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16/07/2018 | FRANCE | N°17MA02048-17MA02051

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 16 juillet 2018, 17MA02048-17MA02051


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Samoti a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner solidairement la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, la SAS Razel-Bec, le groupement Razel-Bec - Malet, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, la SA Société des Eaux de Marseille et la SAS Bureau Veritas, à lui verser la somme de 11 962,50 euros à titre de provision sur les sommes qui lui sont dues pour les

travaux de réparation d'un immeuble endommagé par l'exécution de travaux ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Samoti a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner solidairement la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, la SAS Razel-Bec, le groupement Razel-Bec - Malet, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, la SA Société des Eaux de Marseille et la SAS Bureau Veritas, à lui verser la somme de 11 962,50 euros à titre de provision sur les sommes qui lui sont dues pour les travaux de réparation d'un immeuble endommagé par l'exécution de travaux publics.

Par une ordonnance n° 1608818 du 28 avril 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a condamné solidairement la métropole Aix-Marseille-Provence, venant aux droits de la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, la SAS Razel-Bec, la société Malet, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, la SA Société des Eaux de Marseille et la SAS Bureau Veritas à verser une provision d'un montant de 11 962,50 euros à la SCI Samoti.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 17MA02048 le 17 mai 2017, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, représentée par la SCP Delormeau et associés, demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 en tant qu'elle la condamne à verser une provision à la SCI Samoti ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande présentée à son encontre par la SCI Samoti devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la métropole Aix-Marseille-Provence, la société Razel-Bec et la SA Société des Eaux de Marseille à la garantir des condamnations prononcées contre elle ;

4°) de mettre à la charge de la partie perdante la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'obligation est sérieusement contestable dès lors que les désordres sont sans lien avec la mission qui lui avait été attribuée ;

- sa responsabilité ne peut être recherchée du fait de sa qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

- aucun manquement ne pouvant lui être reproché, elle ne peut être appelée en garantie ;

- la société Razel-Bec, responsable des dommages, devra la garantir ;

- la SA Société des Eaux de Marseille devra la garantir de toute condamnation dans le cas où les dommages seraient regardés comme imputables à des manquements dans l'exécution de la mission du maître d'oeuvre ;

- la réparation des préjudices doit incomber en partie au maître d'ouvrage des travaux qui n'a pas fait procéder à un constat préalable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2017, la SA Société des Eaux de Marseille, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué :

- d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 en tant qu'elle la condamne à verser une provision à la SCI Samoti ;

- statuant en référé, de rejeter la demande présentée à son encontre par la SCI Samoti devant le tribunal administratif de Marseille ;

- à défaut, de condamner la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, la SAS Razel-Bec, la métropole Aix-Marseille-Provence et la SAS Bureau Veritas à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de la partie perdante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'obligation est sérieusement contestable dès lors qu'aucune faute ne peut lui être reprochée ;

- aucun manquement ne peut être reproché au maître d'oeuvre ;

- la SAS Razel-Bec est seule responsable des dommages ;

- en cas de manquement du maître d'oeuvre, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie la garantira des condamnations prononcées à son encontre ;

- le maître d'ouvrage des travaux, qui n'a pas fait procéder à un constat préalable, la garantira des condamnations prononcées à son encontre ;

- la responsabilité de la SAS Bureau Veritas est également engagée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 août 2017, la SCI Samoti, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge solidaire des parties perdantes le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le lien de causalité direct entre les dommages et les travaux publics étant établi, sa créance n'est pas sérieusement contestable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 août 2017, la SAS Bureau Veritas Construction, venant aux droits de la société Bureau Veritas, représentée par la SCP Bernard Hugues Jeannin Petit, demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête et les conclusions dirigées à son encontre ;

2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué :

- d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 en tant qu'elle la condamne à verser une provision à la SCI Samoti ;

- statuant en référé, de rejeter la demande présentée à son encontre par la SCI Samoti devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de la SCI Samoti et, le cas échéant, de toute partie perdante, solidairement, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'obligation est sérieusement contestable dès lors que sa responsabilité ne peut être engagée que dans le cadre du contrat qui la lie au maître de l'ouvrage et des missions que celui-ci lui a confiées ;

- son obligation à garantir la SA Société des Eaux de Marseille est sérieusement contestable.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 28 août 2017, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, représentée par la SCP Delormeau et associés, conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens. Elle demande à la cour, en outre, de rejeter les conclusions de la SA Société des Eaux de Marseille présentées à son encontre, de condamner la SAS Bureau Veritas Construction à la garantir des condamnations prononcées à son encontre et de porter à 10 000 euros la somme demandée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en outre, que la responsabilité de la SAS Bureau Veritas est également engagée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2017, la métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par la SELARL Abeille et associés, demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué :

- d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 en tant qu'elle la condamne à verser une provision à la SCI Samoti ;

- statuant en référé, de rejeter la demande présentée à son encontre par la SCI Samoti devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) à défaut, de condamner la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, la SAS Razel-Bec, la SA Société des Eaux de Marseille et la SAS Bureau Veritas à la garantir des condamnations prononcées à son encontre.

Elle soutient que :

- l'obligation est sérieusement contestable dès lors qu'elle n'est pas l'auteur matériel des dommages ;

- l'entrepreneur et le maître d'oeuvre, qui sont les principaux responsables, doivent la garantir des condamnations prononcées à son encontre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2017, la SAS Razel-Bec, représentée par la SCP de Angelis - Semidei - Vuillquez - Habart Melki - Bardon - de Angelis, demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête et les conclusions dirigées à son encontre ;

2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué :

- d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 en tant qu'elle la condamne à verser une provision à la SCI Samoti ;

- statuant en référé, de rejeter la demande présentée à son encontre par la SCI Samoti devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) à défaut, de condamner la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, la métropole Aix-Marseille-Provence, la SA Société des Eaux de Marseille et la SAS Bureau Veritas à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

4°) de mettre à la charge de la partie perdante la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'obligation est sérieusement contestable dès lors que la réception sans réserve des travaux a mis fin aux relations contractuelles ;

- elle n'est pas responsable de la survenue des dommages ;

- le maître de l'ouvrage s'est abstenu de faire procéder à un constat préalable ;

- le maître d'oeuvre, qu'elle avait informé, a exercé un contrôle insuffisant sur les tranchées et excavations ;

- le contrôleur technique, également informé, n'a formulé aucune réserve sur les travaux qu'elle a réalisés ;

- la réception des travaux ayant été prononcée, la métropole doit la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

- le maître d'oeuvre et le contrôleur technique, qui ont commis des fautes, doivent également la garantir.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 5 décembre 2017, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, représentée par la SCP Delormeau et associés, conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes moyens.

Elle soutient, en outre, que la métropole Aix-Marseille-Provence doit la garantir des condamnations mises à sa charge, la réception des travaux ayant été prononcée sans réserve.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 17MA02051 le 17 mai 2017, la SAS Bureau Veritas Construction, venant aux droits de la société Bureau Veritas, représentée par la SCP Bernard Hugues Jeannin Petit, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 en tant qu'elle la condamne à verser une provision à la SCI Samoti ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande présentée à son encontre par la SCI Samoti devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de la SCI Samoti la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'obligation est sérieusement contestable dès lors que sa responsabilité ne peut être engagée que dans le cadre du contrat qui la lie au maître de l'ouvrage et des missions que celui-ci lui a confiées ;

- sa mission ne s'étendait pas aux immeubles de l'avenue Roger Salengro.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2017, la SA Société des Eaux de Marseille, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué :

- d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 en tant qu'elle la condamne à verser une provision à la SCI Samoti ;

- statuant en référé, de rejeter la demande présentée à son encontre par la SCI Samoti devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) à défaut, de condamner la SAS Bureau Veritas, la SAS Razel-Bec, la métropole Aix-Marseille-Provence et la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

4°) de mettre à la charge de la partie perdante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soulève les mêmes moyens que dans l'instance n° 17MA02048.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 août 2017, la SCI Samoti, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge solidaire des parties perdantes le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le lien de causalité direct entre les dommages et les travaux publics étant établi, sa créance n'est pas sérieusement contestable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 août 2017, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, représentée par la SCP Delormeau et associés, demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué :

- d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 en tant qu'elle la condamne à verser une provision à la SCI Samoti ;

- statuant en référé, de rejeter la demande présentée à son encontre par la SCI Samoti devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) à défaut, de rejeter les conclusions d'appel en garantie présentées à son encontre et de condamner la SAS Razel-Bec, la métropole Aix-Marseille-Provence, la SAS Bureau Veritas Construction et la SA Société des Eaux de Marseille à la garantir des condamnations prononcées contre elle ;

4°) de mettre à la charge de la partie perdante la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'obligation est sérieusement contestable dès lors que les désordres sont sans lien avec la mission qui lui avait été attribuée ;

- sa responsabilité ne peut être recherchée du fait de sa qualité de mandataire du groupement d'entreprises ;

- aucun manquement ne pouvant lui être reproché, elle ne peut être appelée en garantie ;

- la société Razel-Bec, responsable des dommages, devra la garantir ;

- la SA Société des Eaux de Marseille devra la garantir de toute condamnation dans le cas où les dommages seraient regardés comme imputables à des manquements dans l'exécution de la mission du maître d'oeuvre ;

- la réparation des préjudices doit incomber en partie au maître d'ouvrage des travaux qui n'a pas fait procéder à un constat préalable ;

- la responsabilité de la SAS Bureau Veritas est également engagée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2017, la métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par la SELARL Abeille et associés, demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué :

- d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 en tant qu'elle la condamne à verser une provision à la SCI Samoti ;

- statuant en référé, de rejeter la demande présentée à son encontre par la SCI Samoti devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) à défaut, de condamner la SAS Bureau Veritas, la SAS Razel-Bec, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie et la SA Société des Eaux de Marseille à la garantir des condamnations prononcées à son encontre.

Elle soulève les mêmes moyens que dans l'instance n° 17MA02048.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2017, la SAS Razel-Bec, représentée par la SCP de Angelis - Semidei - Vuillquez - Habart Melki - Bardon - de Angelis, demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué :

- d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 en tant qu'elle la condamne à verser une provision à la SCI Samoti ;

- statuant en référé, de rejeter la demande présentée à son encontre par la SCI Samoti devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) à défaut, de condamner la SAS Bureau Veritas, la métropole Aix-Marseille-Provence, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie et la SA Société des Eaux de Marseille à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

4°) de mettre à la charge de la partie perdante la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soulève les mêmes moyens que dans l'instance n° 17MA02048.

Par un mémoire, enregistré le 5 décembre 2017, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, représentée par la SCP Delormeau et associés, conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes moyens.

Elle soutient, en outre, que la métropole Aix-Marseille-Provence doit la garantir des condamnations mises à sa charge, la réception des travaux ayant été prononcée sans réserve.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la Cour a désigné M. Vanhullebus, président, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes de la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie et de la SAS Bureau Veritas Construction sont dirigées contre la même ordonnance et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule ordonnance.

2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude.

3. La communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, aux droits de laquelle vient la métropole Aix-Marseille-Provence, exerce la compétence en matière de gestion des services d'intérêt collectif " assainissement et eau ". L'établissement public de coopération intercommunale a confié la réalisation de travaux de recalibrage du ruisseau des Aygalades entre le boulevard de Briançon et le grand port maritime de Marseille, d'une part, au groupement de maîtrise d'oeuvre composé de la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie et de la SA Société des Eaux de Marseille, et, d'autre part, à un groupement conjoint d'entreprises, comprenant la SAS Razel-Bec et la société Malet. Le contrôle technique a été confié à la société Bureau Veritas, aux droits de laquelle vient la SAS Bureau Veritas Construction.

4. Des désordres étant apparus dans l'immeuble du 165 avenue Roger Salengro, appartenant à la SCI Samoti, à la suite de l'exécution de travaux de connexion des égouts sur le trottoir et la chaussée de l'avenue Roger Salengro à Marseille, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a ordonné une expertise le 14 octobre 2014. Faisant droit à la demande de la SCI Samoti par une ordonnance du 28 avril 2017, le juge des référés a, en premier lieu, condamné solidairement la métropole Aix-Marseille-Provence, la SAS Razel-Bec, la société Malet, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, la SA Société des Eaux de Marseille et la SAS Bureau Veritas, à verser à la SCI la somme de 11 962,50 euros à titre de provision sur les sommes qui lui sont dues pour les travaux de réparation de l'immeuble endommagé par l'exécution des travaux. Le juge des référés a, en second lieu, rejeté les conclusions d'appel en garantie présentées par les défendeurs, l'existence des obligations correspondantes n'apparaissant pas, en l'état de l'instruction, revêtir un caractère non sérieusement contestable. La SAS Ingerop Conseil et Ingénierie et la SAS Bureau Veritas Construction font appel de l'ordonnance du 28 avril 2017.

Sur la responsabilité :

5. Même en l'absence de faute, le maître de l'ouvrage et, le cas échéant, le maître d'oeuvre, l'entrepreneur chargé des travaux et le contrôleur technique sont responsables vis-à-vis des tiers des dommages causés à ceux-ci par l'exécution d'un travail public, à moins que ces dommages ne soient imputables à un cas de force majeure ou à une faute de la victime.

6. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, que les désordres constatés dans l'immeuble du 165 avenue Roger Salengro ont pour origine les difficultés rencontrées lors du creusement d'une tranchée au droit de la façade de l'immeuble contigu situé au n° 167. La SCI Samoti établit ainsi que les dommages sont imputables à l'exécution de travaux publics, à l'égard desquels elle a la qualité de tiers.

7. Il appartient à la SCI Samoti, victime d'un dommage de travaux publics, de rapporter la preuve du lien de cause à effet entre, d'une part, les travaux publics et, d'autre part, le préjudice dont elle se plaint. Dès lors qu'il existe un lien direct et certain entre ces travaux et le dommage, l'existence d'un lien direct entre l'exécution de la mission confiée au maître d'oeuvre, d'une part, et le dommage subi, d'autre part, ne conditionne pas la possibilité pour la victime de mettre en jeu la responsabilité de ces participants à l'exécution des travaux publics.

8. Il suit de là que la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie ne peut pas utilement, pour contester sa responsabilité, se borner à soutenir qu'il incombe à la SCI Samoti de démontrer que son intervention est en relation avec les désordres. Cette société ne peut pas davantage se prévaloir utilement de la convention de groupement de maîtrise d'oeuvre qu'elle a conclue avec la SA Société des Eaux de Marseille, dont les stipulations ne sont pas opposables à la SCI Samoti.

9. Un contrôleur technique, alors même qu'il n'est chargé ni de la surveillance ni du contrôle des travaux doit être regardé, pour la mise en oeuvre du régime de responsabilité applicable aux victimes ayant la qualité de tiers à une opération de travaux publics, comme participant à l'exécution de ces travaux. Ainsi qu'il a été indiqué au point 7, dès lors qu'il existe un lien direct et certain entre ces travaux et le dommage, l'existence d'un lien direct entre l'exécution de la mission confiée au contrôleur technique et le dommage subi ne conditionne pas la possibilité pour la victime de mettre en jeu sa responsabilité. Si, en vertu de l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation, le contrôleur technique n'est tenu vis-à-vis des constructeurs à supporter la réparation de dommages qu'à concurrence de la part de responsabilité susceptible d'être mise à sa charge dans les limites des missions définies par le contrat le liant au maître d'ouvrage, la SAS Bureau Veritas Construction ne saurait utilement s'en prévaloir envers la victime d'un dommage de travaux publics, dès lors que ces dispositions, applicables en matière de garantie décennale, ne limitent la responsabilité des contrôleurs techniques qu'à l'égard des autres constructeurs. Cette société n'est, par suite, pas fondée à soutenir que les particularités de sa mission l'excluraient d'une condamnation au versement d'une indemnité solidairement avec les autres intervenants sur le fondement des principes applicables à la réparation des dommages de travaux publics.

10. Il résulte en outre de l'instruction que la mission confiée par le maître de l'ouvrage au contrôleur technique s'étendait également à la stabilité des immeubles bordant l'avenue Roger Salengro. La SAS Bureau Veritas Construction n'est ainsi pas fondée à soutenir qu'elle n'est pas au nombre des participants à l'opération de travaux publics dont la SCI Samoti peut valablement rechercher la responsabilité.

11. Il résulte de ce qui précède que l'existence de l'obligation de la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie et de la SAS Bureau Veritas Construction à l'égard de la SCI Samoti n'est pas sérieusement contestable. C'est dès lors à bon droit que le premier juge les a condamnées à verser à la SCI Samoti une provision d'un montant non discuté de 11 962,50 euros, solidairement avec la métropole Aix-Marseille-Provence, la SAS Razel-Bec, la société Malet et la SA Société des Eaux de Marseille.

Sur les conclusions d'appel en garantie présentées par la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie à titre subsidiaire :

12. La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve. Elle met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage. La réception interdit, par conséquent, au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l'ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation. Il en va ainsi, s'agissant des dommages causés aux tiers, et sauf clause contractuelle contraire, alors même que le maître de l'ouvrage entendrait exercer une action en garantie à l'encontre des constructeurs à raison de condamnations prononcées contre lui au profit de ces tiers, sauf dans le cas où la réception n'aurait été acquise à l'entrepreneur qu'à la suite de manoeuvres frauduleuses ou dolosives de sa part. Le devoir de conseil du maître d'oeuvre au moment de la réception ne concerne que l'état de l'ouvrage achevé et ne s'étend donc pas aux désordres causés à des tiers par l'exécution du marché.

13. Il résulte de l'instruction que la réception des travaux a été prononcée le 24 juillet 2014 avec une réserve relative à des imperfections et malfaçons étrangères aux désordres causés aux immeubles riverains. Cette réception a eu pour effet de mettre fin aux rapports contractuels entre la métropole Aix-Marseille-Provence, substituée à la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage. Il suit de là que, en l'absence de clause contractuelle contraire, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie est fondée à demander à être garantie en totalité par la métropole Aix-Marseille-Provence de la condamnation prononcée à son encontre au bénéfice de la SCI Samoti.

14. Il résulte de ce qui précède que la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande d'appel en garantie qu'elle avait dirigée contre la métropole Aix-Marseille-Provence.

Sur les conclusions de la métropole Aix-Marseille-Provence :

En ce qui concerne les conclusions d'appel provoqué :

15. L'admission partielle de l'appel principal de la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie aggrave la situation de la métropole Aix-Marseille-Provence. Par suite, l'appel provoqué présenté par celle-ci à l'encontre de la SCI Samoti est recevable.

16. Il résulte de ce qui a été indiqué aux points 5 et 6 que la responsabilité de la métropole est engagée de plein droit, même en l'absence de faute de sa part, en sa qualité de maître d'ouvrage des travaux publics à l'origine des dommages causés par leur exécution à l'immeuble du n° 165 de l'avenue Roger Salengro. La métropole Aix-Marseille-Provence, qui n'invoque ni cas de force majeure ni faute de la victime, ne peut pas utilement faire valoir qu'elle n'est pas l'auteur matériel de ces dommages. Il suit de là que son obligation envers la SCI Samoti n'est pas sérieusement contestable. Elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille l'a condamnée à verser la SCI Samoti une provision d'un montant non critiqué de 11 962,50 euros, solidairement avec la SAS Razel-Bec, la société Malet, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, la SA Société des Eaux de Marseille et la SAS Bureau Veritas Construction.

En ce qui concerne les conclusions d'appel en garantie :

17. Ainsi qu'il a été indiqué au point 12, la réception des travaux, qui met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage, interdit, par conséquent, au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l'ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation.

18. Il résulte de ce qui précède que la métropole Aix-Marseille-Provence n'est pas recevable à demander, au demeurant pour la première fois en appel, que la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, la SA Société des Eaux de Marseille et la SAS Bureau Veritas soient condamnées à la garantir des condamnations prononcées à son encontre.

19. La métropole n'allègue pas que la réception des travaux n'aurait été acquise à la SAS Razel-Bec qu'à la suite de manoeuvres frauduleuses ou dolosives de sa part. Elle n'est, dès lors, pas davantage recevable à présenter une demande, d'ailleurs nouvelle en appel, tendant à la condamnation de cette société à la garantir des condamnations prononcées à son encontre.

Sur les conclusions de la SA Société des Eaux de Marseille et de la SAS Razel-Bec :

20. L'ordonnance du 28 avril 2017 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille a été notifiée le 4 mai 2017 à la SA Société des Eaux de Marseille et le 9 mai 2017 à la SAS Razel-Bec. La présente ordonnance n'a pas pour effet d'aggraver la situation de ces deux sociétés. Dès lors, les conclusions qu'elles ont présentées après l'expiration du délai d'appel et tendant à l'annulation de l'ordonnance du 28 avril 2017 en tant qu'elle les a condamnées solidairement avec la métropole Aix-Marseille-Provence, la société Malet, la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie et la SAS Bureau Veritas Construction à verser une provision à la SCI Samoti, ne sont pas recevables.

Sur les frais liés au litige :

21. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par la SAS Bureau Veritas Construction, la métropole Aix-Marseille-Provence, la SA Société des Eaux de Marseille et la SAS Razel-Bec doivent dès lors être rejetées.

22. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la métropole Aix-Marseille-Provence, la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie et non compris dans les dépens.

23. Il y a lieu de mettre à la charge de la SAS Bureau Veritas Construction le versement à la SCI Samoti d'une somme de 2 000 euros sur le même fondement.

O R D O N N E :

Article 1er : L'ordonnance du 28 avril 2017 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée en tant qu'elle a rejeté l'appel en garantie de la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie dirigé contre la métropole Aix-Marseille-Provence.

Article 2 : La métropole Aix-Marseille-Provence est condamnée à garantir la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie à hauteur des condamnations prononcées à son encontre par l'ordonnance du 28 avril 2017 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille.

Article 3 : L'ordonnance du 28 avril 2017 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est réformée en ce qu'elle a de contraire à la présente ordonnance.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie et des conclusions présentées par cette société dans l'instance n° 17MA02051 est rejeté.

Article 5 : La requête de la SAS Bureau Veritas Construction et les conclusions présentées par cette société dans l'instance n° 17MA02048 sont rejetées.

Article 6 : Les conclusions de la métropole Aix-Marseille-Provence, de la SA Société des Eaux de Marseille et de la SAS Razel-Bec présentées par la voie de l'appel provoqué et leurs conclusions d'appel en garantie sont rejetées.

Article 7 : La métropole Aix-Marseille-Provence versera à la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 8 : La SAS Bureau Veritas Construction versera à la SCI Samoti la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 9 : Les conclusions de la SA Société des Eaux de Marseille et de la SAS Razel-Bec tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 10 : La présente ordonnance sera notifiée à la SAS Ingerop Conseil et Ingénierie, à la SAS Bureau Veritas Construction, à la SCI Samoti, à la métropole Aix-Marseille-Provence, à la SA Société des Eaux de Marseille, à la SAS Razel-Bec et au groupement Razel-Bec - Malet.

Fait à Marseille, le 16 juillet 2018.

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N°17MA02048...


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