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06/05/1997 | FRANCE | N°94NT00710

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 06 mai 1997, 94NT00710


Vu le recours du ministre du budget enregistré au greffe de la Cour le 11 juillet 1994 ;
Le ministre demande à la Cour :
1 ) de réformer le jugement n 91629 du 16 mars 1994 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a accordé à M. X... la réduction des compléments d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1987 et 1988 ;
2 ) de remettre intégralement les impositions contestées à la charge de M. X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le décret n

83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours ad...

Vu le recours du ministre du budget enregistré au greffe de la Cour le 11 juillet 1994 ;
Le ministre demande à la Cour :
1 ) de réformer le jugement n 91629 du 16 mars 1994 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a accordé à M. X... la réduction des compléments d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1987 et 1988 ;
2 ) de remettre intégralement les impositions contestées à la charge de M. X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le décret n 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 1997 :
- le rapport de Mme HELMHOLTZ, président-rapporteur,
- et les conclusions de M. AUBERT, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui ... imposent des sujétions ..." ; qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 8 du décret n 83-1025 du 28 novembre 1983 : "Sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, ... les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ... ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé a été en mesure de présenter des observations écrites" ; qu'aux termes du 2ème alinéa du même article : "Toute personne qui est concernée par une décision mentionnée au premier alinéa du présent article doit être entendue, si elle en fait la demande, par l'agent chargé du dossier ou, à défaut par une personne habilitée à recueillir ses observations orales. Elle peut se faire assister ou représenter par un mandataire de son choix." ;
Considérant que, eu égard à l'obligation faite à l'administration d'établir les impôts dus par tous les contribuables d'après leur situation au regard de la loi fiscale, les décisions par lesquelles elle met une imposition à la charge d'une personne physique ou morale, ne peuvent, en dépit de la "sujétion" qui en résulte pour cette dernière, être regardées comme des décisions administratives individuelles "défavorables" au sens de l'article 1er précité de la loi du 11 juillet 1979 ; que, par suite, en prononçant la décharge des compléments d'impôts sur le revenu auxquels M. X... a été assujetti au titre des années 1987 et 1988, au motif que l'établissement de ces impositions avait procédé d'une décision administrative imposant une sujétion et que l'administration n'avait pas pleinement satisfait à la demande d'entretien formulée par le contribuable conformément à la règle énoncée par l'alinéa 2 de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 en confirmant les redressements avant l'examen des documents que le requérant devait produire comme il en avait été convenu lors de l'entretien avec le supérieur hiérarchique du signataire de la notification de redressement, les premiers juges ont méconnu le champ d'application de ces textes ;
Considérant que le ministre est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, le Tribunal administratif de Rouen a estimé, par ce motif, que la procédure d'imposition était irrégulière ; qu'il appartient toutefois à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X... tant devant la Cour que devant le Tribunal administratif ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant en premier lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la décision par laquelle l'administration met à la charge d'un contribuable une imposition ne constitue pas une décision défavorable au sens de la loi du 11 juillet 1979 et n'a pas à être précédée du débat contradictoire préalable prévu par l'alinéa 2 de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 ; que dès lors, M. X... n'est pas fondé à soutenir que la procédure serait irrégulière du fait de la méconnaissance desdites dispositions en raison de l'absence d'intervention de l'interlocuteur départemental en dépit de la demande qu'il avait faite ;

Considérant en deuxième lieu, que M. X... ne peut davantage invoquer, sur le fondement de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 lequel permet de se prévaloir à l'encontre de l'administration, d'instructions publiées dans les conditions prévues par la loi du 17 juillet 1978 lorsqu'elles ne sont pas contraires aux loi et règlements, le bénéfice de l'instruction administrative 13 L-9-76 du 18 juin 1976, aux termes de laquelle "aucune imposition supplémentaire ne pourra être mise en recouvrement tant qu'il n'aura pas été statué sur le recours du contribuable auprès de l'interlocuteur départemental", dès lors que cette instruction comporte des mesures qu'aucune disposition de loi ou de règlement ne donnait compétence au ministre pour édicter ;
Considérant enfin, que M. X... fait valoir que la réponse à ses observations serait insuffisamment motivée dès lors que l'administration a confirmé les redressements concernant la remise en cause de la déduction supplémentaire pour frais professionnels prévue en faveur des VRP sans avoir pris connaissance de l'ensemble des éléments qu'il avait communiqués ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales : "Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la notification de redressement adressée le 17 avril 1990 à M. X..., celui-ci a présenté ses observations en se bornant à refuser le redressement portant sur la suppression de la déduction supplémentaire de 30 % dont il bénéficiait sur ses salaires sans présenter de justificatifs et en demandant un rendez-vous avec le supérieur hiérarchique du signataire de la notification de redressement ; que, lors de l'entretien qui s'est déroulé le 20 juin 1990 après report de la date initialement fixée à la suite de la demande de l'intéressé, celui-ci n'a pas davantage présenté de document susceptible d'établir l'importance de son activité de VRP ; que l'administration a confirmé les redressements par une réponse aux observations du contribuable en date du 25 juin 1990 qui était dûment motivée au regard des observations formulées par l'intéressé, nonobstant la mention erronée que ces observations avaient été complétées par courrier ; que cette manière d'agir n'a pas comporté d'irrégularité au regard des dispositions précitées de l'article L.57 du livre des procédures fiscales dès lors qu'aucune prescription législative ou réglementaire n'impose au service de délai pour répondre aux observations faites par le redevable et de poursuivre un débat contradictoire après l'envoi de cette réponse ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant que les impositions litigieuses procèdent de la réintégration dans le montant des rémunérations devant supporter l'impôt sur le revenu, au titre des années 1987 et 1988, des sommes que M. X... soutient être en droit de soustraire de l'impôt au titre de la déduction supplémentaire de 30 % pour frais professionnels prévue, en application de l'article 83-3 du code général des impôts, à l'article 5 de l'annexe IV à ce code, en faveur des voyageurs, représentants et placiers de commerce ou d'industrie ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction et notamment du contrat de travail liant M. X... à la société CIMNOR, qui exerce l'activité de négoce de matériels de travaux publics que l'intéressé était, au cours des années considérées, animateur des ventes et vendeur ; qu'il assurait l'ensemble de l'animation commerciale de la société ainsi que le suivi de l'activité des vendeurs en même temps qu'il visitait, dans un secteur géographique et pour une catégorie d'entreprises déterminés les clients de la société et recueillait directement leurs commandes ; que l'intéressé n'établit pas, par les pièces produites, qu'il ait consacré, en fait, l'essentiel de son activité à cette fonction de représentant de commerce ; que dès lors, M. X... ne peut prétendre au bénéfice de la déduction supplémentaire susmentionnée ;
Considérant d'autre part, que si M. X... soutient que sa rémunération est composée d'un fixe et d'un pourcentage calculé sur les opérations réalisées, il ne l'établit pas par la production d'un bulletin de paie concernant un tiers ; qu'il ne saurait justifier davantage des modalités de sa rémunération en faisant valoir que ses salaires subissent des fluctuations d'une année sur l'autre alors qu'il ressort du contrat de travail que cette rémunération comporte une part variable résultant uniquement de l'intéressement au chiffre d'affaires global de la société et n'est pas dépendante de son activité personnelle de vendeur ; que par suite, la rémunération résultant de son activité de représentation ne pouvant être distinguée de celle procédant de son activité d'animateur des ventes, l'intéressé ne saurait, en tout état de cause, bénéficier de la déduction supplémentaire pour cette activité de vendeur ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre du budget est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a déchargé M. X... des compléments d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1987 et 1988 en conséquence de la réintégration de la déduction supplémentaire de 30 % dans le calcul de ses revenus imposables ;
Article 1er : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Rouen en date du 16 mars 1994 est annulé.
Article 2 : Les compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. X... a été assujetti au titre des années 1987 et 1988 en conséquence de la réintégration de la déduction supplémentaire de 30 % dans le calcul de ses revenus imposables sont intégralement remis à sa charge.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à M. X.... La République mande et ordonne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 94NT00710
Date de la décision : 06/05/1997
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCEDURE - QUESTIONS GENERALES - MOTIVATION - MOTIVATION OBLIGATOIRE - ABSENCE.

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCEDURE - PROCEDURE CONTRADICTOIRE - NON OBLIGATOIRE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - OPPOSABILITE DES INTERPRETATIONS ADMINISTRATIVES (ART - L - 80 A DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES) - ABSENCE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT - NOTIFICATION DE REDRESSEMENT - MOTIVATION.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - TRAITEMENTS - SALAIRES ET RENTES VIAGERES - DEDUCTIONS POUR FRAIS PROFESSIONNELS - DEDUCTIONS FORFAITAIRES.


Références :

CGI 83
CGI Livre des procédures fiscales L57
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 8, art. 1
Instruction du 18 juin 1976 13L-9-76
Loi 78-753 du 17 juillet 1978
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme HELMHOLTZ
Rapporteur public ?: M. AUBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1997-05-06;94nt00710 ?
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