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26/05/1998 | FRANCE | N°95NT00473

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 26 mai 1998, 95NT00473


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 avril 1995, présentée pour la S.A. DUFRA, qui a son siège au centre commercial Intermarché, avenue de la 2ème DB à Argentan (61200), par Me X..., avocat au barreau de Caen ;
La S.A. DUFRA demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 922658 du 31 janvier 1995 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1989 et 1990 ;
2 ) de dire que ses réclamations étaient recevables ;
3 ) de dire qu'

elle était en droit de prétendre à l'exonération temporaire de taxe professio...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 avril 1995, présentée pour la S.A. DUFRA, qui a son siège au centre commercial Intermarché, avenue de la 2ème DB à Argentan (61200), par Me X..., avocat au barreau de Caen ;
La S.A. DUFRA demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 922658 du 31 janvier 1995 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1989 et 1990 ;
2 ) de dire que ses réclamations étaient recevables ;
3 ) de dire qu'elle était en droit de prétendre à l'exonération temporaire de taxe professionnelle prévue par l'article 1464 B du code général des impôts ;
4 ) de dire que la valeur locative des locaux commerciaux appartenant à la SCI Val de Baize doit être déterminée par comparaison avec le local-type 182, comme l'a été celle du centre Leclerc lorsqu'il était implanté dans cette même zone, sur la base d'une valeur au m de 45 F ;
5 ) de lui accorder la décharge qu'elle sollicite ;
6 ) de condamner l'administration aux entiers dépens et de lui accorder une indemnité de 15 000 F en remboursement des frais irrépétibles engagés pour les besoins de l'instance juridictionnelle, comprenant notamment le remboursement des honoraires d'avocat, dont il sera justifié en cours d'instance, et du timbre fiscal exigé par l'article 44 de la loi de finances pour 1994 ;
7 ) d'ordonner le sursis à exécution du jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 avril 1998 :
- le rapport de M. ISAÏA, premier conseiller,
- et les conclusions de M. AUBERT, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité des conclusions de la demande :
Considérant qu'aux termes de l'article R.196-2 du livre des procédures fiscales : "Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts directs locaux et aux taxes annexes doivent être présentées à l'administration des impôts au plus tard le 31 décembre de l'année suivant ... l'année de mise en recouvrement du rôle ..." et qu'aux termes de l'article R.196-3 du même livre : "Dans le cas où un contribuable fait l'objet d'une procédure de reprise ou de redressement de la part de l'administration des impôts, il dispose d'un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses propres réclamations" ; qu'enfin, aux termes de l'article L.174 dudit livre : "Les omissions ou les erreurs concernant la taxe professionnelle peuvent être réparées par l'administration jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due" ;
Considérant, d'une part, que par une réclamation en date du 12 octobre 1992, reçue par l'administration le 14 octobre, jour de l'enregistrement de sa demande devant le tribunal, la S.A. DUFRA a contesté l'imposition primitive à la taxe professionnelle établie au titre de l'année 1990 et mise en recouvrement le 31 octobre 1990 ; qu'en application des dispositions précitées de l'article R.196-2 du livre des procédures fiscales, le délai de réclamation concernant cette imposition expirait le 31 décembre 1991 ; que, par suite, la réclamation dont il s'agit était tardive et qu'en conséquence les conclusions de la demande de la S.A. DUFRA étaient irrecevables en tant qu'elles visaient l'imposition susindiquée ; que, dès lors, c'est à bon droit que ces conclusions ont été rejetées par le tribunal ;
Considérant, d'autre part, que l'imposition supplémentaire à la taxe professionnelle mise à la charge de la S.A. DUFRA au titre de l'année 1989 a été établie à la suite d'une procédure de reprise ; qu'ainsi, en ce qui concerne les impositions dues au titre de cette même année, ladite société disposait d'un délai spécial de réclamation qui, en application des dispositions précitées de l'article L.174 du livre des procédures fiscales, allait jusqu'au 31 décembre de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due, soit jusqu'au 31 décembre 1992 ; que, par suite, sa réclamation en date du 6 janvier 1992, en tant qu'elle visait l'imposition primitive à la taxe professionnelle établie au titre de l'année 1989 n'était pas tardive et qu'à ce titre les conclusions de sa demande étaient donc recevables ; que, dès lors, le tribunal, en les déclarant irrecevables, a entaché son jugement d'irrégularité ; que celui-ci doit, dans cette mesure, être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande de la S.A. DUFRA tendant à la décharge de l'imposition primitive à la taxe professionnelle établie au titre de l'année 1989 ;
Sur le bénéfice de l'exonération de taxe professionnelle prévue par l'article 1464 B du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes de l'article 1464 B du code général des impôts : "I. Les entreprises créées du 1er juillet 1983 au 31 décembre 1988, soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et répondant aux conditions prévues aux 2 et 3 du II et au III de l'article 44 bis, peuvent être exonérées, dans les conditions prévues à l'article 1464 C, de la taxe professionnelle dont elles sont redevables, pour les établissements qu'elles ont créés ou repris à une entreprise en difficulté, au titre des deux années suivant celle de leur création ..." ; qu'aux termes de l'article 44 bis du même code : " ...II ... 2 A la clôture de l'exercice, le prix de revient des biens d'équipement amortissables selon le mode dégressif en application des dispositions du 1 de l'article 39 A doit représenter au moins les deux tiers du prix de revient total des immobilisations corporelles amortissables ; les entreprises qui ne remplissent pas cette condition à la clôture de leur premier exercice peuvent pratiquer l'abattement à titre provisoire ; cet avantage leur sera définitivement acquis si le pourcentage des deux tiers est atteint à la clôture de l'exercice suivant ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au 31 décembre 1989, date de clôture du premier exercice de la S.A. DUFRA, créée le 28 mars 1988, les biens amortissables selon le mode dégressif ne représentaient que 2,60 % du prix de revient total des immobilisations corporelles amortissables ; que si la société soutient que ce taux serait de 79,9 % au titre de l'année 1990 elle n'apporte aucun justificatif à ses allégations ; qu'elle ne peut, dès lors, être regardée, tant pour l'année 1989 que pour l'année 1990, comme remplissant la condition posée par les dispositions précitées du 2 du II de l'article 44 bis du code général des impôts ; que, par suite, elle n'est pas en droit de bénéficier, au titre des mêmes années, de l'exonération de la taxe professionnelle prévue par l'article 1464 B ;
Sur les bases d'imposition à la taxe professionnelle :
Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : "La taxe professionnelle a pour base : 1 Dans le cas des contribuables autres que les titulaires de bénéfices non commerciaux, les agents d'affaires et les intermédiaires de commerce employant moins de cinq salariés : a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de celles qui ont été détruites ou cédées au cours de la même période ..." ; qu'aux termes de l'article 1469 du même code : "La valeur locative est déterminée comme suit : 1 Pour les biens passibles d'une taxe foncière, elle est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe ..." ;

Considérant qu'en vertu de l'article 1495 du code général des impôts, relatif à l'évaluation des propriétés bâties : "Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation" ; que l'article 1498 du même code dispose : "La valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après :1 ) Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location : 2 ) a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel" ; qu'en application de l'article 324 B de l'annexe III au code général des impôts : "I. Pour l'application de l'article 1495 du code général des impôts, la date de l'évaluation s'entend du jour de clôture du procès-verbal des opérations de révision dans la commune" ;
Considérant que la S.A. DUFRA conteste la valeur locative attribuée, par voie de comparaison, aux locaux qu'elle a loués à Argentan et demande, en conséquence, la réduction de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1989 ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les locaux dans lesquels la société requérante exploite un magasin Intermarché et qui sont situés au carrefour de la rocade sud d'Argentan et de l'avenue de la 2ème DB, ont été comparés au local-type n 183, situé lui aussi sur la rocade et dans lequel était également exploité un supermarché ; que si à la différence des locaux litigieux ce local-type est entouré d'habitations et de nombreux magasins et activités de service, cette circonstance est sans incidence dès lors que la situation dudit local doit s'apprécier à la date à laquelle a été établi le procès-verbal complémentaire des opérations de révision des immeubles commerciaux d'Argentan, soit au 20 avril 1977 et qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'à ce jour il en aurait déjà été ainsi ; qu'est également sans incidence la triple circonstance que l'administration se serait fondée sur l'implantation du centre commercial dans une zone industrielle éloignée de toute population sédentaire pour refuser l'ouverture, à l'intérieur de la galerie marchande, d'un débit de tabac et la délivrance d'une licence de 4ème catégorie à un autre commerçant, que l'exploitant connaîtrait des difficultés d'achalandage depuis 1992 et, enfin, qu'un tarif plus faible aurait été appliqué à des commerces situés au voisinage du magasin Intermarché mais dont les activités n'étaient pas similaires ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a déterminé la valeur locative des locaux en litige par comparaison avec le local-type n 183 ; que, dès lors, la S.A. DUFRA n'est pas fondée à demander que cette valeur soit déterminée sur la base d'un tarif non pas de 60 F au m mais de 45 F, qui est celui correspondant au local-type n 182 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la demande de la S.A. DUFRA tendant à la décharge de l'imposition primitive à la taxe professionnelle établie au titre de l'année 1989 doivent être rejetées ; qu'il résulte également de ce qui précède que la S.A. DUFRA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande en tant qu'elle concernait l'imposition supplémentaire à la taxe professionnelle établie au titre de l'année 1989 et la taxe professionnelle établie au titre de l'année 1990 ;
Sur les dépens :
Considérant que la S.A. DUFRA, qui succombe à l'instance, n'est, en tout état de cause, pas fondée à demander le remboursement des dépens ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que la S.A. DUFRA succombe dans la présente instance ; que sa demande, fondée sur les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 15 000 F au titre des frais qu'elle a exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Caen est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de la S.A. DUFRA tendant à la décharge de l'imposition primitive à la taxe professionnelle établie au titre de l'année 1989.
Article 2 : Les conclusions de la demande de la S.A. DUFRA tendant à la décharge de l'imposition primitive à la taxe professionnelle établie au titre de l'année 1989 et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la S.A. DUFRA et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 95NT00473
Date de la décision : 26/05/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - DEMANDES ET OPPOSITIONS DEVANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF - REGULARITE DU JUGEMENT.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - EXONERATIONS.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - ASSIETTE.


Références :

CGI 1464 B, 44 bis, 1467, 1469, 1495, 1498
CGI Livre des procédures fiscales R196-2, R196-3, L174
CGIAN3 324 B
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. ISAÏA
Rapporteur public ?: M. AUBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1998-05-26;95nt00473 ?
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