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26/10/2005 | FRANCE | N°02PA02016

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation a, 26 octobre 2005, 02PA02016


Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2002, présentée pour la BANQUE WORMS venant aux droits des sociétés RADAR et ACMER, dont le siège est Tour Voltaire 1 place des Degrés à Paris la Défense Cédex 58 (92059), par le bureau Francis Lefebvre ; la BANQUE WORMS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles a été assujettie la société RADAR au titre des exercices 1985 et 1986 ;

2°) de pr

ononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) ...

Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2002, présentée pour la BANQUE WORMS venant aux droits des sociétés RADAR et ACMER, dont le siège est Tour Voltaire 1 place des Degrés à Paris la Défense Cédex 58 (92059), par le bureau Francis Lefebvre ; la BANQUE WORMS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles a été assujettie la société RADAR au titre des exercices 1985 et 1986 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5.500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 octobre 2005 :

- le rapport de Mme Brotons, rapporteur,

- et les conclusions de M. Jardin, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de la société anonyme RADAR, société holding d'un groupe de grande distribution alimentaire, l'administration a remis en cause, au titre de l'exercice 1985, la déduction d'une provision constituée pour dépréciation des titres de la société Paris-France et, au titre de l'exercice 1986, la comptabilisation de moins-values à long terme dégagées à raison de la cession des titres des sociétés Docks de Blois, Nord Est Alimentation (NEA) et Société Française de Supermarchés ; que la BANQUE WORMS, qui vient aux droits des sociétés RADAR et Acmer, société absorbante de RADAR qu'elle a elle-même absorbée en 1997, fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés établies, en conséquence, au nom de la société RADAR ;

Sur la provision pour dépréciation des titres de la société Paris-France :

Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts dans sa rédaction applicable : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celle-ci comprenant ... notamment : 5° les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables ...pour les exercices ouverts à partir du 1er janvier 1974, les titres de participation ne peuvent faire l'objet d'une provision que s'il est justifié d'une dépréciation réelle par rapport au prix de revient... ;

Considérant que la société RADAR a constitué, à la clôture de l'exercice 1985, une provision de 167.176.000 F pour dépréciation des titres de la société Paris-France qu'elle détenait, à hauteur de 69,30 %, ramenant ainsi la valeur de ses titres de 316,80 F, prix de revient unitaire, à 147,10 F, alors que le cours de bourse était de 350 F ; qu'il résulte de l'instruction que le niveau élevé du cours de l'action s'expliquait par des opérations en cours tendant à la prise de contrôle de la société RADAR, société mère de Paris-France, mais ne reflétait pas la valeur réelle de la société ; que le montant de la provision constituée a été déterminé, au vu d'un rapport d'expert, sur la base de la valeur liquidative de la société compte tenu de son patrimoine, corrigée par la prise en compte du risque résultant de la mise en jeu d'une garantie de passif par le groupe Galeries Lafayette ; qu'il ressort dudit rapport que la société Paris-France, dont les résultats étaient lourdement déficitaires, n'avait pratiquement plus d'activité commerciale en raison de la cession de la quasi-totalité de son réseau commercial au groupe Galeries Lafayette, pour 1 F symbolique, au cours de l'exercice 1985 ; que, dès lors, la valeur de la société pouvait valablement être déterminée à partir de ses seuls actifs immobiliers, appréciés au prix du marché à la date de constitution de la provision ; qu'il suit de là que la BANQUE WORMS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande relative à ce chef de redressement ;

Sur la moins-value à long terme résultant de la cession à M. X des titres de la société Docks de Blois :

Considérant que la société RADAR a cédé à M. X, au cours de l'exercice 1986, 336.284 actions de sa filiale Docks de Blois, pour 1 F symbolique ; que l'administration a réintégré, dans les résultats de l'exercice en cause la moins-value à long terme dégagée par cette opération au motif que la cession avait été opérée sur la base d'une sous-évaluation manifeste des titres et constitué, de ce fait, un avantage anormal consenti au profit de M. X ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la valeur de cession a été déterminée sur la base d'un rapport établi par les commissaires aux comptes de la société RADAR à la suite du rachat de cette société, en avril 1986, par le groupe Primistères ; que ce rapport, qui concernait deux sociétés que le groupe Primistères ne souhaitait pas conserver, en raison, d'une part de leurs résultats lourdement déficitaires qui risquaient de peser sur les résultats d'ensemble, d'autre part, de la nécessité de procéder à la fermeture de plusieurs entrepôts au risque de provoquer un conflit social visant l'ensemble du groupe, concluait à une valeur négative de la société Docks de Blois, par comparaison entre sa valeur patrimoniale avant impôts compte tenu d'une plus-value latente sur immobilisations et le cumul des pertes prévisibles sur trois exercices ; que si l'administration soutient que cette évaluation reposait sur une estimation irréaliste des résultats attendus, il est constant que ladite évaluation, qui prolongeait les tendances observées, ne pouvait pas prendre en compte les éventuelles améliorations attendues d'une restructuration qui n'était pas réalisable par la société mère et qui n'a été mise en oeuvre que par le repreneur, M. X ; que, notamment, il ressort du dossier que la reprise de la société par M. X a été opérée le 20 août et non le 30 septembre 1986 et que c'est postérieurement à cette date qu'a été initiée la restructuration de la société ; que le prix auquel M. X a revendu les titres de la société, un an plus tard, ne constitue pas un élément pertinent de comparaison eu égard aux importantes mesures de restructuration mises en oeuvre, à l'amélioration des résultats qui en est résultée et à l'intérêt particulier que représentait, pour l'acquéreur, le rachat d'une société devenue depuis peu son principal client ; que par suite, l'administration n'établit pas la sous-évaluation manifeste du prix de cession des titres en 1986 et qu'elle n'est dès lors pas fondée à qualifier ladite cession d'acte anormal de gestion ; qu'il suit de là que la BANQUE WORMS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande relative à ce chef de redressement ;

Sur les moins-values à long terme résultant des cessions des titres Nord-Est Alimentation et Société Française de Supermarchés :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société RADAR a cédé à la société Primistères, au cours de l'exercice 1986, la totalité des titres qu'elle détenait dans les sociétés Nord-Est Alimentation (NEA) et Société Française de Supermarchés ; que ces cessions ont été consenties pour 1 F symbolique, alors que la valeur nette d'inventaire des sociétés en cause était respectivement de 7.595.349 F et de 8.492.404 F ; qu'il ressort du rapport du conseil d'administration de la société RADAR à l'assemblée générale du 10 décembre 1986 que la société Primistères s'était engagée à racheter l'ensemble des sociétés succursalistes sur la base des valeurs nettes d'inventaire ; que la société requérante se borne à soutenir que les cessions opérées pour 1 F s'inscrivaient dans le cadre d'ensemble du rachat du secteur succursaliste par la société Primistères pour un montant de 48 MF, sans préciser les motifs pour lesquels le prix de cession des deux sociétés en cause s'est écarté de leur valeur nette d'inventaire ; qu'elle ne peut utilement invoquer la situation lourdement déficitaire de ces sociétés et les abandons de créances qu'elle avait dû leur consentir, dès lors que ces éléments étaient déjà pris en compte dans le cadre de l'engagement pris par le repreneur ; que, par suite l'administration doit être regardée comme établissant la sous-évaluation du prix des cessions en cause ; qu'elle est dès lors fondée à considérer que ces cessions ont constitué un acte anormal de gestion et à réintégrer, en conséquence, dans les résultats de la société RADAR, les moins-values à long terme dégagées par ces opérations ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la BANQUE WORMS est seulement fondée à demander la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés établies au nom de la société RADAR au titre des exercices 1985 et 1986 à raison de la réintégration, d'une part, de la provision constituée pour dépréciation des titres de la société Paris-France, d'autre part, de la moins-value à long terme dégagée par la cession des titres de la société Docks de Blois à M. X ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3.000 euros au titre des frais exposés par la requérante et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La BANQUE WORMS venant aux droits des sociétés RADAR et ACMER est déchargée, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés établies au nom de la société RADAR, au titre des exercices 1985 et 1986, à raison de la réintégration dans les résultats de cette société, d'une part, de la provision constituée pour dépréciation des titres de la société Paris-France, d'autre part, de la moins-value à long terme dégagée par la cession des titres de la société Docks de Blois à M. X.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 10 avril 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la BANQUE WORMS une somme de 3.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la BANQUE WORMS est rejeté.

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N° 02PA02016


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 02PA02016
Date de la décision : 26/10/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pré SICHLER-GHESTIN
Rapporteur ?: Mme Isabelle BROTONS
Rapporteur public ?: M. JARDIN
Avocat(s) : BARDET ; BARDET ; ZAMOUR

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-10-26;02pa02016 ?
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