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22/02/2022 | FRANCE | N°21MA04908

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 22 février 2022, 21MA04908


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 9 juin 2021 l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de sa destination et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de quatre mois.

Par un jugement n° 2103284 du 3 août 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté

sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 9 juin 2021 l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de sa destination et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de quatre mois.

Par un jugement n° 2103284 du 3 août 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2021, M. B..., représenté par la SCP Dessalces, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 août 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 9 juin 2021 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement, qui ne spécifie pas en quoi les pièces médicales produites ne suffisaient pas à appuyer sa demande, est insuffisamment motivé et méconnaît les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

- la décision méconnaît les dispositions de l'article 41-2 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dès lors qu'il n'a pas été mis à même de présenter ses observations sur la mesure envisagée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article L. 611-3 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision est entachée d'une erreur d'appréciation en méconnaissance des dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 novembre 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., de nationalité algérienne, relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de l'Hérault du 9 juin 2021 l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de sa destination et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de quatre mois.

2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) "

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. " M. B... soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne précise pas en quoi les pièces versées au dossier ne lui permettaient pas d'entrer dans le champ d'application du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Au point 5 de son jugement, le magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier a écarté le moyen en tenant compte des pièces versées au débat et en exposant qu'il n'était pas établi, " au regard des seules pièces médicales versées au débat, que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ". En désignant les pièces jugées non probantes, au regard des conditions mentionnées dans la disposition invoquée dont il a cité le texte, le magistrat désigné a suffisamment motivé son jugement, dès lors que l'intéressé a été mis à même de comprendre les motifs pour lesquels ce moyen était écarté et, le cas échéant, d'en contester le bien-fondé devant le juge d'appel. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement a été rendu en méconnaissance des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ou qu'il n'a pas eu droit à un procès équitable en violation des dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. Aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre. (...) ". Si les dispositions de cet article s'adressent non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union et ne sont donc pas en elles-mêmes invocables par un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement telle qu'une obligation de quitter le territoire français, celui-ci peut néanmoins utilement faire valoir que le principe général du droit de l'Union européenne, relatif au respect des droits de la défense, imposait qu'il soit préalablement entendu et mis à même de présenter toute observation utile sur la mesure d'éloignement envisagée. Toutefois, une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision défavorable est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie.

5. En admettant même que M. B... ait entendu se prévaloir de la méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne relatif au respect des droits de la défense, il ne fait pas état des éléments qu'il aurait pu utilement porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise la mesure contestée et qui, s'ils avaient été communiqués à temps, auraient été de nature à faire obstacle à son édiction, alors qu'il a pu présenter ses observations dans le cadre de la procédure d'instruction de sa demande d'asile. Dans ces conditions, le moyen ne peut qu'être écarté.

6. Aux termes des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ".

7. S'il ressort des pièces du dossier, et notamment des ordonnances et attestations médicales, que M. B... souffre d'une pathologique psychiatrique qui nécessite un suivi spécialisé régulier et une guidance thérapeutique avec soutien psychothérapique, ainsi qu'une prescription régulière d'antipsychotiques, ainsi que l'a jugé à bon droit le premier juge ces seuls éléments ne suffisent pas, en particulier en l'absence d'avis médical en ce sens, à établir qu'un défaut de prise en charge entrainerait des circonstances d'une exceptionnelle gravité. De même M. B... se borne à invoquer le coût des soins en Algérie et à affirmer qu'il n'a pas de revenu et qu'il n'existe pas de système permettant la prise en charge des soins dans ce pays, sans étayer ses affirmations par la moindre pièce. Dans ces circonstances il n'apparaît pas que le requérant ne pourrait être effectivement pris en charge dans son pays d'origine. Par suite, à tous égards, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

8. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

9. M. B... se prévaut de son entrée en France le 22 juin 2020 et de la présence de ses parents, qui y résident régulièrement depuis 1999 et 2014. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire, sans charge de famille et qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans. En outre, s'il allègue la présence de deux de ses frères sur le territoire national, cette circonstance n'est étayée par aucune pièce versée au débat. Par suite, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et qu'elle méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur la décision fixant le pays de destination :

10. L'intéressé soutient que la décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption de motifs retenus par le magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier, au point 9 de son jugement.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire :

11. S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il y a lieu de l'écarter par adoption de motifs retenus par le magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier au point 11 de son jugement.

12. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel de M. B..., qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B... et à Me Hennani.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Fait à Marseille, le 22 février 2022.

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N° 21MA04908


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro d'arrêt : 21MA04908
Date de la décision : 22/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP DESSALCES et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-02-22;21ma04908 ?
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