(4ème chambre A)
VU, enregistrée au greffe de la cour le 21 avril 1998, la requête présentée pour Mme Paulette X... demeurant ... et M. Alain X... demeurant ..., par Me Z..., avocat ; les consorts X... demandent à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9704103/3 du 31 décembre 1997 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a, d'une part, confirmé l'arrêté de péril non imminent du 18 juillet 1996 pris par le maire de Saint-Denis à l'encontre de l'immeuble situé ... et ..., d'autre part, mis en demeure les copropriétaires de faire procéder aux travaux prescrits par ledit arrêté ;
2 ) d'annuler l'arrêté de péril du 18 juillet 1996 ;
3 ) de condamner la commune de Saint-Denis à faire l'avance des travaux pouvant se révéler nécessaires pour neutraliser l'état de péril du bâtiment A ;
4 ) de leur donner acte de ce qu'ils se réservent la faculté d'engager une action en responsabilité à l'encontre de la commune de Saint-Denis ;
5 ) de condamner la commune de Saint-Denis, sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, à leur verser la somme de 25.000 F ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de la construction et de l'habitation, notamment ses articles L.511-1, L.511-2 et L.511-4 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 novembre 1999 :
- le rapport de Melle PAYET, premier conseiller,
- les observations de Me Z..., avocat, pour M. et Mme X... et celles de Me Y..., avocat, pour la commune de Saint-Denis,
- et les conclusions de M. BROTONS, commissaire du Gouvernement ;
Sur l'état de péril des immeubles sis ..., ... sur le territoire de la commune de Saint-Denis :
Considérant qu'aux termes de l'article L.511.1 du code de la construction et de l'habitation : "Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques lorsqu'ils menacent ruine et qu'ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité, ou lorsque, d'une façon générale, ils n'offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique ( ...)" ; qu'aux termes de l'article L.511-2 du même code : "( ...) Le tribunal administratif ( ...) fixe, s'il y a lieu, le délai pour l'exécution des travaux ou, pour la démolition. Il peut autoriser le maire à y faire procéder d'office et aux frais du propriétaire si cette exécution n'a pas eu lieu à l'époque prescrite.( ...) " ; qu'aux termes de l'article L.511-4 du même code : "Lorsque, à défaut du propriétaire, le maire a dû prescrire l'exécution des travaux ainsi qu'il a été prévu aux articles L.511-2 ( ...) le montant des frais est avancé par la commune ; il est recouvré comme en matière d'impôts directs." ; que, pour l'application des dispositions précitées il y a lieu de considérer que l'intervention du maire prévue à l'article L.511-1 n'est pas limitée au cas où le danger à prévenir peut affecter la sécurité publique par des chutes de matériaux ou par l'effondrement de la bâtisse sur les riverains ou les usagers d'une voie publique jouxtant l'immeuble, mais s'étend également au cas où l'état de péril d'une construction présente des risques pour la sécurité non seulement de ses occupants mais aussi de toute personne qui viendrait à pénétrer dans la propriété ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'immeuble, composé de deux corps de bâtiment A et B, situé au ..., ..., sur le territoire de la commune Saint-Denis, qui a fait l'objet d'un arrêté de péril non imminent pris le 18 juillet 1996 par le maire de Saint-Denis en application des dispositions précitées, menaçait ruine et constituait un danger réel ; que la circonstance, alléguée par les consorts X..., que les désordres du bâtiment A ne comportaient aucun risque pour la sécurité des usagers de la voie publique ou pour la consistance du domaine public, ne faisait pas obstacle à ce que le maire de Saint-Denis usât des pouvoirs qu'il tient des articles précités du code de la construction et de l'habitation dès lors qu'il n'est pas contesté que la sécurité des occupants était menacée ;
Considérant, par ailleurs, que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a substitué son jugement du 31 décembre 1997 à l'arrêté de péril non imminent pris par le maire de Saint-Denis le 18 juillet 1996 ; que, dès lors, les requérants ne sont pas recevables à invoquer à l'encontre de cette décision juridictionnelle un moyen tiré du détournement de pouvoir ou de procédure ;
Sur les travaux prescrits :
Considérant que, par le jugement en date du 31 décembre 1997, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a mis en demeure les propriétaires des immeubles susmentionnés de réaliser dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement, la réalisation des travaux suivants : d'une part, en ce qui concerne le bâtiment A, à défaut de sa démolition la reprise en sous-oeuvre des fondations de l'ensemble de la construction, la vérification et la reprise des chaînages, le recalage des planchers et de la charpente, et le traitement des fissures, d'autre part, la démolition du bâtiment B ; que le même jugement a autorisé le maire de Saint-Denis à faire exécuter lesdits travaux d'office et aux frais des copropriétaires dans l'hypothèse où ces derniers ne les auraient pas exécutés dans le délai prescrit ; que les travaux décrits ci-dessus sont nécessaires pour mettre fin de façon efficace à l'état de péril constaté et ne sont donc pas, ainsi que le prétendent les requérants, hors de proportion avec le but recherché ; que, par ailleurs, à supposer même qu'il soit établi que les dégradations dont sont atteints les bâtiments A et B résulteraient de travaux publics ayant endommagé le réseau communal d'égouts et de canalisations, provoquant des infiltrations qui auraient compromis la solidité des fondations des édifices, le moyen est inopérant dès lors que la mise en oeuvre de la procédure de péril, en l'absence de cause naturelle, ne requiert pas d'autre condition que l'état de dangerosité des bâtiments pris dans leur ensemble, sans qu'il y ait lieu à cet égard de distinguer entre les parties privatives et les parties communes ; qu'enfin, les constats préliminaires à la mise en oeuvre de la procédure de péril imminent, objet d'un arrêté antérieur, ne sauraient être utilement discutés dans le cadre de la présente instance qui constitue un litige distinct ;
Sur la répartition des frais :
Considérant, en premier lieu, que les dispositions précitées de l'article L.511-4 du code de la construction et de l'habitation n'autorisent pas les propriétaires à demander la condamnation de la commune à faire l'avance des frais correspondant aux travaux prescrits jusqu'à ce que les responsabilités sur les causes de l'état de péril de leur bien soient déterminées par voie judiciaire ;
Considérant, en second lieu, qu'eu égard à l'indivisibilité du péril et des travaux à effectuer pour y remédier, les dépenses correspondantes doivent être supportées par l'ensemble des propriétaires, que les travaux concernent les parties privatives ou les parties communes, et qu'il appartiendra à ces derniers de procéder entre eux à la répartition finale des frais, sous réserve de saisir les tribunaux de l'ordre judiciaire en cas de litige survenant sur cette répartition ;
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit donné acte :
Considérant que les consorts X... demandent qu'il leur soit donné acte qu'ils se réservent la faculté de saisir les tribunaux compétents d'une action en responsabilité à l'encontre de la commune de Saint-Denis afin d'être indemnisés de leur préjudice ; qu'il n'appartient pas à la juridiction administrative de donner acte ; que, par suite, les conclusions à cette fin sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les consorts X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a ordonné aux copropriétaires de l'immeuble dont s'agit de procéder aux travaux de réparation et de démolition ci-avant énumérés et, faute pour ces derniers de le faire dans le délai imparti, a autorisé le maire de Saint-Denis à y faire procéder d'office et à leurs frais ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation de sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que les consorts X... succombent dans la présente instance ; que leur demande tendant à ce que la commune de Saint-Denis soit condamnée, sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, à leur payer une somme au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner les consorts X..., sur le fondement des mêmes dispositions, à payer à la commune de Saint-Denis une somme au titre des frais non compris dans les dépens que cette dernière a exposés ;
Article 1er : La requête des consorts X... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Denis fondées sur les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, sont rejetées.