La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/03/1999 | FRANCE | N°97PA01538

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4e chambre, 25 mars 1999, 97PA01538


(4ème Chambre B)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 17 juin 1997 sous le n 97PA01538, présentée pour Mme Martine Z... demeurant ..., par Me Y..., avocat ; Mme Z... demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n 966124 en date du 8 avril 1997 par lequel le tribunal administratif de Melun a condamné la commune de Saint-Soupplets à payer à Mme Z... la somme de 10.000 F à titre d'indemnisation de son préjudice moral, ainsi que 4.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et a rejeté le surplus

des conclusions de la demande de Mme Z... qui tendaient à l'annula...

(4ème Chambre B)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 17 juin 1997 sous le n 97PA01538, présentée pour Mme Martine Z... demeurant ..., par Me Y..., avocat ; Mme Z... demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n 966124 en date du 8 avril 1997 par lequel le tribunal administratif de Melun a condamné la commune de Saint-Soupplets à payer à Mme Z... la somme de 10.000 F à titre d'indemnisation de son préjudice moral, ainsi que 4.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de Mme Z... qui tendaient à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune en date du 27 septembre 1996 portant reconstitution de carrière et indemnité de 38.681,75 F, à la condamnation de la commune à lui payer la somme de 707.041,19 F avec intérêts de droit, ainsi que 20.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux adminis-tratifs et des cours administratives d'appel ;
2 ) d'annuler l'arrêté du 27 septembre 1986 portant reconstitution de carrière ;
3 ) de condamner la commune de Saint-Soupplets à lui verser une indemnité de 707.041,19 F, sauf à parfaire, avec intérêts au taux légal ;
4 ) de condamner la commune à lui payer la somme de 20.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n 84-53 du 26 janvier 1984, modifiée, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
VU le décret du 9 septembre 1965 ;
VU le décret n 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime de congés maladie de fonctionnaires territoriaux ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 1999 :
le rapport de Mme de SALINS, premier conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour Mme Z...,
- et les conclusions de M. LAMBERT, commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les premiers juges ont statué sur la demande de Mme Z... relative à la régularité de sa reconstitution de carrière sans examiner le moyen soulevé par l'intéressée selon lequel l'indemnité allouée à ce titre par la commune de Saint-Soupplets était insuffisante en ce qu'elle n'incluait pas le montant du supplément familial de traitement auquel elle pouvait prétendre ; que, dans ces conditions, le jugement du tribunal administratif de Melun en date du 8 avril 1997 est entaché d'une omission de statuer sur ce point et doit être annulé ;
Considérant qu'il y lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme Z... devant le tribunal administratif de Melun ;
Sur la légalité de la reconstitution de carrière opérée par l'arrêté en date du 27 septembre 1996 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme Z... a été recrutée par la commune de Saint-Soupplets comme agent spécialisé des écoles maternelles puis titularisée dans cet emploi à temps incomplet à raison de 32 heures par semaine, par arrêté du 16 janvier 1985 ; que les fonctions de régisseur de la caisse des écoles lui ont également été confiées ; que le maire de la commune a réduit son horaire hebdomadaire de travail de 32 heures à 24 heures par arrêté du 5 septembre 1985 annulé par jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 16 février 1988 confirmé par une décision du Conseil d'Etat en date du 6 octobre 1995 au motif que la réduction du temps de travail ne pouvait pas intervenir sans une délibération préalable du conseil municipal ; que l'intéressée a été radiée des cadres pour abandon de poste par arrêté du maire en date du 25 avril 1987 qui a aussi été annulé par le tribunal administratif de Versailles par jugement en date du 23 janvier 1990 devenu définitif ; que, par arrêté du 11 avril 1990, le maire de la commune a réintégré Mme Z... dans les effectifs de la commune à compter du 25 avril 1987 et l'a placée en congé de maladie sans traitement à dater du même jour ; que, par un deuxième arrêté du 26 juin 1990, le maire l'a radiée définitivement des cadres de la commune le 14 octobre 1988, date de versement par le régime général de la sécurité sociale d'une pension d'invalidité en raison de son inaptitude définitive à l'exercice de ses fonctions constatée par le comité médical départemental le 16 avril 1987 ; que le tribunal administratif de Versailles a rejeté, par jugement en date du 30 janvier 1992, la demande de Mme Z... tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de ces deux derniers arrêtés ; que, pour exécuter la décision susmentionnée du Conseil d'Etat en date du 6 octobre 1995, le maire a, par l'arrêté attaqué du 27 septembre 1996, rétabli Mme Z... dans son emploi à temps non complet à raison de 32 heures par semaine à compter du 1er septembre 1985 (article 2), l'a placée en congé maladie ordinaire avec plein traitement du 13 octobre 1985 au 10 janvier 1986 (article 3) puis à demi traitement du 11 janvier 1986 au 24 avril 1987 (article 4) ; qu'il l'a nommée au 3ème échelon de l'indice 1 le 16 janvier 1987 avec l'indice brut 226 (article 5) ; que, tenant compte du jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 30 janvier 1992, il l'a placée en congé maladie sans traitement du 25 avril 1987 au 14 octobre 1988 (article 6), date à laquelle il l'a radiée des cadres de la commune en se référant à nouveau expressément à ce jugement (article 7) ; qu'enfin, il lui a accordé une indemnité de 38.681,75 F correspondant à la différence entre les revenus auxquels elle aurait pu prétendre au cours de cette période compte tenu de la reconstitution de carrière ainsi opérée et ceux qu'elle a effectivement perçus en remplacement (article 8) ;
Considérant, en premier lieu, que le maire de Saint-Soupplets, qui s'est borné à tirer les conséquences de la décision du Conseil d'Etat en date du 5 septembre 1995, était compétent pour procéder à la reconstitution de la carrière de Mme Z... ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté du 27 septembre 1996, en tant qu'il place Mme Z... en congé maladie sans traitement du 25 avril 1987 au 14 octobre 1988 et qu'il la radie des cadres de la commune à partir de cette dernière date, doit être regardé comme une décision purement confirmative des arrêtés en date des 11 avril 1990 et 26 juin 1990 ; que l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 30 janvier 1992 qui a rejeté la demande de Mme Z... dirigée contre ces arrêtés et fondée sur leur illégalité interne, s'oppose à ce que, dans le cadre de la présente instance, Mme Z... puisse, comme elle le fait, contester pour des motifs de légalité interne les articles 6 et 7 de l'arrêté du 27 septembre 1996 ; que lesdites conclusions sont irrecevables et doivent, par suite, être rejetées ; qu'en revanche, l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 30 janvier 1992 ne fait pas obstacle à ce que la requérante conteste la légalité des autres articles de cet arrêté ;
Considérant, en troisième lieu, que l'arrêté du 27 septembre 1996 a bien rétabli Mme Z... dans son emploi à raison de 32 heures par semaine ; que si le maire de Saint-Soupplets était en conséquence, ainsi que les premiers juges l'ont à juste titre relevé, tenu de la réaffilier à la CNRACL en application de l'article 107 de la loi du 26 janvier 1984, l'absence de mention de cette affiliation dans l'arrêté attaqué n'est pas de nature à entacher celui-ci d'illégalité, dès lors qu'aucun texte n'impose une telle mention ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 109 de la loi susvisée du 26 janvier 1984, dans sa rédaction en vigueur à la date à laquelle Mme Z... a été placée en congé maladie : "Les dispositions de la présente loi sont applicables aux fonctionnaires nommés dans des emplois permanents à temps non complet, sous réserve des dérogations prévues par décret en Conseil d'Etat rendues nécessaires par la nature de ces emplois" ; que, toutefois, ces dispositions, faute d'intervention du décret d'application qu'elles prévoient, n'étaient pas entrées en application avant le 24 avril 1987 ; que, par suite, la situation des agents titulaires employés à temps non complet demeurait régie, avant cette date, par les dispositions des articles L.421-1 et L.421-2 du code des communes dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 26 janvier 1984 ; que ces articles rendent applicables aux agents employés à temps non complet les dispositions de l'article L.415-11 du même code ; que, dans ces conditions, la commune de Saint-Soupplets n'a pas méconnu lesdites dispositions en plaçant l'intéressée en congé maladie ordinaire avec plein traitement du 13 octobre 1985 au 10 janvier 1986 puis avec demi-traitement du 11 janvier 1986 au 24 avril 1987 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Z... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 27 septembre 1996 en tant qu'il procède à la reconstitution de sa carrière à la suite de l'annulation, confirmée par le Conseil d'Etat, de la décision du maire de Saint-Soupplets en date du 5 septembre 1985 réduisant le nombre d'heures de service de l'intéressée ;
Sur les conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice subi du fait de la perte de revenus :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède qu'en calculant les indemnités dues à Mme Z... en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la réduction illégale de son nombre d'heures de travail puis de son licenciement illégal pour abandon de poste, sur la base d'un plein traitement à raison de 32 heures par semaine du 13 octobre 1985 au 10 janvier 1986, puis d'un demi traitement du 11 janvier 1986 au 24 avril 1987, la commune n'a pas fait une insuffisante appréciation du préjudice subi par l'intéressée ; qu'il ressort des pièces du dossier que les sommes ainsi allouées comprenaient le montant du supplément familial de traitement ;
Considérant, en deuxième lieu, que Mme Z..., qui était en congé maladie et qui a été déclarée définitivement inapte à exercer son emploi par le comité médical en avril 1987, ne tenait d'aucun texte le droit de percevoir un traitement de la commune au-delà du 25 avril 1987, quelle que soit la caisse d'assurance à laquelle elle était affiliée ; que, dans ces conditions, la décision de la radier des cadres le 25 avril 1987 et celle de la placer en congé maladie sans traitement à compter de la même date ne lui ont créé aucun préjudice matériel ;
Considérant, en troisième lieu, que la décision de la radier des cadres de la commune à compter du 14 octobre 1988, date à partir de laquelle une pension d'invalidité lui a été accordée par la caisse d'assurance maladie, n'est entachée d'aucune erreur de fait, de droit ou d'appréciation ; que, dans ces conditions, cette décision qui n'est pas fautive, ne crée aucun droit à indemnisation au profit de la requérante ;
Considérant, en dernier lieu, que Mme Z..., qui n'a pas saisi la commission de réforme, afin que celle-ci se prononce sur l'imputation au service de sa maladie, n'établit pas, par la production de trois certificats médicaux, que l'état dépressif dont elle souffre et qui l'a rendue définitivement inapte à exercer ses fonctions résultent des seules mesures illégales prises par la commune à son égard ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en fixant à 38.681,75 F le montant du préjudice matériel subi par Mme Z... du fait des mesures illégales prises à son encontre par la commune de Saint-Soupplets, celle-ci n'a pas insuffi-samment évalué le montant de ce préjudice ; que la demande de Mme Z... tendant à ce que la commune soit condamnée à lui verser l'intégralité de son traitement à compter du 13 octobre 1985 en réparation dudit préjudice ne peut qu'être rejetée ;
Sur la réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que tant la mesure réduisant le nombre d'heures de travail de Mme Z... que celle la licenciant pour abandon de poste lui ont créé un préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence tenant notamment au fait que l'intéressée n'a jamais retrouvé d'emploi équivalent et au délai mis par la commune à la réintégrer après l'annulation des mesures litigieuses ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en fixant à 50.000 F, tous intérêts compris, le montant de l'indemnité due par la commune en réparation ; qu'en revanche, Mme Z... ne peut prétendre à être indemnisée du préjudice moral que lui aurait causé la décision du 6 septembre 1985 lui retirant les fonctions de régisseur de la caisse des écoles, dès lors que cette mesure d'ordre intérieur n'est pas motivée par une quelconque malversation mais se réfère à la mauvaise tenue de cette caisse, motif qui n'est pas erroné ; que, par suite, il y a lieu de condamner la commune de Saint-Soupplets à verser à Mme Z... une indemnité de 50.000 F, y compris tous intérêts à la date du présent arrêt, en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'elle a subi et de rejeter le surplus de sa demande à ce titre ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'arti-cle L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que Mme Z..., qui n'est pas la partie perdante dans le cadre de la présente instance, soit condamnée sur leur fondement ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune de Saint-Soupplets à lui verser une somme de 10.000 F au titre des frais qu'elle a exposés, sur le fondement des mêmes dispositions ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Melun en date du 8 avril 1997 est annulé.
Article 2 : La commune de Saint-Soupplets est condamnée à verser une indemnité de 50.000 F, tous intérêts compris à la date du présent arrêt, à Mme Z....
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de Mme Z... et de sa requête ainsi que l'appel incident et les conclusions de la commune de Saint-Soupplets tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux admini-stratifs et des cours administratives d'appel sont rejetés.
Article 4 : La commune de Saint-Soupplets versera à Mme Z... une somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 97PA01538
Date de la décision : 25/03/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

54-06-07-005 PROCEDURE - JUGEMENTS - EXECUTION DES JUGEMENTS - EFFETS D'UNE ANNULATION


Références :

Code des communes L421-1, L421-2, L415-11
Loi 84-53 du 26 janvier 1984 art. 107, art. 109


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme de SALINS
Rapporteur public ?: M. LAMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1999-03-25;97pa01538 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award