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09/07/1992 | FRANCE | N°90NC00463

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 09 juillet 1992, 90NC00463


Vu, enregistrée le 13 août 1990 et régularisée le 20 septembre 1990 sous le n° 90NC00463 la requête présentée pour le département du Nord, Hôtel du département, ... ;
Le département demande à la Cour :
1) d'annuler le jugement en date du 15 juin 1990 par lequel le tribunal administratif de Lille l'a condamné à payer aux époux Y... une indemnité de 220 300 F ;
2°) d'écarter sa responsabilité des conséquences dommageables des désordres subis par l'habitation des époux Y... ;
3°) à titre subsidiaire d'admettre son appel en garantie à l'encontre de GAZ de

FRANCE ;
Vu, enregistré le 19 octobre 1990, le mémoire en défense présenté pour les ...

Vu, enregistrée le 13 août 1990 et régularisée le 20 septembre 1990 sous le n° 90NC00463 la requête présentée pour le département du Nord, Hôtel du département, ... ;
Le département demande à la Cour :
1) d'annuler le jugement en date du 15 juin 1990 par lequel le tribunal administratif de Lille l'a condamné à payer aux époux Y... une indemnité de 220 300 F ;
2°) d'écarter sa responsabilité des conséquences dommageables des désordres subis par l'habitation des époux Y... ;
3°) à titre subsidiaire d'admettre son appel en garantie à l'encontre de GAZ de FRANCE ;
Vu, enregistré le 19 octobre 1990, le mémoire en défense présenté pour les époux Y... domiciliés ... ;
Les époux Y... demandent le rejet de la requête et le versement d'une indemnité de 20 000 F au titre de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu, enregistré le 29 novembre 1990, le mémoire présenté pour la commune d'AVESNES-LES-AUBERT ;
La commune demande à la Cour de rejeter la requête et subsidiairement, si sa responsabilité était retenue à être garantie par GAZ de FRANCE et l'entreprise WATTIEZ ;
Vu, enregistré le 14 décembre 1990, le mémoire déposé par GAZ de FRANCE ;
GAZ de FRANCE demande à titre principal le rejet de la requête et, à titre subsidiaire à être garanti par la société WATTIEZ dans l'hypothèse où sa responsabilité serait retenue ;
Vu, enregistré le 13 mars 1991, le mémoire par lequel les époux Y... :
1) confirment leurs conclusions antérieures ;
2) chiffrent leur préjudice à 342 481,34 F pour la réfection de l'immeuble, 350 F par mois pour la perte de jouissance d'une pièce d'habitation, 50 000 F pour le préjudice d'agrément et une somme de 2 500 F à parfaire pour les charges exceptionnelles de chauffage ;
3) demandent en outre que le département du Nord, la commune d'AVESNES-LES-AUBERT et GAZ de FRANCE soient condamnés in solidum si le jugement devait être reformé ;
4) demandent enfin une indemnité de 30 000 F au titre de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 1992 :
- le rapport de M. SCHILTE, Conseiller,

- les observations de Me GASSE, avocat de la commune d'AVESNES et de Me X..., substituant la SCP COURTEAUX-PELISSIER, avocat de GAZ de FRANCE ;
- et les conclusions de M. PIETRI, Commissaire du Gouvernement, désigné en application du 2° alinéa de l'article 18 de la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986 ajouté par l'article 5 de la loi n° 90-5611 du 25 juin 1990 ;

Sur l'appel principal :
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :
Considérant que pour retenir la responsabilité du département du Nord dans les conséquences dommageables des désordres qui ont affecté l'immeuble des époux Y..., le tribunal administratif de Lille s'est fondé sur la responsabilité sans faute du maître de l'ouvrage constitué par la conduite d'eaux pluviales souterraine ; qu'il avait explicitement écarté la responsabilité pour faute de Gaz de France en estimant qu'il n'existait aucune preuve de lien de causalité entre les désordres constatés et les travaux effectués plusieurs années auparavant pour le compte de GAZ de FRANCE ; que dès lors, le tribunal n'était pas tenu d'examiner l'appel en garantie formé par le département du Nord contre Gaz de France, lequel n'était susceptible d'être accueilli que sur le fondement de la responsabilité pour faute ;
En ce qui concerne les conclusions du département du Nord dirigées contre la commune d'AVESNES-LES-AUBERT :
Considérant que les conclusions du département du Nord tendant à ce que la commune d'AVESNES-LES-AUBERT soit déclarée responsable des dommages subis par les époux Y... ont été présentés pour la première fois en appel ; qu'elles ne sont, dès lors, pas recevables ;
En ce qui concerne la détermination des responsabilités :
Considérant qu'à la suite d'un orage violent intervenu dans la nuit du 22 au 23 juin 1986, des désordres, se manifestant par des fissures des façades, des affaissements de planchers et des apports de limons dans la cave, sont apparus dans l'immeuble appartenant aux époux Y... en bordure du CD.97 sur la commune d'AVESNES-LES-AUBERT ; que ces désordres importants faisaient suite à des apports irréguliers d'eau dans la cave intervenus au cours des années précédentes et signalés à la commune ; Considérant qu'à l'occasion de la réfection en 1966 du CD.97, le département, maître de l'ouvrage, avait fait installer un drainage sous bordure en tuyaux de béton poreux sur radier étanche ; qu'en 1967, la commune a créé un réseau d'assainissement ; que ces deux réseaux ont été raccordés ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les dommages subis par les époux Y... sont imputables à des arrivées d'eau provenant du réseau de collecte d'eaux pluviales lui-même connecté au réseau d'assainissement ; que, d'une part, le département est responsable des dommages causés par le réseau d'eau pluviale qui lui appartient ; qu'il incombait, d'autre part, à la commune d'AVESNES-LES-AUBERT, responsable du bon fonctionnement de l'ensemble du réseau d'assainissement et d'évacuation des eaux pluviales, de surveiller l'état de toutes les canalisations, qu'elles lui aient ou non appartenu et notamment, pour ce qui est de la canalisation de drainage sous bordure, de mettre le département, resté maître de l'ouvrage, en demeure d'effectuer les travaux jugés par elle nécessaires à ce fonctionnement ; que la commune, avertie des désordres que rencontraient les époux Y... à chaque précipitation importante n'a pas mis en oeuvre l'ensemble des mesures qu'appelait la situation ; qu'ainsi sa responsabilité est également engagée ;

Considérant par contre qu'en admettant même que les fuites d'eau proviennent de cassures de la canalisation consécutives à des travaux effectués pour le compte de GAZ de FRANCE en 1979 ou même par M. Y... lors de l'exécution de son branchement particulier, les éléments figurant au dossier ne permettent pas de retenir, compte tenu notamment du délai écoulé entre ces travaux et la réalisation des dommages, que les désordres constatés sont la conséquence directe de ces travaux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a ainsi lieu de retenir pour moitié la responsabilité de la commune et celle du département ; que le département du Nord est fondé à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a retenu sa responsabilité exclusive dans la survenance des dommages ; Sur l'appel incident et provoqué des époux Y... :
En ce qui concerne la demande de condamnation solidaire :
Considérant que si les époux renouvellent en appel leur demande de condamnation solidaire du département du Nord et de la commune d'AVESNES-LES-AUBERT, les fondements des responsabilités mises en jeu sont distincts ; qu'il n'y a dès lors pas lieu de prononcer une condamnation solidaire ;
En ce qui concerne l'évaluation du préjudice :
Considérant d'une part que l'indemnisation pour la réparation de l'immeuble ne saurait dépasser la valeur vénale dudit immeuble que le tribunal administratif a, par une exacte appréciation, fixée à 205 000 F ;
Considérant d'autre part que les époux Y... ne justifient pas que leurs autres chefs de préjudice dépasserait la somme de 15 300 F allouée par le tribunal administratif au titre des troubles divers dans les conditions d'existence ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer l'évaluation du préjudice faite par le tribunal administratif, soit un montant de 220 300 F qui doit être mis à charge pour moitié au département et pour moitié à la commune d'AVESNES-LES-AUBERT ;
En ce qui concerne les intérêts :
Considérant que les époux Y... sont recevables en appel à étendre leur demande d'intérêts à l'intégralité de la somme réparant leur préjudice alors même qu'ils avaient limité en première instance cette demande aux intérêts portant sur la somme réparant les préjudices autres que la reconstruction de l'immeuble ; que les époux Y... ont ainsi droit au paiement des intérêts sur les sommes dues par le département du Nord et la commune d'AVESNES-LES-AUBERT à compter du 2 août 1989, date de leur requête introductive d'instance ;
Sur la demande du département du Nord tendant a obtenir le paiement d'intérêts sur les sommes versées aux époux Y... :

Considérant que si le département du Nord a, en exécution du jugement attaqué, versé aux époux Y... la somme de 205 000 F dont il se trouve partiellement déchargé par la présente décision, il n'est pas fondé à demander à la Cour la condamnation des époux Y... à la réparation sous la forme d'intérêts au taux légal, du préjudice subi par lui du fait du versement de ladite somme auquel il était tenu en raison du caractère exécutoire du jugement ; qu'en revanche il y a lieu de déduire des intérêts qu'il est condamné à verser par la présente décision les montants déjà versés ;
Sur l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation." ; que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner le département du Nord et la commune d'AVESNES-LES-AUBERT à verser chacun une somme de 3 000 F aux époux Y... ;
Article 1er : Le département du Nord est condamné à payer aux époux Y... une somme de 110 150 F augmentée des intérêts de droit entre le 2 août 1989 et la date du présent arrêt, déduction faite des intérêts déjà versés en application du jugement du 15 juin 1990 du tribunal administratif de Lille.
Article 2 : La commune d'AVESNES-LES-AUBERT est condamnée à payer aux époux Y... une somme de 110 150 F augmentée des intérêts de droit entre le 2 août 1989 et la date du présent arrêt.
Article 3 : Le département du Nord et la commune d'AVESNES-LES-AUBERT paieront chacun une indemnité de 3 000 F aux époux Y....
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête du département du Nord et des conclusions du recours incident des époux Y... est rejeté.
Article 5 : Le jugement en date du 15 juin 1990 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au département du Nord, aux époux Y..., à la commune d'AVESNES-LES-AUBERT, à GAZ de FRANCE, au ministre de l'équipement, du logement et des transports et à la Société WATTIEZ.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro d'arrêt : 90NC00463
Date de la décision : 09/07/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

67-02-05-02 TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - PERSONNES RESPONSABLES - ETAT OU AUTRE COLLECTIVITE PUBLIQUE


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: SCHILTE
Rapporteur public ?: PIETRI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1992-07-09;90nc00463 ?
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