Vu la requête, enregistrée le 12 février 2004 (télécopie confirmée par courrier enregistré le 16 février 2004), sous le n° 04MA00321, présentée pour Mme Nadia X, élisant domicile ..., par Me Lucas, avocat ; Mme X demande à la Cour :
1°' d'annuler l'ordonnance n°03-4228 en date du 21 janvier 2004 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à ordonner une expertise au contradictoire du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Montpellier aux fins de décrire toutes les pathologies et troubles dont elle est atteinte depuis le 28 février 2002, et de dire si son état de santé lui permettait de reprendre le travail dès avril 2002 ;
2°) de désigner un expert avec notamment pour mission d'apprécier l'état dépressif de Mme X, de procéder à son examen, de se faire communiquer tous documents utiles permettant de décrire toutes les pathologies et éventuellement les autres troubles dont elle souffre depuis le 28 février 2002, de dire si son état lui permettait de reprendre le travail dès le mois d'avril 2002, de dire son état est susceptible d'aggravation ou d'amélioration ;
Elle soutient que l'ordonnance du 21 janvier 2004 est entachée d'irrégularité et que sa demande d'expertise est fondée ;
- que le juge a commis une erreur de droit en considérant que la légalité de la décision de la licencier, pour abandon de poste, n'était pas subordonnée à l'appréciation de la santé de la requérante, et que seul le licenciement pour inaptitude physique justifiait la mesure d'expertise sollicitée ; que si l'absence de l'agent est justifiée, l'abandon de poste n'est pas caractérisé ; que selon une jurisprudence constante l'arrêt maladie est considéré comme une justification de l'absence de l'agent ; que Mme X conteste le fait que le CHU n'ait pas retenu qu'elle n'était pas physiquement en état de regagner son poste de travail et qu'elle bénéficiait d'un arrêt maladie ; qu'elle souffrait d'un syndrome dépressif qui justifiait un arrêt maladie fondé sur cette pathologie dès le 28 février 2002, arrêt maladie ordonné après que le comité médical se soit prononcé sur sa pathologie thrombo-embolique ; que le CHU a eu connaissance de cet arrêt maladie avant de la mettre en demeure de reprendre son activité professionnelle ; qu'elle sollicite une expertise afin de rapporter la preuve de la réalité de ses malaises et de ce qu'ils justifient qu'elle n'a pu répondre à l'injonction qui lui était faite de reprendre le travail ;
- que le juge a commis une erreur matérielle dans l'appréciation de la portée et des effets des expertises dont elle a fait l'objet ; que l'expertise du comité médical départemental, dont par ailleurs Mme X a contesté la composition, ne portait que sur la pathologie thrombo-embolique et non sur son état général ; que le comité n'a pas eu à connaître de son syndrome dépressif diagnostiqué postérieurement à sa saisine ; que Mme X conteste la portée de l'intervention du docteur Y ; que, contrairement au CHU qui considère qu'il a eu à connaître de l'état de santé général de l'agent, Mme X soutient que, s'il y a eu examen, il n'a porté que sur l'affection justifiant le congé de longue maladie, à savoir la pathlogie thrombo-embolique ; que les différents experts ne se sont prononcés que sur la maladie thrombo-embolique et non sur l'état général de la requérante ; que Mme X apporte des éléments de nature à remettre en cause les appréciations des différents experts, à savoir des certificats médicaux émanant de médecins attestant de son état dépressif ;
- que, sur le fond, la demande d'expertise répond aux exigences de l'article R.532-1 du code de justice administrative ; qu'elle est utile et nécessaire au traitement de sa demande d'annulation de la décision de licenciement actuellement pendante devant le Tribunal administratif de Montpellier ; que l'appréciation de l'état de santé de la requérante au regard des deux pathologies dont elle souffrait lors de la décision de reprise d'activité présente une utilité certaine ; que la décision de licenciement contestée est fondée sur le fait que le comité médical départemental et l'expert désigné pour une contre-expertise l'auraient déclarée apte à reprendre ses fonctions ; que le comité médical a commis une erreur sur la gravité de sa maladie thrombo-embolique et qu'il n'a pas eu à connaître du syndrome dépressif qui a été diagnostiqué le 28 février 2002, soit après la réunion du comité médical départemental tenue le 20 février 2002 ; que le juge des référés du tribunal administratif a rejeté le 13 février 2003 sa demande de suspension de la décision de licenciement du 30 avril 2002, rejet confirmé par le Conseil d'Etat le 30 juillet 2003 ; que Mme X, qui élève seule ses trois enfants, ne perçoit plus de traitement depuis le 6 avril 2002 ; qu'elle a intérêt à obtenir l'annulation de cette décision ; que l'expertise s'impose pour démontrer que son état de santé ne lui permettait pas de reprendre son activité à la date fixée arbitrairement par l'employeur ;
Vu l'ordonnance attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré au greffe de la Cour le 27 mai 2004, présenté par le Centre Hospitalier Universitaire de Montpellier, représenté par son directeur général, dûment habilité par délibération du conseil d'administration du 21 avril 2004, qui conclut à la confirmation de l'ordonnance attaquée et au rejet de la demande d'expertise de Mme X ;
Il soutient que la mesure d'expertise sollicitée est inutile contrairement à ce que soutient la requérante ; que s'il est vrai qu'un motif d'ordre médical est traditionnellement regardé comme un motif valable de non reprise du travail, la jurisprudence admet cependant que l'administration puisse radier un fonctionnaire pour abandon de poste dès lors qu'il apparaît que le certificat médical produit est manifestement une manoeuvre du fonctionnaire pour ne pas reprendre ses fonctions ; que dans le cas de Mme X, le CHU s'est astreint à prendre conseil auprès des autorités médicales compétentes avant chaque décision administrative génératrice d'effets juridiques ; qu'ainsi, par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 27 février 2002, le CHU a invité Mme X à reprendre ses fonctions suite à l'avis d'aptitude rendu le 20 février 2002 par le comité médical départemental, et à se présenter chez le médecin du travail le 4 mars 2002 ; que Mme X qui ne s'est pas rendue à ce rendez-vous, et ne l'a pas reporté, s'est bornée à envoyer une nouvelle prolongation d'arrêt de travail ; que le CHU a diligenté une nouvelle expertise auprès du docteur Y, afin qu'il vérifie si des éléments nouveaux étaient intervenus depuis le 20 février 2002 pouvant éventuellement invalider l'avis du comité médical départemental ; que le CHU n'était pas dans l'obligation de missionner cet expert ; que le docteur Y qui a reçu Mme X le 6 mars 2002 a conclu à l'absence d'éléments médicaux nouveaux la mettant dans l'incapacité de réintégrer ses fonctions ; qu'il a précisé par courrier du 4 avril 2002 que cette expertise ne s'était pas limitée à la seule affection ayant justifié le congé de longue maladie ; qu'une mise en demeure de reprendre ses fonctions en date du 5 avril 2002 a donc été adressée à Mme X ; que, saisi d'un recours par Mme X le 6 mars 2002, le comité médical supérieur a confirmé le 28 avril 2003 l'avis du comité médical départemental estimant qu'elle était apte à la reprise de ses fonctions sur un poste aménagé ;
- que le juge n'a pas commis d'erreur matérielle dans l'appréciation de la portée et des effets des expertises subies par Mme X ; que l'irrégularité de la composition du comité médical départemental soulevée à nouveau par Mme X ne saurait affecter la régularité de l'avis émis par ledit comité, compte tenu de l'impossibilité de faire sièger un spécialiste de l'affection dont souffre Mme X au sein dudit comité ; qu'à aucun moment, le CHU n'a nié les difficultés de santé de la requérante ; que Mme X a commis une erreur en ne se présentant pas à la convocation de la médecine du travail ; que le docteur Y, médecin agréé par le comité médical départemental a précisé dans un courrier que l'expertise du 6 mars 2002 ne s'était pas limitée à l'examen de la seule affection ayant justifié le congé de longue maladie, et qu'il n'a pas retenu d'éléments médicaux mettant Mme X dans l'impossibilité de réintégrer ses fonctions ;
- qu'un arrêt de la Cour administrative d'appel de Douai du 28 mai 2003 a estimé que ni les certificats d'arrêts de travail émanant du médecin généraliste, ni l'attestation d'un médecin psychiatre ne sont de nature à remettre en cause les conclusions des médecins assermentés sur l'état de santé d'un agent ; que le CHU a informé en temps utile Mme X de ses droits et obligations ; que deux mois se sont écoulés entre le premier courrier du 27 février 2002 invitant Mme X à reprendre ses fonctions et la décision de licenciement le 30 avril 2002 ; que Mme X pouvait régulariser sa situation, soit en sollicitant une disponibilité, soit en se présentant au médecin du travail ; que la décision de licenciement pour abandon de poste est exclusivement fondée sur une position irrégulière de l'intéressée au regard de sa situation administrative ; que si Mme X n'était pas en état physiquement de se présenter le 4 mars 2002 devant le médecin du travail, elle a cependant pu se rendre le 6 mars 2002 à la contre-expertise du docteur Y ; qu'elle a eu également la capacité intellectuelle de formuler le 6 mars 2002 un appel devant le comité médical supérieur ; que l'expertise n'est pas nécessaire dans la mesure où la situation dans laquelle se trouve la requérante est la conséquence directe de son attitude ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision en date du 1er septembre 2003 par laquelle le Conseiller d'Etat, président de la Cour administrative d'appel de Marseille a, sur le fondement de l'article L.555-1 du code de justice administrative, désigné M. Guy LAPORTE, président de la deuxième chambre, pour statuer sur les appels formés devant la Cour contre les ordonnances du juge des référés des tribunaux administratifs du ressort pour les matières relevant de la compétence de la deuxième chambre ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.532-1 du code de justice administrative : Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction.... ; et qu'aux termes de l'article L.555-1 dudit code : Sans préjudice des dispositions du titre II du livre V du présent code, le président de la Cour administrative d'appel ou le magistrat qu'il désigne à cet effet est compétent pour statuer sur les appels formés devant les cours administratives d'appel contre les décisions rendues par le juge des référés ;
Considérant que Mme X demande au juge d'appel d'annuler l'ordonnance en date du 21 janvier 2004 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à ordonner une expertise aux fins de décrire toutes les pathologies et troubles dont elle souffre depuis le 28 février 2002 et de dire si son état de santé lui permettait de reprendre le travail dès le mois d'avril 2002 ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le comité médical départemental réuni le 20 février 2002 a rendu un avis favorable à la reprise de fonctions de Mme X, à temps plein à compter du 4 mars 2002 sur un poste aménagé ; que suite à cet avis, Mme X, a été invitée par courrier recommandé du 27 février 2002 à réintégrer ses fonctions et à se présenter à la médecine du travail le 4 mars 2002 ; qu'elle n'a pas déféré à cette invitation et s'est bornée à produire le 28 février 2002 un avis d'arrêt de travail de son médecin généraliste pour la période du 28 février au 3 avril 2002, arrêt justifié par deux éléments, un syndrome dépressif et une maladie thrombo-embolique ; que le 6 mars 2002, Mme X a saisi le comité médical supérieur d'un recours contre la décision du comité médical départemental ; qu' une contre-visite effectuée le 6 mars 2002 par le docteur Y, médecin expert du CHU, n'a pas retenu d'éléments médicaux mettant Mme X dans l'incapacité de réintégrer ses fonctions ; qu'une mise en demeure de reprendre ses fonctions sous 72 heures a été adressée à Mme X par le CHU le 29 mars 2002, lui précisant que sa défection serait considérée comme une rupture unilatérale du lien avec l'employeur, passible d'un licenciement pour abandon de poste, et l'informant qu'elle avait la possibilité de solliciter une disponibilité ; qu'en réponse Mme X a fait valoir, dans un courrier du 3 avril 2002, que le syndrome dépressif, nouvelle pathologie dont elle souffrait, justifiait l'arrêt de travail du 28 février 2002 et sa prolongation, et que la contre-visite du docteur Y n'avait pas concerné cette affection ; que le CHU a adressé un nouveau courrier à Mme X le 5 avril 2002 lui précisant que la contre-visite du 6 mars 2002 avait déterminé son aptitude à la reprise du travail de façon globale, et renouvelant, sauf à présenter une demande disponibilité, l'injonction de reprendre ses fonctions sous 72 heures, faute de quoi elle serait licenciée pour abandon de poste ; que Mme X n'a pas retiré ce courrier recommandé à la poste ; que le comité médical supérieur a, dans sa séance du 28 avril 2003, rejeté le recours présenté par Mme X et s'est prononcé pour la reprise du travail sur un poste adapté ;
Considérant par ailleurs, que les éléments produits par Mme X à l'appui de sa demande, d'une part, les arrêts de travail successifs prescrits par son médecin généraliste pour les périodes des 2 avril au 3 mai 2002, 25 avril au 25 mai 2002, 25 mai au 25 juin 2002, d'autre part, les certificats médicaux des médecins généralistes ou spécialistes qui l'ont suivie, ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions des comités médicaux départemental et supérieur qui se sont prononcés pour l'aptitude de Mme X à reprendre ses fonctions sur un poste adapté ; qu'il suit de là que l'utilité de la mesure d'expertise sollicitée par la requérante afin d'apprécier son éventuelle inaptitude à reprendre son travail à compter du 4 mars 2002 n'est pas établie ; que par suite Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée, le juge des référés de premier ressort a rejeté sa demande ; qu'il résulte de tout ce qui précède que sa requête d'appel doit être rejetée ;
ORDONNE :
Article 1er : La requête de Mme Nadia X est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Nadia X, au Centre Hospitalier Universitaire de Montpellier et au ministre de la santé et de la protection sociale.
Fait à Marseille, le 27 septembre 2004
Le président de la 2e chambre
Signé : G. LAPORTE
La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la protection sociale en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
Classement CNIJ : 54-03-011
36-10-04
C
N° 04MA00321 2