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22/10/1997 | FRANCE | N°95NC01903

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 5, 22 octobre 1997, 95NC01903


VU la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés les 24 novembre 1995 et 8 mars 1996 au greffe de la Cour, présentés par M. Abdelkader B, demeurant ..., ayant pour avocat la SCP LYON-CAEN et autres, avocats au Conseil d'État et à la Cour de Cassation ;

Il demande que la Cour :

1°) annule le jugement, en date du 21 septembre 1995, par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre d'État, ministre de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire, en date du 30 janvier 1995, prononçant son expu

lsion du territoire français ;

2°) annule l'arrêté ministériel susmentionn...

VU la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés les 24 novembre 1995 et 8 mars 1996 au greffe de la Cour, présentés par M. Abdelkader B, demeurant ..., ayant pour avocat la SCP LYON-CAEN et autres, avocats au Conseil d'État et à la Cour de Cassation ;

Il demande que la Cour :

1°) annule le jugement, en date du 21 septembre 1995, par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre d'État, ministre de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire, en date du 30 janvier 1995, prononçant son expulsion du territoire français ;

2°) annule l'arrêté ministériel susmentionné ;

3°) condamne l'État à lui verser une somme de 7 000F sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Il soutient que :

- le jugement a été pris sur une procédure irrégulière ;

- le ministre de l'Intérieur n'a pas procédé à l'examen particulier des circonstances de l'espèce et a ainsi commis une erreur de droit, en se fondant exclusivement sur les faits délictueux commis par lui entre 1987 et 1989 ;

- l'arrêté d'expulsion attaqué porte atteinte au droit de l'exposant de mener une vie familiale normale, conformément aux dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

VU le nouveau mémoire, enregistré le 25 septembre 1997, présenté pour M. B qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ; Il fait valoir, en outre, qu'il a subi un grave accident du travail le 26 février 1996 et qu'il est suivi dans le service d'oncologie de l'hôpital TENON à la suite d'une amputation pratiquée le 25 mars 1996 ;

VU le jugement attaqué ;

VU les autres pièces du dossier ;

VU la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

VU l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 02 octobre 1997 :

- le rapport de M. MOUSTACHE, Conseiller ;

- et les conclusions de M. VINCENT, Commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

CONSIDÉRANT que le moyen tiré par M. B de ce que le jugement attaqué aurait " été pris sur une procédure irrégulière " n'est assorti d'aucune précision de nature à mettre le juge d'appel à même d'apprécier le bien-fondé d'un tel moyen ; qu'ainsi celui-ci ne saurait être accueilli ;

Sur la légalité de l'arrêté d'expulsion :

CONSIDÉRANT, en premier lieu, que les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent en aucun cas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre n'ait pas en l'espèce examiné l'ensemble des éléments relatifs au comportement de M. B et aux différents aspects de sa situation afin de déterminer si, après l'infraction commise par ce dernier, sa présence sur le territoire français constituait en janvier 1995 une menace grave pour l'ordre public ; qu'ainsi le moyen tiré d'une prétendue erreur de droit doit être rejeté ;

CONSIDÉRANT, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

CONSIDÉRANT qu'il ressort des pièces du dossier que M. B, de nationalité marocaine, a participé entre 1987 et 1989 à un trafic de stupéfiants ; qu'il a été pour ces faits, condamné à sept années d'emprisonnement par jugement, en date du 28 juin 1991, du tribunal correctionnel de Senlis ; que, d'une part, s'il allègue qu'il est marié depuis 1975 avec une ressortissante marocaine et qu'il est père de cinq enfants dont quatre ont la nationalité française, la mesure d'expulsion dont il a fait l'objet par arrêté du ministre d'État, ministre de l'Intérieur et la décentralisation en date du 30 janvier 1995, n'a cependant pas, eu égard à la nature et à la gravité des faits qui lui sont reprochés, porté au droit au respect de sa vie familiale une atteinte excédant ce qui était nécessaire à la défense de l'ordre public ; que, dans ces conditions, ladite mesure n'a pas méconnu les dispositions précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

CONSIDÉRANT, d'autre part, que si M. B, dans l'ultime mémoire qu'il a produit, se prévaut de son état de santé en faisant valoir, notamment, qu'il a été victime d'un accident du travail le 26 février 1996 et qu'il suit un traitement de chimiothérapie pour une affection néoplasique, de telles circonstances, survenues postérieurement à la date de l'arrêté d'expulsion, demeurent sans incidence sur la légalité de celui-ci ;

CONSIDÉRANT qu'il résulte de ce qui précède que M. B n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 30 janvier 1995, par lequel le ministre de l'Intérieur a ordonné son expulsion du territoire français ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :

CONSIDÉRANT qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : " Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

CONSIDÉRANT que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. B la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

ARTICLE 1 : La requête présentée par M. B est rejetée.

ARTICLE 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B et au Ministre de l'Intérieur.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 95NC01903
Date de la décision : 22/10/1997
Sens de l'arrêt : Tribunal administratif amiens 1995-09-21 confirmation
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-02-04 Étrangers. Expulsion. Droit au respect de la vie familiale.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. MOUSTACHE
Rapporteur public ?: M. VINCENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1997-10-22;95nc01903 ?
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