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23/10/1991 | FRANCE | N°89NT01208

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 23 octobre 1991, 89NT01208


VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 juin 1989 sous le n° 89NT01208, présentée par M. Jacques X..., demeurant ... (8ème) par Me Y..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
M. X... demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement, en date du 17 mars 1989, en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de ROUEN n'a que partiellement fait droit à sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1972, 1973 et 1974 ;
2°) de prononcer la décharge des imposi

tions contestées ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général de...

VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 juin 1989 sous le n° 89NT01208, présentée par M. Jacques X..., demeurant ... (8ème) par Me Y..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
M. X... demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement, en date du 17 mars 1989, en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de ROUEN n'a que partiellement fait droit à sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1972, 1973 et 1974 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 1991 :
- le rapport de M. GRANGE, conseiller,
- et les conclusions de M. LEMAI, commissaire du gouvernement,

Sur l'appel principal :
Considérant, en premier lieu, que l'administration a réintégré dans les revenus du contribuable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, au titre de l'année 1973, une somme de 50.000 F représentant la contre-valeur de deux titres d'emprunt 3,50 % 52/58 remis par un tiers, en considérant que cette opération dissimulait en réalité le versement d'honoraires ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quinquies B du code général des impôts applicable en l'espèce : "Les actes dissimulant la portée véritable d'un contrat ou d'une convention sous l'apparence de stipulations déguisant ... une réalisation ... de revenus ... ne sont pas opposables à l'administration, laquelle supporte la preuve du caractère réel de ces actes devant le juge de l'impôt lorsque, pour restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse, elle s'est abstenue de prendre l'avis du comité consultatif dont la composition est indiquée à l'article 1653 C ..." ;
Considérant qu'en estimant que cette opération ne constituait pas un don, comme le soutient le requérant en produisant un acte dûment enregistré, mais correspondait en fait à la rémunération de la rédaction d'actes de reconnaissance de dons manuels consentis par le donateur à son neveu, l'administration a entendu se prévaloir, implicitement mais nécessairement, des dispositions de l'article 1649 quinquies B précité relatives à l'abus de droit ; qu'elle n'a pas saisi le comité consultatif visé par ce texte, et supporte ainsi la charge de la preuve du bien-fondé de ce redressement ;
Considérant que pour justifier le redressement, le ministre fait valoir que la somme litigieuse est proche de celle qui résulterait de l'application aux prestations en cause du tarif des conseils juridiques ; qu'il existe une concomitance de date entre ces prestations, réalisées par le contribuable comme en témoigne le papier à en-tête utilisé pour la rédaction des actes, et la remise de ladite somme ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que l'application du tarif invoqué par l'administration ne permet pas d'obtenir une rémunération proche de la somme en litige ; que le client bénéficiaire desdites prestations était en réalité abonné du cabinet de conseil juridique et fiscal, dont le contribuable était l'associé, et lui avait versé à ce titre des honoraires s'élevant à 21.315,50 F en 1973 ; qu'enfin, certains des actes, en rémunération desquels la somme litigieuse aurait été versée, se bornaient à reproduire les mentions d'un acte antérieur ; qu'ainsi, les présomptions dont fait état l'administration ne peuvent être regardées comme constituant la preuve du versement déguisé d'une rémunération ;

Considérant, en second lieu, que l'administration a réintégré dans le revenu imposable du contribuable, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, au titre des années 1972, 1973 et 1974 des sommes de 14.966 F, 18.675 F et 18.105 F représentant le solde inexpliqué d'une balance de disponibilités en espèces qu'elle avait établie ; que cette balance est notamment basée sur l'estimation de dépenses courantes et sur le principe, arrêté par le vérificateur, que les remboursements en espèces de frais professionnels perçus par l'intéressé correspondaient, pour le même montant, à des dépenses en espèces de même nature, engagées par le contribuable ;
Considérant que l'administration ayant suivi l'avis de la commission départementale des impôts saisie du litige, il incombe au contribuable, en application de l'article 1649 quinquies A3 du code général des impôts applicable en l'espèce, d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition ainsi retenues ;
Considérant que le contribuable fait valoir que les dépenses forfaitaires en espèces du train de vie retenues par le vérificateur correspondent sensiblement au double du solde de la balance qu'il lui était demandé de justifier, et en déterminent ainsi l'importance ; que les remboursements de frais perçus correspondaient pour partie à des éléments ne donnant lieu à aucune dépense, tels que l'amortissement du véhicule ; qu'enfin le vérificateur a refusé de tenir compte de ce que certaines dépenses du train de vie courant étaient réglées par chèque ; qu'en raison de ces circonstances, établies par les pièces du dossier et compte tenu du caractère très sommaire de la méthode utilisée, M. X... doit être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme apportant la preuve de l'exagération des redressements ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de ROUEN a rejeté partiellement sa demande ;
Sur le recours incident :

Considérant que la demande de justification adressée le 2 novembre 1976 à M. X... portait sur diverses sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires, ainsi que sur les soldes d'une balance des espèces incluant, parmi d'autres, la somme litigieuse de 59.000 F ; qu'après avoir notifié le 21 décembre 1976 la reprise, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, de certains crédits et des soldes rectifiés de la balance, l'administration a, ensuite, isolé la somme litigieuse pour en notifier la reprise, le 28 novembre 1980, en application de l'article 179 du code général des impôts alors en vigueur, au titre du revenu global ; que la demande de justification ne comportait ni les dates, ni la référence des comptes sur lesquels des versements avaient été faits en 1972 pour un montant de 59.000 F ; qu'en outre, l'obligation incombant à M. X... de justifier un solde de balance de trésorerie était différente de celle qui aurait consisté à s'expliquer sur l'origine de versements sur des comptes bancaires ; qu'ainsi, en estimant que le contribuable n'avait pas été mis en mesure de justifier l'origine de cette somme et qu'elle ne figurait pas sur la demande de justification, le tribunal administratif n'a pas porté une appréciation erronée ; que, dès lors, le recours incident du ministre tendant au rétablissement de l'imposition dont le tribunal a prononcé la décharge ne peut être accueilli ;
Article 1er - L'article 3 du jugement du Tribunal administratif de ROUEN en date du 17 mars 1989 est annulé.
Article 2 - Les bases des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu assignées à M. X... sont réduites de quatorze mille neuf cent soixante six francs (14.966 F) au titre de 1972, soixante huit mille six cent soixante quinze francs (68.675 F) au titre de 1973, et dix huit mille cent cinq francs (18.105 F) au titre de 1974.
Article 3 - M. X... est déchargé des droits et pénalités correspondant à la réduction des bases d'imposition définies à l'article 2.
Article 4 - Le recours incident du ministre chargé du budget est rejeté.
Article 5 - Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre délégué au budget.


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