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16/10/2023 | FRANCE | N°23TL01431

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 16 octobre 2023, 23TL01431


Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée le 16 février 2023, Mme C... A..., représentée par Me Sicot, avocat, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de désigner un expert pour procéder à la délimitation et au bornage des parcelles cadastrées section AH n° 243, n°244, AH n°693 et AH n°694 sises Puech du Four sur le territoire de la commune de Bédarieux.

Par une ordonnance n° 2300902 du 6 juin 2023, le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à cette experti

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Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée le 16 février 2023, Mme C... A..., représentée par Me Sicot, avocat, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de désigner un expert pour procéder à la délimitation et au bornage des parcelles cadastrées section AH n° 243, n°244, AH n°693 et AH n°694 sises Puech du Four sur le territoire de la commune de Bédarieux.

Par une ordonnance n° 2300902 du 6 juin 2023, le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à cette expertise pour les parcelles cadastrées section AH n°243, AH n° 244, AH N°693 et a confié ces missions à M. D..., géomètre-expert.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 juin 2023 et un mémoire enregistré le 13 octobre 2023, non communiqué, le département de l'Hérault, représenté par Me Rosier, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler l'ordonnance du 6 juin 2023 rendue par le tribunal administratif de Montpellier ;

2°) à titre subsidiaire, de le mettre hors de cause ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître d'une demande d'expertise relevant du domaine privé de la personne publique ;

- en l'absence de toute précision quant à la nature d'un éventuel litige au fond entre Mme A... et le département de l'Hérault, les conclusions à fin d'expertise de la première sont irrecevables ;

- il doit être mis hors de cause ;

- l'expertise est dépourvue de caractère utile.

Par un mémoire en date du 24 août 2023, l'office public de l'habitat Hérault Logement, représenté par Me Dubois, conclut à l'annulation de l'ordonnance du 6 juin 2023 du tribunal administratif de Montpellier, ou, à titre subsidiaire, à sa mise hors de cause, et à la mise à la charge de Mme A... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître d'une demande d'expertise relevant du domaine privé de la personne publique ;

- la demande d'expertise est dépourvue d'utilité, elle vise seulement à engager la responsabilité du géomètre-expert responsable du bornage de 2017 ;

- le bornage actuel s'oppose à ce qu'un bornage nouveau soit mis en œuvre ;

- il doit être mis hors de cause, dès lors que la parcelle AH n°693 visée par l'expertise n'existe plus, ayant été divisée en plusieurs parcelle dont il n'est pas propriétaire.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 23 août et le 8 septembre 2023, Mme A..., représentée par Me Sicot, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du département de l'Hérault de la somme de 2 000 euros.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par le département et l'office public n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., propriétaire en indivision des parcelles cadastrées section AH n° 243 et AH n° 244 sises sur la commune de Bédarieux (Hérault), a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de prescrire une expertise afin de déterminer la régularité du bornage opéré à l'initiative du département de l'Hérault et de la société Hérault Aménagement à la fin de l'année 2017 s'agissant de ces parcelles et des parcelles cadastrées AH n° 693 et AH n° 694. Par une ordonnance du 6 juin 2023, dont le département de l'Hérault relève appel, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a fait droit à cette expertise sauf en ce qui concerne la parcelle AH n° 694 sur laquelle il ne s'est pas prononcé et a confié ces missions à M. D..., géomètre-expert.

En ce qui concerne la compétence de la juridiction administrative :

2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence d'une décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction (...) ".

3. Avant tout procès et avant même que puisse être déterminée, eu égard aux parties éventuellement appelées en la cause principale, la compétence sur le fond du litige, et dès lors que ce dernier est de nature à relever, fût-ce pour partie, de l'ordre de juridiction auquel il appartient, le juge des référés a compétence pour ordonner une mesure d'instruction sans que soit en cause le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires. Il n'en est autrement que lorsqu'il est demandé au juge des référés d'ordonner une mesure d'instruction qui porte à titre exclusif sur un litige dont la connaissance au fond n'appartient manifestement pas à l'ordre de juridiction auquel il appartient.

4. Le département de l'Hérault et la société d'économie mixte Hérault aménagement ont initié une procédure de bornage concernant les parcelles AH n° 694 dont le département est propriétaire, AH n° 693 appartenant alors à la société d'économie mixte et AH n° 243 propriété d'une indivision comprenant Mme A... en vue de la réalisation de la zone d'aménagement concerté du Puech du Four à Bédarieux. Des procès-verbaux de bornage et un plan de bornage ont en conséquence été établis à la fin de l'année 2017 et au début de l'année 2018. Estimant que ces bornages avaient été réalisés à partir de documents comportant des erreurs, Mme A... a saisi le juge des référés du tribunal administratif, de manière concomitante d'ailleurs au tribunal judiciaire de Béziers, pour qu'un expert soit désigné afin notamment de procéder à la délimitation et au bornage des parcelles susmentionnées. Mme A..., qui n'avait au demeurant pas précisé devant le tribunal administratif le litige relevant de la juridiction administrative pour lequel serait utile la mesure d'expertise demandée, fait désormais valoir en appel la possibilité d'une éventuelle action contre le département concernant le domaine public de celui-ci ou subsidiairement concernant son domaine privé.

5. Aux termes de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l'usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu'en ce cas ils fassent l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public. ". Il ressort des pièces du dossier que la parcelle AH n° 694 n'est pas affectée à l'usage direct du public, n'ayant d'ailleurs fait l'objet d'aucun aménagement à cet effet. Même si cette parcelle est comprise dans une opération d'aménagement constituée par la zone d'aménagement concerté susmentionnée elle n'est pas affectée à un service public. Contrairement à ce que soutient Mme A..., elle fait ainsi partie du domaine privé du département. En se bornant ensuite à relever la compétence du juge administratif sur certains actes relatifs à la gestion du domaine privé des personnes publiques, Mme A..., dont le litige porte en réalité sur les conditions dans lesquelles se sont déroulées les opérations de bornage et sur leur résultat, ne justifie pas de la possibilité d'une instance devant le juge administratif. La parcelle AH n° 693, alors propriété de la société d'économie mixte Hérault aménagement, désormais divisée en parcelles cadastrées section AH n° 749 à 772 et appartenant à diverses personnes privées, n'appartenait pas plus au domaine public. En admettant même comme le soutient Mme A... que la parcelle AH n° 769 affectée à l'usage de voie de circulation fasse partie du domaine public, il ressort des plans produits par les parties qu'elle n'est pas en limite des parcelles de l'indivision dont elle séparée par des terrains privés et qu'en conséquence la question du bornage soulevée ne se pose pas pour elle. Les autres nouvelles parcelles n'appartiennent pas non plus au domaine public.

6. Aux termes de l'article L. 162-5 du code rural et de la pêche maritime " Les contestations relatives à la propriété et à la suppression des chemins et sentiers d'exploitation ainsi que les difficultés relatives aux travaux prévus à l'article L. 162-2 sont jugées par les tribunaux de l'ordre judiciaire. ". Si Mme A... fait aussi valoir en appel que la mesure d'expertise sera utile dans la perspective d'un litige portant sur la disparition d'un chemin d'exploitation permettant l'accès à sa parcelle, un tel litige relève en application des dispositions précitées de la seule compétence des juridictions judiciaires.

7. Il résulte de ce qui précède que la connaissance au fond du litige susmentionné en délimitation des parcelles n'appartient manifestement pas à la juridiction administrative. C'est donc à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier s'est prononcé pour ordonner la mesure d'expertise litigieuse. Il y a lieu par suite d'annuler l'ordonnance susvisée du 6 juin 2023 et de rejeter la demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur les frais liés au litige :

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le département de l'Hérault et l'office public Hérault Logement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions présentées par Mme A... sur le fondement des mêmes dispositions ne peuvent qu'être rejetées.

O R D O N N E :

Article 1er : L'ordonnance susvisée du 6 juin 2023 du tribunal administratif de Montpellier est annulée.

Article 2 : La demande d'expertise présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de Mme A... et de l'office public Hérault Logement tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée au département de l'Hérault, à l'office public Hérault Logement, à Mme C... A... et à M. B... D..., expert.

Fait à Toulouse, le 16 octobre 2023.

Le président,

J-F. MOUTTE

La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 23TL01431
Date de la décision : 16/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : RAMAHANDRIARIVELO - DUBOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-10-16;23tl01431 ?
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