(1ère Chambre)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 31 mai 1995, présentée pour M. Marc Y..., demeurant au marché Saint-Martin, ..., par Me X..., avocat ; M. Y... demande à la cour :
1°) de suspendre à titre provisoire l'exécution de l'ordonnance du 12 mai 1995, par laquelle le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, statuant en référé, lui a ordonné, à la demande de la ville de Paris, de libérer immédiatement l'emplacement et les dépendances qu'il occupe sur le marché couvert Saint-Martin sis ..., 10ème, faute de quoi la ville de Paris fera procéder à son expulsion ;
2°) d'annuler ladite ordonnance ;
3°) de condamner la ville de Paris à lui verser la somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 janvier 1996 :
- le rapport de M. DACRE-WRIGHT, conseiller,
- les observations du cabinet FOUSSARD, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la ville de Paris,
- et les conclusions de Mme PHEMOLANT, commissaire du Gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité de l'ordonnance ni les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article R.130 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "En cas d'urgence, le président du tribunal administratif ... ou le magistrat qu'(il) délègue peut sur simple requête qui ... sera recevable même en l'absence d'une décision administrative préalable, ordonner toutes mesures utiles sans faire préjudice au principal et sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative" ; qu'il résulte de ces dispositions que les pouvoirs du juge des référés sont limités aux cas d'urgence ;
Considérant que la convention du 11 août 1989 par laquelle le maire de Paris a concédé à M. Y... l'emplacement n° B6/B7 du marché couvert Saint-Martin et ses dépendances aux fins d'y exploiter un commerce de salon de thé-cafétéria, a été résiliée par une décision de la même autorité, en date du 16 novembre 1994, l'intéressé n'ayant pas donné suite à la mise en demeure qui lui avait été faite le 4 mai 1994 d'avoir à payer dans le délai d'un mois les arriérés de charges et redevances dues au titre de la convention ;
Considérant que si M. Y... a cessé d'avoir un titre lui permettant d'occuper le domaine public, les affirmations de la ville de Paris selon laquelle son refus de quitter les lieux l'empêchait de donner satisfaction à d'autres commerçants pour obtenir la concession de l'emplacement ne sont pas corroborées par les pièces du dossier ; qu'il ne résulte pas plus de l'instruction que M. Y... perturbait le fonctionnement de ce marché ; qu'ainsi, l'expulsion de M. Y... ne présentait pas, en l'espèce, un caractère d'urgence ; que, dès lors, M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Paris lui a ordonné de libérer l'emplacement et les dépendances qu'il occupait au besoin avec le concours de la force publique ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que la ville de Paris succombe en la présente instance ; que sa demande tendant à ce que M. Y... soit condamné à lui verser une somme de 10.000 F au titre des frais qu'elle a exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de M. Y... ;
Article 1er : L'ordonnance n° 9504477/7/RA du 12 mai 1995 du magistrat délégué par la président du tribunal administratif de Paris est annulée.
Article 2 : La demande présentée par la ville de Paris devant le juge des référés du tribunal administratif est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. Y... et de la ville de Paris tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.