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16/09/2003 | FRANCE | N°99MA00079

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 16 septembre 2003, 99MA00079


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel le 20 janvier 1999 sous le n°99MA00079 et le mémoire ampliatif enregistré le 17 mars 1999, présentés pour la SOCIETE SARTEC INDUSTRIE, ayant son siège social 12 boulevard Frédéric SAUVAGE à Marseille (13014), par la S.C.P d'avocats Jean Jacques GATINEAU ;

La SOCIETE SARTEC INDUSTRIE demande à la Cour :

1°/ de réformer le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 18 novembre 1998 en tant qu'il a rejeté sa demande en annulation de la décision du 5 février 1995 par laquelle le ministre d

u travail et des affaires sociales a lui-même annulé la décision de l'inspec...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel le 20 janvier 1999 sous le n°99MA00079 et le mémoire ampliatif enregistré le 17 mars 1999, présentés pour la SOCIETE SARTEC INDUSTRIE, ayant son siège social 12 boulevard Frédéric SAUVAGE à Marseille (13014), par la S.C.P d'avocats Jean Jacques GATINEAU ;

La SOCIETE SARTEC INDUSTRIE demande à la Cour :

1°/ de réformer le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 18 novembre 1998 en tant qu'il a rejeté sa demande en annulation de la décision du 5 février 1995 par laquelle le ministre du travail et des affaires sociales a lui-même annulé la décision de l'inspecteur du travail en date du 7 septembre 1994 l'autorisant à licencier M. André Y, salarié protégé ;

2°/ d'annuler la décision ministérielle en cause ;

3°/ de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 14.432 F et 14.472 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Classement CNIJ : 66-07-01-04

C

La requérante soutient :

- que le jugement attaqué a été rendu selon une procédure irrégulière ; qu'en effet, le Tribunal administratif a écarté le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte attaqué en faisant état d'un décret de délégation de compétence qui ne lui a jamais été communiqué, en violation du principe du contradictoire et de l'article R.138 du code des Tribunaux administratifs et Cours administratives d'appel ;

- qu'en l'état des pièces qui lui ont été communiquées, la décision attaquée a été prise par une autorité incompétente ;

- que le Tribunal administratif a dénaturé le jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 15 janvier 1994 en se fondant sur la cession de son fond de commerce à la société FOSELEV pour affirmer que tous les salariés de SARTEC avaient été transférés à FOSELEV, contrairement au dispositif du dit jugement ;

- que le Tribunal administratif a également méconnu les dispositions de l'article 63 de la loi du 25 janvier 1985 ;

- qu'en tout état de cause, il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire, que la cour devrait saisir d'une question préjudicielle, de trancher les éventuelles questions d'interprétation de l'article L.122-12 du code de travail ;

Vu, enregistré le 12 mai 1999, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'emploi et de la solidarité qui conclut au rejet de la requête en se référant aux observations déjà produites en première instance, aux termes desquelles :

- l'intérêt à agir des sociétés SARTEC et FOSELEV a ultérieurement obtenu l'autorisation de licenciement de M. Y ;

- la circonstance que la notification de la décision ministérielle soit intervenue après l'acceptation du délai de 4 mois imparti au ministre est sans incidence dés lors que la décision elle-même a été prise dans le délai ;

- en l'absence de toute liste nominative et de tout critère de licenciement, le contrat de travail de M. Y, salarié protégé, devait être regardé comme compris dans les 38 mentionnés comme repris par FOSELEV ;

Vu, enregistré le 27 janvier 2003, le mémoire présenté pour la société anonyme CIMAT SARTEC substituée à la société FOSELEV, qui s'en rapporte à l'appréciation de la cour quant au bien-fondé de la requête d'appel de la société SARTEC et argumente sur le recours exercé par M. Y, en demandant la condamnation de ce dernier à lui verser une indemnité de 1.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n°85-98 du 25 janvier 1985, modifiée, relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises ;

Vu le code des Tribunaux administratifs et Cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative entré en vigueur le 1er janvier 2001 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2003 :

- le rapport de Mme GAULTIER, premier conseiller ;

-les observations de Me CAGNOL pour S.C.P BACM Avocats pour la société CIMAT SARTEC ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant que la société SARTEC INDUSTRIE fait appel du jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 18 novembre 1998 en tant qu'il a rejeté sa demande en annulation de la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle en date du 3 février 1995, ayant annulé l'autorisation administrative de licencier M. André Y, salarié protégé, qui lui avait été accordée, le 7 septembre 1994, par l'inspecteur du Travail de la 4ème section de Marseille ;

Sur la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société SARTEC INDUSTRIE :

Considérant que la circonstance que l'autorisation de licencier M. Y ait été, postérieurement à la décision ministérielle en litige, accordée à la société FOSELEV, repreneuse du fond de commerce de SARTEC INDUSTRIE, n'est pas nature à priver cette dernière d'un intérêt à agir à l'égard du refus qui lui a été opposé ; que, dés lors, la fin de non recevoir opposée par le ministre de l'emploi et de la solidarité doit être écartée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que pour écarter le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision ministérielle en date du 3 février 1995, les premiers juges se sont fondés sur l'existence d'un décret de délégation de compétence, produit par le ministre de l'emploi et de la solidarité à l'appui du mémoire enregistré le 20 octobre 1998 au greffe du Tribunal administratif ; qu'il ne résulte pas de l'examen du dossier de première instance que ce mémoire ait été communiqué à la société SARTEC INDUSTRIE ; que le jugement attaqué, ainsi intervenu en méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure, est entaché d'irrégularité et doit être annulé en tant qu'il a statué sur la demande présentée par la société SARTEC INDUSTRIE ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société SARTEC INDUSTRIE devant le Tribunal administratif de Marseille ;

Sur la légalité de la décision ministérielle attaquée :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'examen du décret en date du 14 avril 1993, régulièrement publié, que M. BRUN, avait reçu délégation du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle pour signer la décision attaquée ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être rejeté ;

Considérant, en second lieu, que selon l'article L.412-18 du code du travail, le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ou de l'autorité qui en tient lieu ; qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis de la qualité de délégué syndical bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'aux termes de l'article L. 122-12, 2ème alinéa du code précité : S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. ; qu'aux termes de l'article 63 de la loi, susvisée, du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises, dans sa rédaction alors en vigueur : Lorsque le plan prévoit des licenciements pour motif économique, il ne peut être arrêté par le tribunal qu'après que le comité d'entreprise ou à défaut, les délégués du personnel ainsi que l'autorité administrative compétente ont été informés et consultés... Le plan (de continuation ou de cession de l'entreprise) précise notamment les licenciements qui doivent intervenir dans le délai d'un mois après le jugement. Dans ce délai, ces licenciements interviennent sur simple notification de l'administrateur... ;

Considérant que, par la décision attaquée, le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a annulé la décision d'autorisation de licenciement, accordée le 7 septembre 1994 à la société SARTEC INDUSTRIE, par l'inspecteur du travail, au motif qu'en l'absence d'autorisation préalable autorisant son licenciement, le contrat de travail de M.Y avait automatiquement été transféré à la société FOSELEV, repreneuse de l'activité exercée par SARTEC INDUSTRIE à compter du 16 juin 1994, en vertu du jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 15 juin 1994 ; que la société SARTEC INDUSTRIE soutient que la décision attaquée serait entachée d'erreur de droit et de fait, voire de dénaturation des pièces du dossier ; qu'en effet, elle était bien l'employeur de M.Y à la date du 7 septembre 1994 ; qu'en tout état de cause, si l'application en l'espèce de l'article L.122-12 du code du travail posait une question sérieuse, il n'appartiendrait qu'à l'autorité judiciaire de la trancher ;

Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 15 juin 1994 qu'était notamment cédée à la société anonyme FOSELEV l'activité de maintenance industrielle exercée par SARTEC S.A ; que si le plan de reprise prévoyait que la société repreneuse assurerait la poursuite de 38 contrats de travail sur les 92 concernés dans l'établissement de SARTEC INDUSTRIE situé à Marseille, ce document ne précisait aucune liste nominative de licenciements qui aurait été inclus dans une liste du personnel non repris dans le périmètre des offres , au sens du jugement du Tribunal de commerce en cause ; que, dès lors, le transfert à la S.A FOSELEV de la branche d'activités de SARTEC INDUSTRIE entraînait, par le seul effet de l'article L.122-12 du code du travail, le transfert des contrats de travail de l'ensemble des salariés rattachés à cette activité au nouvel exploitant à compter du 16 juin 1994 ; que la société SARTEC INDUSTRIE, qui avait cessé, à compter de cette date, d'être l'employeur de M.Y, n'avait pas qualité pour présenter, en son nom, une demande d'autorisation de licenciement le concernant ; que le ministre a, dès lors, à bon droit annulé l'autorisation qui avait accordée, le 7 septembre 1994, à la requérante par l'inspecteur du travail ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société SARTEC INDUSTRIE n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du ministre de l'emploi et de la solidarité en date du 3 février 1995 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la société SARTEC INDUSTRIE une quelconque indemnité au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 18 novembre 1998 est annulé en tant qu'il a statué sur la demande de la société SARTEC INDUSTRIE, conjointement avec celles des sociétés FOSELEV et CIMAT SARTEC ayant le même objet.

Article 2 : Les demandes des sociétés SARTEC INDUSTRIE, FOSELEV et CIMAT SARTEC sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié aux sociétés SARTEC INDUSTRIE, FOSELEV et CIMAT SARTEC, au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et à M. Y.

Délibéré à l'issue de l'audience du 24 juin 2003, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

Mme GAULTIER, premier conseiller,

assistés de Melle FALCO , greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 16 septembre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Guy LAPORTE Joëlle GAULTIER

Le greffier,

Sylvie FALCO

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 99MA00079 7


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA00079
Date de la décision : 16/09/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: Mme GAULTIER
Rapporteur public ?: M. BOCQUET
Avocat(s) : SCP JEAN-JACQUES GATINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-09-16;99ma00079 ?
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