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25/10/2001 | FRANCE | N°98PA01021

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4e chambre, 25 octobre 2001, 98PA01021


(4ème chambre B)
VU le recours, enregistré au greffe de la cour le 15 avril 1998, présenté par la MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT ; la MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du 18 novembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé, d'une part, l'arrêté du 24 janvier 1995 par lequel le préfet du Val d'Oise a engagé conjointement et solidairement à l'encontre des époux X... une procédure de consignation de la somme de trois millions de francs correspondan

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(4ème chambre B)
VU le recours, enregistré au greffe de la cour le 15 avril 1998, présenté par la MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT ; la MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du 18 novembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé, d'une part, l'arrêté du 24 janvier 1995 par lequel le préfet du Val d'Oise a engagé conjointement et solidairement à l'encontre des époux X... une procédure de consignation de la somme de trois millions de francs correspondant à la réalisation de travaux d'élimination de déchets et de réalisation d'analyses et, d'autre part, l'état exécutoire émis le 1er avril 1996 par le trésorier-payeur général du Val d'Oise en application de cette mesure de consignation ;
2 ) de rejeter la demande présentée par les époux X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
3 ) de condamner les époux X... à verser à l'Etat une somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de l'environnement ;
VU la loi n 75-633 du 15 juillet 1975 ;
VU la loi n 76-663 du 19 juillet 1976 ;
VU la loi n 85-98 du 25 janvier 1985 ;
VU le décret n 77-1133 du 21 septembre 1997 ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2001 :
- le rapport de M. ALFONSI, premier conseiller,
- et les conclusions de M. HAÏM, commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'un récépissé de déclaration d'installation classée a été délivré le 8 août 1983 à la société Lunije pour l'exploitation d'une usine de produits chimiques à Taverny ; que, par un arrêté du 10 novembre 1994, le préfet du Val d'Oise a mis en demeure conjointement et solidairement la société Lunije, Me Z..., administrateur judiciaire, Me A..., liquidateur judiciaire et M. X..., propriétaire des terrains, d'éliminer l'ensemble des déchets présents sur le site, de faire réaliser, en concertation avec l'inspecteur des installations classées, des analyses de sol par une société spécialisée et de faire, le cas échéant, des propositions de dépollution ; que, par l'arrêté en litige daté du 24 janvier 1995, le préfet du Val d'Oise a engagé conjointement et solidairement à l'encontre du liquidateur judiciaire de la société Lunije et du propriétaire des terrains où se trouvent les installations de ladite société à Taverny la procédure de consignation prévue à l'article 23-a de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement et à l'article 3 de la loi du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux ; que l'autorité administrative a fixé à ce titre à la somme de 3 millions de francs la consignation entre les mains d'un comptable public correspondant à la réalisation de travaux d'élimination de l'ensemble des déchets présents sur le site, constitués de fûts vides et pleins et d'eaux résiduaires, à la réalisation d'analyses de sols et, si nécessaire, de travaux de dépollution du site ; qu'en application de cet arrêté, le trésorier-payeur général du Val d'Oise a émis pour le même montant le 1er avril 1996 un état exécutoire à l'encontre des époux X... en leur qualité de propriétaires des terrains ; que la MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT relève appel du jugement du 18 novembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Versailles a, sur la demande des époux X..., annulé l'arrêté du préfet du Val d'Oise du 24 janvier 1995 et l'état exécutoire émis le 1er avril 1996 ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il résulte de la minute du jugement attaqué qu'après avoir visé les observations en défense du préfet du Val d'Oise contenues dans son mémoire enregistré le 17 juillet 1996, les premiers juges ont répondu à l'argumentation du préfet tirée de la légalité au regard des dispositions de la loi du 15 juillet 1975 de la procédure de consignation engagée à l'encontre des époux X... ; qu'en revanche, le tribunal n'était pas tenu de répondre au moyen de défense relatif à la régularité de la notification de son arrêté du 24 janvier 1995, inopérant dès lors que les conditions de notification de cet arrêté sont sans incidence sur sa légalité ; que, par suite, la MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT n'est pas fondée à soutenir que ledit jugement serait entaché d'irrégularité ;
Au fond :

Considérant, d'une part, qu'aux termes des dispositions de l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement codifiées à l'article L.511-1 du code de l'environnement : "Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers, et d'une manière générale les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients, soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de l'environnement ..." ; qu'aux termes des dispositions de l'article 23 de la même loi codifiées à l'article L.514-1 du code de l'environnement : "Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées et lorsqu'un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l'inobservation des conditions imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Si, à l'expiration du délai fixé pour l'exécution, l'exploitant n'a pas obtempéré à cette injonction, le préfet peut : 1 ) obliger l'exploitant à consigner entre les mains d'un comptable public, une somme répondant du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée à l'exploitant au fur et à mesure de l'exécution des mesures prescrites ; il est procédé au recouvrement de cette somme comme en matière de créances étrangères à l'impôt et au domaine. Pour le recouvrement de cette somme, l'Etat bénéficie d'un privilège du même rang que celui prévu à l'article 1920 du code général des impôts ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société à responsabilité limitée Lunije exploitait sur un terrain situé chemin de Saint-Prix à Taverny une usine de fabrication de produits détersifs ayant fait l'objet en 1983 d'une déclaration d'installation classée pour la protection de l'environnement ; que les époux X..., représentants légaux de l'entreprise et propriétaires du terrain, ont cessé toute activité au plus tard au mois de juin 1993 après avoir cédé les parts sociales de cette société et loué leur terrain à un nouvel exploitant, M. Y... ; que la liquidation judiciaire de la société Lunije a été prononcée par jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 7 octobre 1994 ; que ni la mise en liquidation judiciaire de la société Lunije ni aucune autre circonstance de fait ou de droit n'ont eu pour effet de substituer les époux X... à cette société en qualité d'exploitant, au sens de la loi du 19 juillet 1976, des dépôts de produits chimiques constitués sur le site de l'usine ; qu'ainsi, les époux X... ne pouvaient ni en leur qualité d'anciens associés de la société Lunije, ni en leur qualité de propriétaires des terrains faire l'objet des mesures prévues par les dispositions susmentionnées de l'article 23 de cette loi ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article 3 de la loi du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux, codifiées à l'article L.541-3 du code de l'environnement : "Au cas où les déchets sont abandonnés, déposés ou traités contrairement aux prescriptions du présent chapitre et des règlements pris pour son application, l'autorité titulaire du pouvoir de police peut, après mise en demeure, assurer d'office l'élimination desdits déchets aux frais du responsable ... L'autorité titulaire du pouvoir de police peut également obliger le responsable à consigner entre les mains d'un comptable public une somme répondant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée au fur et à mesure de l'exécution des travaux" ; que les époux X..., qui n'exploitaient plus l'installation classée déclarée par la société Lunije, ne pouvaient être tenus pour responsables des déchets demeurés sur le terrain du seul fait qu'ils ont conservé la propriété de ce terrain ; que les conditions dans lesquelles cette installation a été précédemment exploitée par M. X... ne permettaient pas davantage de le regarder comme responsable au sens des dispositions susmentionnées des déchets abandonnés sur le site par suite de la défaillance de ladite société ;
Considérant qu'il suit de là que la MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du préfet du Val d'Oise du 24 janvier 1995 et l'état exécutoire émis en conséquence le 1er avril 1996 ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme X..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à l'Etat la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à payer à Mme X... la somme de 15.000 F qu'elle demande au titre des frais exposés à l'occasion de l'instance ;
Article 1er : Le recours de la MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT est rejeté.
Article 2 : L'Etat (ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement) versera à Mme X... une somme de 15.000 F en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 98PA01021
Date de la décision : 25/10/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

NATURE ET ENVIRONNEMENT - INSTALLATIONS CLASSEES POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT - CHAMP D'APPLICATION DE LA LEGISLATION - INSTALLATIONS ENTRANT DANS LE CHAMP D'APPLICATION DE LA LOI N° 76-663 DU 19 JUILLET 1976.

NATURE ET ENVIRONNEMENT - AUTRES MESURES PROTECTRICES DE L'ENVIRONNEMENT.


Références :

Arrêté du 10 novembre 1994
Arrêté du 24 janvier 1995
Code de justice administrative L761-1
Code de l'environnement L511-1, L514-1, L541-3
Loi 75-633 du 15 juillet 1975 art. 3
Loi 76-663 du 19 juillet 1976 art. 23, art. 1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. ALFONSI
Rapporteur public ?: M. HAÏM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2001-10-25;98pa01021 ?
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