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11/05/1994 | FRANCE | N°93NC01114

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, 11 mai 1994, 93NC01114


Vu la requête enregistrée le 17 novembre 1993 présentée pour Mme S. ;
Mme S. demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement en date du 5 octobre 1993 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant au versement d'une allocation provisionnelle de 1 000 000F par le Centre Régional de Transfusion Sanguine de Nancy et le Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy en réparation du préjudice subi par elle à raison de sa contamination par le virus de l'hépatite C ;
2°/ de condamner le Centre Régional de Transfusion Sanguine de Nancy et le Ce

ntre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy à lui payer une indemn...

Vu la requête enregistrée le 17 novembre 1993 présentée pour Mme S. ;
Mme S. demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement en date du 5 octobre 1993 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant au versement d'une allocation provisionnelle de 1 000 000F par le Centre Régional de Transfusion Sanguine de Nancy et le Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy en réparation du préjudice subi par elle à raison de sa contamination par le virus de l'hépatite C ;
2°/ de condamner le Centre Régional de Transfusion Sanguine de Nancy et le Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy à lui payer une indemnité provisionnelle de 1 000 000F ainsi qu'une somme de 15 000F hors taxe au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et d'ordonner une expertise pour chiffrer son préjudice ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de la santé publique ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 1994 :
- le rapport de M. LE CARPENTIER, Conseiller,
- les observations de Me MICHEL de la S.C.P. MICHEL-FREY-GOSSIN, avocat de Mme S. et de Me NIORE substituant Me HASCOET, avocat du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy,
- et les conclusions de M. PIETRI, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que Mme S. demande la condamnation conjointe et solidaire du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy et du Centre Régional de Transfusion Sanguine de Nancy à lui verser une indemnité provisionnelle d'un million de francs ainsi que la désignation d'un expert en vue d'évaluer son préjudice, au motif que lesdits Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy et Centre Régional de Transfusion Sanguine de Nancy seraient responsables de sa contamination par le virus de l'hépatite C qu'elle aurait contractée lors d'une intervention de chirurgie cardio-vasculaire pratiquée dans le même centre hospitalier le 6 avril 1988 ; que, le tribunal administratif de Nancy saisi par elle de ce litige ayant rejeté sa requête par jugement en date du 5 octobre 1993, Mme S. relève appel de celui-ci ;
Sur les conclusions dirigées contre le Centre Régional de Transfusion Sanguine de Nancy :
Considérant que le Centre Régional de Transfusion Sanguine de Nancy qui constitue un service administratif du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy est dépourvu de la personnalité morale ; que, dès lors, les conclusions de Mme S. doivent être regardées comme dirigées contre le seul Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy ;
Sur la responsabilité du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy :
Considérant que les conclusions par lesquelles Mme S. a mis en cause la responsabilité du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy doivent être interprétées comme fondées tant sur la responsabilité sans faute que sur la responsabilité pour faute dudit Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy ;
En ce qui concerne la responsabilité sans faute du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy :
Considérant que Mme S., faute notamment d'avoir subi un préjudice d'une gravité exceptionnelle, ne se trouve pas dans l'une des situations qui lui permettraient de rechercher la responsabilité sans faute du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy ;
En ce qui concerne la responsabilité pour faute du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy ;

Considérant, en premier lieu, qu'à la date du 6 avril 1988 à laquelle Mme S. a reçu cinq transfusions de concentrés érythrocytaires, il n'existait aucun procédé permettant de détecter avec certitude la contamination des donneurs de sang par le virus de l'hépatite C dont la spécificité n'était alors que présumée et qui n'a été découvert qu'en 1989 ; que le dépistage obligatoire au virus de l'hépatite C des donneurs de sang n'a été institué qu'à compter du 1er mars 1990, par un arrêté du ministre chargé de la santé en date du 19 février 1990 ; qu'avant cette date, deux arrêtés du ministre chargé de la santé en date des 21 mars 1988 et 12 septembre 1988 avaient seulement prévu pour compter respectivement des 15 avril 1988 et 1er octobre 1988, l'éviction des donneurs de sang dont le taux de transaminases à l'alanine-amino transférase était anormalement élevé et des donneurs sérologiquement positifs à l'hépatite B ; que, par conséquent, à la date de l'intervention chirurgicale pratiquée sur Mme S., il n'existait aucune obligation pour le Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy d'assurer le dépistage des donneurs de sang contaminé au virus de l'hépatite C ; qu'au surplus, il résulte de l'instruction que le Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy avait anticipé sur l'entrée en vigueur des arrêtés susmentionnés en instituant spontanément un tel dépistage dès le 1er février 1988 ; que dès lors, Mme S. n'est pas fondée à soutenir que sa contamination par le virus de l'hépatite C révélerait par elle-même une faute de nature à engager à son égard la responsabilité du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy ;
Considérant, en second lieu, que si le dossier médical de Mme S. contient, comme l'a relevé l'expert nommé par les premiers juges, des indications confuses et anormalement imprécises, notamment en ce qui concerne le report des données permettant d'identifier avec certitude les donneurs du sang qui lui a été effectivement transfusé le 6 avril 1988, de telles anomalies ne sont pas, compte tenu de ce qui précède, de nature à établir l'existence d'une faute du service public hospitalier en relation avec la contamination subie par Mme S. ;
Considérant, en troisième lieu, qu'en admettant qu'un flacon de 10 ml. de plasma humain contenant quatre facteurs de coagulation ait été effectivement administré à Mme S. le 7 avril 1988, il résulte également de l'instruction que ce type de dérivé sanguin, totalement inactivé au virus de l'hépatite C par application d'un traitement au solvant-détergent, avait reçu un tel traitement en vigueur depuis 1987 ; que dès lors, aucune faute ne peut, à ce titre, être imputée au Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme S. n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que Mme S. qui succombe dans la présente instance n'est pas fondée à demander la condamnation du Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy à lui payer une somme de 15 000F hors taxe au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1 : La requête de Mme S. est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme S., au Centre Hospitalier Régional Universitaire de Nancy, à la Caisse primaire d'assurance maladie de Nancy, au Centre Régional de Transfusion Sanguine et au Ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la Santé et de la Ville.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 93NC01114
Date de la décision : 11/05/1994
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE POUR FAUTE SIMPLE : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DU SERVICE HOSPITALIER - ABSENCE DE FAUTE - Contamination par un virus attribué à des transfusions - Transfusions en avril 1988 ayant causé la contamination par le virus de l'hépatite C.

60-02-01-01-01-02, 61-05-01 Le virus de l'hépatite C n'ayant été découvert qu'en 1989, une contamination qui serait survenue à l'occasion d'une transfusion pratiquée en avril 1988 n'est pas par elle-même révélatrice d'une faute de nature à engager la responsabilité du service public hospitalier.

SANTE PUBLIQUE - UTILISATION THERAPEUTIQUE DE PRODUITS D'ORIGINE HUMAINE - DONS DU SANG - Responsabilité de la puissance publique à raison de la transfusion de produits sanguins - Contamination alléguée d'une patiente par le virus de l'hépatite C du fait de transfusions subies en avril 1988 - Absence de faute du service public hospitalier.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Président : M. Philippoteaux
Rapporteur ?: M. Le Carpentier
Rapporteur public ?: M. Pietri

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1994-05-11;93nc01114 ?
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