Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 23 juillet 1987 sous le numéro 89706 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 5 juin 1986 sous le numéro 89NC00543, présentée pour Madame et Monsieur X..., demeurant ... à 54460 LIVERDUN ;
Les époux X... demandent à la Cour :
1° de réformer le jugement en date du 26 mai 1987 par lequel le tribunal administratif de NANCY a rejeté la demande en décharge des impositions supplémentaires sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1976, 1977 et 1978 ;
2° de prononcer la décharge des impositions contestées ;
Vu l'ordonnance du 2 janvier 1989 par laquelle le Président de la 8ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis le dossier à la cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 9 octobre 1990 :
- le rapport de M. BONHOMME, conseiller,
- les observations de M. et Mme Victor X... ;
- et les conclusions de Mme FELMY, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que Madame et Monsieur Victor X... ont fait l'objet en 1980 d'une vérification approfondie de leur situation fiscale d'ensemble portant sur les années 1976, 1977 et 1978, faisant suite à la vérification de la comptabilité de l'entreprise individuelle de maçonnerie dont Mme Philomène X... était la dirigeante ; qu'à l'issue de ces contrôles, l'administration a rectifié d'office les bénéfices industriels et commerciaux déclarés pour les exercices 1976 et 1977 et évalué d'office les bénéfices industriels et commerciaux de l'exercice 1978 ; que les époux X... font appel du jugement du tribunal administratif de NANCY qui a rejeté leur demande en décharge des impositions supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'impôt sur le revenu des années 1976, 1977 et 1978 pour un montant de 261 628 F ; Sur l'étendue du litige :
Considérant que, postérieurement à l'introduction de la requête, le directeur régional des impôts de Meurthe-et-Moselle a prononcé les 14 juin 1989 et 10 septembre 1990 au titre des années 1976 et 1978 des dégrèvements de l'impôt sur le revenu des époux Y... pour un montant total de 164 904 F en droits et pénalités ; que, dans cette mesure, la requête est devenue sans objet ;
Sur la régularité de la procédure contentieuse devant le tribunal administratif :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R.201 du code des tribunaux administratifs, dans sa rédaction en vigueur à la date du jugement contesté et applicable dans les instances relatives aux affaires fiscales, "l'avertissement du jour où la requête est portée en séance publique est donné aux parties qui ont fait connaître, antérieurement à la fixation du rôle, leur intention de présenter des observations orales" ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'examen du dossier de première instance que les époux X... ont fait connaître, antérieurement à la fixation du rôle, leur intention de présenter des observations orales lors de l'audience au cours de laquelle l'affaire les concernant a été examinée par le tribunal administratif ; que dès lors, à supposer même que le greffe de ce tribunal n'ait pas averti les requérants du jour où l'affaire a été appelée à l'audience ou n'ait pas invité leur conseil à user de son droit de formuler des observations orales, M. et Mme X... ne sont pas fondés à soutenir que le tribunal administratif aurait, en raison de cette omission, entaché le jugement attaqué d'une irrégularité de procédure ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, que les époux X... font valoir que la vérification de comptabilité se serait prolongée, du fait de la vérification approfondie de leur situation fiscale d'ensemble, jusqu'au 13 juin 1980, date d'expédition de la notification des redressements envisagés par l'administration ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que les opérations de vérification de la comptabilité se sont déroulées du 15 janvier au 30 avril 1980, date de la dernière intervention sur place du vérificateur ; que celle-ci a clos les opérations de vérification de la comptabilité dès lors que, d'une part, les contrôles effectués après cette date dans le cadre des demandes d'information et d'éclaircissement adressées par le service au contribuable n'ont pas permis une nouvelle consultation des documents comptables de l'entreprise dirigée par Madame X... et que, d'autre part, la vérification de la situation fiscale d'ensemble des époux X..., qui a suivi la vérification de comptabilité, ne peut être regardée en l'espèce comme ayant permis de poursuivre l'investigation de la comptabilité de l'entreprise, alors même que l'examen des comptes privés des requérants a permis d'y déceler des recettes commerciales dissimulées provenant de l'entreprise ; que, par suite, les consorts X... ne sont pas fondés à soutenir que la vérification de comptabilité s'est prolongée au delà de la durée réglementaire ;
Considérant, en deuxième lieu, que le vérificateur a remis le 27 janvier 1980 aux contribuables vérifiés un avis de vérification approfondie de leur situation fiscale d'ensemble ; qu'il ne résulte pas de l'article 67 de la loi n° 75-1278 du 30 décembre 1975, codifié aux articles L.12, L.49 et L.50 du livre des procédures fiscales relatifs à cette procédure, qu'ainsi que l'affirment les requérants, le fait d'aviser un contribuable de l'engagement de cette procédure crée pour l'administration une obligation d'engager avec lui un débat oral sur les renseignements qu'elle recueille ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit que l'administration doive informer le contribuable de l'absence de caractère contraignant de cette procédure ; que l'administration qui avait connaissance de recettes commerciales dissimulées sur des comptes dont la communication résultait de la procédure de vérification d'ensemble des revenus des requérants était en droit de leur adresser une demande d'information, sans avoir au préalable l'obligation de porter à leur connaissance les informations recueillies ; que si les requérants invoquent le caractère imprécis de cette demande d'information, cette imprécision, à la supposer admise, n'est pas en elle-même de nature à entacher d'irrégularité la procédure de redressement poursuivie, dès lors que celle-ci n'est pas intervenue en application de l'article L.69 du livre des procédures fiscales sur le fondement d'une taxation d'office pour insuffisance des réponses données par les requérants à la demande d'information litigieuse ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obstacle qu'à l'issue d'une vérification approfondie de situation fiscale et d'une vérification de comptabilité l'administration informe le contribuable de l'ensemble des rectifications de ses bases d'imposition par une seule notification de redressement ;
Sur la charge de la preuve :
Considérant qu'il n'est pas contesté que la comptabilité présentée au vérificateur au titre de chacune des trois années vérifiées était dépourvue de caractère probant, eu égard notamment à l'absence de comptabilisation sur une période de plusieurs mois de certaines opérations commerciales ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le vérificateur a engagé la procédure de rectification d'office ; que dès lors, les requérants n'étaient fondés à demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaire ; qu'ils ne peuvent, par suite, obtenir la décharge ou la réduction des impositions contestées qu'en apportant la preuve de l'exagération des bases retenues par l'administration ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant que pour reconstituer les résultats imposables des trois années vérifiées l'administration a réintégré en tant que recettes commerciales dissimulées les apports aux comptes bancaires présentant un caractère commercial et le solde de la balance de trésorerie pour un montant de 298 051 F ; qu'eu égard à la confusion existant entre les comptes commerciaux et privés des requérants et à la circonstance que l'essentiel des ressources des époux X... provient de l'activité commerciale exercée par Madame X..., l'administration était en droit de recourir à cette méthode ; que si les époux X... contestent à concurrence de 249 731 F le caractère commercial des ressources ainsi réintégrées en faisant valoir que pour 118 000 F celles-ci ont pour origine des prêts et dons familiaux comprenant notamment un don manuel de 33 249,99 F du père de Madame X..., ils n'apportent pas la preuve de ces prêts et libéralités et ne sont dès lors pas fondés à demander que les sommes en cause soient exclues du calcul des redressements contestés ; qu'en tant qu'ils contestent la prise en compte d'une somme de 26 786 F correspondant à des remises de chèques ou de virements figurant sur le compte bancaire ouvert auprès de la S.N.V.B., ainsi que de deux autres sommes de 30 859 F et 1 358 F, lesdites sommes se rapportent soit à des redressements abandonnés par l'administration soit à des opérations pour lesquelles les requérants ne font pas la preuve d'une origine non commerciale ;
Considérant par ailleurs qu'en ce qui concerne la demande des requérants d'imputation de charges professionnelles non comptabilisées et réglées par un compte C.C.P., c'est à bon droit que l'administration a, malgré la production de factures justificatives, limité cette imputation aux dépenses effectivement acquittées au moyen de ce compte, soit 7 388,83 F ; qu'il n'est pas justifié que le virement de 5 000 F sur le compte S.N.V.B. concernant un client BENSE ait été comptabilisé ; qu'enfin, pour les autres apports bancaires dont la réintégration est discutée, les justifications apportées ne peuvent être regardées comme suffisantes ; que par suite M. et Mme X... n'apportent pas la preuve qui leur incombe de l'exagération des bases d'imposition retenues ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de NANCY a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions contestées ;
Article 1 : Il n'y a pas lieu à statuer sur la demande de réduction de l'impôt sur le revenu présentée par Madame et Monsieur Victor X... devant le tribunal administratif de NANCY à concurrence de la somme de 164 904 F en droits en pénalités.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête des époux X... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié aux époux X... et au ministre délégué auprès du Ministre d'Etat, Ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.