VU le recours, enregistré au greffe de la Cour le 28 février 1992, présenté par le MINISTRE DU BUDGET ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 6 novembre 1991 par lequel le Tribunal administratif de NANTES a accordé à la société Vilmorin décharge de la cotisation de taxe professionnelle qui lui a été réclamée au titre de l'année 1988 ;
2°) de décider de remettre à la charge de la société Vilmorin ladite cotisation ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 septembre 1993 :
- le rapport de M. AUBERT, conseiller,
- et les conclusions de M. ISAIA, commissaire du gouvernement,
Considérant qu'aux termes de l'article 1450 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 1988 : "Les exploitants agricoles ... sont exonérés de taxe professionnelle" ;
Considérant que la société anonyme Vilmorin exerce des activités d'obtenteur de nouvelles variétés végétales et de producteur de semences potagères ; que la convention-type de multiplication des semences qu'elle passe avec un agriculteur-multiplicateur pour le développement de son activité de producteur de semences potagères l'oblige à fournir à ce dernier des semences de base, à lui prodiguer des conseils techniques et à prendre livraison de la récolte ; que, pour sa part, l'agriculteur-multiplicateur s'engage à assurer la multiplication des semences selon les stipulations de la convention, à suivre les directives de la société et à accepter à tous moments les visites et les contrôles de ses agents ; qu'en contrepartie, la société lui verse une rémunération proportionnelle au tonnage et à la qualité des produits récoltés ; que, pendant la période qui va de la livraison des semences de base à la récolte des semences commerciales, la société anonyme Vilmorin reste à tout moment propriétaire des produits semés et récoltés, alors même que pour déterminer la rémunération de l'agriculteur elle déduit du poids de la récolte le poids des semences de base qu'elle lui a livrées ; que, dans le même temps, elle assure la direction et la surveillance du processus de multiplication des semences potagères réalisé conjointement avec l'agriculteur-multiplicateur qu'elle rémunère et à l'occasion duquel elle partage avec ce dernier la qualité d'exploitant et les risques de la production ; qu'ainsi, l'activité qu'elle exerce dans les conditions prévues par la convention précitée s'insère dans le cycle biologique de la production des semences potagères et comporte, de ce fait, des actes de production agricole ; que, par suite, la société Vilmorin doit, dans ces circonstances, être regardée comme se livrant à une exploitation agricole ; qu'elle est fondée, dès lors, à demander, au titre de son activité de producteur de semences potagères, l'exonération prévue par l'article 1450 précité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de NANTES a accordé à la société Vilmorin la décharge des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1988 dans les rôles de la commune de LA MENITRE ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que le bien fondé de ces conclusions doit être apprécié au regard des dispositions applicables à la date du présent arrêt ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.8.1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de la société Vilmorin ;
Article 1er - Le recours du MINISTRE DU BUDGET est rejeté.
Article 2 - Les conclusions de la société Vilmorin tendant au bénéfice de l'article L.8.1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 3 - Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET et à la société Vilmorin.