAEC de HUGUENOT d'une chance de gagner son procès ; que le cas de chaque exproprié est singulier et qu'aucun plaideur n'est jamais certain de l'accueil qui sera réservé à son argumentation; que chaque procès contient une part d'aléa et qu'il n'est pas certain, au cas particulier, que la Cour d'appel de Toulouse, siégeant, le cas échéant, dans une autre composition, aurait rejeté les prétentions du groupement ;

qu'il est en outre constant qu'en privant son client de la voie de l'appel, la SCP DENJEAN ETELIN l'a également privé de la voie du pourvoi en cassation ; que la privation d'une voie de recours génère nécessairement au profit du plaideur un préjudice qui doit être réparé et que ce n'est pas parce qu' aucun pourvoi n'a été formé par les autres expropriés que celui dont a été privé le GAEC de HUGUENOT n'aurait eu sur aucune chance d'aboutir ;

Attendu, sur le préjudice, qu'en cas de perte de chance, la réparation du dommage ne peut être que partielle et qu'elle correspond à une fraction des différents préjudices subis ; qu'au cas particulier il convient de l'évaluer à la somme de 20.000 francs ;

Attendu que la SCP DENJEAN- ETELIN qui succombe en toutes ses prétentions doit être condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer au GAEC de HUGUENOT la somme de 8.000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; PAR CES MOTIFS LA COUR

En la forme, reçoit l'appel jugé régulier,

Et au fond,

Infirme la décision déférée, et statuant à nouveau ,

Condamne la SCP d'avocats DENJEAN-ETELIN à payer au GAEC de HUGUENOT la somme de 20.000 francs( vingt mille Francs)(soit 3 048,98 Euros) à titre de dommages et intérêts et celle de 8.000 francs( huit mille Francs)(soit 1 219,59 Euros) par application de l'article 700 modifié du nouveau Code de procédure civile ;

La condamne en outre aux dépens de première instance et d'appel et autorise Maître BRUNET, avoué, à recouvrer directement contre elle ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante ;

Rejette toute autre demande contraire ou plus ample des parties.

Le président et le greffier ont signé la minute de l'arrêt. LE GREFFIER LE PRESIDENT M. FOUYSSAC M. LEBREUIL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Numéro d'arrêt : 00/01337
Date de la décision : 28/11/2001

Analyses

AVOCAT - Responsabilité - Dommage - Réparation - Evaluation du préjudice - Perte d'une chance - Action en justice

Il est certain que la faute commise par l'avocat - défaut de dépôt dans le délai réglementaire du mémoire d'appel au greffe de la Cour - a privé l'appelant d'une chance de gagner son procès. Le cas de chaque exproprié est singulier et aucun plaideur n'est jamais certain de l'accueil qui sera réservé à son argumentation. Il est en outre constant qu'en privant son client de la voie de l'appel, la société intimée l'a également privé de la voie du pourvoi en cassation. La privation d'une voie de recours génère nécessairement, au profit du plaideur, un préjudice qui doit être réparé et ce n'est pas parce qu'aucun pourvoi n'a été formé par les autre expropriés que celui dont a été privé l'appelant n'aurait eu aucune chance d'aboutir. Dans le cas d'une perte de chance, la réparation du dommage ne peut être que partielle et elle correspond à une fraction des différents préjudices subis


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2001-11-28;00.01337 ?
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