(1ère chambre B)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 août 2000 présentée par la SCP HUGLO LEPAGE et associés conseil, avocat, pour l'ASSOCIATION CONTRE LA ROCADE (ACRO) dont le siège social est fixé 7 place Louis Grenier 78350 Les Loges-en-Josas ; l'ASSOCIATION CONTRE LA ROCADE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 997305 et 997476 en date du 23 mai 2000 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 24 septembre 1999 par laquelle le conseil général des Yvelines a approuvé le projet de déviation de la route départementale n 938 sur le territoire des communes de Buc, Les Loges-en-Josas et Jouy-en-Josas ;
2 ) d'annuler ladite délibération avec toutes conséquences de droit ;
3 ) de condamner le département des Yvelines à lui verser une somme de 20.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
VU la loi n° 83-360 du 12 juillet 1993 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 novembre 2001 :
- le rapport de Mme MONCHAMBERT, premier conseiller,
- les observations de la SCP HUGLO, LEPAGE et associés, avocat, pour l'ASSOCIATION CONTRE LA ROCADE et celles du cabinet GUINARD, avocat, pour le conseil général des Yvelines,
- et les conclusions de M. BARBILLON, commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que l'ACRO a soutenu dans un mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif de Versailles le 2 mai 2000 que le projet de déviation approuvé par la délibération du 24 septembre 1999 n'était pas compatible avec le plan d'occupation des sols de la commune de Loges-en-Josas ; que les premiers juges ont omis de répondre à ce moyen ; que, par suite, le jugement attaqué en date du 23 mai 2000 doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par l'ACRO devant le tribunal administratif de Versailles ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de déviation de la route départementale 938 entre le carrefour de la route départementale 939 et le lieudit "les Arcades" sur le territoire des communes du Buc, de Jouy-en-Josas et des Loges-en-Josas a été, après enquête publique, déclaré d'utilité publique par un arrêté du préfet des Yvelines en date du 7 octobre 1988 ; que par un nouvel arrêté préfectoral du 4 juin 1993, cette déclaration d'utilité publique a été prorogée de cinq ans ; que par une délibération en date du 28 mars 1997, le conseil général des Yvelines a approuvé un avant-projet de travaux modificatif arrêté en novembre 1996 ; que cet avant-projet a fait, en application de l'article 7 de la loi du 12 juillet 1983 susvisée, l'objet d'une enquête publique entre le 26 mai et le 25 juin 1998 ; que par la délibération attaquée, le conseil général des Yvelines a approuvé, le 24 septembre 1999, le projet définitif des travaux ;
Considérant que l'objet d'une déclaration publique est d'autoriser son bénéficiaire à procéder aux expropriations nécessaires à la réalisation des travaux, sur la base d'un dossier soumis à enquête publique comprenant notamment, en application de l'article R.13 du code de l'expropriation susvisé, un plan de situation ainsi qu'un plan général des travaux, une description des caractéristiques des ouvrages les plus importants et le cas échéant, une appréciation de l'impact des travaux projetés sur l'environnement ; qu'il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, et en tenant compte des observations éventuellement formulées au cours de l'enquête publique, d'apprécier l'utilité publique de l'opération au regard des caractéristiques essentielles des ouvrages telles qu'elles sont précisées dans le dossier, de son coût financier, des atteintes portées à la propriété privée ou à d'autres intérêts publics, et des inconvénients d'ordre social qu'elle comporte ; qu'ainsi, une modification substantielle par des décisions ultérieures relatives à l'approbation des travaux, des caractéristiques de l'opération est, contrairement à ce que soutient le département des Yvelines, susceptible de constituer une violation de l'acte par lequel cette opération est déclarée d'utilité publique, nonobstant la circonstance que la propriété de la totalité des immeubles dont la cession avait été déclarée d'utilité publique, lui a été effectivement transférée en tant que bénéficiaire de l'expropriation ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet initial, soumis à l'enquête publique de 1987, de la déviation de la route départementale 938 entre le carrefour de la route départementale 939 et le lieudit "les Arcades" qui traverse sur une longueur d'environ deux kilomètres le territoire des communes du Buc, de Jouy-en-Josas et des Loges-en-Josas, ne comportait que l'aménagement d'une route à deux voies et de quatre carrefours plans ; que les travaux approuvés par la délibération attaquée comportent notamment, outre la transformation de trois carrefours dans le secteur du Haut Buc et du Petit Jouy, le percement d'une tranchée couverte de 250 mètres de long sous la route départementale 120 et le prolongement de la voie pour véhicules lents ainsi que la création d'une liaison spécifique à l'usage des cycles et des piétons entre Les Loges-en-Josas et Le Petit Jouy ; que le coût total de l'opération qui était initialement de 75 millions de francs a été, par suite de l'ensemble des modifications retenues, porté à 154.7 millions de francs ; que dans ces conditions, tant les modifications introduites que l'augmentation du coût de l'opération affectent substantiellement le projet déclaré d'utilité publique le 7 octobre 1988 et rendent ainsi nécessaire l'engagement d'une nouvelle déclaration d'utilité publique, préalablement à l'approbation des travaux par le conseil général des Yvelines ; que par suite, l'ASSOCIATION CONTRE LA ROCADE est fondée à demander l'annulation de la délibération du 24 septembre 1999 ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que le département des Yvelines, partie perdante, puisse se voir allouer les sommes qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner le département des Yvelines à payer à l'ASSOCIATION CONTRE LA ROCADE la somme de 6.000 F à ce titre ;
Article 1er : Le jugement en date du 23 mai 2000 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La délibération du 24 septembre 1999 du conseil général des Yvelines est annulée.
Article 3 : Le département des Yvelines versera à l'ASSOCIATION CONTRE LA ROCADE une somme de 6.000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions du département des Yvelines tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.