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20/06/1991 | FRANCE | N°89NT00714

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 20 juin 1991, 89NT00714


VU l'ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 6ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le dossier de la requête présentée pour la COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 avril 1988 sous le n° 97269 ;
VU la requête susvisée et le mémoire complémentaire enregistré le 17 août 1988, présentés pour la COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE (Cher), représen

tée par son maire en exercice, par la SCP Bore et Xavier, avocat au Co...

VU l'ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 6ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le dossier de la requête présentée pour la COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 avril 1988 sous le n° 97269 ;
VU la requête susvisée et le mémoire complémentaire enregistré le 17 août 1988, présentés pour la COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE (Cher), représentée par son maire en exercice, par la SCP Bore et Xavier, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
La COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 11 février 1988 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans l'a condamnée à verser à Mme Marie X... la somme de 25 000 F en réparation des conséquences dommageables de la dégradation des berges de l'île des Vicaires dont l'intéressée est propriétaire sur la rivière l'Yèvre et a mis à sa charge les frais d'expertise ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le Tribunal administratif d'Orléans et de la condamner aux entiers dépens ;
3°) subsidiairement, de réduire le montant de la condamnation prononcée à son encontre ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 1991 :
- le rapport de M. DUPOUY, conseiller,
- et les conclusions de M. CADENAT, commissaire du gouvernement,

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, si la COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE (Cher) soutient que le jugement du Tribunal administratif d'Orléans en date du 11 février 1988 est entaché d'insuffisance et de contradiction de motifs, ainsi que de défaut de réponse à conclusions, elle n'assortit ses allégations d'aucune précision permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé ; que, dès lors, ce moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur la responsabilité :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que la dégradation des berges de l'île des Vicaires dont Mme X... est propriétaire sur la rivière l'Yèvre trouve son origine principale dans la survenance de crues répétées et particulièrement violentes depuis 1976 ; que d'autres facteurs naturels, tenant en particulier à la situation topographique de cette île, ont contribué à la réalisation des dommages ; que, toutefois, l'érosion des berges a également été provoquée par la construction, en 1978, à une trentaine de mètres en amont de l'île, d'un barrage à clapet automatique remplaçant un ouvrage ancien partiellement effondré ; que cet ouvrage communal, par rapport auquel Mme X... a la qualité de tiers, a modifié localement l'équilibre hydraulique antérieur de la rivière et a une influence perturbatrice permanente sur les berges voisines, sauf en périodes de hautes eaux où le clapet est abaissé et ne contrarie plus l'écoulement des eaux ;
Considérant, en second lieu, que la COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE invoque les fautes qu'aurait commises Mme X... en ne prenant pas les précautions nécessaires pour protéger sa propriété contre les risques d'érosion ; que, si l'Etat et les communes n'ont pas l'obligation d'assurer la protection des propriétés voisines des cours d'eau navigables ou non navigables contre l'action naturelle des eaux et si cette protection incombe aux propriétaires intéressés, la responsabilité des collectivités publiques peut être engagée lorsque les dommages subis ont été provoqués par l'existence ou le mauvais état d'entretien d'ouvrages publics ; qu'ainsi, aucune faute de nature à exonérer la commune de sa responsabilité ne peut être imputée à Mme X... pour n'avoir pris aucune mesure propre à assurer la protection des berges de l'île des Vicaires contre l'action perturbatrice du barrage voisin ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le tribunal administratif a fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en fixant au quart la part des dommages imputables à l'ouvrage public ; que, par suite, la commune requérante n'est pas fondée à demander que sa responsabilité soit dégagée dans le présent litige, ni même que sa part de responsabilité soit limitée à 10 % des dommages subis par Mme X... ; que cette dernière n'est pas davantage fondée à solliciter, par la voie du recours incident, la condamnation de la commune à réparer l'intégralité de son préjudice ;
Sur le préjudice :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le tribunal administratif n'a fait une appréciation ni excessive ni insuffisante du préjudice subi par Mme X... en l'évaluant à la somme de 100 000 F ; que si celle-ci reproche aux premiers juges de n'avoir pas tenu compte dans le calcul du préjudice de la perte de 50 mètres carrés de terrain, elle ne présente à l'appui de sa demande aucune estimation de ce chef de préjudice ;
Sur l'appel en garantie formé par la COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE contre la société berrichonne d'économie mixte d'équipement et d'aménagement pour le développement du département du Cher (SOBEREM) et l'Etat :
Considérant, d'une part, que si, par convention du 1er décembre 1977, la SOBEREM, aux droits de laquelle est venue la société d'économie mixte du centre de la France (SEMIC), a reçu délégation de la commune, maître de l'ouvrage, à effet de procéder à la réalisation du barrage, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'article 8 de la convention précitée, que, par la prise de possession de l'ouvrage accompagnant la réception, intervenue le 16 janvier 1979, la commune a reçu la garde dudit ouvrage ; qu'ainsi, elle n'est plus en droit de rechercher la responsabilité de cette société à raison de désordres susceptibles d'affecter l'ouvrage construit pour son compte ;
Considérant, d'autre part, que si la commune a également dirigé ses conclusions d'appel en garantie contre l'Etat, dont les services techniques ont assuré la maîtrise d'oeuvre pour l'aménagement et la construction du barrage, elle n'invoque à son encontre aucune faute de nature à permettre d'engager éventuellement sa responsabilité dans la survenance des dommages ; que, dès lors, ces conclusions doivent être rejetées ;
Sur les intérêts :
Considérant que Mme X... a droit aux intérêts de la somme de 25 000 F à compter du 13 décembre 1984, date de l'enregistrement de sa requête devant le Tribunal administratif d'Orléans ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que Mme X... a demandé le 27 mai 1991 la capitalisation des intérêts afférents à l'indemnité de 25 000 F que le tribunal administratif lui a accordée ; qu'à cette date, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas encore été exécuté, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Sur les dépens :
Considérant que les conclusions de la SEMIC tendant à la condamnation des appelants aux entiers dépens sont dépourvues de toute précision sur la nature et le montant des frais ainsi allégués ; qu'elles ne peuvent donc qu'être rejetées ;
Article 1er - L'indemnité de vingt cinq mille francs (25 000 F) que la COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE (Cher) a été condamnée à verser à Mme X... portera intérêt au taux légal à compter du 13 décembre 1984. Les intérêts échus le 27 mai 1991 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 - La requête de la COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE, le surplus des conclusions du recours incident de Mme X... et les conclusions de la société d'économie mixte du centre de la France sont rejetés.
Article 3 - Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE MEHUN-SUR-YEVRE, à Mme X..., à la société d'économie mixte du centre de la France et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace.


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