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20/01/1993 | FRANCE | N°90NT00511

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1e chambre, 20 janvier 1993, 90NT00511


VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 septembre 1990, présentée pour M. Jean-Pierre X..., demeurant ... (Indre-et-Loire) par Me Pierre FONTANEAU, avocat à la Cour ;
M. X... demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif d'ORLEANS en date du 19 juin 1990 en tant qu'il a rejeté partiellement sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1977 à 1980 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités dont elles ont été assorties ;
3°)

de prononcer en sa faveur le remboursement des frais exposés ;
VU les autres pièc...

VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 septembre 1990, présentée pour M. Jean-Pierre X..., demeurant ... (Indre-et-Loire) par Me Pierre FONTANEAU, avocat à la Cour ;
M. X... demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif d'ORLEANS en date du 19 juin 1990 en tant qu'il a rejeté partiellement sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1977 à 1980 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités dont elles ont été assorties ;
3°) de prononcer en sa faveur le remboursement des frais exposés ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 1993 :
- le rapport de M. ISAIA, conseiller,
- et les conclusions de M. CHAMARD, commissaire du gouvernement,

Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que l'irrégularité des opérations de vérification de comptabilité dont la société SURVEILLANCE DE L'OUEST a été l'objet est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre du requérant ; que le fait d'aviser un contribuable qu'une vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble sera entreprise ne crée pas pour l'administration l'obligation d'engager avec lui un débat oral et contradictoire sur les renseignements qu'elle recueille ; que les notifications de redressement en date du 18 décembre 1981 et du 6 octobre 1982 ont été régulièrement adressées à M. X... qui ne les a pas retirées malgré deux présentations à son domicile et les mises en instance règlementaires au bureau de poste de ROCHECORBON ; que, dès lors, le requérant soutient en vain qu'il n'a pas été mis en mesure de produire utilement ses observations en réponse auxdites notifications ; que, par suite, la procédure d'imposition a été régulière ;
Sur la charge de la preuve :
Considérant que les redressements afférents aux crédits bancaires d'origine inexpliquée ont été établis suivant la procédure de taxation d'office prévue par l'article L.69 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, il appartient au contribuable, en application des dispositions de l'article L.193 du livre des procédures fiscales, de démontrer le caractère exagéré des évaluations retenues à ce titre par l'administration pour l'année 1978 ; que par ailleurs, M. X... n'a pas répondu aux notifications de redressements dans le délai de trente jours qui lui était imparti aux termes des dispositions de l'article R.57-1 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, il lui appartient, en application de l'article R.194-1 du même livre, de démontrer le caractère exagéré des redressements qui ont été mis à sa charge suivant la procédure contradictoire au titre des années 1977 à 1980 ;
Sur les bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les traitements et salaires :
Considérant qu'aux termes de l'article 12 du code général des impôts : "L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année" ; que, dès lors, le requérant se prévaut, en vain, de la circonstance qu'il aurait déclaré les salaires dus, aux lieu et place des salaires versés, seuls imposables ;

Considérant qu'en application des dispositions précitées l'administration a rattaché les salaires versés par la société SOVAL en 1978 et par la société SURVEILLANCE DE L'OUEST en 1978 et 1979 aux revenus imposables de l'année au cours de laquelle ils ont été perçus ; que les redressements contestés ont été établis à partir des indications fournies par le contribuable en réponse aux demandes de justifications qui lui ont été adressées par le service ; que le requérant, qui ne conteste pas avoir perçu les sommes en cause, soutient qu'il en serait résulté une double imposition du fait qu'une partie des salaires qu'il déclarait au titre d'une année ne lui était versée en réalité qu'au cours de l'année suivante ; que, toutefois, en ne produisant pas les justificatifs des salaires payés, auxquels ne peut se substituer un "tableau des encaissements", il n'établit pas que le montant des rémunérations retenues par l'administration excède celui des salaires qui lui ont été effectivement versés par les sociétés SOVAL et SURVEILLANCE DE L'OUEST pour chacune des années susindiquées ; que, de même, il ne démontre pas la réalité de la double imposition alléguée dans la mesure notamment où les déclarations de revenus souscrites mentionnaient des salaires d'un montant inférieur ; qu'il ne peut se prévaloir de l'autorité de la chose jugée par la chambre correctionnelle de la Cour d'appel de PARIS dont les constatations de fait n'ont pas porté sur le montant des salaires effectivement perçus au cours des années en litige ;
En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : "1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ..." et qu'aux termes de l'article 110 du même code : "Pour l'application de l'article 109-1-1°, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés" ;

Considérant qu'il est constant qu'au cours des années 1978, 1979 et 1980, M. X... a perçu des sommes versées par la société SURVEILLANCE DE L'OUEST ; que, s'il prétend qu'elles correspondent à des prestations de services effectuées à la demande de cette société, il n'établit pas, par les documents qu'il produit, que les prestations dont s'agit ont été réalisées en supplément de son activité salariée ; que, par suite, les rémunérations en cause doivent être regardées comme des bénéfices distribués passibles de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; qu'il est constant que M. X... a encaissé à ce titre les sommes de 25 000 F en 1978 et de 80 000 F en 1980 ; que celles-ci n'ont pas été portées sur les déclarations de revenu global et n'ont pas été soumises à l'impôt sur le revenu ; que sur ce point, le requérant se prévaut en vain de l'arrêt rendu le 23 juillet 1992 par la Cour d'appel de PARIS, qui ne comporte aucune constatation de fait contraire à ce qui a été dit ci-dessus sur la nature des prestations facturées à la société SURVEILLANCE DE L'OUEST sous couvert du cabinet "PLURIDIS" et sur le montant des sommes taxées par le service ; que, toutefois, en ce qui concerne une somme de 29 911 F perçue par M. X... en 1979, la seule circonstance que la charge correspondante a été réintégrée dans les résultats de la société SURVEILLANCE DE L'OUEST ne suffit pas à établir que cette somme aurait fait l'objet d'une distribution de bénéfices au profit du requérant ; que, par suite, celui-ci doit être regardé comme apportant la preuve du caractère exagéré de l'évaluation de l'administration à hauteur de 29 911 F ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : "Sont notamment considérés comme revenus distribués : ...d. La fraction des rémunérations qui n'est pas déductible en vertu de l'article 39-1-1° ..." ; qu'en vertu des dispositions de l'article 39-1-1° les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu ;
Considérant que M. X..., qui détenait 500 des 3 000 parts constituant le capital de la société SURVEILLANCE DE L'OUEST, a perçu, en sa qualité de secrétaire général au titre des années 1978, 1979 et 1980, des rémunérations s'élevant respectivement à 216 000 F, 246 150 F et 240 000 F et que l'administration a jugées excessives à concurrence de la moitié ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que pendant les années en litige, le requérant était le seul dirigeant de la société SOVAL, qui disposait de deux agences situées l'une à CAHORS et l'autre à MENDE, alors que la société SURVEILLANCE DE L'OUEST, située à TOURS, était dirigée par Mme Fernande X..., gérante salariée, et par M. Gérard X..., directeur général ; que, compte tenu de l'existence d'une autre fonction rémunérée et en l'absence de justification de la nature exacte de son emploi de secrétaire général, le requérant, qui se borne en appel à faire état de la spécificité de l'activité de transport de fonds et de surveillance à laquelle se livrait l'entreprise, et des responsabilités et des risques qu'il devait assumer de ce fait, n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que l'administration aurait insuffisamment apprécié l'importance des services qu'il rendait à la société SURVEILLANCE DE L'OUEST ; que, par suite, c'est à bon droit qu'en application des dispositions de l'article 111.d du code général des impôts, la moitié des rémunérations qu'il a perçues a été imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
En ce qui concerne les revenus non rattachables à une catégorie particulière :
Considérant que le requérant ne justifie par aucun document probant de l'origine des espèces déposées sur son compte bancaire pour un montant de 8 600 F ; qu'ainsi, il n'apporte pas la preuve, dont la charge lui incombe, de l'exagération de ce revenu taxé d'office ;
Sur les pénalités :
Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions combinées des articles 1728 et 1729 du code général des impôts que les majorations prévues audit article 1729, tel qu'il était rédigé au cours des années 1977 à 1980, ne sont applicables que lorsque la bonne foi du redevable ne peut être admise ; qu'il appartient à l'administration d'établir l'absence de bonne foi ; qu'en démontrant que M. X... s'est abstenu sciemment de déclarer des sommes d'un montant élevé dont il ne pouvait ignorer avoir eu la disposition et qui se rattachaient à différentes catégories de revenus, l'administration établit que la bonne foi de ce dernier ne peut être retenue ;

Considérant, d'autre part, que M. X..., en percevant en 1978, sous couvert du "cabinet PLURIDIS" et sans avoir informé l'administration qu'il exerçait sous cette dénomination une activité libérale, une somme de 25 000 F, qui ne correspondait à aucune prestation distincte par nature de celles inhérentes à ses fonctions salariées et en omettant de la déclarer, s'est livré à une opération constitutive de manoeuvres frauduleuses ; que, c'est par suite à bon droit que lui a été appliquée la majoration prévue dans ce cas par l'article 1729-1 du code général des impôts ; qu'en revanche, il ressort des motifs de l'arrêt susindiqué de la Cour d'appel de PARIS du 22 juin 1992 que la somme de 80 000 F, perçue également sous la dénomination PLURIDIS, a été régulièrement déclarée en 1980 ; que, dès lors, si la circonstance que l'existence du cabinet PLURIDIS n'avait pas été portée à la connaissance du service n'est pas, à elle seule, constitutive de manoeuvres frauduleuses, elle fait ressortir l'absence de bonne foi du contribuable ; qu'il y a lieu, par suite, pour les pénalités applicables à ce redressement, de substituer à la majoration prévue, en cas de manoeuvres frauduleuses, par l'article 1729-1 du code général des impôts, la majoration prévue, en cas d'absence de bonne foi, par ledit article ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'ORLEANS a rejeté ses demandes en tant qu'elles concernaient un redressement d'un montant de 29 911 F au titre de l'année 1979 et les pénalités pour manoeuvres frauduleuses appliquées à la somme de 80 000 F, encaissée en 1980 sous couvert du cabinet PLURIDIS ;
Sur le recours incident du ministre :
Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'ORLEANS a, d'une part, diminué les redressements afférents aux frais de déplacement remboursés au contribuable par la SARL SURVEILLANCE DE L'OUEST d'une somme de 30 493 F au titre de l'année 1979 et d'une somme de 26 355 F au titre de l'année 1980 ; que, d'autre part, au motif que les conditions de mise en oeuvre des articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales n'étaient pas remplies, il a réduit les bases d'imposition établies au titre de chacune de ces deux années et tirées des crédits bancaires injustifiés, d'une somme respectivement de 111 106 F et de 63 750 F ; qu'ensuite, dans l'article 3 du dispositif de son jugement, le tribunal a additionné les sommes susindiquées et prononcé une réduction des bases d'imposition d'un montant de 141 599 F au titre de l'année 1979 et de 90 105 F au titre de l'année 1980 ;

Considérant, toutefois, que par une décision en date du 8 novembre 1984 antérieure à l'enregistrement de la demande devant le tribunal administratif, l'administration avait partiellement admis la réclamation présentée par M. X... et ramené les bases d'imposition établies par voie de taxation d'office et afférentes aux crédits bancaires injustifiés, de 111 106 F à 74 389 F pour l'année 1979 et de 63 750 F à 54 083 F en 1980 ; que le tribunal ayant omis de tenir compte de cette décision de dégrèvement, le ministre du budget, par la voie du recours incident, est fondé, sur ce point, à demander la réformation du jugement attaqué ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8.1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les conclusions présentées par M. X... et tendant au remboursement des frais exposés ne sont pas chiffrées ; que, par suite, elles sont irrecevables et ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;
Article 1er - La réduction des bases d'imposition à l'impôt sur le revenu accordée à M. X... par le Tribunal administratif d'ORLEANS au titre des années 1979 et 1980 est ramenée respectivement de cent quarante et un mille cinq cent quatre vingt dix neuf francs (141 599 F), à cent quatre mille huit cent quatre vingt deux francs (104 882 F) et de quatre vingt dix mille cent cinq francs (90 105 F), à quatre vingt mille quatre cent trente huit francs (80 438 F).
Article 2 - La base de l'impôt sur le revenu assignée à M. X... au titre de l'année 1979 est réduite d'une somme de vingt neuf mille neuf cent onze francs (29 911 F).
Article 3 - Il est accordé à M. X... décharge des droits et pénalités correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 2.
Article 4 - Les pénalités pour mauvaise foi sont substituées aux pénalités pour manoeuvres frauduleuses mise à la charge de M. X... et afférentes à une somme de quatre vingt mille francs (80 000 F) soumise à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1980.
Article 5 - Le jugement du Tribunal administratif d'ORLEANS en date du 19 juin 1990 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 - Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre du budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 90NT00511
Date de la décision : 20/01/1993
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - AMENDES - PENALITES - MAJORATIONS.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - TAXATION D'OFFICE - POUR DEFAUT DE REPONSE A UNE DEMANDE DE JUSTIFICATIONS (ART - 176 ET 179 DU CGI - REPRIS AUX ARTICLES L - 16 ET L - 69 DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES).

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - REVENUS DES CAPITAUX MOBILIERS ET ASSIMILABLES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - TRAITEMENTS - SALAIRES ET RENTES VIAGERES.


Références :

CGI 12, 109, 110, 111, 39 par. 1, 1728, 1729 par. 1
CGI Livre des procédures fiscales L69, L193, R194-1, R57-1, L16
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. ISAIA
Rapporteur public ?: M. CHAMARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;1993-01-20;90nt00511 ?
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