Vu la requête, enregistrée le 22 septembre 2005, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0410061/8 du 23 août 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 avril 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme X et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Paris ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le décret n° 95 ;304 portant publication de la convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision en date du 2 janvier 2006 par laquelle le Président de la Cour a délégué les pouvoirs qui lui sont attribués par les articles L. 776-1 et R. 222-33 du code de justice administrative à M. Moreau ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2006 :
- le rapport de M. Moreau, magistrat délégué,
- les observations de Me Cohen-Bacri pour Mme X,
- les conclusions de M. Coiffet, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée alors en vigueur : « Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 21 octobre 2003, de la décision du préfet de police du même jour lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant que si Mme X, qui s'est mariée le 8 mai 2001 avec un ressortissant français, fait valoir qu'elle n'a pas transgressé les obligations du mariage, qu'elle n'est pas responsable de la rupture de la vie commune, intervenue à l'initiative de son époux et que sa présence est indispensable en France pour défendre ses intérêts face à son époux dans le cadre de la procédure de divorce, elle ne peut soutenir que l'exécution de l'arrêté litigieux ferait obstacle à ce qu'elle puisse utilement défendre ses intérêts dans une procédure de divorce ; qu'une telle circonstance est sans incidence sur la légalité dudit arrêté ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions du séjour de Mme X en France, l'arrêté ait porté au droit de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a retenu ce moyen pour prononcer l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière du 7 avril 2004 pris à l'encontre de Mme X ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X devant le Tribunal administratif de Paris et devant la cour ;
Sur l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour :
Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 7 avril 2004 qui a prononcé sa reconduite à la frontière, Mme X excipe de l'illégalité de la décision du 21 octobre 2003 par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé un titre de séjour ; qu'à la suite de ce refus, Mme X a effectué un recours gracieux le 12 décembre 2003 qui a fait l'objet d'un rejet implicite et qui a dès lors, prorogé le délai contentieux jusqu'au 13 juin 2004, délai dans lequel elle a présenté un recours, enregistré au Tribunal administratif de Paris le 23 avril 2004, contre ledit arrêté ; que par conséquent, l'exception d'illégalité soulevée par Mme Touba est recevable ;
Considérant que M. Riou, signataire du refus de titre de séjour contesté, disposait, à la date d'intervention de celui-ci, d'une délégation de signature en vertu de l'arrêté n° 2003-15 000 du 2 janvier 2003 régulièrement publié le 7 janvier 2003 au Bulletin municipal officiel de la ville Paris lui donnant compétence pour signer notamment les décisions de titres de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la mesure contestée manque en fait ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le préfet de police a pris la décision lui refusant un titre de séjour, Mme X ne remplissait pas la condition de communauté de vie entre époux lui ouvrant droit au bénéfice d'une carte de séjour en qualité de conjoint de ressortissant français ; que si l'intéressée soutient que la communauté de vie a été rompue à son initiative en raison des violences qu'elle a subies de la part de son mari, cette circonstance n'est pas de nature à la faire bénéficier de plein droit d'un titre de séjour ; que, par suite, les moyens tirés de ce que le préfet de police ne pouvait légalement prendre à son encontre la décision de refus sans méconnaître les dispositions précitées ni commettre une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés ;
Considérant que si Mme X est entrée en France le 20 septembre 2002 après s'être mariée le 8 mai 2001 avec un ressortissant français en Algérie, mère de deux enfants âgés de cinq et treize ans et résidant en Algérie, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions de séjour en France de Mme X, qui a cessé toute communauté de vie avec son époux dès le mois de décembre 2002, et qui n'est pas dépourvue de tout lien familial en Algérie où elle a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans, la décision de refus de titre de séjour du 7 avril 2004 n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de Mme X comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision ; qu'ainsi, ledit arrêté répond aux exigences de motivation des actes administratifs ;
Considérant qu'il résulte des diverses circonstances de l'espèce, précédemment rappelées, que l'arrêté de reconduite du PREFET DE POLICE en date du 7 avril 2004 n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; que par suite, en prenant la mesure litigieuse, le PREFET DE POLICE n'a ni méconnu l'article 8 de la convention susmentionée ni commis une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ;
Considérant que les pièces produites par Mme X ne sont pas de nature à établir la réalité des risques auxquels elle serait personnellement exposée en cas de retour en Algérie ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir qu'en désignant l'Algérie comme pays de renvoi, le PREFET DE POLICE aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 23 août 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 avril 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme X ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement du 23 août 2005 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2° : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris par Mme X est rejetée.
N° 05PA03900
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