La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/04/1999 | FRANCE | N°96NT01560

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 27 avril 1999, 96NT01560


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 juillet 1996, présentée pour M. Louis X..., demeurant ..., par Me ORHAN, avocat à la Cour ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 91589-91590 du 27 juin 1996 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1984, 1985, 1986 et 1987 et des suppléments de droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période correspondante ;
2 ) de prononcer la décharge d

es impositions contestées et des pénalités dont elles ont été assorties ;
3 ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 juillet 1996, présentée pour M. Louis X..., demeurant ..., par Me ORHAN, avocat à la Cour ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 91589-91590 du 27 juin 1996 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1984, 1985, 1986 et 1987 et des suppléments de droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période correspondante ;
2 ) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités dont elles ont été assorties ;
3 ) d'ordonner que, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur le pourvoi, il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mars 1999 :
- le rapport de M. ISAÏA, premier conseiller,
- et les conclusions de M. AUBERT, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décision en date du 19 décembre 1996 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux d'Ille-et-Vilaine a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 70 816 F, des compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. X... a été assujetti au titre des années 1984, 1985, 1986 et 1987 ; que les conclusions de la requête de M. X... relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant que M. X..., qui commercialise, sur les marchés, des vêtements confectionnés pour partie dans son entreprise, a fait l'objet en 1987 d'une vérification de comptabilité en matière de taxes sur le chiffre d'affaires et de bénéfices industriels et commerciaux qui a porté sur les années 1984, 1985 et 1986 ; qu'à la suite de ce contrôle le service a remis en cause les forfaits établis au titre des périodes biennales 1984-1985 et 1986-1987 et, après avoir déterminé de nouvelles bases forfaitaires, redressé les chiffres d'affaires et les bénéfices imposables au titre de ces quatre années ;
En ce qui concerne la caducité des forfaits :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8 du livre des procédures fiscales : "Le forfait de bénéfices industriels et commerciaux et de taxes sur le chiffre d affaires ... devient caduc lorsque le montant en a été fixé au vu de renseignements inexacts ou lorsqu'une inexactitude est constatée dans les documents dont la production ou la tenue est exigée par la loi. Il est alors procédé ... à l'établissement d'un nouveau forfait ... si le contribuable remplit encore les conditions prévues pour bénéficier du régime correspondant" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'examen des documents comptables et des justifications produites par le contribuable a permis au vérificateur de constater qu'au cours de la période vérifiée la répartition des achats entre ceux utilisés dans la fabrication des vêtements et ceux destinés à la revente était très différente de celle apparaissant sur les déclarations n 951 relatives aux années 1984, 1985 et 1986 ; que sur les sept machines utilisées pour la fabrication des vêtements, une seule avait été mentionnée sur les déclarations souscrites depuis la création de l'entreprise ; qu'en l'absence de livre d'inventaire l'évaluation des stocks n'a pu être vérifiée ; que la conjonction de ces différents éléments avait pour effet d'occulter en partie l'activité de fabrication, pour laquelle les coefficients multiplicateurs étaient les plus élevés et qui était donc la plus lucrative pour l'entreprise ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que les renseignements fournis par le contribuable étaient inexacts et que du fait qu'ils ont affecté de nombreuses rubriques figurant sur les déclarations n 951 la détermination des forfaits des périodes biennales 1984-1985 et 1986-1987 a été la conséquence de ces inexactitudes ; que, par suite, elle était en droit de prononcer la caducité de ces forfaits et d'en établir de nouveaux ;
En ce qui concerne l'établissement des nouveaux forfaits :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.191 du livre des procédures fiscales : "Lorsque l'imposition a été établie selon la procédure forfaitaire ..., la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la réduction de l'imposition" et qu'aux termes de l'article R.191-1 du même livre : "Dans le cas prévu à l'article L.191, le contribuable doit fournir tous éléments, comptables ou autres, de nature à permettre d'apprécier : ... b) l'importance du bénéfice que l'entreprise peut produire normalement, compte tenu de sa situation propre, s'il s'agit d'un bénéfice industriel et commercial ; c) l'importance des opérations que l'entreprise peut réaliser normalement, compte tenu de sa situation propre, s'il s'agit de la taxe sur la valeur ajoutée" ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 302 ter 2 bis du code général des impôts : "Les forfaits doivent tenir compte des réalités des petites entreprises et, en particulier, de l'évolution des marges dans l'activité considérée et de celle des charges imposées à l'entreprise. Ils sont, sous réserve d'une adaptation à chaque entreprise, établis sur la base de monographies professionnelles nationales ou régionales, élaborées par l'administration et communiquées aux organisations professionnelles qui peuvent présenter leurs observations" ;
Considérant, en premier lieu, que pour vérifier la comptabilité et établir les forfaits litigieux le vérificateur n'était pas tenu d'examiner les comptes bancaires mixtes détenus par M. X... ; que, par ailleurs, ce dernier ne conteste pas la procédure d'établissement des forfaits par la commission départementale des impôts ; que, dès lors, il lui appartient d'apporter la preuve du caractère exagéré des évaluations de l'administration ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'administration a reconstitué les recettes de M. X... au titre des années litigieuses en appliquant à chaque catégorie d'achats, après avoir effectué une ventilation que l'intéressé ne conteste pas, les coefficients relevés dans les monographies professionnelles, lesquels étaient d'ailleurs inférieurs à ceux résultant des propres déclarations de l'intéressé, l'emploi de cette méthode ayant été imposé, en l'espèce, notamment par l'absence du livre d'inventaire et par l'impossibilité matérielle de procéder à un relevé des prix pratiqués, le contribuable n'étant pas en mesure de les indiquer avec précision, en raison de la diversité de ses points de vente ; que si M. X... soutient que les coefficients retenus par l'administration sont excessifs il n'établit pas, de façon comptable ou extra-comptable, que ceux figurant dans ses déclarations auraient été déterminés en tenant compte seulement des achats de tissus destinés à la fabrication de vêtements, à l'exclusion des fournitures, sur lesquelles il n'aurait appliqué aucune marge bénéficiaire ; que si le requérant soutient que les forfaits qui lui ont été assignés n'étaient pas compatibles avec les résultats de son entreprise au cours des années 1988 à 1990, pour lesquelles il était soumis au régime réel simplifié, une telle affirmation, à la supposer fondée, ne permet pas d'apprécier, à la date où lesdits forfaits ont été établis par la commission départementale des impôts, soit le 20 octobre 1988, l'importance des affaires et du bénéfice que son entreprise pouvait normalement réaliser au cours des années 1984 à 1987 ; qu'enfin, sont sans portée probante les considérations générales selon lesquelles il était "matériellement impossible" au requérant de réaliser les chiffres d'affaires reconstitués ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a tenu compte de l'absence d'évolution des prix depuis 1984 et minoré les coefficients déclarés par le contribuable dans la mesure où ils étaient supérieurs à ceux qu'indiquaient les monographies professionnelles ; que, dès lors, M. X... n'est pas fondé à soutenir que, pour l'établissement des forfaits, le service n'aurait pas tenu compte des réalités des petites entreprises au sens des dispositions précitées de l'article 302 ter 2 bis du code général des impôts ;
Considérant, en dernier lieu, que l'instruction du 28 décembre 1984 qu'invoque le requérant vise le cas des entreprises qui, avant d'être au forfait, étaient soumises à un régime réel d'imposition, ce qui ne correspond pas à la situation de M. X... ; que l'instruction du 22 février 1993 est postérieure à la mise en recouvrement des impositions litigieuses ; que, par suite, le requérant ne saurait utilement invoquer ces deux instructions sur le fondement des dispositions de l'article L.80-A du livre des procédures fiscales ;
Considérant que, dans ces conditions, M. X... n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du caractère exagéré des évaluations de l'administration ;
Sur les pénalités pour mauvaise foi :

Considérant que M. X... soutient que les majorations pour mauvaise foi prévues par les articles 1729 et 1731 du code général des impôts, dans leur rédaction alors en vigueur, ne sont pas fondées ; que les renseignements inexacts qu'il a fournis au service ont cependant eu pour effet de sous-évaluer de façon importante les forfaits fixés en matière de bénéfice et de taxes sur le chiffre d'affaires pour l'ensemble de la période litigieuse ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme établissant la preuve de la mauvaise foi du contribuable ;
Considérant, toutefois, que les pénalités dont il s'agit présentent le caractère d'une sanction de nature pénale à laquelle doit être appliqué le principe de la loi nouvelle moins sévère ; que les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, dans leur rédaction issue de la loi n 87-502 du 8 juillet 1987, prévoient l'application d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie, alors qu'il résulte de l'instruction que, s'agissant des compléments d'impôt sur le revenu assignés à M. X... au titre des années 1984 et 1985, le service a fait application, dans ce cas, de la pénalité de 50 % prévue par l'article 1729 dans sa rédaction alors en vigueur lorsque le montant des droits est supérieur à la moitié des droits réellement dus ; qu'il convient, dès lors, de maintenir les pénalités dont il s'agit, dans la limite, s'il y a lieu, du montant de ces pénalités qui, après défalcation de la part correspondant aux intérêts de retard qu'elles incluaient, n'excède pas le taux de 40 % prévu par le 1 de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction issue du III de l'article 2 de la loi du 8 juillet 1987 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. X... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel était suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté la totalité de ses demandes ;
Article 1er : A concurrence de la somme de soixante dix mille huit cent seize francs (70 816 F), en ce qui concerne les compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. X... a été assujetti au titre des années 1984, 1985, 1986 et 1987, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X....
Article 2 : En ce qui concerne les compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. X... a été assujetti au titre des années 1984 et 1985 les pénalités pour mauvaise foi sont maintenues dans la limite, s'il y a lieu, du montant de ces pénalités qui, après défalcation de la part correspondant aux intérêts de retard qu'elles incluaient, n'excède pas le taux de 40 % prévu par le 1 de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction issue du III de l'article 2 de la loi du 8 juillet 1987.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 96NT01560
Date de la décision : 27/04/1999
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - AMENDES - PENALITES - MAJORATIONS - PENALITES POUR MAUVAISE FOI.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - REQUETES D'APPEL - INCIDENTS.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - FORFAIT.


Références :

CGI 1729, 1731
CGI Livre des procédures fiscales L8, L191, R191-1, 302 ter, L80, 1729
Loi 87-502 du 08 juillet 1987 art. 2


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. ISAÏA
Rapporteur public ?: M. AUBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1999-04-27;96nt01560 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award