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20/03/2024 | FRANCE | N°23TL02480

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 20 mars 2024, 23TL02480


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société civile immobilière PACA Immo a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de condamner la société Electricité de France à lui verser, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 131 159,35 euros.



Par une ordonnance n° 2305428 du 2 octobre 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

:



Par une requête sommaire enregistrée le 20 octobre 2023 et complétée le 19 décembre suivant, la s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière PACA Immo a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de condamner la société Electricité de France à lui verser, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 131 159,35 euros.

Par une ordonnance n° 2305428 du 2 octobre 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire enregistrée le 20 octobre 2023 et complétée le 19 décembre suivant, la société PACA Immo, représentée par Me Pomares, demande au juge des référés de la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de condamner la société Electricité de France à lui verser, à titre provisionnel, la somme de 131 159,35 euros ;

3°) de mettre à la charge de la société Electricité de France la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative est bien compétente pour connaître du litige dès lors que, contrairement à ce qui est jugé dans l'ordonnance attaquée, les contrats pour l'achat d'électricité entre les particuliers et la société Electricité de France sont des contrats administratifs par détermination de la loi, en l'espèce l'article L. 314-7 du code de l'énergie ;

- la somme de 131 159,35 euros, qui correspond au montant de la vente de l'électricité qu'elle a produit en décembre 2021 et janvier 2022 conformément au tarif convenu dans le contrat d'achat BTA0167342 signé en 2012, lui est due par la société Electricité de France dès lors que, dans sa décision du 27 janvier 2023, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêté du 26 octobre 2021 qui mettait en œuvre le décret n° 2021-1385 du même jour relatif à la révision de certains contrats de soutien à la production d'électricité d'origine photovoltaïque prévue par l'article 225 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 et prévoyait un prix d'achat plus faible de l'électricité produite ;

- cette somme est également due dès lors qu'elle a demandé le 29 novembre 2021 la mise en œuvre de la clause de sauvegarde qui est prévue au deuxième alinéa de l'article 225 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 lorsque les nouveaux tarifs sont de nature à compromettre la viabilité économique du producteur, la mise en œuvre de cette clause entraînant la suspension de la réduction de tarif en application de l'article 7 du décret du 26 octobre 2021.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2024, la société Electricité de France, représentée par Me Cabanes et Me Perche de l'association d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle Baker et McKenzie, demande au juge des référés de la cour :

- de rejeter la requête ;

- de mettre à la charge de la société PACA Immo la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, la demande de la société PACA Immo est irrecevable, faute d'avoir été précédée de la procédure de conciliation obligatoire préalable prévue par les dispositions de l'article XIII des conditions générales applicables au contrat d'achat de l'électricité la liant avec cette société ;

- à titre subsidiaire, la créance de la société PACA Immo présente un caractère sérieusement contestable dès lors qu'elle est tenue de se conformer à la décision du ministre chargé de l'énergie de n'appliquer à nouveau les tarifs " historiques " plus élevés de l'électricité qu'à compter du 27 janvier 2023, date de la décision du Conseil d'Etat, et de maintenir les tarifs inférieurs pour la période antérieure ;

- cette créance est également sérieusement contestable dès lors que la société PACA Immo n'établit pas la réalité de son allégation selon laquelle elle aurait demandé la mise en œuvre de la clause de sauvegarde en saisissant la Commission de régulation de l'énergie.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'énergie ;

- la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 ;

- le décret n° 2021-1385 du 26 octobre 2021 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la cour a, par une décision du 4 janvier 2023, désigné M. Alain Barthez, président de la 1ère chambre, pour statuer sur les appels formés devant la cour contre les décisions rendues par le juge des référés.

Considérant ce qui suit :

1. La société PACA Immo est propriétaire d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil située à Saint-Martin-de-Crau (Bouches-du-Rhône) pour laquelle elle bénéficie d'une obligation d'achat de l'électricité par la société Electricité de France. Elle a demandé à cette dernière de lui payer la somme de 52 716,71 euros correspondant à la valeur de l'électricité produite au mois de décembre 2021 facturée au tarif " historique " prévu dans le contrat d'achat de 2012 ainsi que la somme de 78 442,64 euros correspondant à la valeur de l'électricité produite au mois de janvier 2022 facturée selon le même tarif. N'ayant pu obtenir le paiement de ces sommes, elle a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative afin qu'il condamne la société Electricité de France à lui verser une provision de 131 159,35 euros. Elle fait à présent appel de l'ordonnance du 20 octobre 2023 par laquelle le juge de référés a rejeté sa demande.

Sur la régularité de l'ordonnance :

2. Aux termes de l'article L. 314-7 du code de l'énergie : " Les contrats conclus en application de la présente section par Electricité de France et les entreprises locales de distribution sont des contrats administratifs qui ne sont conclus et qui n'engagent les parties qu'à compter de leur signature (...) ". Ainsi, contrairement à ce qui est mentionné dans l'ordonnance attaqué, le contrat d'achat de l'électricité liant la société PACA Immo et la société Electricité de France est un contrat administratif. Toutefois, bien qu'ayant indiqué qu'il ne résultait pas de l'instruction que ce contrat puisse être qualifié de contrat administratif, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier n'en a pas déduit que la juridiction administrative n'était pas compétente pour connaître du litige mais seulement que la créance dont la société PACA Immo se prétendait titulaire présentait, pour ce motif, un caractère sérieusement contestable. Par voie de conséquence, cette société n'est pas fondée à soutenir que l'ordonnance serait irrégulière dès lors qu'elle aurait jugé à tort que la juridiction administrative n'était pas compétente pour connaître du litige.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance :

3. D'une part, aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". D'autre part, le contrat d'achat BTA0167342 en litige dans la présente instance prévoit que sont applicables les conditions générales " PHOTO2010V1 ". Aux termes de l'article XIII de ces conditions générales, relatif à la conciliation : " Les parties s'efforcent de résoudre à l'amiable tout différend relatif à la validité, l'interprétation ou l'exécution auquel donnerait lieu le présent contrat. Tout différend doit être dûment notifié par la partie requérante à l'autre partie par lettre recommandée avec accusé de réception et en se référant expressément au présent article. Les parties disposent alors d'un délai de 60 jours calendaires pour tenter de régler le différend à l'amiable à compter de la réception de ladite notification. A défaut d'un règlement amiable à l'expiration du délai susvisé, la partie la plus diligente pourra saisir la juridiction compétente pour statuer sur ce différend ".

4. Les stipulations précitées des conditions générales du contrat d'achat prévoient la mise en œuvre d'une procédure de recours préalable avant la saisine du juge administratif. L'existence même de ce recours prévu au contrat fait obstacle à ce qu'une des parties saisisse directement le juge administratif, y compris le juge statuant en référé. Cependant, ce dernier peut être saisi dès lors qu'une des parties a engagé la procédure de recours préalable, sans attendre que celle-ci soit parvenue à son terme.

5. En l'espèce, la société PACA Immo a présenté, en exécution selon elle du contrat d'achat la liant à la société Electricité de France, les factures n° 22 et n° 23 correspondant à l'électricité produite, respectivement en décembre 2021 et en janvier 2022, pour lesquelles cette dernière société lui a notifié son refus de procéder au paiement par courriel du 23 mars 2023. Ainsi, le présent litige est relatif à l'exécution du contrat d'achat et les dispositions de l'article XIII précédemment mentionnées ont donc vocation à s'appliquer. Or, à la suite de ce refus du 23 mars 2023, la société PACA Immo a envoyé à la société Electricité de France une lettre de mise en demeure de payer par courrier du 12 juin 2023 et cette lettre, qui ne se réfère pas à l'article XIII précédemment cité et du fait de son objet, ne peut être regardée comme le recours préalable à fin de conciliation prévu par ces dispositions. Ainsi, la société Electricité de France est fondée à soutenir que la demande de première instance est irrecevable, faute d'avoir engagé cette procédure de recours préalable avant d'avoir saisi la juridiction administrative.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société PACA Immo n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Electricité de France, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à la société PACA Immo au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société PACA Immo une somme à verser à la société Electricité de France au titre de ces mêmes frais.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de la société PACA Immo est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Electricité de France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société civile immobilière PACA Immo et à la société anonyme Electricité de France.

Fait à Toulouse, le 20 mars 2024.

Le juge des référés,

A. Barthez

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°23TL02480


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Numéro d'arrêt : 23TL02480
Date de la décision : 20/03/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-015 Procédure. - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. - Référé-provision.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : ABP AVOCATS CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-20;23tl02480 ?
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