Vu la requête, enregistrée le 21 octobre 2002, présentée pour la SARL JANET, dont le siège est rue Joseph Girard à Villars les Dombes (01330), représentée par son gérant en exercice, par Me Veber, avocat au barreau de Lyon ;
La SOCIETE JANET demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0102731 du 4 juillet 2002 par lequel le Tribunal administratif de Lyon l'a condamnée à payer à la commune de Villars les Dombes les sommes de 12 215,89 euros et 9 081,34 euros solidairement avec la SA Braize en réparation des désordres affectant le centre nautique municipal dont la restructuration leur avait été confiée ainsi que pour l'indemniser du préjudice subi à raison de ces désordres, 3 336,55 euros et 700 euros solidairement avec la SA Braize en remboursement des frais d'expertise et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter les conclusions de la commune de Villars les Dombes dirigées contre elle ;
3°) de mettre à la charge de la commune Villars les Dombes les frais d'expertise, soit la somme de 3 336,55 euros, ainsi qu'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 mars 2003, présenté pour la commune de Villars les Dombes par Me Bogue, avocat au barreau de Bourg en Bresse, laquelle conclut au rejet de la requête, demande en outre la capitalisation des intérêts échus à compter du jugement et que soit mis à la charge de la société requérante la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle s'en remet à la justice pour ce qui est de la notification de sa requête introductive d'instance à la SOCIETE JANET ; que les allégations de partialité de l'expert ne sont étayées d'aucun élément précis sachant que la société, représentée aux opérations d'expertise n'a formulé aucune remarque et que l'on ne saurait reprocher à l'expert d'avoir donné son avis sur les fautes techniques et leurs liens de causalité avec les désordres constatés, ni même sur un éventuel partage de responsabilité, avis qui ne lient pas le Tribunal et qui répondaient à la mission qui lui avait été confiée par ordonnance du 22 janvier 1996 ; qu'au vu des pièces contractuelles et de la mission d'expertise aucune ambiguïté n'est susceptible d'être relevée quant à sa qualité de propriétaire de la piscine ce dont elle justifiera en tant que de besoin ; que les premiers désordres affectant les bassins sont apparus en septembre 1992 et n'étaient donc pas apparents lors de la réception intervenue le 12 juillet 1992 ; que, si des fuites ont été constatées en cours de chantier en juin 1992, elles ont été réglées par des travaux de remise en état avant la réception et rien ne permet de dire, notamment en considération de leur localisation, qu'elles seraient en lien avec les désordres ultérieurs relevés par l'expert ; qu' en tout état de cause, rien ne permet d'affirmer que la commune ait eu connaissance de leur cause technique ; que, si la requérante allègue de leur caractère apparent, il lui appartenait alors d'en signaler les causes au titre de son obligation de conseil et sa responsabilité contractuelle pour faute peut être recherchée ; qu'il résulte des pièces communiquées et des opérations d'expertise que la société n'a jamais informé la commune, ni le maître d'oeuvre, de la prétendue persistance de fuites après le constat de juin 1992 et la requérante ne peut en conséquence arguer d'une prétendue faute du maître d'ouvrage au motif qu'il aurait dispensé le maître d'oeuvre de formalités de contrôle et d'essai qui ne lui ont été demandés ni par l'entreprise ni par le maître d'oeuvre ; que la main levée de la caution bancaire n'équivaut nullement à une reconnaissance de prise en charge des préjudices ; qu'elle a justifié auprès de l'expert des pertes d'eau chiffrées ; qu'à titre infiniment subsidiaire, à supposer les opérations d'expertise et le jugement irrégulier, la commune solliciterait alors l'instauration d'une mesure d'expertise judiciaire aux frais avancés par l'entreprise ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 juillet 2003, présenté pour la SOCIETE JANET laquelle persiste dans ses conclusions, par les mêmes moyens, ajoutant que l'expert s'est contenté d'inviter la commune à quantifier l'eau perdue, pour reprendre les chiffres avancés sans procéder lui-même à toute investigation technique ; que la commune ne prouve pas que les fuites dont elle s'est plaint en septembre 1992 seraient différentes de celles dont elle avait eu connaissance en cours de chantier en juin 1992, ce que n'établit pas davantage l'expertise ; que le maître d'oeuvre tout comme la commune étaient parfaitement informés de l'existence des fuites et de leur cause, la commune ne pouvant lui faire supporter les éventuelles carences de son maître d'oeuvre dans la délivrance de l'information ; que sa responsabilité contractuelle ne peut être invoquée plus de dix ans après les travaux, la réception sans réserve l'exonérant de toute garantie et de toute responsabilité ; que la commune a dispensé son maître d'oeuvre des essais préalables à la réception, en méconnaissance de l'article 1.6 du cahier des clauses techniques particulières du lot canalisation, faute en lien direct avec le préjudice dont elle réclame réparation et qui engage sa responsabilité contractuelle ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 février 2004, présenté pour la commune de Villars les Dombes laquelle persiste dans ses conclusions, outre capitalisation des intérêts échus, par les mêmes moyens, ajoutant que c'est bien à l'entreprise de démontrer que le maître d'ouvrage était en mesure d'apprécier à la fois la manifestation physique du désordre et ses causes ; que la question des fautes des différents intervenants est inopérante dès lors que les désordres relevaient de la garantie décennale ; que l'invocation à titre subsidiaire de la responsabilité contractuelle de la société, à supposer qu'il n'y ait pas lieu d'appliquer la garantie décennale, ne constitue nullement un moyen tardif ; qu'enfin la commune n'a jamais exonéré ni l'architecte ni l'entreprise des prestations qui étaient à leur charge dans les marchés passés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'article 1154 du code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 avril 2007 :
- le rapport de M. Veslin, président ;
- les observations de Me Mercier-Durand, avocat de la commune de Villars les Dombes ;
- et les conclusions de M. Besle, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative, « Toutefois, les notifications de la requête, du mémoire en défense (…) sont obligatoirement effectuées au moyen de lettres recommandées avec demande d'avis de réception » ; qu'il ne ressort pas du dossier, en l'absence d'un avis de réception signé par la SOCIETE JANET, que la requête introduite par la commune de Villars les Dombes devant le Tribunal administratif de Lyon, et tendant à la condamnation solidaire notamment de la SARL JANET à lui verser des sommes correspondant au coût de remise en état de son centre nautique affecté de désordres ainsi qu'à l'indemnisation du préjudice subi pour perte d'eau, ait été communiquée à la SOCIETE JANET conformément aux prescriptions précitées du deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative ; que, par suite, le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 4 juillet 2002 a été rendu à l'issu d'une procédure irrégulière et, ses articles 1 à 3 doivent être annulés en tant qu'ils concernent la SOCIETE JANET ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la commune de Villars les Dombes devant le Tribunal administratif de Lyon en ce qu'elle tend à ce que la SOCIETE JANET soit, solidairement avec d'autres sociétés, déclarée responsable des désordres survenus au centre nautique municipal et condamnée à l'indemniser du coût de remise en état ainsi que du préjudice subi ;
Considérant que pour restructurer son centre nautique la commune de Villars les Dombes a confié à la SARL JANET la réalisation du lot « canalisations » ; que des baisses anormales du niveau de l'eau des bassins ayant été rapidement observées, après que les travaux aient été réceptionnés sans réserve le 17 juillet 1992, la commune, au vu des conclusions de l'expert désigné en référé demande la condamnation de la SOCIETE JANET au titre de la garantie décennale due par les constructeurs ;
Sur la recevabilité de la demande :
Considérant qu'en sa qualité de maître d'ouvrage des travaux de restructuration du centre nautique municipal, la commune de Villars les Dombes justifie de sa qualité à agir à l'encontre des constructeurs, sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ; que la circonstance qu'elle ait réceptionné sans réserve les travaux le 17 juillet 2002, alors que la présence de fuites d'eau aurait été apparente, demeure en tout état de cause sans incidence sur la recevabilité de sa demande ;
Sur la régularité de l'expertise :
Considérant qu'il ne résulte d'aucune pièce versée au dossier, ni de son rapport déposé le 31 décembre 1997, que l'expert désigné en référé aurait conduit sa mission de façon partiale et entaché d'irrégularité les opérations qui lui avaient été confiées ;
Sur la responsabilité de la SOCIETE JANET :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que la baisse anormale de 4 cm par 24 heures du niveau de l'eau constatée dans les bassins de la piscine municipale provenait de nombreuses fuites affectant les canalisations réalisées par la SOCIETE JANET, en raison de défauts de collage et d'emboîtement des pièces en PVC ; que ces fuites imposaient un apport journalier supplémentaire en eau de l'ordre de 30 m3 afin de maintenir un remplissage normal des bassins ; que, par suite, elles ne permettaient plus une utilisation de la piscine dans des conditions normales et doivent être regardées compte tenu de leur importance comme rendant l'ouvrage impropre à sa destination ; que la seule circonstance que des fuites aient été très tôt détectées dans le local technique, fuites auxquelles il avait été remédié avant la réception des travaux prononcée sans réserve le 17 septembre 1992, ne permet pas de regarder les nombreuses fuites décelées ultérieurement et à l'origine des variations anormales du niveau d'eau des bassins, comme ayant constitué des désordres apparents lors de la réception ; que ces désordres sont dès lors de nature à engager la responsabilité de la SOCIETE JANET, à l'égard de la commune de Villars les Dombes, sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la commune maître d'ouvrage ait dispensé le maître d'oeuvre, la société Braize, d'effectuer les essais et contrôles préalables à la réception prévus à l'article 1.6 du cahier des clauses techniques particulières applicable et qu'elle ait ainsi commis une faute de nature à atténuer, en totalité ou en partie, la responsabilité décennale encourue par la SOCIETE JANET en sa qualité de constructeur ;
Sur la réparation :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la commune de Villars les Dombes ait laissé s'aggraver son préjudice, résultant des pertes d'eau entre la saison 1993 et l'automne 1997, date des dernières réparations effectuées ; que le coût des travaux de reprise nécessaires, lesquels doivent comprendre les frais exposés pour la recherche des fuites, est justifié pour un montant de 12 215,89 euros hors taxes ; que la société ne verse aucun document à l'effet de démontrer, alors que la commune ne pouvait être en mesure de justifier du volume exact d'eau perdu, que l'expert aurait fait une évaluation exagérée des pertes d'eau liées aux fuites, durant la période d'indemnisation retenue, en déterminant celles-ci à partir de la baisse du niveau d'eau constatée et de la superficie des bassins concernés ; que ces pertes d'eau ainsi évaluées représentent un coût de 9 081,34 euros hors taxes ; que la société requérante ne justifie pas qu'elle ne serait pas en mesure de récupérer ou de déduire la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'il y a lieu en conséquence de condamner la SOCIETE JANET à payer à la commune de Villars les Dombes une somme totale de 21 297,23 euros solidairement avec la société Braize, déclarée co ;responsable des dommages et du préjudice subi par les dispositions non annulées du jugement attaqué ;
Considérant que, faute de justifier d'une demande de paiement des sommes sus ;indiquées avant l'introduction de sa demande au Tribunal le 7 juin 2001, la commune ne peut prétendre au bénéfice des intérêts au taux légal sur la somme de 21 297,23 euros qu'à compter de cette dernière date ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 3 336,55 euros, à la charge de la SARL JANET solidairement avec la société Braize ;
Sur la capitalisation des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts afférents à la somme due par la SOCIETE JANET a été demandée par la commune de Villars les Dombes pour la première fois le 13 mars 2003 ; qu'à cette date, au cas où ladite somme n'aurait pas été payée, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 13 mars 2003 ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure en cas de non paiement ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, la commune de Villars les Dombes n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à sa charge le paiement de la somme réclamée par la SOCIETE JANET au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE JANET le versement à la commune de Villars les Dombes d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Les articles 1 à 3 du jugement n° 0102731 du Tribunal administratif de Lyon du 4 juillet 2002 sont annulés en tant qu'ils concernent la SARL JANET.
Article 2 : La SARL JANET est condamnée à payer à la commune de Villars les Dombes une somme totale de 21 297,23 euros augmentée des intérêts à compter du 7 juin 2001 solidairement avec la SA Braize.
Article 3 : Les intérêts échus sur la somme de 21 297,23 euros le 13 mars 2003 ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure seront capitalisés à chacune de ces dates, en cas de non paiement, pour produire eux-mêmes intérêts à la charge de la SOCIETE JANET.
Article 4 : Les frais d'expertise exposés en référé, taxés et liquidés à la somme de 3 336,55 euros sont mis à la charge de la SARL JANET solidairement avec la SA Braize.
Article 5 : La SARL JANET est condamnée à verser à la commune de Villars les Dombes une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la commune de Villars les Dombes ensemble le surplus des conclusions présentées par la SARL JANET au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
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N° 02LY02045