VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 10 janvier 1994, présentée par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1049/92 en date du 27 octobre 1993 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé la décision du 1er octobre 1992 du directeur départemental de l'équipement de l'Essonne rejetant la demande de M. Jean-Marc X... tendant au bénéfice de l'indemnité d'éloignement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le décret n° 53-1266 du 22 décembre 1953 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; le décret n° 92-245 du 17 mars 1992 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 décembre 1994 :
- le rapport de Mme MESNARD, conseiller ;
- et les conclusions de M. MERLOZ, commissaire du Gouvernement ;
Sur l'appel principal du MINISTRE DE L'EQUI-PEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par M. X... :
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant que le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion n'a pas dénaturé le sens et la portée de la requête de M. X... en regardant celle-ci comme tendant, en réalité, à l'annulation de la décision du directeur départemental de l'équipement de l'Essonne du 1er octobre 1992 rejetant sa demande de versement de l'indemnité d'éloignement ; que le ministre requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la demande présentée par M. X... était irrecevable ;
Au fond :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 du décret du 22 décembre 1953 portant aménagement du régime de rémunération des fonctionnaires de l'Etat en service dans les départements d'outre-mer : "Les fonctionnaires de l'Etat domiciliés dans un département d'outre-mer, qui recevront une affectation en France métropolitaine à la suite de leur entrée dans l'administration, d'une promotion ou d'une mutation, percevront, s'ils accomplissent une durée minimum de quatre années consécutives en métropole, une indemnité d'éloignement non renouvelable" ; qu'il résulte de ces dispositions que, contrairement aux termes d'une circulaire du 22 janvier 1986 portant compte-rendu d'une réunion interministérielle du 14 janvier 1986, l'indemnité peut, par principe, être accordée aux fonc-tionnaires originaires d'un département d'outre-mer séjournant en métropole depuis plus de deux ans au moment de leur titularisation, à la condition qu'ils aient, à cette date, été domiciliés dans leur département d'origine, c'est à dire qu'ils y aient conservé le centre de leurs intérêts matériels et moraux ; qu'il appartient à l'administration de rechercher sous le contrôle du juge si cette condition est remplie au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., dont les parents sont originaires de la Réunion et dont la mère et le frère y résident, a vécu dans ce département depuis sa naissance, le 27 février 1959, et y a poursuivi des études jusqu'en 1977 ; qu'il y est revenu après avoir accompli en métropole les obligations du service national et y est resté jusqu'au mois de décembre 1986, époque à laquelle il est retourné en métropole ; qu'il s'est marié le 12 décembre 1987 avec une personne originaire de la Réunion, dont les parents résident ainsi qu'il n'est pas contesté dans ce département d'outre-mer ; qu'après avoir été employé par la commune de Sainte-Geneviève-des-Bois, il a été recruté sur concours en qualité d'agent des travaux publics de l'Etat à compter du 1er novembre 1988 puis titularisé à compter du 1er novembre 1989 ; qu'il devait, à cette date, être regardé comme ayant conservé le centre de ses intérêts matériels et moraux à la Réunion, département dans lequel il a, d'ailleurs, passé, par la suite, en 1991, un congé bonifié et où il a été muté le 1er janvier 1992 ; qu'ainsi, M. X... avait droit, compte tenu de la date de sa titularisation et de celle de sa mutation, au versement des deux premières fractions de l'indemnité d'éloignement ; que le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME n'est, par suite, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé la décision en date du 1er octobre 1992 par laquelle le directeur départemental de l'équipement de l'Essonne a rejeté sa demande tendant au bénéfice de ladite indemnité ; que sa requête, doit, en conséquence, être rejetée ;
Sur les conclusions incidentes de M. X... tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser les intérêts et les intérêts des sommes dues ainsi qu'une somme de 50.000 F à titre de dommages-intérêts :
Considérant que ces conclusions se rattachent à un litige différent de celui que soulève l'appel principal qui tend à l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion s'est borné à annuler la décision du 1er octobre 1992 du directeur départemental de l'équipement de l'Essonne ; qu'ainsi, elles ne sont pas recevables et doivent, dès lors, être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'arti-cle L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circons-tances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat à verser à M. X... la somme de 6.000 F ;
Article 1er : La requête du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. X... une somme de 6.000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. X... est rejeté.