Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 mars 1998, sous le n° 98NC00529, complétée par un mémoire enregistré le 27 novembre 1998, présentée pour la SARL Les Etablissements BECKER dont le siège est ZA Messompré à Semécourt (Moselle), représentée par son gérant en exercice, par Me Gourvennec, avocat au barreau de Metz ;
La SARL Les Etablissements BECKER demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 29 juillet 1998 du Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant, d'une part, à l'annulation de l'avis du Maire de Semécourt du 28 mars 1994 et de la décision du 28 avril 1994 du préfet de la Moselle refusant de rétablir l'accès direct à la route nationale 52 dont elle disposait et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 500 000 francs en réparation du préjudice subi du fait de la suppression de cet accès ;
2°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 500 000 francs en réparation du préjudice subi ;
Code : C
Plan de classement : 71-02-04-01
Elle soutient que :
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'absence de motivation de la décision du
28 avril 1994 ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré du non-respect par la commune et le département de la Moselle de leurs engagements contractuels quant à l'accès direct de la route nationale au terrain de l'entreprise ;
- le principe de l'égalité devant la loi a été méconnu ;
- il y a bien eu préjudice dès lors que les voies annexes d'accès ne sont aucunement signalées à l'attention de la clientèle de passage ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré le 8 septembre 1999, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement tendant au rejet de la requête ;
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
Vu, enregistré le 5 octobre 2000, le mémoire en défense présenté par la commune de Semécourt (Moselle), représentée par son maire en exercice, par la SCP d'avocats Becker-Morel-Friot-Michem-Schwitzer-Martin-Roth-Jean, tendant au rejet de la requête et à la condamnation de l'entreprise BECKER à lui payer la somme de 3 000 francs en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance en date du 15 septembre 2000 portant clôture de l'instruction au
5 octobre 2000 à 16 heures ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2003 :
- le rapport de Mme SEGURA-JEAN, Premier Conseiller,
- et les conclusions de M. ADRIEN, Commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont omis de statuer sur les moyens de la demande tirés de l'absence de motivation de la décision du préfet de la Moselle du 28 avril 1994 et de ce que le droit de l'entreprise à un accès direct sur la route nationale résulterait des engagements contractuels de la commune et du département de la Moselle ; que, dès lors, en tant qu'il a rejeté les conclusions de la SARL Les Etablissements BECKER, dirigées contre cette décision, ce jugement doit être annulé ; que, par suite, il y a lieu pour la Cour de se prononcer immédiatement sur lesdites conclusions par voie d'évocation et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions de la requête ;
Sur les conclusions dirigées contre l'avis du maire de Semécourt du 28 mars 1994 :
Considérant que la société Les Etablissements BECKER ne conteste pas l'irrecevabilité opposée par les premiers juges aux conclusions de sa demande dirigées contre l'avis du maire de la commune de Semécourt ; que, dès lors, les conclusions susanalysées ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur la légalité de la décision du préfet du 28 avril 1994 :
Considérant, en premier lieu, que la décision du préfet de la Moselle en date du 28 avril 1994 rejetant la demande de l'entreprise comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels elle est fondée ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la SARL Les Etablissements BECKER a disposé en 1986 d'une autorisation temporaire d'accès direct à la route nationale 52, d'une durée d'un an, en raison de la réalisation de travaux effectués par elle-même sur le terrain lui appartenant ; qu'il était prévu qu'en cas de prolongation de la durée du chantier, un renouvellement devrait être demandé, ce que n'a jamais fait l'entreprise, qui au demeurant, disposait d'un accès par la voirie interne de la zone commerciale ;
Considérant, en troisième lieu, que, si l'entreprise invoque l'acte de vente du terrain par la commune de Semécourt, l'accord de cession de ladite parcelle et un plan émanant du département de la Moselle, pour se prévaloir d'un droit à un accès direct à la route nationale 52, aucun de ces documents ne peut être regardé comme attribuant un tel droit à la société ;
Considérant, enfin, et en tout état de cause, que la SARL requérante ne peut se prévaloir de l'autorisation accordée à l'entreprise X, dès lors que cette autorisation concerne une parcelle située en dehors du périmètre de la zone industrielle et commerciale, contenant la maison d'habitation de M. X, et non directement desservie par la voirie interne à ladite zone ; que, par suite, la SARL Les Etablissements BECKER et M. X ne se trouvant pas dans des situations identiques, l'entreprise n'est pas fondée à soutenir que le principe de l'égalité devant la loi a été méconnu par le refus du préfet ;
Sur les conclusions indemnitaires :
Considérant que, d'une part, il résulte de ce qui précède que l'entreprise n'avait aucun droit à disposer d'un accès direct à la route nationale 52 au moment où cet accès a été supprimé ; que, d'autre part, l'illégalité externe de la décision en date du 7 avril 1994 du directeur départemental de l'équipement n'est pas de nature à engager la responsabilité de l'administration à l'égard de la SARL ; que, dès lors, les conclusions susmentionnées ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Les Etablissements BECKER n'est fondée ni à demander l'annulation de la décision du préfet de la Moselle du 28 avril 1994, ni à se plaindre de ce que le Tribunal administratif de Strasbourg, par le jugement attaqué, a rejeté les autres conclusions de sa demande ;
Sur les conclusions de la commune de Semécourt tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui se sont substituées à celles de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de condamner la SARL Les Etablissements BECKER à verser à la commune de Semécourt la somme de 450 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E
ARTICLE 1er : Le jugement n° 941188 et n° 941189 du Tribunal administratif de Strasbourg du 29 juillet 1998 est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions de la demande de la SARL Les Etablissements BECKER dirigées contre la décision du préfet de la Moselle du 28 avril 1994.
ARTICLE 2 : Les conclusions de la demande de la SARL Les Etablissements BECKER dirigées contre la décision mentionnée à l'article 1er ci-dessus et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.
ARTICLE 3 : La SARL Les Etablissements BECKER est condamnée à payer à la commune de Semécourt la somme de 450 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
ARTICLE 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Les Etablissements BECKER, à la commune de Semécourt et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
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