La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/10/1998 | FRANCE | N°97NC02429

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, 22 octobre 1998, 97NC02429


(Première Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 1997 sous le n 97NC02429, présentée pour M. Christian X..., demeurant ... à Stiring-Wendel (Moselle), représenté par Me BLINDAUER ;
M. X... demande à la Cour :
1 / d'annuler le jugement en date du 6 novembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé sur le recours de la SARL Cableries Lapp, une décision du 1er décembre 1995 du ministre du travail, du dialogue social et de la participation ayant eu pour effet d'autoriser le licenciement de M. X... ;
2 / de rejeter la demande présent

e par la Société Cableries Lapp devant le tribunal administratif ;
3 / ...

(Première Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 1997 sous le n 97NC02429, présentée pour M. Christian X..., demeurant ... à Stiring-Wendel (Moselle), représenté par Me BLINDAUER ;
M. X... demande à la Cour :
1 / d'annuler le jugement en date du 6 novembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé sur le recours de la SARL Cableries Lapp, une décision du 1er décembre 1995 du ministre du travail, du dialogue social et de la participation ayant eu pour effet d'autoriser le licenciement de M. X... ;
2 / de rejeter la demande présentée par la Société Cableries Lapp devant le tribunal administratif ;
3 / de condamner cette société à lui verser une somme de 15 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er octobre 1998 :
- le rapport de M. BATHIE, Premier Conseiller,
- les observations de Me PIERRE, avocat de M. X... et de Me MARCHAL, avocat des Cableries Lapp ;
- et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.436-1 du code du travail : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise ou d'un représentant syndical ... est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur l'autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ..." ;
Considérant qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement compte-tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution du mandat dont il est investi ;
Considérant que, pour annuler la décision du ministre du travail et de l'emploi qui avait pour effet d'interdire le licenciement par la Société Cableries Lapp, de M. X..., salarié protégé en sa qualité de délégué syndical et de membre du comité d'entreprise, le tribunal administratif a estimé que ce dernier avait commis des fautes professionnelles de nature à justifier une telle sanction, en détenant sans autorisation à son domicile des matériels informatiques appartenant à son employeur ;
Considérant en premier lieu qu'il est constant que, parallèlement à la procédure d'autorisation de licenciement pour faute professionnelle contestée devant le juge de l'excès de pouvoir, des poursuites pénales ont été engagées contre M. X..., à partir des mêmes faits ;
Considérant qu'il résulte des constatations de fait qui constituent le support nécessaire du dispositif de l'arrêt, devenu définitif, du 30 avril 1998 par lequel la Cour d'appel de Metz a condamné M. X... à une peine de deux mois d'emprisonnement assortie du sursis et qui, dans cette mesure, sont revêtues de l'autorité de la chose jugée, que l'intéressé s'est rendu complice du délit de contrefaçon par reproduction de logiciels ; que toutefois ces faits ne constituent pas une faute professionnelle d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement du salarié ;

Considérant en deuxième lieu que, s'il est établi que le salarié détenait à son domicile divers outils informatiques appartenant à la Société Lapp, celle-ci n'apporte pas d'éléments suffisamment précis, de nature à étayer ses accusations, selon lesquelles cette rétention de matériel aurait perturbé ses propres activités, ou lui aurait créé un préjudice quelconque dû à la divulgation de données confidentielles auprès de tiers ; que M. X... fait valoir, sans être utilement contredit, que cet emport à domicile, de documents liés à ses fonctions de cadre constituait une pratique courante, qui n'a pu lui être imputée à faute qu'à l'occasion du conflit surgi avec son employeur, et de la suspension brutale de ses attributions qui s'en est ensuivie ; que dans les circonstances de l'espèce, ces autres faits reprochés au salarié ne pouvaient davantage caractériser une faute de nature à justifier son licenciement ;
Considérant qu'il résulte de ces éléments que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur la gravité des fautes professionnelles imputées à M. X... par son employeuse, et sus-analysées, pour annuler la décision ministérielle attaquée, ayant pour effet d'empêcher le licenciement de l'intéressé ;
Considérant qu'il y a lieu, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la Société Lapp devant le tribunal administratif ;
Considérant en premier lieu que, si des propos, tenus au sein du comité d'entreprise par M. X..., mettaient en cause en termes vifs, l'organisation interne du système informatique, ces propos, replacés dans le contexte d'une procédure de licenciement, ne pouvaient davantage caractériser une faute de nature à justifier une telle sanction ;
Considérant en deuxième lieu que la décision du ministre du travail, du dialogue social et de la participation, en date du 1er décembre 1995 se borne à viser la loi n 95-884 du 3 août 1995, portant amnistie, sans ensuite en tirer aucune conséquence, dans les motifs qui l'ont conduit à refuser l'autorisation de licenciement litigieuse ; que le moyen tiré par la société Lapp, de ce que le ministre aurait fait une application erronée de cette loi d'amnistie manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement sus-visé, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision ministérielle sus-évoquée ;
Considérant enfin qu'il y a lieu, en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de faire verser une somme de 10 000 F par la Société Cableries Lapp à M. Christian X... ;
Article 1er : Le jugement susvisé du 6 novembre 1997 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : En application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la Société Cableries Lapp versera une somme de 10 000 F à M. Christian X....
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Christian X..., à la Société Cableries Lapp et à la ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 97NC02429
Date de la décision : 22/10/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01-04-02-02 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR FAUTE - ABSENCE DE FAUTE D'UNE GRAVITE SUFFISANTE


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Code du travail L436-1
Loi 95-884 du 03 août 1995


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BATHIE
Rapporteur public ?: M. STAMM

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1998-10-22;97nc02429 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award