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22/01/2004 | FRANCE | N°02MA01124

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 22 janvier 2004, 02MA01124


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 17 juin 2002, sous le N° 02MA01124, présentée par la société Thalès (anciennement dénommée Thomson CSF), venant aux droits de la société Thomson Sintra activités sous-marines ;

La société Thalès demande à la Cour :

Classement CNIJ : 19 04 01 02 04

C

1°/ d'annuler le jugement en date du 12 mars 2002, par lequel le Tribunal administratif de Nice a partiellement rejeté sa demande de réduction des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles avait été as

sujettie la société la SA Thomson Sintra ASM au titre de l'exercice clos en 1994 ;

2°/ de la déc...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 17 juin 2002, sous le N° 02MA01124, présentée par la société Thalès (anciennement dénommée Thomson CSF), venant aux droits de la société Thomson Sintra activités sous-marines ;

La société Thalès demande à la Cour :

Classement CNIJ : 19 04 01 02 04

C

1°/ d'annuler le jugement en date du 12 mars 2002, par lequel le Tribunal administratif de Nice a partiellement rejeté sa demande de réduction des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles avait été assujettie la société la SA Thomson Sintra ASM au titre de l'exercice clos en 1994 ;

2°/ de la décharger des impositions litigieuses ;

Elle soutient :

- que dans le cadre d'un contrôle fiscal, le vérificateur a remarqué que la SA Thomson Sintra ASM avait omis de doter la réserve spéciale des plus-values à long terme d'un montant de 7.514.703 F, ce qu'il a assimilé à un prélèvement brut sur cette réserve spéciale ;

- qu'à origine, l'assemblée générale du 26 juin 92 avait différé une dotation à la réserve spéciale en raison du caractère déficitaire de l'exercice 1991 ; qu'au cours de l'année 1993, elle a d'abord affecté la totalité du montant du bénéfice de l'année 1992 à la réserve spéciale, et à la réserve légale, et décidé une affectation complémentaire par virement du compte de réserve légale au cours de réserve légale affectée aux plus-values à long terme ; que c'est par erreur que l'assemblée générale des actionnaires, n'a pas décidé le virement de la somme de 7.204.474 F de la réserve légale à la réserve légale affectée aux plus-values à long terme ; que ce défaut de virement, qui procède d'une erreur, ne peut pas être assimilé comme l'a fait le vérificateur à un prélèvement brut sur la réserve spéciale ;

- que le Conseil d'Etat n'assimile à un prélèvement sur la réserve spéciale des plus-values à long terme, que le fait que, pour une société, de ne pas doter cette réserve, alors qu'elle pouvait le faire, et donc de rejet délibéré du montant de la plus-value à long terme parmi les réserves ordinaires ;

- que lorsque la société a décidé un virement insuffisant du compte de la réserve légale affectée aux plus-values à long terme elle ne peut être réputée avoir pris une décision de gestion, puisque le montant litigieux était inscrit au compte de réserve légale ;

- qu'en tout état de cause, un dégrèvement d'un montant de 1.649.569 F doit être prononcé, à fin d'éviter le phénomène de double imposition dont l'entreprise fait l'objet ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le nouveau mémoire enregistré le 29 juillet 2002, présenté pour la SA Thalès ; la SA Thalès conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ;

Vu, enregistré le 23 avril 2003, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre demande à la Cour :

- de prononcer un non lieu à statuer à concurrence des dégrèvements prononcés par l'administration fiscale ;

- de rejeter le surplus des conclusions de la requête de la SA Thalès ;

Il soutient :

- que les dispositions de l'article 209 quater du code général des impôts font obligation aux sociétés de doter une réserve spéciale des plus values à long terme, au cours de l'exercice suivant lequel celui où elles ont été réalisées ; qu'à défaut les sociétés sont réputées avoir pris une décision de gestion, de prélèvement sur la réserve spéciale, qui génère des conséquences financières au niveau de l'imposition ;

- que les dotations à la réserve spéciale des plus-values à long terme doivent être constituées en priorité sur les bénéfices comptables de l'exercice de réalisation de la plus value, ou à défaut sur les bénéfices reportés à nouveau, les réserves ordinaires libérées d'impôt, ou la réserve légale ; qu'enfin, l'administration a pu admettre que pour un exercice donné, et dans certaines conditions, la dotation à la réserve légale puisse être assimilée, du point de vue fiscal, à la dotation à la réserve spéciale, dans la limite du montant des plus-values à long terme dégagées en comptabilité au cours de l'exercice, diminué de l'impôt effectivement payé ;

- que dans les circonstances de l'espèce, la société Thomson a dégagé au cours de l'exercice 1991 des plus-values pour un montant de 13.853.767 F ; qu'en application des dispositions du code général des impôts, elle aurait dû affecter, au cours de l'exercice clos en 1992, le montant de cette plus-value diminué de l'impôt sur les sociétés à la réserve des plus-values à long terme, soit un montant de 11.360.088 F ;

- que l'exercice 1991 étant déficitaire, la réserve n'a pas été dotée au cours de l'année 1992, mais que l'affectation pouvait être différée en 1993 ou en 1994 ;

- qu'au cours de l'année 1992, la société a dégagé une plus-value à long terme de 16.066.704 F, ce qui aurait dû entraîner une augmentation de la réserve spéciale des plus-values à long terme de 13.174.697 F ; que cette réserve, n'a cependant été dotée que d'un montant, résultant de l'assemblée générale des actionnaires du 25 juin 93, de 8.270.614 F, et ceci par un virement de la réserve légale ;

- qu'au cours de l'année 1993, la société ayant dégagé une plus-value à long terme de 71.173.625 F, la réserve spéciale des plus-values à long terme aurait dû être dotée du montant de 58.362.372 F ; que par décision de l'assemblée générale des actionnaires du 29 juin 1994, la réserve spéciale des plus-values à long terme n'a été dotée que du montant de 57.653.342 F, faisant apparaître une nouvelle insuffisance ;

- qu'au total, cette insuffisance se chiffre à 8.223.732 F ;

- que, ce faisant, la société n'a pas respecté les règles comptables et fiscales de constitution de la réserve spéciale des plus-values à long terme ; que la société aurait dû transférer un montant complémentaire de 7.204.474 F de la réserve légale proprement dite, vers le sous compte de réserve légale des plus-values à long terme ; qu'en ne le faisant pas, la société a pris une décision de gestion qui lui est opposable, étant observé que la faculté de doter la réserve spéciale des plus-values à long terme par imputation de la réserve légale résulte de règles dérogatoires qui sont d'interprétation stricte ; qu'il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d'Etat que la faculté de constitution de la réserve spéciale par imputation sur la réserve légale suppose l'individualisation de la somme, au sein de la réserve légale, dans un sous compte réserve légale plus-value nette à long terme ; que cette individualisation n'a pas été faite en l'espèce ;

- que dès lors que la société disposait de résultats comptables bénéficiaires, au cours des exercices 1992 et 1993, et d'une réserve légale suffisante, elle devait doter la réserve spéciale des plus-values à long terme ;

- qu'il est accordé un dégrèvement complémentaire de 1.649.569 F, pour tenir compte de l'excédent d'impôt résultant de la diminution des bases imposables au taux réduit de l'exercice clos en 1993 ;

Vu, enregistré le 7 août 2003, le nouveau mémoire présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, transmettant le certificat de dégrèvement prononcé par l'administration fiscale ;

Vu enregistré le 11 août 2003, le nouveau mémoire présenté pour la SA Thalès ; la société conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens et par les moyens :

- qu'aucune décision de jurisprudence ne valide la position de l'administration fiscale ; que, bien au contraire, la décision rendue le 28 novembre 1997 est très proche de la sienne ; que le but est d' interdire le désinvestissement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2003 :

- le rapport de Mme PAIX, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Considérant que la SA Thomson Sintra ASM aux droits de laquelle vient la SA Thalès (anciennement dénommée Thomson CSF) a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, ayant porté sur les exercices clos en 1992, 1993, et 1994, dont sont issus des redressements ; que demeurent seuls en litige les redressements relatifs à la constitution par la société, de la réserve des plus-values à long terme, par application de l'article 209 quater du code général des impôts ; que la société interjette régulièrement appel du jugement, en date du 12 mars 2002, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête tendant à la réduction du supplément d'impôt sur les sociétés mis à son nom au titre de l'année 1994 en conséquence de ces redressements ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant, que par décision en date du 16 juillet 2003, postérieure à l'introduction de la requête d'appel, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a accordé à la SA Thalès un dégrèvement d'un montant de 266.563, 66 euros (1.748.543 F) sur la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle avait été assujettie au titre de l'année 1994 ; que les conclusions de la requête sont donc, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur le surplus des conclusions de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 209 quater du CGI, dans sa rédaction applicable à l'espèce : 1. Les plus-values soumises à l'impôt ... à l'un des taux réduits ... prévus à l'article 219-I ..., diminuées du montant de cet impôt, sont portées à une réserve spéciale. 2. Les sommes prélevées sur cette réserve sont rapportées aux résultats de l'exercice en cours lors de ce prélèvement, sous déduction de l'impôt perçu lors de la réalisation des plus-values correspondantes ... ; que ces dispositions, qui ont pour objet d'empêcher la distribution des sommes en cause, imposent aux sociétés l'obligation comptable de porter dans un compte de capitaux propres, dénommé réserve spéciale de plus-value à long terme , le montant, déterminé selon les modalités prévues par le code général des impôts et diminué de l'impôt y afférent, des plus-values résultant des cessions de certains éléments d'actif immobilisé intervenues au cours de l'exercice précédent, lorsque ces plus-values sont soumises à un taux réduit d'imposition ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA Thomson Sintra ASM a dégagé, au titre de l'exercice clos en 1991, des plus-values à long terme pour un montant total de 13.853.767 F, qui auraient dû, en application de l'article 209 quater du code général des impôts être affectées, à hauteur de 11.360.088 F à la réserve des plus-values à long terme de l'exercice clos en 1992 ; que toutefois, l'exercice 1991 s'étant avéré déficitaire, aucune dotation n'a été effectuée au cours de l'année 1992 ; qu'en revanche, les exercices clos en 1992 et 1993 ont été bénéficiaires ; qu'au cours de l'année 1992, la société a dégagé une plus-value à long terme de 16.066.704 F, qui aurait dû la conduire pour se conformer aux dispositions précitées du code général des impôts, à augmenter la réserve des plus-values à long terme d'un montant de 13.174.697 F ; que par décision de l'assemblée générale ordinaire des actionnaires du 25 juin 1993, la société a doté la réserve spéciale des plus-values à long terme d'une part d'un montant de 8.749.469 F (issu du bénéfice de l'année 1992) et d'autre part de la somme de 8.270.614 F (cette somme provenant d'une part, pour un montant de 6.063.010 F de la réserve légale, et d'autre part pour une somme de 2.207.604 F du bénéfice de l'année 1992) ; qu'au cours de l'année 1993, la société a dégagé une plus-value à long terme d'un montant de 71.173.625 F, qui aurait dû conduire à augmenter la réserve des plus-values à long terme d'un montant de 58.362.372 F ; que cependant, par décision de l'assemblée générale du 29 juin 1994, la société a doté la réserve spéciale des plus-values à long terme d'un montant de 57.653.340 F, l'insuffisance de dotation étant de 709.030 F ; qu'estimant qu'en raison du défaut de virement de la totalité du compte de réserve légale au 31 décembre 1993, et d'une partie du bénéfice de l'exercice clos en 1993, ces sommes avaient été prélevées sur la réserve spéciale, au sens du 2 précité de l'article 209 quater du code général des impôts, l'administration en a rapporté le montant, diminué de l'impôt perçu lors de la réalisation des plus-values correspondantes, aux résultats de l'exercice clos en 1994 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les plus-values nettes à long terme réalisées par la SA Thomson Sintra ASM n'ont pas été portées, au cours des exercices clos 1993 et 1994, à la réserve spéciale prévue par l'article 209 quater susmentionné du code général des impôts ; qu'il est constant qu'à la clôture de l'exercice 1994, le compte de plus value à long terme qui aurait dû être doté de la somme de 228.632.987 F n'était doté que de la somme de 220.409.255 F, faisant ainsi apparaître une insuffisance d'affectation de 8.223.732 F ; que ces affectations, ainsi qu'il a été précisé ci dessus, résultent de deux assemblées générales des actionnaires, et ne peuvent donc être assimilées, contrairement à ce que soutient la société contribuable, à des erreurs de gestion ; qu'ainsi, et alors même que les sommes en litige n'auraient pas, en fait, donné lieu à distribution, la société Thomson Sintra ASM doit être regardée comme ayant pris une décision de gestion consistant à ne pas inscrire en totalité au compte de réserve spéciale les bénéfices correspondant aux plus-values à long terme réalisées ; qu'il n'est pas établi que les affectations auxquelles elle a procédé offraient juridiquement les mêmes garanties d'indisponibilité ; que c'est à bon droit que le service a tiré les conséquences de cette décision ; que, dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, le Tribunal administratif de Nice a, en ce qui concerne les droits restant en litige, rejeté sa demande ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la société SA Thalès à concurrence de la somme de 266.563, 66 euros ( deux cent soixante-six mille cinq cent soixante-trois euros et soixante-six centimes), soit 1.748.543 F (un million sept cent quarante huit mille cinq cent quarante trois francs).

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SA Thalès est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Thalès et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 25 novembre 2003, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS, président assesseur,

Mme PAIX, premier conseiller,

assistés de Mme GIORDANO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 22 janvier 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

François BERNAULT Evelyne PAIX

Le greffier,

Signé

Danièle GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

7

N° 02MA01124


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA01124
Date de la décision : 22/01/2004
Sens de l'arrêt : Non-lieu partiel
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: Mme PAIX
Rapporteur public ?: M. BEDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-01-22;02ma01124 ?
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