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23/04/1998 | FRANCE | N°96NC02245

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, 23 avril 1998, 96NC02245


(Première Chambre)
Vu le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, enregistré au greffe de la Cour le 13 août 1996 ;
Le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la Cour :
1 / d'annuler le jugement n 952987 en date du 27 juin 1996 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté en date du 30 octobre 1995 par lequel le MINISTRE DE L'INTERIEUR a ordonné l'expulsion du territoire français de M. Abdelkader X... ;
2 / de rejeter la demande présentée par M. Abdelkader X... devant le tribunal administratif d'Amiens ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces

du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme...

(Première Chambre)
Vu le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, enregistré au greffe de la Cour le 13 août 1996 ;
Le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la Cour :
1 / d'annuler le jugement n 952987 en date du 27 juin 1996 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté en date du 30 octobre 1995 par lequel le MINISTRE DE L'INTERIEUR a ordonné l'expulsion du territoire français de M. Abdelkader X... ;
2 / de rejeter la demande présentée par M. Abdelkader X... devant le tribunal administratif d'Amiens ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n 45-2658 en date du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mars 1998 :
- le rapport de M. SAGE, Président-rapporteur,
- et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté "Sous réserve des dispositions de l'article 25, l'expulsion peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public" ;
Considérant qu'aux termes de l'article 25 de l'ordonnance susrappelée, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté : "Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 : ... 3 L'étranger qui justifie par tous moyens résider en France depuis plus de quinze ans ainsi que l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans ... Par dérogation aux dispositions du présent article, l'étranger entrant dans l'un des cas énumérés au 3 ; ... peut faire l'objet d'un arrêté d'expulsion en application des articles 23 et 24 s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans" ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1 / Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2 / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou de la protection des droits et des libertés d'autrui" ;
Considérant que si M. X..., ressortissant marocain, réside en France depuis 1967 où demeure sa famille, composée de sa femme et de ses quatre enfants nés en France dont il assurait seul l'entretien jusqu'à son incarcération en 1991, alors même qu'il n'avait eu, avant cette date, aucun antécédent judiciaire, et qu'à la date probable de sa libération du centre de détention de Liancourt, il sera âgé de plus de soixante cinq ans, l'intéressé s'est rendu coupable le 19 septembre 1991 de meurtre avec préméditation et a été condamné à ce titre à 9 ans de réclusion criminelle ; que le crime commis a été imprévisible et perpétré à l'encontre d'un voisin avec lequel M. X... entretenait des relations amicales ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des enquêtes des services sociaux et éducatifs, que par ce comportement, qui ne s'est pas atténué en détention, l'intéressé constitue un danger réel et permanent, tant pour ses proches que pour autrui ; que, dès lors, la mesure d'expulsion attaquée, nécessaire à la défense de l'ordre public et à la prévention des infractions pénales, n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, en dépit de l'âge avancé de M. X..., et dans la mesure où d'une part, quatre de ses autres enfants issus d'un premier mariage résident dans son pays d'origine, et d'autre part, son épouse s'est substituée à lui, depuis sa détention pour l'entretien de la famille, porté une atteinte excessive à sa vie familiale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance de l'article 8 précité pour annuler l'arrêté du 30 octobre 1995 ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... tant devant la Cour que devant le tribunal administratif ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, que la présence de M. X... constitue une menace grave à l'ordre public au sens de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée susvisée, en raison d'une part, de la gravité des faits qui lui sont reprochés et d'autre part, de l'ensemble de son comportement ; que la circonstance qu'il se soit présenté spontanément au commissariat de police après son crime avant d'exprimer des remords, et qu'il se serait bien comporté en détention avec les surveillants et les autres détenus ne préjugent en rien les risques de récidive ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé sa décision en date du 30 octobre 1995 ;
Article 1er : Le jugement n 952987 en date du 27 juin 1996 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif d'Amiens est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'INTERIEUR et à M. X....


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 96NC02245
Date de la décision : 23/04/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ETRANGERS - EXPULSION - DROIT AU RESPECT DE LA VIE FAMILIALE.

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - EFFET DEVOLUTIF ET EVOCATION - EFFET DEVOLUTIF.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 23, art. 25


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. SAGE
Rapporteur public ?: M. STAMM

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1998-04-23;96nc02245 ?
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