(4ème Chambre)
VU, enregistré au greffe de la cour le 7 mai 1996, le recours présenté par le MINISTRE de l'EDUCATION NATIONALE, de l'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR et de la RECHERCHE, lequel demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 954340-954480du 4 mars 1996, par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 10 juillet 1995 du recteur de l'académie de Versailles prononçant le licenciement de M. A... à l'issue de la période de prorogation de son stage de professeur des écoles ;
2 ) de rejeter la demande formée par M. A... devant le tribunal administratif ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le décret n 90-680 du 1er août 1990 portant statut particulier des professeurs des écoles ;
VU l'arrêté ministériel du 2 juillet 1991 modifié le 17 février 1993, relatif au contenu et à la validation des formations organisées par les instituts universitaires de formation des maîtres ;
VU la circulaire ministérielle n 91-202 du 2 juillet 1991 prise pour l'application de l'arrêté susvisé du 2 juillet 1991 modifié, relative au contenu et à la validation des formations organisées par les instituts universitaires de formation des maîtres ;
VU l'arrêté du 2 octobre 1991 modifié par arrêté du 17 février 1993, relatif aux conditions de délivrance du diplôme professionnel de professeur des écoles ;
VU la note de service N 93-149 du 9 mars 1993 du MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA CULTURE ensemble son annexe, relative aux conditions de délivrance du diplôme professionnel de professeur des écoles aux professeurs des écoles stagiaires recrutés au concours externe et au second concours interne de recrutement de professeurs des écoles ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 novembre 1999 :
- le rapport de Melle PAYET, premier conseiller,
- et les conclusions de M. BROTONS, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que le MINISTRE de l'EDUCATION NATIONALE, de l'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR et de la RECHERCHE conteste le jugement du 4 mars 1996 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 10 juillet 1995 du recteur de l'académie de Versailles prononçant le licenciement de M. A..., professeur stagiaire, à compter du 1er septembre 1995 ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions du décret susvisé du 1er août 1990 portant statut particulier des professeurs des écoles, notamment de ses articles 10, 12 et 13, et des textes susvisés pris pour son application, notamment l'arrêté et la circulaire du 2 juillet 1991 portant contenu et validation des formations assurées par les Instituts universitaires de formation des maîtres (I.U.F.M.) et l'arrêté du 2 octobre 1991, modifié par l'arrêté du 17 février 1993, que les candidats qui ont été reçus au concours d'entrée, soit qu'ils aient suivi une première année de formation professionnelle, soit qu'ils se soient présentés directement, sont nommés professeurs des écoles stagiaires et suivent en cette qualité une année de scolarité dénommée "deuxième année de formation professionnelle" à l'issue de laquelle leur formation est validée sur la base de trois éléments d'évaluation, à savoir, le "stage en responsabilité", le "mémoire professionnel" et les "modules d'enseignement" dont certains sont obligatoires, qui permettent d'évaluer l'assiduité et l'acquisition des connaissances indispensables à l'exercice de la mission professorale ; que, pour valider ces trois éléments, le jury académique se prononce au vu des dossiers individuels, des résultats et des propositions du directeur de l'I.U.F.M. ; qu'après proposition du jury, le recteur arrête la liste des professeurs stagiaires ayant obtenu le diplôme professionnel, la liste de ceux qui sont admis à proroger leur stage et la liste des stagiaires qui sont licenciés ; que les professeurs stagiaires autorisés à effectuer une nouvelle année de stage sont alors placés "en situation" sur un poste vacant du terrain et bénéficient à ce titre d'un "plan de formation adapté" ; que, toutefois, aucun des textes susmentionnés ne précise le contenu pédagogique d'un tel plan, la circulaire du 2 juillet 1991 se bornant à indiquer dans son titre II, chapitre C) : " ( ...) Les I.U.F.M. doivent être en mesure de proposer des formations ( ...) adaptées à la situation particulière de certains publics ( ...). - De même, des modalités de validation de la formation adaptées à des publics particuliers (professeurs stagiaires ayant déjà bénéficié d'une formation professionnelle, notamment) doivent être mises en oeuvre dans le cadre de la seconde année. - En ce qui concerne les professeurs stagiaires effectuant après le concours un stage externé, il est demandé aux I.U.F.M. de présenter dans leurs plans de formation des dispositions adaptées à la situation de ces stagiaires." ; que, par ailleurs, la même circulaire ne définit que les orientations générales relatives, notamment, aux durées respectives des stages, des enseignements disciplinaires et de la formation générale, aux objectifs à atteindre, à la méthodologie, aux outils et techniques d'enseignement et aux modalités de validation de la formation ; qu'ainsi, en l'absence d'un texte spécifiant les caractéristiques d'un "plan de formation adapté", la mise en oeuvre des directives s'y rapportant requiert seulement de l' I.U.F.M. que celui-ci s'inspire des principes généraux définis par la circulaire susanalysée en personnalisant la formation dispensée aux stagiaires placés dans des situations particulières telles que la prorogation de stage, sans que puisse être opposé à l'administration le caractère informel d'un tel plan ; qu'en ce qui concerne la validation des formations acquises dans le contexte d'une nouvelle année de stage, le jury académique se détermine sur
l'avis d'un inspecteur de l'éducation nationale lequel peut s'appuyer sur une "évaluation qui peut prendre la forme d'une inspection du professeur stagiaire dans la classe qui lui est confiée." ; qu'à l'issue des opérations de classement, les stagiaires qui, au terme d'une ultime prorogation de leur scolarité, n'ont pas obtenu le diplôme professionnel de professeur des écoles, sont licenciés ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas contesté, qu'à l'issue de sa deuxième année de scolarité M. A... a obtenu la validation du "stage en responsabilité" mais non celle du "mémoire professionnel" et des "modules d'enseignement" ; que, par un arrêté du recteur de l'académie de Versailles en date du 1er septembre 1994, l'intéressé fut admis à renouveler son stage durant l'année scolaire 1994-1995 et, conformément aux textes précités, fut placé "en situation" sur un poste vacant du terrain ; que, durant ladite période, l'intéressé fut l'objet de visites de classes suivies d'entretiens de la part de conseillers pédagogiques et de professeurs de l'I.U.F.M. ; qu'il bénéficia par ailleurs de quatre demi-journées de formation théorique ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ces mesures de formation pédagogique aient été prises en méconnaissance des orientations générales rappelées plus haut ; que, dès lors, M. A... doit être regardé comme ayant bénéficié d'un "plan de formation adapté" sans qu'y fasse obstacle la circonstance, à la supposer même établie, que ce plan n'aurait pas été suffisamment personnalisé pour l'aider à pallier ses insuffisances dans les disciplines non validées, ou aurait été redondant en ce qui concerne l'évaluation de ses aptitudes pédagogiques eu égard au fait que son "stage en responsabilité" avait été validé en juin 1994 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté du 10 juillet 1995 par lequel le recteur de l'académie de Versailles a prononcé le licenciement de M. A... à l'issue de la période de prorogation de son stage, le tribunal administratif de Versailles a considéré que l'intéressé n'avait pas bénéficié d'un "plan de formation"prévu par les textes ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Sur la légalité externe de la décision attaquée :
Considérant, en premier lieu, que le licenciement d'un stagiaire en fin de stage n'entre dans aucune des catégories de mesures qui doivent être motivées en application de la loi du 11 juillet 1979 ; que, par suite, l'absence de motivation de l'arrêté rectoral attaqué n'a pas entaché celui-ci d'illégalité ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté attaqué en date du 10 juillet 1995 a été établi suivant le modèle défini à l'Annexe II de la note de service du 9 mars 1993 susvisée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté en cause serait entaché d'une irrégularité en la forme en ce qu'il aurait été établi à tort sur le formulaire prévu à l'Annexe I de ladite note de service, manque en fait et ne peut, en tout état de cause, qu'être rejeté ;
Considérant, en troisième lieu, que si M. A... soutient que des rapports d'inspection de Mme Y... en date du 21 juin 1994, de M. X... en date du 1er juin 1995 et de M. Z... en date du 29 juin 1995 ne lui ont pas été communiqués, en méconnaissance des disposition de la loi du 17 juillet 1978 auxquelles renvoie la note de service susvisée du 9 mars 1993, de telles circonstances sont sans incidences sur la décision attaquée qui ne constitue pas un refus de communication ;
Sur la légalité interne de la décision attaquée :
Considérant, en premier lieu, que M. A... allègue que la décision portant renouvellement de son stage ne lui ayant été notifiée que le 29 novembre 1994 par courrier simple qu'il a réceptionné le 1er décembre 1994, cette décision n'a pris effet qu'à cette date et que, par voie de conséquence et compte tenu de ce que la durée statutaire du stage renouvelé est d'une année, son licenciement ne pouvait intervenir que le 1er décembre 1995 et non le 1er septembre 1995 ; que si l'administration a effectivement notifié avec retard l'arrêté rectoral susmentionné, la circonstance est en tout état de cause sans influence sur la légalité de l'arrêté de licenciement dès lors que l'intéressé a effectivement bénéficié d'une nouvelle année de stage ;
Considérant, en second lieu, que, lors de l'évaluation effectuée les 1er et 29 juin 1995 par deux inspecteurs de l'éducation nationale, il fut relevé que l'intéressé n'avait pas mis à profit la prorogation de son stage ni les conseils et recommandations dont il avait bénéficié durant cette période pour surmonter ses insuffisances ; que les irrégularités relevées par M. A... dans la tenue de son dossier n'établissent pas qu'elles auraient influé sur la décision du jury de ne pas le faire figurer sur la liste proposée au recteur pour l'attribution du diplôme de professeur des écoles ; que si M. A... allègue, d'une part, que son enseignement était apprécié des élèves ainsi que de leurs parents, et ce, malgré qu'il ait été affecté dans des classes de zones particulièrement difficiles, d'autre part, que l'I.U.F.M. ne lui aurait pas prodigué une véritable formation ni même de simples conseils pédagogiques, de telles allégations ne suffisent pas à démontrer que la décision de licenciement dont il a été l'objet par arrêté rectoral en date du 10 juillet 1995 serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le MINISTRE de l'EDUCATION NATIONALE, de l'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR et de la RECHERCHE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 10 juillet 1995 par lequel le recteur de l'académie de Versailles a prononçé le licenciement de M. A..., professeur des écoles stagiaire ;
Article 1er : Le jugement n 954340-954480 en date du 4 mars 1996 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.