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26/02/1998 | FRANCE | N°96PA01610

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 26 février 1998, 96PA01610


(1ère Chambre)
VU la requête, enregistrée le 3 juin 1996, présentée pour M. Georges X..., demeurant lotissement Pointe d'or, ..., représenté par Me COUDRAY, avocat ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9202971/5 en date du 6 février 1996 par lequel le conseiller désigné par le président du tribunal administratif de Paris, statuant en application de l'article L.4-1 du code des tribunaux administratifs et des cours admi-nistratives d'appel, a rejeté comme tardive sa demande de versement de l'indemnité d'éloignement ;
2 ) de condamner l'Etat à lui v

erser le montant de l'indemnité d'éloigne-ment, avec les intérêts de dro...

(1ère Chambre)
VU la requête, enregistrée le 3 juin 1996, présentée pour M. Georges X..., demeurant lotissement Pointe d'or, ..., représenté par Me COUDRAY, avocat ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9202971/5 en date du 6 février 1996 par lequel le conseiller désigné par le président du tribunal administratif de Paris, statuant en application de l'article L.4-1 du code des tribunaux administratifs et des cours admi-nistratives d'appel, a rejeté comme tardive sa demande de versement de l'indemnité d'éloignement ;
2 ) de condamner l'Etat à lui verser le montant de l'indemnité d'éloigne-ment, avec les intérêts de droit, à compter du 4 octobre 1980 et la capitalisation des intérêts échus ;
3 ) de condamner l'Etat (ministre de l'intérieur) à lui verser une somme de 8.542 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
C+ VU le décret n 53-1266 du 22 décembre 1953 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 février 1998 :
- le rapport de M. GUILLOU, premier conseiller,
- les observations de Me COUDRAY, avocat, pour M. X...,
- et les conclusions de Mme PHEMOLANT, commissaire du Gouver-nement ;

Considérant que M. X... a adressé le 4 octobre 1980 au préfet de police de Paris une réclamation tendant à obtenir l'attribution de l'indemnité d'éloi-gnement prévue par les dispositions de l'article 6 du décret du 22 décembre 1953 à laquelle il estimait avoir droit ; qu'après avoir réitéré plusieurs fois cette demande et, en dernier lieu, le 12 septembre 1991, il a saisi le tribunal administratif de Paris d'un recours, enregistré au greffe de ce tribunal le 25 février 1992 afin de faire valoir ses droits concernant l'attribution de l'indemnité d'éloignement précitée ; qu'eu égard aux conclusions ainsi formulées, le litige porté par M. X... devant le tribunal administratif présentait le caractère d'un litige de plein contentieux ; qu'aux termes de l'article R.102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Sauf en matière de travaux publics, le tribunal administratif ne peut être saisi que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification de la décision attaquée ... Toutefois, l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : 1 ) en matière de plein contentieux" ; qu'en l'absence, en l'espèce, de toute preuve apportée par l'administration, de la notification d'une décision expresse de rejet opposée aux demandes formulées par M. X..., aucune forclusion ne pouvait, par suite, lui être opposée ; qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme étant irrece-vable en raison de sa tardiveté ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'aux termes de l'article 6 du décret du 22 décembre 1953 portant aménagement du régime de rémunération des fonctionnaires de l'Etat en service dans les départements d'outre-mer : "les fonctionnaires de l'Etat domiciliés dans un département d'outre-mer, qui recevront une affectation en France métro-politaine à la suite de leur entrée dans l'administration, d'une promotion ou d'une mutation, percevront, s'ils accomplissent une durée minimum de service de quatre années consécutives en métropole, une indemnité d'éloignement non renouvelable" ; qu'il résulte de ces dispositions que, contrairement à ce que soutient le ministre de l'intérieur, l'indemnité peut par principe être accordée aux fonctionnaires originaires d'un département d'outre-mer recrutés en métropole depuis plus de deux ans au moment de leur titularisation, à condition qu'ils soient à cette date domiciliés dans leur département d'origine, c'est-à-dire qu'ils y aient conservé le centre de leurs intérêts matériels et moraux ; qu'il appartient à l'administration de rechercher sous le contrôle du juge, si cette condition est remplie au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... est originaire du département de la Guadeloupe où il est né en 1954 et où il a fait ses études de 1960 à 1974 avant de venir en métropole en 1975 pour y accomplir son service militaire ; que ses parents et ses frère et soeurs résident en Guadeloupe ; que, dans ces conditions, et bien qu'à l'issue de son service en 1976, il soit resté en métropole pour occuper des emplois dans le secteur privé pendant deux ans avant d'être recruté en qualité d'élève-gardien de la paix à compter du 1er octobre 1978 puis titularisé dans le corps des gardiens de la paix de la préfecture de police de Paris à compter du 1er septembre 1980, il doit être regardé, nonobstant son mariage en métropole, comme ayant conservé à cette dernière date le centre de ses intérêts matériels et moraux en Guadeloupe et donc comme domicilié au 1er septembre 1980 dans un département d'outre-mer au sens des dispositions précitées de l'article 6 du décret du 22 décembre 1953 ; que M. X... est dès lors fondé à soutenir que la décision implicite par laquelle le préfet de police de Paris, saisi de sa demande du 12 septembre 1991, lui a refusé le bénéfice de l'indemnité d'éloignement à la suite de son entrée dans l'administration, n'était pas fondée et à demander que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité correspondant au montant des sommes qui lui ont été indûment refusées ;
Considérant que l'état de l'instruction ne permet pas de fixer le montant de l'indemnité ; qu'il y a lieu de renvoyer M. X... devant l'administration pour y être procédé à la liquidation des sommes qui lui sont dues ; que le requérant a droit aux intérêts sur lesdites sommes à compter de la réception par l'administration de sa demande initiale du 4 octobre 1980, pour la première fraction de l'indemnité, puis à partir de leurs dates d'échéance pour les deux autres fractions ; que la capitalisation des intérêts a été demandée les 3 juin 1996 et 11 juin 1997 ; qu'à chacune de ces deux dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; qu'il y a lieu, conformément à l'article 1154 du code civil, de faire droit à ces demandes ;
Sur l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux adminis-tratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condam-ner l'Etat à verser à M. X... 8.542 F au titre des dispositions précitées ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 6 février 1996 est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X... une indemnité égale au montant de l'indemnité d'éloignement prévue par l'article 6 du décret du 22 septembre 1953. M. X... est renvoyé devant l'administration pour y être procédé à la liquidation de ladite indemnité.
Article 3 : Ladite indemnité portera intérêts à compter de la date de réception par l'administration de la demande du 4 octobre 1980 pour la première fraction et à compter des dates d'échéance de chacune des autres fractions.
Article 4 : Les intérêts seront capitalisés aux 3 juin 1996 et 11 juin 1997 pour porter eux-mêmes intérêts.
Article 5 : L'Etat (ministre de l'intérieur) versera 8.542 F à M. X... au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA01610
Date de la décision : 26/02/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

36-08-02 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - REMUNERATION - TRAITEMENT


Références :

Code civil 1154
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R102
Décret 53-1266 du 22 décembre 1953 art. 6


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. GUILLOU
Rapporteur public ?: Mme PHEMOLANT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1998-02-26;96pa01610 ?
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