La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/11/1997 | FRANCE | N°96PA02383

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 18 novembre 1997, 96PA02383


(1ère Chambre)
VU la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés les 14 août et 2 décembre 1996 au greffe de la cour administrative d'appel, présentés pour la société civile immobilière DE RIS RMB, dont le siège social est ..., représentée par son gérant domicilié audit siège, par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la société civile immobilière DE RIS RMB demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 936145 en date du 7 juin 1996 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'ét

at exécutoire en date du 3 février 1993 par lequel le directeur du Port autono...

(1ère Chambre)
VU la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés les 14 août et 2 décembre 1996 au greffe de la cour administrative d'appel, présentés pour la société civile immobilière DE RIS RMB, dont le siège social est ..., représentée par son gérant domicilié audit siège, par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la société civile immobilière DE RIS RMB demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 936145 en date du 7 juin 1996 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'état exécutoire en date du 3 février 1993 par lequel le directeur du Port autonome de Paris l'a mise en demeure de verser la somme de 12.272,60 F à titre de redevance pour l'occupation sans titre d'une parcelle du domaine public fluvial située au droit du quai A. Bouton à Viry-Châtillon, pendant une période allant du 30 juillet au 1er décembre 1992, à la condamnation de l'Etat à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, et à ce que le juge statue sur l'appartenance au domaine public des parcelles en litige ou, au besoin, désigne un expert afin de fournir tous éléments de droit et de fait de nature à déterminer les limites du domaine public fluvial ;
2 ) d'annuler cet état exécutoire ;
3 ) de condamner l'Etat à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
4 ) subsidiairement, d'ordonner une mesure d'instruction pour déterminer si la parcelle en cause fait partie du domaine public fluvial et quelle est la superficie de cette parcelle occupée par les remblais qu'elle a édifiés ;
5 ) de condamner le Port autonome de Paris à lui verser la somme de 8.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces produites et jointes au dossier ;
VU le code du domaine de l'Etat ;
VU le code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ;
VU le code civil ;
VU la loi n 68-917 du 24 octobre 1968 relative au Port autonome de Paris ;
VU le décret n 70-851 du 21 septembre 1970 portant délimitation de la circonscription du Port autonome de Paris et remise des installations portuaires ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 1997 :
- le rapport de M. BARBILLON, conseiller,

- les observations de Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la société civile immobilière DE RIS RMB et celles de la SCP BLIAH, STIBBE et ULLMO, avocat, pour le Port autonome de Paris,
- et les conclusions de Mme COROUGE, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que le Port autonome de Paris a émis le 3 février 1993 un état exécutoire à l'encontre de la société civile immobilière DE RIS RMB pour un montant s'élevant à 12.272,60 F et correspondant à la redevance due par cette société en raison de l'occupation sans titre d'une parcelle du domaine public fluvial située au droit du quai A. Bouton à Viry-Châtillon, pour une période allant du 30 juillet au 1er décembre 1992 ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de la société civile immobilière DE RIS RMB tendant à l'annulation de cet état exécutoire et à la condamnation de l'Etat à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
Sur la domanialité publique :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 du code du domaine public fluvial : "Les limites des cours d'eau domaniaux sont déterminées par la hauteur des eaux coulant à pleins bords avant de déborder ..." ; qu'aux termes de l'article 10 du même code : "La propriété des alluvions, relais, atterrissements, îles et îlots qui se forment naturellement dans les fleuves et rivières domaniaux est réglée par les dispositions des articles 556, 557, 560 et 562 du code civil" ; que l'article 556 du code civil dispose que "Les atterrissements et accroissements qui se forment successivement et imperceptiblement aux fonds riverains d'un fleuve ou d'une rivière s'appellent alluvion. L'alluvion profite au propriétaire riverain ..." ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que le domaine public fluvial incorpore les parcelles alluvionnaires en bordure de rivière ou de fleuve jusqu'au point où ces parcelles peuvent être inondées lors des périodes des plus hautes eaux ; qu'il résulte de l'instruction que la parcelle située au nord du quai A. Bouton en bordure de Seine, qui présente un caractère alluvionnaire, se situait, même avant les travaux de remblaiement effectués par la société civile immobilière DE RIS RMB, à un niveau moyen inférieur aux cotes atteintes par la Seine en période de plus hautes eaux ; que la société requérante ne peut dès lors soutenir, en se fondant sur les disposi-tions précitées de l'article 556 du code civil, que la parcelle litigieuse constitue un atterrissement de ses propriétés qui ne peut être inclus dans le domaine public fluvial ;
Sur le bien-fondé des redevances :
Considérant, en premier lieu, que les actes portant délimitation du domaine public n'ont pas le caractère d'actes réglementaires dont la légalité pourrait être invoquée par voie d'exception après l'expiration des délais de recours contentieux ; que la société civile immobilière DE RIS RMB n'est ainsi pas recevable, pour soutenir que le Port autonome de Paris n'était pas compétent pour prendre les états exécutoires attaqués, à se prévaloir de l'illégalité au regard des dispositions de l'article 3 de la loi susvisée du 24 octobre 1968, du plan annexé au décret susvisé du 21 septembre 1970, devenu définitif ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L.28 du code du domaine de l'Etat : "Nul ne peut, sans autorisation délivrée par l'autorité compétente, occuper une dépendance du domaine public national ou l'utiliser dans les limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous ..." ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que durant la période de travaux correspondant à la construction par la société civile immobilière DE RIS RMB d'un parc de bureaux et d'activités sur les parcelles dont elle est propriétaire, cette société a fait procéder au remblaiement de la parcelle litigieuse et l'a en partie clôturée, malgré la mise en garde qui lui a été adressée par le Port autonome de Paris le 19 avril 1990 et bien qu'elle se soit engagée, en réponse à cette lettre, à faire évacuer lesdits remblais ; que si la société civile immobilière DE RIS RMB fait valoir que les remblais ont été aplanis, que le niveau de la parcelle n'a pas été sensiblement modifié et que l'aspect de cette parcelle a été "amélioré" par le remblaiement, ces circonstances sont sans influence sur sa situation d'occupante sans titre d'une dépendance du domaine public fluvial de l'Etat ; que la société requérante était, dès lors, astreinte au paiement d'une redevance, conformément aux dispositions précitées de l'article L.28 du code du domaine de l'Etat ;
Sur le montant de la redevance :
Considérant, en premier lieu, que si la société civile immobilière DE RIS RMB affirme n'avoir clôturé pour les besoins de ses travaux qu'une portion de 2.800 m de la surface de la parcelle alluvionnaire, il résulte de l'instruction qu'elle a effectué des remblais sur toute cette parcelle ; qu'il en résulte, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, que la société requérante n'est pas fondée à demander à être déchargée d'une partie de la redevance ;
Considérant, en second lieu, qu'il n'est pas établi que la bande de terrain, située entre un ancien quai et l'actuel quai A. Bouton dont la société civile immobilière DE RIS RMB soutient être propriétaire, soit incluse dans la surface de la parcelle alluvionnaire qu'elle a occupée irrégulièrement ; qu'elle ne peut, dès lors, soutenir qu'elle n'avait pas à verser de redevance pour cette partie du terrain ;
Sur l'appel en garantie :
Considérant que la circonstance, à la supposer établie, que le service de la navigation de la Seine, consulté par la commune de Viry-Châtillon dans le cadre de l'instruction d'un permis de construire, aurait commis une erreur dans la délimitation de l'une des parcelles appartenant à la société requérante, n'est pas de nature à engager la responsabilité pour faute de l'Etat dans le cadre du présent litige, dès lors qu'il résulte de l'instruction que ce service ne s'est pas prononcé, lors de cette consultation, sur la délimitation du domaine public fluvial ; que les conclusions de la société requé-rante tendant à ce que l'Etat la garantisse des condamnations prononcées à son encontre pour avoir occupé irrégulièrement le domaine public fluvial de la Seine ne peuvent ainsi qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que la société civile immobilière DE RIS RMB succombe dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que le Port autonome de Paris et l'Etat soient condamnés à lui verser une somme au titre des frais qu'elle a exposés doit, en conséquence, être rejetée ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions précitées, de condamner la société civile immobilière DE RIS RMB à payer au Port autonome de Paris la somme de 5.000 F ;
Article 1er : La requête de la société civile immobilière DE RIS RMB est rejetée.
Article 2 : La société civile immobilière DE RIS RMB versera la somme de 5.000 F au Port autonome de Paris au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA02383
Date de la décision : 18/11/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - CONSISTANCE ET DELIMITATION - DOMAINE PUBLIC NATUREL - CONSISTANCE DU DOMAINE PUBLIC FLUVIAL - TERRAINS FAISANT PARTIE DU DOMAINE PUBLIC FLUVIAL.

DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - PROTECTION DU DOMAINE - CONTRAVENTIONS DE GRANDE VOIRIE - FAITS CONSTITUTIFS.


Références :

Code civil 556
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Code du domaine de l'Etat L28
Décret 70-851 du 21 septembre 1970 annexe
Loi 68-917 du 24 octobre 1968 art. 3


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BARBILLON
Rapporteur public ?: Mme COROUGE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1997-11-18;96pa02383 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award