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15/10/1998 | FRANCE | N°97MA05239

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1e chambre, 15 octobre 1998, 97MA05239


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 14 octobre 1997 sous le n 97MA05239, présentée pour la société à responsabilité limitée "NICE JAZZ PRODUCTIONS", dont le siège social est ..., ayant pour avocat la SCP DELAPORTE-BRIARD ;
La société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" demande à la Cour :
1 / d'annuler l'ordonnance du 22 septembre 1997 par laquelle le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nice, statuant en référé, a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de NICE à lui verser une pro

vision d'un montant de 10.648.916 F à valoir sur l'indemnité à laquelle elle...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 14 octobre 1997 sous le n 97MA05239, présentée pour la société à responsabilité limitée "NICE JAZZ PRODUCTIONS", dont le siège social est ..., ayant pour avocat la SCP DELAPORTE-BRIARD ;
La société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" demande à la Cour :
1 / d'annuler l'ordonnance du 22 septembre 1997 par laquelle le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nice, statuant en référé, a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de NICE à lui verser une provision d'un montant de 10.648.916 F à valoir sur l'indemnité à laquelle elle soutient avoir droit en raison de la résiliation anticipée par la ville de la convention de délégation du service public de l'organisation du festival de jazz qui lui avait été consentie le 30 mars 1995 ;
2 / de condamner la ville de NICE à lui verser une provision d'un montant de 10.243.732 F ;
3 / de condamner ladite ville à lui payer la somme de 50.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er octobre 1998 :
- le rapport de M. BIDARD DE LA NOE, président assesseur ;
- les observations de Maître X... de la SCP DELAPORTE-BRIARD pour la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" ;
- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant qu'aux termes de l'article R.129 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Le président du Tribunal administratif ou de la Cour administrative d'appel ou le magistrat que l'un deux délègue peut accorder une provision au créancier qui a saisi le Tribunal ou la Cour d'une demande au fond lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie." ;
Sur les interventions :
Considérant que Maître Z..., représentant les créanciers de la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS", se prévaut en cette qualité de droits auxquels l'arrêt à rendre est susceptible de préjudicier ; que, par suite son intervention est recevable ;
Considérant que le mémoire de Maître Y..., administrateur judiciaire désigné par jugement du Tribunal de commerce de Paris en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS", doit être regardé, non comme une intervention, mais comme un mémoire complémentaire tendant aux mêmes fins que la requête de ladite société ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
Considérant que, pour rejeter les moyens de la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" faisant valoir que sa créance sur la ville de NICE présentait le caractère incontestable exigé par les dispositions précitées de l'article R.129 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le premier juge s'est borné à répondre, dans l'ordonnance attaquée, que le litige "présente une réelle difficulté qui ne peut être tranchée que par le juge du fond" ; que, ce disant, il n'a pas répondu aux moyens dont il était saisi ; que, dès lors, il y a lieu d'annuler l'ordonnance, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande ;
Sur la demande de provision :
Considérant que, par convention en date du 30 mars 1995, la ville de NICE avait délégué à la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" l'exploitation et la gestion de son festival de jazz pour les trois années 1995, 1996 et 1997 ; que, par délibération de son conseil municipal en date du 7 mars 1997, elle a résilié unilatéralement la convention pour le motif d'intérêt général tiré de ce que la société avait perdu la capacité d'organiser le festival de l'année 1997 du fait de sa mise en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de Paris du 13 juin 1996 ;
Considérant que la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS", qui est liée à la ville du NICE par contrat, ne peut utilement invoquer la responsabilité extra-contractuelle qui découlerait des fautes qu'aurait commises, selon elle, cette collectivité locale en retardant le versement de subventions et en ne respectant pas ses engagements ;

Considérant, en revanche, que la convention susvisée signée entre la ville de NICE et la société requérante stipulait à son article 35 que "la résiliation de la convention pourra intervenir ( ...) pour motif d'intérêt général avec un préavis de six mois donné par la ville" ; qu'il est constant que la résiliation prononcée le 7 mars 1997 n'a été précédée d'aucun préavis ; que la ville de NICE n'invoque utilement aucun fait de nature à justifier la méconnaissance du délai de préavis ; qu'en particulier, contrairement à ce qu'il est allégué, l'article 28 de la convention susvisée ne faisait pas obligation à la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" de verser une nouvelle caution d'un montant d'un million de francs dès lors que cette caution avait déjà été constituée en 1995 ;
Considérant que la méconnaissance par la ville de NICE de ses obligations contractuelles a conduit la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" à effectuer pour la préparation du festival de jazz du mois de juillet 1997 des dépenses qu'elle n'aurait pas engagées si elle avait été informée le 7 septembre 1996, comme l'exigeaient les stipulations de l'article 35 du contrat, de la résiliation au 7 mars 1997 de sa délégation de service public ; qu'ainsi, en l'état de l'instruction, l'obligation pour la ville de NICE de rembourser les dépenses engagées par la société requérante n'est pas sérieusement contestable au moins pour la période comprise entre le 7 septembre 1996 et le 7 mars 1997 ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" justifie avoir dépensé, pendant cette période, la somme d'un million de francs en salaires à son personnel, en rémunérations à son gérant et en frais de bureau et de gestion ;
Considérant, en revanche, que la société requérante ne justifie pas avoir versé les honoraires des artistes qu'elle avait engagés, ni les avoir indemnisés ; qu'il en est de même pour les divers contrats de prestataires de service dont elle fait état pour un montant de 1.092.913 F ; que, si la société a droit à l'indemnisation de son préjudice commercial et de ses pertes de bénéfices, leur montant ne présente pas un caractère certain dès lors que les résultats des festivals organisés en 1995 et 1996 avaient été déficitaires ; qu'enfin, si la ville de NICE, la région de Provence-Alpes-Côte d'Azur et le département des Alpes-Maritimes s'étaient engagés à verser des subventions à la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS", lesdites subventions ne présentent pas un caractère incontestable dès lors que la ville de NICE soutient qu'elles étaient allouées, non pas à la société prise personnellement, mais pour l'organisation du festival de l'année 1997 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'état de l'instruction, la créance de la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" doit être regardée comme présentant un caractère non sérieusement contestable à concurrence d'un million de francs ; que, par suite, il y a lieu de fixer à cette somme la provision qui lui sera réglée par la ville de NICE et dont le versement sera subordonné à la constitution d'une caution bancaire du même montant ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :

Considérant qu'il y a lieu de condamner la ville de NICE à verser la somme de 10.000 F à la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Considérant que les dispositions de l'article précité s'opposent à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la ville de NICE tendant à la condamnation de la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" à lui verser la somme de 10.000 F au titre des frais non compris dans les dépens ;
Considérant, enfin, que Maître Z... n'étant pas partie à la présente instance, les dispositions de l'article L.8-1 susvisé font obstacle à la condamnation de la ville de NICE au titre dudit article ;
Article 1er : L'intervention de Maître Z... est admise.
Article 2 : L'ordonnance en date du 22 septembre 1997 du conseiller délégué par le président du Tribunal administratif de Nice est annulée.
Article 3 : La ville de NICE est condamnée à verser à la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" une provision d'un million de francs à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices résultant de la résiliation unilatérale de la convention de délégation de service public signée le 30 mars 1995 pour l'organisation et la gestion du festival de jazz de Nice.
Article 4 : Le versement de la provision d'un million de francs est subordonné à la constitution par la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" d'une caution bancaire du même montant.
Article 5 : La ville de NICE est condamnée à verser à la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" la somme de 10.000 F (dix mille francs) sur le fondement de l'article L.8-1 code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" est rejeté.
Article 7 : Les conclusions de la ville de NICE tendant à la condamnation de la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS" à lui verser la somme de 10.000 F (dix mille francs) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 8 : Les conclusions de Maître Z... tendant à la condamnation de la ville de NICE sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 9 : Le présent arrêt sera notifié à la société "NICE JAZZ PRODUCTIONS", à la ville de NICE, à Maître Z..., à Maître Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 97MA05239
Date de la décision : 15/10/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

PROCEDURE - PROCEDURES D'URGENCE - REFERE-PROVISION - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE.

PROCEDURE - INCIDENTS - INTERVENTION - RECEVABILITE.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R129, L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BIDARD DE LA NOE
Rapporteur public ?: M. BOCQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;1998-10-15;97ma05239 ?
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