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23/04/1998 | FRANCE | N°97NC00823

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, 23 avril 1998, 97NC00823


(Première Chambre)
Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 11 avril 1997, présentée pour M. Mourad X..., incarcéré au centre de détention de LOOS (Nord), par Me Mannessier, avocat au Barreau de Lille ;
M. X... demande à la Cour :
1°) - d'annuler le jugement n 96-2523 et 96-2524 en date du 16 janvier 1997 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 20 mai 1996 par lequel le ministre de l'intérieur a prononcé son expulsion du territoire français ;
2°) - d'annuler ladite décision ;

3 ) - d'ordonner le sursis à exécution de la décision attaquée ;
4 ) - de conda...

(Première Chambre)
Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 11 avril 1997, présentée pour M. Mourad X..., incarcéré au centre de détention de LOOS (Nord), par Me Mannessier, avocat au Barreau de Lille ;
M. X... demande à la Cour :
1°) - d'annuler le jugement n 96-2523 et 96-2524 en date du 16 janvier 1997 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 20 mai 1996 par lequel le ministre de l'intérieur a prononcé son expulsion du territoire français ;
2°) - d'annuler ladite décision ;
3 ) - d'ordonner le sursis à exécution de la décision attaquée ;
4 ) - de condamner l'Etat à lui verser une somme de 6 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n 45-2658 en date du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n 78-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mars 1998
- le rapport de M. SAGE, président,
- les observations de Me MANNESSIER, avocat de M.LEGHLID,
- et les conclusions de M.STAMM, Commissaire du Gouvernement ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :
Considérant que l'arrêté attaqué mentionne que M. X... s'est rendu coupable en décembre 1992, de viol commis en réunion et qu'en raison de l'ensemble de son comportement la présence sur le territoire français de l'intéressé constitue une menace grave pour la sécurité publique ; qu'une telle motivation satisfait en l'espèce aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 24 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : "Un procès-verbal enregistrant les explications de l'étranger est transmis avec l'avis motivé de la commission au ministre de l'intérieur qui statue. L'avis de la commission est également communiqué à l' intéressé" ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal de la séance de la commission spéciale d'expulsion devant laquelle a comparu M. X..., que le président de cette commission lui a communiqué oralement l'avis rendu par la commission et les raisons sur lesquelles il se fondait ; qu'ainsi l'obligation de communication de l'avis de la commission d'expulsion à l'intéressé imposée par les dispositions susmentionnées, a été satisfaite ;
Sur la légalité interne de la décision attaquée :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 : "Sous réserve des dispositions de l'article 25, l'expulsion peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si la présence sur le territoire d'un étranger constitue une menace grave à l'ordre public." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... a été condamné le 3 juin 1994 par la Cour d'assises du Nord à une peine de sept ans de réclusion pour viol en réunion ; qu'eu égard à la gravité de ces faits, le ministre de l'intérieur a pu légalement estimer que la présence de M. X... constituait une menace grave pour l'ordre public ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui." ;

Considérant que M. X..., ressortissant algérien, célibataire et sans enfant, soutient qu'il vit en France depuis l'âge de 6 ans et 7 mois, que toute sa famille y réside, qu'il n'a pas d'attaches familiales proches dans le pays dont il possède la nationalité et qu'il maitrise très difficilement sa langue d'origine ; que, cependant, compte tenu de la nature et de la gravité des faits qui lui sont reprochés, la mesure d'expulsion prise à son encontre n'a pas porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte excédant ce qui était nécessaire à la défense de l'ordre public ; que, dès lors, l'arrêté attaqué n'a pas méconnu les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent en aucun cas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et de la motivation de l'arrêté que le ministre n'ait pas en l'espèce examiné l'ensemble des éléments relatifs au comportement de M. X... et aux différents aspects de sa situation afin de déterminer si, après l'infraction commise par ce dernier, sa présence sur le territoire français constituait en mai 1996 une menace grave pour l'ordre public ; que les circonstances que M. X... ait bénéficié à plusieurs reprises de permissions de sortir alors qu'il purgeait la peine à laquelle il avait été condamné par la Cour d'assises du Nord et qu'il se conduise bien en détention ne faisaient pas obstacle à ce que le MINISTRE DE L'INTERIEUR usât de la faculté de prononcer l'expulsion de M. X... ;
Considérant que l'arrêté attaqué ne précise pas le pays de destination de M. X... ; qu'ainsi le moyen tiré des circonstances dans lesquelles se trouve son pays d'origine ne saurait être retenu ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mai 1996 par lequel le ministre de l'intérieur a prononcé son expulsion du territoire français ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;

Considérant que M. X... est la partie perdante dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme au titre des frais qu'il a exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 97NC00823
Date de la décision : 23/04/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-02 ETRANGERS - EXPULSION


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Loi 79-587 du 11 juillet 1979
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 24, art. 23


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. SAGE
Rapporteur public ?: M. STAMM

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1998-04-23;97nc00823 ?
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