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30/09/1997 | FRANCE | N°95NT00681

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 30 septembre 1997, 95NT00681


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 mai 1995 présentée par M. Lionel X..., demeurant à Châteauneuf-en-Thymerais (Eure-et-Loir), Château de Maillebois ;
M. Lionel X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 911642-911643-911646 en date du 21 mars 1995 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre des années 1981 à 1985 et de la période du 1er janvier 1981 au 31

décembre 1983 ;
2 ) de lui accorder la décharge des impositions contestées...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 mai 1995 présentée par M. Lionel X..., demeurant à Châteauneuf-en-Thymerais (Eure-et-Loir), Château de Maillebois ;
M. Lionel X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 911642-911643-911646 en date du 21 mars 1995 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre des années 1981 à 1985 et de la période du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1983 ;
2 ) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
3 ) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement et des impositions contestés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 1997 :
- le rapport de M. GRANGE, conseiller,
- et les conclusions de M. AUBERT, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par une décision en date du 14 mai 1996, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux d'Eure-et-Loir a prononcé le dégrèvement, à concurrence d'une somme de 144 843 F, des pénalités dont a été assorti le supplément de taxe sur la valeur ajoutée auquel M. X... a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1983 ; que les conclusions de la requête de M. X... sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que l'administration a estimé que M. X..., en organisant des parties de chasse sur son domaine, exerçait une activité lucrative imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et à la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, alors que l'administration soutenait devant le Tribunal administratif qu'aucun élément probant de nature à démontrer l'existence d'un groupement de fait de chasseurs dont se prévalait le requérant n'avait été présenté, celui-ci a produit le 8 mars 1993 des attestations tendant à établir la réalité de ce groupement ; que le mémoire du 1er mars 1995 par lequel le directeur des services fiscaux a, notamment, contesté la portée des attestations produites, a été communiqué au requérant le 3 mars 1995 ; qu'il n'est pas contesté que celui-ci l'a reçu le 6 mars 1995 alors que l'audience était fixée au 7 mars, et a eu effectivement lieu ce jour-là, ainsi qu'en attestent les mentions du jugement, contrairement à ce que soutient le ministre de l'économie et des finances ; qu'il est constant que le requérant n'a pas répondu à ce dernier mémoire de l'administration ; que le Tribunal administratif, pour écarter le moyen du requérant fondé sur l'existence d'une association de fait dont il n'aurait été que le mandataire, a repris à son compte les arguments avancés par l'administration quant à la portée des attestations produites ; qu'il suit de là que M. X... est fondé à soutenir que, en raison du bref délai dont il disposait pour réfuter les arguments de l'administration sur ce point, le caractère contradictoire de la procédure n'a pas été respecté, et à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X... devant le Tribunal administratif d'Orléans ;
Sur le principe de l'imposition :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 34 du code général des impôts : "Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle et artisanale ..." ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 256 du même code : "I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les ... prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ..." ; et qu'aux termes de l'article 256 A dudit code : "Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent d'une manière indépendante, à titre habituel ou occasionnel, une ou plusieurs opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... accueille sur son domaine, pour des journées de chasse, des personnes qui lui versent des sommes forfaitaires, qui ont varié au cours des années litigieuses entre 4 800 et 6 500 F par fusil et par journée, en contrepartie d'une part droit de chasser et d'emporter le gibier tué, et d'autre part de prestations annexes de personnel de rabattage et de service ainsi que de fournitures de repas ; qu'à cette fin l'intéressé achète notamment des faisans qu'il engraisse et lâche en vue de la chasse ; que les recettes procurées par ces journées ont atteint des montants non contestés compris entre 350 000 F et 520 000 F au cours de chacune des années 1981 à 1985 ; que l'intéressé a vendu le surplus du gibier non emporté pour des sommes comprises entre 30 000 et 46 000 F ; que les dépenses exposées par lui, notamment au titre des achats de nourriture et de frais du personnel d'une trentaine de personnes, se sont élevées au minimum à des montants compris entre 200 000 et 433 000 F ; qu'ainsi, alors même que ces journées de chasse sont en nombre limité dans l'année et ne s'adressent qu'à un cercle restreint d'invités, l'activité ainsi organisée, qui n'est pas l'accessoire de l'exploitation agricole, doit être regardée, notamment en raison de l'ampleur des moyens mis en oeuvre, comme une activité lucrative exercée à titre habituel passible de la taxe sur la valeur ajoutée et imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; que si l'administration a prononcé en appel le dégrèvement d'une partie des pénalités appliquées en matière de taxe sur la valeur ajoutée, cette décision ne peut être regardée comme comportant reconnaissance du caractère non lucratif de l'activité exercée ;
Considérant toutefois que M. X... fait valoir qu'il ne serait que le mandataire d'une association de fait de chasseurs ; que, cependant, en l'absence de tout acte relatif au fonctionnement concret d'un tel groupement, tel que des comptes-rendus de gestion, la réalité de l'existence de ce groupement ne peut être considérée comme établie par les seules attestations émanant de membres supposés de celui-ci que produit le requérant ; que, dès lors, ce dernier ne contestant pas être matériellement l'organisateur des journées de chasse, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les impositions devaient être établies à son nom ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient M. X..., l'administration n'a pas utilisée la procédure de rectification d'office prévue par les dispositions alors en vigueur de l'article L.75 du livre des procédures fiscales, mais celles d'évaluation d'office et de taxation d'office prévues respectivement par les articles L.73-1 dans sa rédaction alors en vigueur et L.66-3 du même livre, en l'absence de déclarations de résultat et de chiffre d'affaires ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les formalités exigées en cas de rectification d'office n'auraient pas été respectées est inopérant ;
Considérant, d'autre part, qu'en raison de la nature industrielle et commerciale de l'activité exercée, M. X... était tenu de souscrire les déclarations de résultats propres à cette catégorie d'imposition ainsi que les déclarations de chiffres d'affaires ; qu'il est constant qu'il ne l'a pas fait ; que l'administration était dès lors en droit de procéder à l'évaluation d'office des résultats et à la taxation d'office du chiffre d'affaires en application des articles rappelés ci-dessus du livre des procédures fiscales, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que les déclarations d'ensemble des revenus et les déclarations de résultats des bénéfices agricoles aient été normalement souscrites ; qu'il appartient, par suite, à M. X..., régulièrement imposé d'office, d'apporter la preuve, en application de l'article L.193 du livre des procédures fiscales, de l'exagération des bases d'imposition retenues ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant que M. X..., qui ne conteste pas le montant des recettes, soutient que l'activité imposée était en réalité déficitaire, hormis au titre de l'année 1983 ; que toutefois, en produisant des tableaux dépourvus de toute pièce justificative, il ne peut être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, s'agissant des impositions restant en litige, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise sollicitée, la demande de M. X... doit être rejetée ;
Article 1er : A concurrence de la somme de cent quarante quatre mille huit cent quarante trois francs (144 843 F) en ce qui concerne le supplément de taxe sur la valeur ajoutée auquel M. X... a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1983, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X....
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif d'Orléans en date du 21 mars 1995 est annulé.
Article 3 : La demande présentée par M. X... devant le Tribunal administratif d'Orléans ainsi que le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 95NT00681
Date de la décision : 30/09/1997
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - DEMANDES ET OPPOSITIONS DEVANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF - REGULARITE DU JUGEMENT.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - REQUETES D'APPEL - EFFET DEVOLUTIF DE L'APPEL OU EVOCATION.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - REQUETES D'APPEL - INCIDENTS.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - PERSONNES ET ACTIVITES IMPOSABLES - ENUMERATION DES PERSONNES ET ACTIVITES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - CHARGES DIVERSES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - BENEFICE REEL - RECTIFICATION ET TAXATION D'OFFICE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - BENEFICE REEL - QUESTIONS CONCERNANT LA PREUVE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - PERSONNES ET OPERATIONS TAXABLES - OPERATIONS TAXABLES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - PROCEDURE DE TAXATION - TAXATION - EVALUATION OU RECTIFICATION D'OFFICE.


Références :

CGI 34, 256
CGI Livre des procédures fiscales L75, L73, L193


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. GRANGE
Rapporteur public ?: M. AUBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1997-09-30;95nt00681 ?
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