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22/02/2001 | FRANCE | N°98PA03725;99PA03943;00PA00570

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4e chambre, 22 février 2001, 98PA03725, 99PA03943 et 00PA00570


VU I) le recours enregistré au greffe de la cour le 20 octobre 1998 sous le n 98PA03725, présenté par la MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE ;
LA MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 2 juillet 1998 en tant qu'il a annulé, à la demande de Mme Geneviève X..., d'une part, la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du 18 octobre 1993 portant refus de renouvellement de son détachement, et, d'autre part, l'arrêté du 11 mars 1994 par lequel le ministr

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VU I) le recours enregistré au greffe de la cour le 20 octobre 1998 sous le n 98PA03725, présenté par la MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE ;
LA MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 2 juillet 1998 en tant qu'il a annulé, à la demande de Mme Geneviève X..., d'une part, la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du 18 octobre 1993 portant refus de renouvellement de son détachement, et, d'autre part, l'arrêté du 11 mars 1994 par lequel le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a prononcé sa réintégration dans les services de la direction départementale du travail et de l'emploi de Paris ;
2 ) de rejeter la demande tendant à l'annulation de ces deux décisions présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
VU II) la demande, enregistrée au greffe de la cour le 6 avril 1999 sous le n 99PA03943, présentée pour Mme X... par la SCP WAQUET-FARGE-HAZAN tendant à ce que la cour condamne la ministre de l'emploi et de la solidarité, d'une part, à exécuter le jugement du tribunal administratif de Paris rendu sous les n 9317649, 948196 et 948197 sous astreinte de 1.000 F par jour de retard et, d'autre part, à lui verser une somme de 15.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU III) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 22 février 2000 sous le n 00PA00570, présentée pour Mme X... par la SCP WAQUET-FARGE-HAZAN ;
Mme X... demande à la cour :
1 ) d'annuler l'ordonnance en date du 16 décembre 1999 par laquelle le président de la 5ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ministre de l'emploi et de la solidarité à lui verser une somme de 1.000.000 F avec les intérêts à compter de sa réclamation préalable et à la reconstitution de sa carrière ;
2 ) de condamner la ministre de l'emploi et de la solidarité à lui verser la somme de 1.000.000 F augmentée des intérêts au taux légal à compter de sa réclamation préalable en date du 1er avril 1999 ;
3 ) d'enjoindre à la ministre de l'emploi et de la solidarité de reconstituer sa carrière en position de détachement auprès de l'ANPE ;
4 ) de condamner la ministre de l'emploi et de la solidarité à lui verser la somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n 84-16 du 11 janvier 1984 ;
VU le décret n 85-986 du 16 septembre 1985 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 février 2001 :
- le rapport de M. ALFONSI, premier conseiller,
- les observations de Mme X...,
- et les conclusions de M. HAIM, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que le recours de la MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE et les requêtes susvisées de Mme X... concernent la situation d'un même fonctionnaire et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur le recours de la MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE :
Considérant que Mme X..., adjointe administrative des services déconcentrés, a été placée en position de détachement auprès de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier 1975 en vue de l'exercice de fonctions de chargée d'information ; que ce détachement a été renouvelé à plusieurs reprises jusqu'au 31 décembre 1986 ; que sa position de détachement auprès du même établissement public a ensuite été régularisée jusqu'au 28 février 1994 ; que, par le jugement attaqué rendu le 2 juillet 1998, le tribunal administratif de Paris a annulé pour excès de pouvoir la décision du 18 octobre 1993 par laquelle le ministre chargé du travail a refusé de renouveler le détachement de Mme X... au-delà de cette date et, par voie de conséquence, la décision du 7 mars 1994 par laquelle le directeur régional adjoint de l'ANPE a remis l'intéressée à la disposition du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, et l'arrêté ministériel du 11 mars 1994 portant réintégration de Mme X... dans son administration d'origine ; que le recours de la ministre de l'emploi et de la solidarité doit être regardé comme tendant à la réformation de ce jugement en tant qu'il annule la décision du 18 octobre 1993 et l'arrêté du 11 mars 1994 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 21 du décret n 85-986 du 16 septembre 1985 modifié relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat et à certaines modalités de cessations définitives de fonctions : "Le détachement de longue durée ne peut excéder cinq ans. Il peut toutefois être renouvelé par périodes n'excédant pas cinq années" ; qu'hormis les cas visés à l'article 17 du même décret, le détachement n'est pas de droit ;
Considérant que, pour mettre fin par les décisions attaquées au détachement dont bénéficiait Mme X..., le ministre s'est fondé sur l'importance de la différence entre la rémunération que percevait l'intéressée dans son emploi de détachement et celle qu'elle pourrait obtenir dans son administration d'origine et sur les inconvénients que de telles différences peuvent avoir sur le retour de fonctionnaires détachés dans leur corps d'origine ; que ce motif, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, repose sur une appréciation de l'intérêt du service et justifiait légalement que soit mis fin au détachement de Mme X... ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le motif tiré de l'absence d'intérêt du service pour annuler les deux décisions du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X... devant le tribunal administratif ;

Considérant, en premier lieu, que les décisions des 18 octobre 1993 et 11 mars 1994 par lesquelles le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a refusé de renouveler le détachement de Mme X... à l'ANPE et l'a réintégrée dans son administration d'origine n'ont pas eu pour effet de retirer ou d'abroger une décision créatrice de droit ; qu'elles n'ont pas été prises en considération de la personne de Mme X... et notamment pour des motifs d'ordre disciplinaire ; que, par suite, elles n'avaient pas à être motivées en application de la loi du 11 janvier 1979 ;
Considérant, en deuxième lieu, que Mme X... soutient que les décisions attaquées créent une rupture d'égalité entre les fonctionnaires placés en position de détachement auprès de l'ANPE, dès lors que certains d'entre eux ont été autorisés à achever leur carrière auprès de cet établissement par voie de détachement ; que le traitement plus favorable qui aurait été réservé à des fonctionnaires provenant d'autres ministères ou appartenant à la catégorie A n'est pas, par lui-même, de nature à établir que le ministre chargé du travail a méconnu le principe d'égalité entre fonctionnaires d'un même corps en refusant de renouveler le détachement de Mme X... à l'ANPE ; qu'en prenant en compte, d'une part, le fait que certains des fonctionnaires concernés avaient dépassé l'âge de cinquante-cinq ans et, d'autre part, le fait que les fonctionnaires n'atteignant pas cet âge pouvaient se voir proposer un déroulement de carrière au sein du ministère, le ministre a pu constater que les personnels concernés n'étaient pas placés dans une situation de fait identique et n'a pas, dès lors, méconnu ce principe ;
Considérant, enfin, que Mme X... ayant été réintégrée, en position d'activité, dans son administration d'origine, les moyens tirés de ce qu'elle ne pouvait ni être placée d'office en position hors cadre ou en disponibilité ni maintenue en détachement à l'ANPE sur la base d'une rémunération inférieure à celle prévue par le statut du personnel de cet établissement sont inopérants ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 18 octobre 1993 et son arrêté du 11 mars 1994 ;
Sur la requête de Mme X... tendant à la condamnation de la MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE au paiement d'une astreinte :

Considérant que, par le présent arrêt, la cour annule le jugement du tribunal administratif de Paris du 2 juillet 1998, en tant que ledit jugement annule, d'une part, la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du 18 octobre 1993 portant refus de renouvellement du détachement de Mme X..., et, d'autre part, l'arrêté du 11 mars 1994 par lequel le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a prononcé sa réintégration dans les services de la direction départementale du travail et de l'emploi de Paris ; que, dès lors, les conclusions aux fins d'astreinte présentées par Mme X... sur le fondement de l'article L.911-4 du code de justice administrative pour obtenir l'exécution de ce jugement ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur la requête de Mme X... dirigée contre l'ordonnance en date du 16 décembre 1999 :
Considérant qu'aux termes de l'article L.9 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors en vigueur : "Les présidents de tribunal administratif ... et les présidents de formation de jugement des tribunaux administratifs ... peuvent, par ordonnance ... rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance" ;
Considérant qu'il est constant que, par lettre en date du 1er avril 1999, Mme X... a adressé à la MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE une demande préalable tendant, d'une part, à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 1.000.000 F assortie des intérêts au taux légal en réparation des différents chefs de préjudice qu'elle a subi du fait de l'illégalité de la décision du 18 octobre 1993 portant refus de renouveler son détachement à l'ANPE et, d'autre part, à la reconstitution de sa carrière ; que le silence gardé par la ministre sur cette demande pendant plus de quatre mois a fait naître une décision implicite de rejet de nature à lier le contentieux ; que, dans ces conditions, Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que le président de la 5ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable et non susceptible d'être couverte en cours d'instance ; que, par suite, l'ordonnance du président de la 5ème section du tribunal administratif de Paris du 16 décembre 1999 est entachée d'irrégularité et doit être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en refusant par sa décision du 18 octobre 1993 de renouveler le détachement de Mme X... auprès de l'ANPE pour une nouvelle période de cinq ans, la MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE n'a pas commis de faute de nature à engager la responsabilié de l'Etat à l'égard de la requérante ; que, dès lors, Mme X... n'est pas fondée à demander que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité en réparation de son préjudice, ni qu'il soit procédé à la reconstitution de sa carrière ;
Sur les conclusions de Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui, dans les présentes instances, ne peut être regardé comme la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Paris du 2 juillet 1998 est annulé en tant qu'il annule la décision du 18 octobre 1993 et l'arrêté du 11 mars 1994 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris et tendant à l'annulation de la décision du 18 octobre 1993 et de l'arrêté du 11 mars 1994 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle sont rejetées.
Article 3 : L'ordonnance du président de la 5ème section du tribunal administratif de Paris du 16 décembre 1999 est annulée.
Article 4 : La demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris et tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité et à ce qu'il soit enjoint à la MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE de reconstituer sa carrière est rejetée.
Article 5 : Les conclusions de Mme X... tendant à la condamnation de l'Etat au paiement d'une astreinte sont rejetées.
Article 6 : Les conclusions de Mme X... tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 98PA03725;99PA03943;00PA00570
Date de la décision : 22/02/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

36-05-03-01-03 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - POSITIONS - DETACHEMENT ET MISE HORS CADRE - DETACHEMENT - REINTEGRATION


Références :

Code de justice administrative L911-4, L761-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L9
Décret 85-986 du 16 septembre 1985 art. 21, art. 17
Loi du 11 janvier 1979


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. ALFONSI
Rapporteur public ?: M. HAIM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2001-02-22;98pa03725 ?
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