Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 mai 1995, présentée par la S.A. GROUPE SERVICE OUEST dont le siège est rue du Château de Bel Air, ... ;
La S.A. GROUPE SERVICE OUEST demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 92-5291 en date du 28 février 1995 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1988 et 1989 dans les rôles de la commune de Carquefou ;
2 ) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
3 ) de condamner l'Etat sur le fondement de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel à lui payer la somme de 15 000 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 75-678 du 29 juillet 1975 ;
Vu la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le décret n 831025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 1998 :
- le rapport de M. GRANGE, conseiller,
- et les conclusions de M. AUBERT, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'administration a rehaussé les bases de la taxe professionnelle à laquelle la S.A. GROUPE SERVICE OUEST a été assujettie au titre des années 1988 et 1989 pour son établissement de Carquefou (Loire-Atlantique) ;
Sur la régularité du jugement attaqué et de la procédure d'imposition :
Considérant, d'une part, que lorsque l'administration se fonde, pour établir des impositions supplémentaires à la taxe professionnelle sur des renseignements recueillis à l'occasion d'une vérification de comptabilité conduite dans l'entreprise, la circonstance que cette vérification serait irrégulière n'a pas pour effet de priver l'administration, dans l'exercice de son droit de communication, de la possibilité de se prévaloir de ces renseignements en matière de taxe professionnelle ; qu'il suit de là que les moyens que tire la société requérante de ce que la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet aurait été irrégulière sont inopérants, nonobstant la circonstance que le service s'est fondé, pour rehausser les bases de la taxe litigieuse, sur des indications figurant dans la comptabilité de l'entreprise qu'il avait contrôlée ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L.56 du livre des procédures fiscales : "La procédure de redressement contradictoire n'est pas applicable : 1 En matière d'impositions directes perçues au profit des collectivités locales ou d'organismes divers ..." ; qu'il ne ressort ni de la loi du 29 juillet 1975 instituant la taxe professionnelle, ni d'aucun autre texte que le législateur ait entendu déroger, pour la taxe professionnelle, à la règle énoncée pour toutes les impositions directes locales, par le premièrement précité de l'article L.56 du livre des procédures fiscales ; qu'il suit de là que la procédure contradictoire prévue et définie par l'article L.55 et les articles L.57 et suivants du même livre des procédures fiscales ne s'applique pas aux redressements apportés par l'administration aux bases de la taxe professionnelle portées dans les déclarations souscrites par les redevables en exécution de l'article 1477 du code général des impôts et qu'elle estime entachées d'insuffisance, inexactitude, omission ou dissimulation ; qu'eu égard à l'obligation faite à l'administration d'établir les impôts dûs par tous les contribuables d'après leur situation au regard de la loi fiscale, les décisions par lesquelles elle met une imposition à la charge d'une personne physique ou morale ne peuvent, en dépit de la "sujétion" qui en résulte pour cette dernière, être regardées comme des décisions administratives individuelles "défavorables", au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que ces décisions ne sont donc pas au nombre de celles dont les motifs doivent être sans délai portés à la connaissance des intéressés ; que les dispositions de l'article 8, 1er alinéa du décret du 28 novembre 1983 ne leur sont pas applicables ; qu'il suit de là que les moyens que tire la société requérante de ce que, d'une part, la lettre par laquelle l'administration l'a informée des modifications apportées aux bases de la taxe professionnelle ne serait pas suffisamment motivée, et, d'autre part, elle n'aurait pas été avertie de la possibilité de présenter des observations sur ces redressements, sont inopérants ;
Considérant que si la société requérante soutient que le Tribunal administratif a omis de se prononcer sur les moyens qu'elle avait soulevés et tirés de l'irrégularité de l'avis de vérification de comptabilité qui lui a été adressé, ainsi que de l'absence d'information sur la possibilité qu'elle aurait eu de présenter des observations sur les redressements dont elle faisait l'objet en matière de taxe professionnelle, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que ces moyens étaient inopérants ; que, par suite, le Tribunal n'a pas commis d'irrégularité en n'y répondant pas ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : "La taxe professionnelle a pour base : 1 Dans le cas des contribuables autres que les titulaires de bénéfices non commerciaux, les agents d'affaires et les intermédiaires de commerce employant moins de cinq salariés : a) La valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de celles qui ont été détruites ou cédées au cours de la même période ; b) Les salaires au sens de l'article 231-1 ... versés pendant la période de référence définie au a ... ; ces éléments sont pris en compte pour 18 % de leur montant ..." ; qu'aux termes de l'article 1478 du même code : "I. La taxe professionnelle est due pour l'année entière par le redevable qui exerce l'activité au 1er janvier ... II. En cas de création d'un établissement autre que ceux mentionnés au III, la taxe professionnelle n'est pas due pour l'année de la création. Pour les deux années suivant celle de la création, la base d'imposition est calculée d'après les immobilisations dont le redevable a disposé au 31 décembre de la première année d'activité et les salaires versés ou les recettes réalisées au cours de cette même année ..." ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient la société requérante, dont l'établissement de Carquefou a été créé en 1987, il résulte de l'instruction que les bases d'imposition des taxes dues au titre de 1988 et 1989 ont été déterminées d'après les immobilisations dont elle disposait au 31 décembre 1987 et les salaires versés au cours de cette même année, conformément aux dispositions précitées de l'article 1478 ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1473 du code général des impôts : "La taxe professionnelle est établie dans chaque commune où le redevable dispose de locaux ou de terrains, en raison de la valeur locative des biens qui y sont situés ou rattachés et des salaires versés au personnel ..." ; qu'il résulte de l'instruction que l'administration n'a pas inclus dans les bases d'imposition de la taxe professionnelle due au titre de l'établissement de Carquefou les salaires versés par l'entreprise à des salariés employés dans d'autres établissements ; que la société ne soutient pas que la répartition ainsi opérée serait erronée ; qu'elle ne précise pas quelles immobilisations auraient été incluses à tort dans les bases d'imposition de l'établissement de Carquefou ;
Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu des dispositions précitées des articles 1467 et 1478 du code général des impôts, la valeur locative d'un bien figurant à un compte d'immobilisations corporelles du bilan de l'exercice de référence entre dans la base de la taxe professionnelle, à moins que le contribuable n'établisse qu'au cours de cet exercice, le bien a été détruit ou cédé ou a, pour une autre cause, définitivement cessé d'être utilisable ; que si la société requérante soutient que des matériels de faible valeur unitaire et de courte durée d'utilisation figurant dans ses comptes d'immobilisations devraient être exclus des bases de la taxe professionnelle, elle n'établit pas, par les documents qu'elle produit, que ces matériels auraient été détruits ou cédés ou auraient définitivement cessé d'être utilisables ; qu'il suit de là que les moyens de la société requérante tendant à établir qu'elle aurait été surtaxée doivent être écartés ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.A. GROUPE SERVICE OUEST n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que la S.A. GROUPE SERVICE OUEST succombe dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme au titre des frais qu'elle a exposés doit, en conséquence, en vertu de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel applicable en l'espèce, être rejetée ;
Article 1er : La requête de la société anonyme GROUPE SERVICE OUEST est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme GROUPE SERVICE OUEST et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.