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21/08/2023 | FRANCE | N°22TL22114

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 21 août 2023, 22TL22114


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, saisi sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à lui verser la somme provisionnelle de 1 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estimait avoir subi dans l'exercice de ses fonctions de brigadier-chef de police, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance

n°2201358 du 4 octobre 2022, le juge des référés du Tribunal administratif de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, saisi sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à lui verser la somme provisionnelle de 1 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estimait avoir subi dans l'exercice de ses fonctions de brigadier-chef de police, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n°2201358 du 4 octobre 2022, le juge des référés du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 octobre 2022, M. B... A..., représenté par Me Gimenez, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 4 octobre 2022 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros, à titre de provision, en réparation du préjudice moral subi en raison de l'outrage dont il a été victime dans le cadre de l'exercice de ses fonctions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a commis une erreur de droit et une erreur de fait en considérant que la créance est sérieusement contestable ;

- il a indubitablement été victime d'un préjudice moral en raison de l'outrage dont une manifestante s'est rendue coupable à son encontre devant un nombre très important de personnes ;

- il est parfaitement fondé à solliciter l'octroi d'une indemnité provisionnelle de 1 000 euros, juste appréciation de son préjudice moral au regard de l'humiliation subie.

Par son mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2023, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud conclut à son incompétence pour défendre les intérêts de l'Etat devant la cour administrative d'appel de Toulouse.

Il demande à la cour :

- de constater l'incompétence du préfet de zone de défense et de sécurité Sud pour défendre cette affaire devant elle ;

- de transmettre l'ensemble des pièces de la procédure à la DLPAJ, seule compétente dans ce contentieux.

Une mise en demeure de produire un mémoire en défense a été adressée, le 21 février 2023, au ministre de l'intérieur et des outre-mer, restée sans réponse.

Par une ordonnance du 24 mars 2023, la date de clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 25 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., brigadier-chef de police, a été victime dans l'exercice de ses fonctions, le 9 octobre 2021, d'un outrage sur personne dépositaire de l'autorité publique, de la part d'une manifestante lors d'une manifestation non déclarée qui s'est déroulée sur la voie publique le 9 octobre 2021. Par un courrier du 7 février 2022, M. A... a adressé à son administration une demande d'indemnisation de son préjudice en sollicitant le bénéfice de la protection fonctionnelle. Par une décision du 7 avril 2022, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud, d'une part, a accordé à M. A... le bénéfice de la protection fonctionnelle, d'autre part, a implicitement rejeté sa réclamation indemnitaire préalable. M. A... a alors demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à lui verser une provision d'un montant de 1 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estimait avoir subi du fait de l'outrage dont il a été victime. M. A... relève appel de l'ordonnance du 4 octobre 2022 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Sur la demande de provision :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Il résulte de ces dispositions que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état.

3. D'autre part, aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires alors applicable : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire. (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. (...)". Ces dispositions établissent à la charge de l'administration une obligation de protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d'intérêt général. Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé, mais aussi d'assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu'il a subis.

4. Il est constant que M. A... a été victime, le 9 octobre 2021, lors de l'exercice de ses fonctions, d'un outrage de la part d'une manifestante qui lui a adressé un doigt d'honneur devant ses collègues et les autres manifestants, et qu'il s'est vu accorder, suite à cet incident, le bénéfice de la protection fonctionnelle. Il en résulte que la protection fonctionnelle accordée par le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud le 7 avril 2022 entraîne une obligation de réparation à l'égard du requérant qui n'est pas sérieusement contestable. Le requérant a droit à la réparation adéquate du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de son outrage. Dans ces conditions, M. A... est fondé à soutenir avoir subi un préjudice moral qu'il incombe à l'Etat de réparer du fait de la protection fonctionnelle. Il suit de là que l'obligation dont se prévaut M. A... à l'encontre de l'Etat n'est pas sérieusement contestable, il y a lieu de fixer la provision à la somme demandée par M. A..., soit 1 000 euros.

5. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une provision de 1 000 euros.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, le versement à M. A... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

ORDONNE :

Article 1er : L'ordonnance n°2201358 du 4 octobre 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Nîmes est annulée.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. A... une provision de 1 000 euros.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud.

Fait à Toulouse, le 21 août 2023.

La juge d'appel des référés,

A. Geslan-Demaret

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

2

N°22TL22114


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 22TL22114
Date de la décision : 21/08/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-015 Procédure. - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. - Référé-provision.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : GIMENEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 27/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-08-21;22tl22114 ?
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