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10/12/1998 | FRANCE | N°96PA00437

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 10 décembre 1998, 96PA00437


(1ère Chambre B)
VU la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour les 20 février et 9 avril 1996, présentés pour la société anonyme FONCIERE PARIS NEUILLY, dont le siège social est sis, au ..., par Me X..., avocat ; la société requérante demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9308764/7 en date du 6 juillet 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du maire de Paris en date du 7 mai 1993 lui refusant un permis de construire sur un terrain sis ..., ensemble cet arrêté

;
2 ) de condamner la ville de Paris à lui verser la somme de 10.000 F s...

(1ère Chambre B)
VU la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour les 20 février et 9 avril 1996, présentés pour la société anonyme FONCIERE PARIS NEUILLY, dont le siège social est sis, au ..., par Me X..., avocat ; la société requérante demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9308764/7 en date du 6 juillet 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du maire de Paris en date du 7 mai 1993 lui refusant un permis de construire sur un terrain sis ..., ensemble cet arrêté ;
2 ) de condamner la ville de Paris à lui verser la somme de 10.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces produites et jointes au dossier ;
VU le code de l'urbanisme ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 1998 :
- le rapport de M. BARBILLON, premier conseiller,
- les observations du cabinet FOUSSARD, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la ville de Paris,
- et les conclusions de Mme COROUGE, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, par une décision en date du 7 mai 1993, le maire de Paris a refusé de délivrer à la société anonyme FONCIERE PARIS NEUILLY un permis de construire en vue de la construction d'un ensemble de bâtiments sur un terrain sis au ..., aux motifs que, d'une part, le projet ne pouvait bénéficier des dispositions du paragraphe UH 14-1-3 de l'article UH 14 du règlement du plan d'occupation des sols et que, d'autre part, il était caractérisé par un dépassement du coefficient d'occupation du sol se traduisant par une insuffisance théorique de terrain de 290,33 m qui ne pouvant être justifiée par un motif d'architecture, ne respectait pas les dispositions de l'article UH 14-1-1 du règlement annexé au plan d'occupation des sols révisé de la ville de Paris, approuvé par la délibération du conseil de Paris en date du 20 novembre 1989 ; que la société FONCIERE PARIS NEUILLY fait appel du jugement en date du 6 juillet 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre cette décision ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R.421-12 du code de l'urbanisme : "si le dossier est complet, l'autorité compétente pour statuer fait connaître au demandeur, dans les quinze jours de la réception de la demande en mairie, par une lettre de notification adressée par pli recommandé avec demande d'avis de réception postal, le numéro d'enregistrement de ladite demande et la date avant laquelle, compte tenu des délais réglementaires d'instruction, la décision devra lui être notifiée ... L'autorité compétente pour statuer avise en outre le demandeur que si aucune décision ne lui a été adressée avant la date mentionnée à l'alinéa précédent, ladite lettre vaudra permis de construire et les travaux pourront être entrepris conformément au projet déposé, sous réserve du retrait, dans le délai de recours contentieux, du permis tacite au cas où il serait entaché d'illégalité. Toutefois, lorsque le projet se trouve dans l'un des cas prévus à l'article R.421-19, le demandeur est informé qu'il ne pourra bénéficier d'un permis tacite" ; et qu'aux termes de l'article R.421-19 du même code : "Le constructeur ne peut bénéficier d'un permis de construire tacite dans les cas ci-après énumérés : ... c) Lorsque la construction est située dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit ..." ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de la demande de permis de construire présentée le 7 décembre 1992 par la société FONCIERE PARIS NEUILLY, la ville de Paris, en application des dispositions précitées de l'arti-cle R.421-12 du code de l'urbanisme, a adressé à la société requérante une lettre de notification dans laquelle le délai d'instruction de la demande était fixé à trois mois et expirait le 7 mars 1993 ; que, dès lors qu'il est constant que la construction projetée est située dans le champ de visibilité d'un monument historique, aucun permis tacite ne pouvait naître, en raison des dispositions susrappelées de l'article R.421-19 du code de l'urbanisme, au profit de la société pétitionnaire à l'expiration de ce délai ; que dans ces conditions, la société FONCIERE PARIS NEUILLY ne peut soutenir qu'à défaut pour la ville de Paris de l'avoir informé que son projet était soumis à ces dispositions, elle détenait, à l'expiration du délai susmentionné, un permis de construire tacite lui conférant des droits auxquels la décision de rejet de sa demande aurait irrégulièrement porté atteinte ;
Considérant, en deuxième lieu, que la société FONCIERE PARIS NEUILLY soutient qu'en estimant que le paragraphe UH 14-1-3 de l'article UH 14 du règlement du plan d'occupation des sols ne pouvait être appliqué au projet envisagé, la ville de Paris a commis une erreur de droit ;
Considérant que les dispositions de ce paragraphe prévoient, sous certaines conditions, que la reconstruction de bâtiments ou de corps de bâtiment peut être autorisée sans versement de la participation pour dépassement du coefficient d'occu-pation des sols lorsque la surface hors oeuvre nette du bâtiment à construire est au plus égale à celle du bâtiment existant à la date du dépôt de la demande de permis de construire ; que la ville de Paris a écarté l'application de ces dispositions ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société FONCIERE PARIS NEUILLY avait obtenu le 14 décembre 1989 un permis de construire pour la restructuration d'un ensemble immobilier situé ... (9ème arron-dissement), comportant notamment la surélévation de deux étages du bâtiment R+3 sur rue ; qu'il ressort de ces mêmes pièces que la société pétitionnaire avait achevé ces travaux de surélévation le 14 mai 1991, date à laquelle le tribunal administratif de Paris a annulé le permis de construire qui lui avait été délivré ; que dans ces conditions, la demande de permis de construire que le maire de Paris a rejeté par la décision attaquée, qui portait notamment sur la construction d'un bâtiment sur rue de R+5 étages sur quatre niveaux de sous-sol, à destination de bureaux, d'habitation et de stationnement, avec conservation partielle des façades, doit être regardée comme un permis de régula-risation portant surélévation de deux niveaux de la construction primitive et ne pouvait dès lors être regardée comme un projet de reconstruction, pouvant bénéficier des dispositions du paragraphe UH 14-1-3 de l'article UH 14 du règlement du plan d'occupation des sols ; que le maire de Paris n'a dès lors commis aucune erreur de droit en écartant l'application de ces dispositions audit projet ;

Considérant, en troisième lieu, qu'à supposer même que le paragraphe UH 4-1-3 soit entaché d'illégalité du fait de l'illégalité de la procédure de modification du plan d'occupation des sols approuvée le 30 mars 1992, cette circonstance, au demeurant non établie, est sans influence sur le bien-fondé de la décision attaquée dès lors que la ville de Paris n'a pas fait application de ces dispositions ;
Considérant, en quatrième lieu, que la société pétitionnaire ne peut soutenir utilement que le maire de Paris aurait dû examiner son projet au regard des dispositions du paragraphe UH 14-1-2 de l'article UH 14 dès lors que ces dispositions, qui ne concernent que les projets de modification extérieures restreintes de bâtiments existants, ne sont pas applicables au projet en cause dans le présent litige, qui avait pour but de permettre la régularisation de la construction des deux niveaux supplé-mentaires construits sur le fondement du permis de construire ultérieurement annulé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la société requérante, la demande de permis de construire qui a fait l'objet de la décision de refus attaquée, ne pouvait être examinée qu'au regard des dispositions du paragraphe UH 14-1-1 de l'article UH 14 du règlement du plan d'occupation des sols de la ville de Paris ;
Sur l'exception d'illégalité du plan d'occupation des sols révisé de la ville de Paris, approuvé le 20 novembre 1989, tirée de la désignation irrégulière des représentants du département de Paris dans la commission de travail chargée de l'élaboration du projet de révision du plan d'occupation des sols de Paris et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article R.123-3 du code de l'urbanisme : "l'établissement d'un plan d'occupation des sols est prescrit par délibération du conseil municipal. Cette délibération fixe les modalités de l'association des personnes publiques autres que l'Etat à l'élaboration du plan d'occupation des sols ..." ; qu'aux termes de l'article R.123-6 du même code : "La délibération prescrivant l'établissement du plan d'occupation des sols est notifiée par le maire aux présidents du conseil régional et du conseil général des régions et départements concernés ... Dans un délai de deux mois à compter de la transmission de cette délibération, les présidents du conseil régional et du conseil général ... font connaître au maire s'ils veulent être associés à l'élaboration du plan d'occupation des sols selon les modalités prévues à l'article R.123-3 et, dans l'affirmative, désignent à cet effet leurs représentants ..." ; que l'article R.123-7 de ce code dispose que le maire conduit la procédure d'élaboration du plan d'occupation des sols et publie par arrêté : "a) La liste des services de l'Etat communiquée par le commissaire de la République ... ainsi que celles des personnes publiques associées conformément au 2ème alinéa de l'article R.123-6 ..." ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si la délibération en date du 25 novembre 1985 par laquelle le conseil de Paris a décidé de poursuivre la révision totale du plan d'occupation des sols de la ville a institué à cet effet, par son article 2, une commission de travail qui comprend notamment, au titre des repré-sentants du conseil de Paris, outre les adjoints au maire concernés par le projet de révision, cinq représentants du conseil de Paris, siégeant en formation de conseil général, ces derniers ont été nommés au sein de la commission par l'arrêté en date du 16 juin 1986, pris par le maire de Paris en application des dispositions de l'article R.123-7 du code de l'urbanisme, en qualité de représentants des personnes publiques associées au titre du département de Paris ; que, dès lors, il appartenait au seul maire de Paris, agissant en tant que président du conseil de Paris au titre du département, de procéder à leur désignation en vertu des dispositions de l'arti-cle R.123-6 du code de l'urbanisme, sans que puisse y faire obstacle le statut particulier que la ville de Paris tient de la loi du 31 décembre 1982, et notamment de son article 38 ; qu'il est constant que, contrairement à cette règle, ces représentants ont été désignés, lors de sa séance en date du 24 mars 1986, par le conseil de Paris siégeant en formation de conseil général ; qu'il suit de là que la société anonyme FONCIERE PARIS NEUILLY est fondée à soutenir, par un moyen qu'elle avait déjà présenté dans sa demande devant le tribunal administratif de Paris, avant l'entrée en vigueur de l'article L.600-1 du code de l'urbanisme, qu'en raison du mode de désignation des représentants du département de Paris, la commission de travail chargée de la révision du plan d'occupation des sols de Paris a été irrégulièrement constituée ;
Considérant qu'il ressort également des pièces du dossier que quatre de ces cinq représentants ont participé, le 9 novembre 1987, à la huitième réunion de la commission de travail, au cours de laquelle les observations faites, s'agissant des règles de densité, par les collectivités publiques consultées sur le projet de révision du plan d'occupation des sols, portant en particulier sur les coefficients d'occupation des sols résultant des dispositions du paragraphe UH 14-1-1 de l'article UH 14, ont été analysées et des propositions ont été formulées sur ce point ; que le procès-verbal de cette réunion a été adopté lors de la neuvième réunion de la commission de travail en date du 1er décembre 1987, à laquelle participaient également quatre de ces représentants ; que la composition irrégulière de la commission de travail a ainsi entaché d'illégalité les délibérations et les propositions de modification adoptées en ce qui concerne l'article UH 14-1-1 du règlement du plan d'occupation des sols révisé de la ville de Paris ; qu'il en résulte que le refus opposé sur ce fondement par le maire de Paris à la demande présentée par la société FONCIERE PARIS NEUILLY ne saurait trouver de base légale dans ces dispositions ; que c'est dès lors à tort que le tribunal administratif les a retenues pour rejeter la demande de la société ;

Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article L.125-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de l'article 1er de la loi du 9 février 1994 : "L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma directeur, d'un plan d'occupation des sols ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu a pour effet de remettre en vigueur le schéma directeur, le plan d'occupation des sols ou le document d'urbanisme en tenant lieu immédiatement antérieur ..." ; qu'il y a lieu en conséquence, de rechercher si les dispositions du règlement du précédent plan d'occupation des sols de Paris, approuvé par arrêté préfectoral du 28 février 1977, qui mettent en oeuvre des règles similaires à celles sur lesquelles est fondée la décision de refus du permis de construire, sont susceptibles d'être substituées aux dispositions irrégulièrement invoquées ;
Considérant que les possibilités maximales d'occupation des sols dans la zone concernée par le projet de construction sont régies, dans le règlement du plan d'occupation des sols de Paris approuvé le 28 février 1977, par l'article UH 14 ; que ce projet, eu égard à ses caractéristiques, n'aurait pu être régulièrement instruit qu'au regard des dispositions du paragraphe UH 14-1 de l'article UH 14 du règlement du plan d'occupation des sols de Paris approuvé le 28 février 1977 qui détermine les coefficients d'occupation des sols applicables à ce type de projet ; que la société FONCIERE PARIS NEUILLY ne peut utilement se prévaloir devant le juge, sur le fondement de l'article 2 du décret du 28 novembre 1983, de ce que, par six arrêts en date du 14 décembre 1988, le Conseil d'Etat a écarté l'application du paragraphe UH 14-3 de l'article UH 14, paragraphe au demeurant distinct du paragraphe UH 14-1 du règlement du plan d'occupation des sols approuvé le 28 février 1977, applicable dans le présent litige ;
Considérant qu'aux termes du paragraphe UH 14-1 de l'article UH 14 du règlement du plan d'occupation approuvé le 28 février 1977 : "Les coefficients d'occupations des sols sont fixés à : 2,70 pour l'habitation, les commerces et les équipements collectifs privés (hôtels, garages, établissements d'enseignement, de soins, etc ..., Ambassades, Consulats, Légations et organisations Internationales Publiques). 1,00 pour les bureaux. 2,00 pour les activités." ; que l'application au projet en cause de ces coefficients, inférieurs à ceux issus du paragraphe UH 14-1-1 de l'article UH 14 du règlement du plan d'occupation des sols révisé approuvé le 20 novembre 1989, fixés à 3 pour les constructions à usage d'habitation et à 1,5 pour les constructions à usage de bureaux, s'opposait à ce qu'il soit fait droit à la demande de permis de construire présentée par la société FONCIERE PARIS NEUILLY ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société FONCIERE PARIS NEUILLY n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 7 mai 1993 par laquelle le maire de Paris a rejeté sa demande de permis de construire ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :

Considérant que la société FONCIERE PARIS NEUILLY succombe dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que la ville de Paris soit condamnée à lui verser une somme au titre des frais qu'elle a exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions précitées, de condamner la société FONCIERE PARIS NEUILLY, à payer à la ville de Paris, la somme de 5.000 F ;
Article 1er : La requête de la société anonyme FONCIERE PARIS NEUILLY est rejetée.
Article 2 : La société anonyme FONCIERE PARIS NEUILLY versera la somme de 5.000 F à la ville de Paris au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA00437
Date de la décision : 10/12/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-03-025-03 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - NATURE DE LA DECISION - REFUS DU PERMIS


Références :

Code de l'urbanisme R421-12, R421-19, R123-3, R123-6, R123-7, L600-1, L125-5
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BARBILLON
Rapporteur public ?: Mme COROUGE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1998-12-10;96pa00437 ?
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