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21/01/1992 | FRANCE | N°90PA00531

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 21 janvier 1992, 90PA00531


VU la requête présentée pour M. Julien X..., demeurant à Marigot 97133 Saint-Barthélemy par la SCP Danielle et Richard GERVY, avocat à la cour ; elle a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 8 juin 1990 ; M. X... demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 59/80 en date du 26 mars 1990 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a limité à 60.000 F la somme accordée à M. X... à titre de dommages et intérêts, à la suite du refus de permis de construire illégal qui lui avait été opposé le 2 mai 1985 ;
2°) de condam

ner l'Etat, ministre de l'industrie et de l'aménagement du territoire à lui ver...

VU la requête présentée pour M. Julien X..., demeurant à Marigot 97133 Saint-Barthélemy par la SCP Danielle et Richard GERVY, avocat à la cour ; elle a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 8 juin 1990 ; M. X... demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 59/80 en date du 26 mars 1990 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a limité à 60.000 F la somme accordée à M. X... à titre de dommages et intérêts, à la suite du refus de permis de construire illégal qui lui avait été opposé le 2 mai 1985 ;
2°) de condamner l'Etat, ministre de l'industrie et de l'aménagement du territoire à lui verser une somme de 1.953.604 F ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 1992 :
- le rapport de Mme TRICOT, conseiller,
- les observations de Me GERVY, avocat à la cour, pour M. X...,
- et les conclusions de Mme MARTIN, commissaire du Gouvernement Considérant que, par jugement en date du 13 décembre 1985 devenu définitif, le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé l'arrêté du maire de Saint-Barthélemy en date du 2 mai 1985 rejetant la demande de permis de construire modificatif présentée par M. X... en vue de procéder à l'agrandissement d'une cave à vins et de ses annexes ; que le permis de construire concernant ce projet a finalement été accordé à M. X... le 11 mars 1986 ; que, par le jugement attaqué en date du 26 mars 1990, le tribunal administratif de Basse-Terre a décidé que le refus illégalement opposé par le maire de Saint-Barthélemy engageait la responsabilité de l'Etat et a condamné l'Etat à verser à M. X... une somme de 60.000 F portant intérêts à compter du 7 septembre 1987 ; que M. X... demande la réformation du jugement du 26 mars 1990 par lequel le tribunal administratif lui a accordé une indemnité de 60.000 F seulement à raison du préjudice résultant des frais de stockage supplémentaires imposés à M. X..., du préjudice financier ayant pour origine l'immobilisation d'un stock de bouteilles et lui a refusé toute indemnité pour les autres chefs du préjudice allégués ;

Sur les frais de stockage :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... qui pouvait à juste titre ainsi qu'il en a été jugé prétendre obtenir la délivrance d'un permis de construire en vue d'agrandir sa cave et ses annexes, a passé commande d'un nombre important de bouteilles de vins qu'il a dû entreposer à la "Maison Rocassel" à Egreville pendant une période de dix mois et demi consécutive à la décision illégale du 2 mai 1985 ; que le surcroît de frais engagés pour assurer le stockage desdites bouteilles a pour origine la faute commise par l'administration et ne saurait constituer la conséquence d'un risque commercial normal ; que, dans ces conditions, si le préjudice subi par M. X... est direct et certain, l'état du dossier ne permet pas à la cour administrative d'appel de déterminer le montant exact du préjudice subi, de la décision illégale qui lui a été opposée ; que, par suite, il y a lieu, avant de statuer sur le montant de l'indemnité à lui accorder d'ordonner une expertise aux fins de fournir à la cour tous éléments de nature à lui permettre d'évaluer le préjudice résultant directement des frais de stockage de bouteilles supplémentaires engagés par M. X... du fait du refus de permis de construire illégal du 2 mai 1985 ;
Sur l'immobilisation des stocks de bouteilles :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... avait payé les bouteilles dont il n'a pu avoir la disposition pendant une période de dix mois et demi consécutive à la décision illégale du 2 mai 1985 ; que si le préjudice financier résultant de cette immobilisation présente pour une partie des stocks immobilisés, un caractère direct et certain, l'état du dossier ne permet pas à la cour administrative d'appel d'apprécier le montant du préjudice subi à raison de ce chef de préjudice par M. X..., du fait de la décision illégale qui lui a été opposée ; que, par suite il y a lieu, avant de statuer sur le montant de l'indemnité à lui accorder d'ordonner une expertise aux fins de fournir à la cour tous éléments de nature à lui permettre d'apprécier le montant du préjudice financier résultant de l'immobilisation du stock de bouteilles directement imputable à la décision illégale du 2 mai 1985 ;
Sur la perte de bénéfices sur les vins :
Considérant que M. X..., soutient avoir subi une perte de bénéfices du fait de la décision illégale du 2 mai 1985 ; que, toutefois, l'état de l'instruction, en l'absence notamment de production de tous éléments comptables, ne permet pas à la cour administrative d'appel d'apprécier la réalité de la perte de bénéfices alléguée, ni, le cas échéant, son montant ; qu'il y a lieu, avant de statuer sur cette demande d'indemnité, d'ordonner une expertise en vue de fournir à la cour tous éléments lui permettant d'apprécier si, au cours de la période de dix mois et demi pendant laquelle la décision illégale a été susceptible d'entraîner un préjudice commercial pour M. X..., ce dernier a subi des pertes de bénéfices sur les vins directement imputables à ladite décision et si, tel était le cas, de fournir à la cour tous éléments comptables et extracomptables permettant d'apprécier le montant du préjudice subi ;
Sur la perte de loyers :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... qui avait trouvé un locataire pour occuper les bureaux compris dans le projet de construction a été privé du loyer desdits locaux à raison du retard de dix mois et demi consécutif à la décision illégale du 2 mai 1985 ; que, dès lors, le préjudice subi par M. X..., contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, présente un caractère certain ; que, toutefois, l'état du dossier ne permet pas à la cour administrative d'appel de déterminer le montant du préjudice imputable au refus illégal de permis de construire, notamment en ce qui concerne la surface des locaux commerciaux ayant fait l'objet d'une promesse de location et n'ayant pu être loués du fait de la décision illégale du 2 mai 1985 ; qu'il y a lieu d'étendre à cette fin la mission de l'expert ;
Sur le "préjudice moral" :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... a subi, du fait de la décision illégale du 2 mai 1985, des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en lui accordant une indemnité de 3.000 F tous intérêts compris ; que le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre du 26 mars 1990 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt ;
Sur les frais d'expertise ;
Considérant qu'il y a lieu de réserver les frais d'expertise pour y être statué en fin d'instance ;
Article 1er : L'indemnité que l'Etat, ministre de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace est condamné à verser à M. X... à raison de son préjudice moral est fixée à 3.000 F.
Article 2 : Avant de statuer sur le surplus du montant des indemnités à accorder à M. X... du fait des conséquences de la décision illégale du 2 mai 1985, il sera procédé, avant dire plus amplement droit, par un expert désigné par le président de la cour administrative d'appel de Paris à une expertise en vue de fournir à la cour les éléments de toute nature lui permettant d'apprécier :
1°) le préjudice subi par M. X... à raison des frais supplémentaires de stockage de bouteilles qu'il a engagés ;
2°) le préjudice subi par M. X... à raison des frais d'immobilisation de stocks de bouteilles ;
3°) le préjudice résultant pour M. X... des pertes de loyers, en donnant en particulier toutes précisions sur la surface des locaux commerciaux ayant fait l'objet d'une promesse de vente et n'ayant pu être loués ;
4°) La réalité et le cas échéant le montant du préjudice subi à raison des pertes alléguées de bénéfices sur les ventes de vins qui seraient en relation directe et certaine avec la décision illégale du 2 mai 1985.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 90PA00531
Date de la décision : 21/01/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-03-06-03 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - CONTENTIEUX DE LA RESPONSABILITE - PREJUDICE


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: TRICOT
Rapporteur public ?: MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1992-01-21;90pa00531 ?
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