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16/07/2024 | FRANCE | N°24MA01612

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 16 juillet 2024, 24MA01612


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Le préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bastia, sur le fondement du troisième alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 14 février 2024 par lequel le maire de la commune de Pianottoli-Caldarello a délivré à M. A... C... un certificat de permis de construire tacite valant division parcellaire, pour l'édification de deux réside

nces secondaires avec garages et piscines, sur un terrain cadastré section C n° 144 à 146 situ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bastia, sur le fondement du troisième alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 14 février 2024 par lequel le maire de la commune de Pianottoli-Caldarello a délivré à M. A... C... un certificat de permis de construire tacite valant division parcellaire, pour l'édification de deux résidences secondaires avec garages et piscines, sur un terrain cadastré section C n° 144 à 146 situé lieudit Caldarello.

Par une ordonnance n° 2400688 du 18 juin 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a suspendu l'exécution de cet arrêté et a rejeté les conclusions de M. C... et de la commune de Pianottoli-Caldarello présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juin 2024, M. C..., représenté par Me Susini, demande au juge des référés de la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal administratif de Bastia du 18 juin 2024 ;

2°) de rejeter le déféré suspension présenté par le préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que la somme de 13 euros au titre du droit de plaidoirie en application des dispositions des articles L. 723-3, R. 723-26-1, R. 723-26-2 et R. 723-26-3 du code de la sécurité sociale.

Il soutient que :

- le juge des référés du tribunal aurait dû considérer comme tardif le déféré du préfet et par voie de conséquence, rejeter le déféré-suspension qui n'en est que l'accessoire, la date de communication au préfet de l'entier dossier du permis tacite ne pouvant être retenue comme point de départ du délai de recours, et l'ordonnance attaquée étant ainsi entachée d'une erreur de droit et d'une méconnaissance du principe de sécurité juridique ;

- l'ordonnance attaquée ne mentionne pas la date de naissance du permis tacite, le 30 juin 2021, et ses conditions de naissance, alors que ce permis est la mesure en litige résultant du jugement du 25 mars 2021, devenu définitif, peu important la date du certificat et sa transmission au préfet ;

- le déféré était tardif, dès lors que le recours gracieux a été formé après l'expiration du délai de recours qui a couru à l'égard du préfet au plus tôt le 30 juin 2021, date de naissance du permis tacite, la notification du jugement du même jour annulant le refus de permis ayant eu lieu le 25 mars 2021, et au plus tard, le 22 novembre 2022, soit le lendemain de la transmission au préfet de l'arrêté portant transfert de ce permis ;

- en tout état de cause, le déféré a été formé après l'expiration d'un délai raisonnable.

La présidente de la Cour a donné délégation à M. B... pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par les juges des référés des tribunaux administratifs du ressort de la Cour, et pour statuer par voie d'ordonnances sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a déposé le 26 novembre 2018 une demande de permis de construire, valant division parcellaire, pour la réalisation de deux résidences secondaires avec garages et piscines, sur des parcelles cadastrées section C n° 144 à 146, situées à Pianatolli-Caldarello. L'arrêté du maire de la commune du 16 janvier 2019 refusant ce permis de construire a été annulé de manière définitive par jugement du tribunal administratif de Bastia du 25 mars 2021 qui a enjoint au maire de réexaminer la demande de M. C... dans un délai de deux mois. Le 30 mars 2021, M. C... a confirmé sa demande de permis de construire et a sollicité en conséquence, le 12 janvier 2022, la délivrance d'un certificat de permis de construire tacite. Par un second jugement du 12 février 2024, le tribunal a annulé le refus tacite du maire de délivrer à M. C... un tel certificat relatif au permis tacite né le 30 juin 2021. Le 14 février 2024, le maire de Pianottolli-Caldarello a délivré ce certificat à M. C..., qu'il a rectifié par certificat du 22 février 2024. Le préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud, a formé le 3 avril 2024 contre ce certificat de permis tacite un recours gracieux, reçu le 8 avril 2024. Par une ordonnance du 18 juin 2024, dont M. C... relève appel, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia, saisi par le préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud, a suspendu l'exécution de ce certificat.

Sur le cadre juridique applicable à la requête d'appel :

2. Aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, auquel renvoie l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. / (...) /

Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. Il est statué dans un délai d'un mois. / Jusqu'à ce que le président du tribunal administratif ou le magistrat délégué par lui ait statué, la demande de suspension en matière d'urbanisme, de marchés et de délégation de service public formulée par le représentant de l'Etat dans les dix jours à compter de la réception de l'acte entraîne la suspension de celui-ci. Au terme d'un délai d'un mois à compter de la réception, si le juge des référés n'a pas statué, l'acte redevient exécutoire. (...) L'appel des jugements du tribunal administratif ainsi que des décisions relatives aux demandes de suspension prévues aux alinéas précédents, rendus sur recours du représentant de l'Etat, est présenté par celui-ci. ".

3. Il résulte de ces dispositions du code général des collectivités territoriales, et notamment du sixième alinéa, précité, de l'article L. 2131-6, que lorsque le juge des référés du tribunal administratif se prononce sur une demande de suspension présentée par le représentant de l'Etat en application de cet article, sa décision, qui n'entre pas dans le champ d'application des articles L. 521-1 à L. 523-1 du code de justice administrative relatifs au juge des référés statuant en urgence, est susceptible de faire l'objet d'un appel (CE, 11 mars 2005, Ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales c/ Commune d'Avion et autres, n° 276181).

4. Les dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, aux termes desquelles les " magistrats ayant le grade de président désignés à cet effet par le président de la cour peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement ", sont applicables par le juge des référés de la Cour statuant en appel sur une requête formée contre une décision du juge des référés du tribunal administratif statuant en premier ressort, notamment dans le cas prévu par l'article L. 554-1 du code de justice administrative.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

5. L'argumentation à laquelle M. C... reproche au juge des référés du tribunal de ne pas avoir répondu et qui était tirée, d'une part, du déclenchement du délai de recours contentieux à l'issue de la notification au préfet du jugement n° 1900489 et d'autre part, de la notification à cette autorité de l'arrêté de transfert de permis de construire constituait, au soutien de sa fin de non-recevoir opposée à la demande d'annulation du préfet et tirée de sa tardiveté, et que le juge a écartée par des motifs suffisants, de simples arguments que celui-ci a pu, sans commettre d'irrégularité, s'abstenir de réfuter explicitement. Par suite, à le supposer soulevé, le moyen tiré de l'omission à statuer entachant l'ordonnance attaquée, manifestement infondée, ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

6. Parmi les actes mentionnés par l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales, et susceptibles d'être déférés par le représentant de l'Etat dans le département sur le fondement des dispositions de l'article L. 2131-6 du même code figure, au 6° : " Le permis de construire et les autres autorisations d'utilisation du sol et le certificat d'urbanisme délivrés par le maire ". Par ailleurs, l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme prévoit que, à défaut d'une décision expresse dans le délai d'instruction, le silence gardé par l'autorité compétente vaut permis de construire et l'article L. 424-8 dispose qu'un tel permis tacite est exécutoire à compter de la date à laquelle il est acquis. Enfin, aux termes de l'article R. 423-7 du même code : " Lorsque l'autorité compétente pour délivrer le permis ou pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est le maire au nom de la commune, celui-ci transmet un exemplaire de la demande ou de la déclaration préalable au préfet dans la semaine qui suit le dépôt ".

7. S'il résulte des dispositions de l'article L. 424-8 du code de l'urbanisme rappelées ci-dessus qu'un permis de construire tacite est exécutoire dès qu'il est acquis, sans qu'il y ait lieu de rechercher s'il a été transmis au représentant de l'Etat, les dispositions de cet article ne dérogent pas à celles de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, en vertu desquelles le préfet défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. Figurent au nombre de ces actes les permis de construire tacites. Une commune doit être réputée avoir satisfait à l'obligation de transmission, dans le cas d'un permis de construire tacite, si elle a transmis au préfet l'entier dossier de demande, en application de l'article R. 423-7 du code de l'urbanisme. Le délai du déféré court alors à compter de la date à laquelle le permis est acquis ou, dans l'hypothèse où la commune ne satisfait à l'obligation de transmission que postérieurement à cette date, à compter de la date de cette transmission. (CE, 22 octobre 2018, M. D..., n° 400779).

8. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est du reste pas allégué par l'appelant, que l'entier dossier de demande de permis de construire qu'il a présenté le 26 novembre 2018 au maire de Pianottoli-Caldarello aurait été transmis au préfet de la Corse-du-Sud conformément aux dispositions citées au point 6 de l'article R. 423-7 du code de l'urbanisme. La circonstance que le préfet a reçu copie du jugement du tribunal administratif de Bastia du 25 mars 2021 annulant le refus de permis de construire du 16 janvier 2019 et enjoignant au maire de Pianottoli-Caldarello de réexaminer la demande de M. C..., qui, en tout état de cause, ne vaut pas délivrance d'une autorisation de construire, est sans incidence sur le point de départ du délai de recours contentieux contre le permis tacite en litige. Si l'arrêté du 16 novembre 2022 portant transfert du permis tacite né le 30 juin 2021 a été transmis au préfet, il ne résulte ni du bordereau de transmission du 22 novembre 2022, ni des autres pièces du dossier, et il n'est pas même allégué, qu'à cette occasion, le dossier de la demande ayant fait naître cette autorisation tacite aurait été porté à la connaissance du préfet.

9. D'autre part, dès lors que, ainsi qu'il vient d'être dit, le préfet n'a pas eu une connaissance suffisante du permis tacite avant que ne lui soit transmis le dossier de la demande, joint au certificat de permis tacite du 14 février 2024, M. C... ne peut valablement se prévaloir du principe de sécurité juridique pour soutenir que le déféré contre son autorisation tacite a été présenté au-delà d'un délai raisonnable.

10. Ainsi, conformément à la règle énoncée au point 7, le délai dans lequel le préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud était recevable à déférer le permis tacite dont la naissance le 30 juin 2021 a été certifiée par le maire de Pianottoli-Caldarello par l'arrêté du 14 février 2024, n'a pas commencé à courir à l'égard du représentant de l'Etat à la date à laquelle ce permis était acquis, ni à la date de transmission du transfert de ce permis, mais le 29 février 2024, date de réception par les services de préfecture du dossier annexé à ce certificat. Il suit de là que tant le recours gracieux du préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud, formé contre le certificat de permis tacite en litige le 3 avril 2024, reçu par le maire de Pianottoli-Caldarello le 8 avril 2024, et dûment notifié à M. C..., que le déféré du préfet tendant à l'annulation de ce certificat, enregistré le 4 juin 2024 au greffe du tribunal, ont été présentés dans le respect du délai de recours contentieux et que la demande de suspension d'exécution présentée par le préfet ne pouvait être rejetée au motif de la tardiveté de son déféré, ainsi que l'a considéré le juge des référés du tribunal.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la requête d'appel de M. C..., qui ne conteste pas le motif de la suspension d'exécution de son permis de construire tacite, est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du même code et ses prétentions relatives au droit de plaidoirie.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête n° 24MA01612 de M. C... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... C....

Copie en sera adressée au préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud, à la commune de Pianottoli-Caldarello et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Fait à Marseille, le 16 juillet 2024.

2

N° 24MA01612


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Numéro d'arrêt : 24MA01612
Date de la décision : 16/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Contrôle de la légalité des actes des autorités locales - Déféré assorti d'une demande de sursis à exécution.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation nationale - Dispositions législatives du code de l'urbanisme.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP AMIEL-SUSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-16;24ma01612 ?
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